Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Lilas
Share the book

CHAPITRE 2 : L'ERREUR

Le deuxième jour chez BlackTower s'annonçait aussi intense que le premier. Élisa arriva délibérément quarante minutes avant l'heure officielle de début, déterminée à ne pas donner à Catherine Palmer la moindre raison de la critiquer. Elle avait passé une partie de la nuit à analyser les données préliminaires du projet Artemis, dormant à peine cinq heures.

L'étage était encore presque désert quand elle s'installa à son bureau. Seuls deux analystes seniors occupaient l'espace près des fenêtres, probablement des bourreaux de travail qui n'avaient jamais quitté les lieux. Le silence relatif permettait à Élisa de se concentrer pleinement sur les tableaux de données complexes qui défilaient sur son écran.

Le projet Artemis concernait l'expansion d'un géant pharmaceutique américain sur les marchés émergents d'Asie du Sud-Est. Les chiffres étaient prometteurs, mais quelque chose clochait dans les projections établies par l'équipe précédente. Élisa fronça les sourcils en examinant les estimations de croissance pour le Vietnam – elles semblaient anormalement optimistes par rapport aux indicateurs économiques locaux.

"Tu es bien matinale," observa une voix familière.

Élisa sursauta légèrement. Zoey se tenait devant son bureau, deux gobelets de café à la main. Elle en tendit un à Élisa.

"J'ai supposé que tu aurais besoin de carburant. Double expresso, correct ?"

"Tu es un ange," sourit Élisa en acceptant le café avec gratitude. "Comment as-tu deviné ma préférence ?"

Zoey haussa les épaules. "Instinct de survie chez BlackTower. On repère vite ceux qui fonctionnent à l'adrénaline et à la caféine." Elle jeta un œil à l'écran d'Élisa. "Artemis, hein ? Palmer ne t'a pas fait de cadeau."

"Je crois avoir trouvé une incohérence dans les projections précédentes," murmura Élisa, hésitant à partager ses doutes. "Les chiffres pour le Vietnam semblent... artificiellement gonflés."

Zoey grimaça. "Fais attention avec ça. Ce dossier était géré par l'équipe de Richardson avant qu'il ne soit... réaffecté."

"Réaffecté ?"

"Envoyé diriger notre minuscule bureau de Detroit après avoir contredit Drake en réunion plénière." Zoey baissa encore la voix. "Écoute, si tu trouves vraiment une erreur, assure-toi d'avoir des preuves solides. Et surtout, présente ça comme une 'optimisation' plutôt qu'une correction."

Élisa hocha la tête, reconnaissante pour ce conseil. "Comment se fait-il que tu connaisses si bien les dynamiques internes après seulement six mois ici ?"

"Observation et survie," répondit Zoey avec un demi-sourire. "Je dois y aller. Présentation au département juridique dans vingt minutes. Bonne chance avec Artemis."

Au fil de la matinée, l'étage s'anima progressivement. Élisa restait concentrée sur son analyse, creusant plus profondément dans les données démographiques et réglementaires du Vietnam. À midi, elle avait la certitude que les projections initiales comportaient une erreur méthodologique significative – quelqu'un avait délibérément ignoré les nouvelles restrictions d'importation pharmaceutique mises en place par le gouvernement vietnamien.

Elle hésitait sur la marche à suivre. Signaler l'erreur pourrait être perçu comme une critique du travail précédent. L'ignorer serait manquer à son devoir professionnel et risquer un échec du projet.

Catherine Palmer passa devant son bureau à ce moment précis, s'arrêtant brièvement. "Où en êtes-vous avec l'analyse préliminaire, Moreau ?"

"J'ai identifié certains points nécessitant un ajustement dans les projections vietnamiennes," répondit prudemment Élisa. "Les nouvelles réglementations d'importation semblent avoir été... sous-évaluées dans l'analyse précédente."

Le visage de Palmer se durcit. "Vous remettez en question le travail de Richardson ?"

"Je suggère simplement une actualisation basée sur les données réglementaires les plus récentes," reformula Élisa, se rappelant le conseil de Zoey.

Palmer la fixa pendant un long moment. "Très bien. Intégrez ces 'ajustements' dans votre rapport préliminaire. Je veux le voir sur mon bureau demain matin, 9h."

"Mais vous aviez dit vendredi—"

"J'ai dit demain," trancha Palmer avant de s'éloigner.

Élisa réprima un soupir. Le délai venait d'être raccourci de deux jours. Elle allait devoir passer la nuit au bureau.

Vers 18h, alors que la plupart des employés commençaient à partir, Élisa commandait son deuxième repas à emporter de la journée. Les heures suivantes passèrent dans un brouillard de concentration intense, peaufinant les graphiques et affinant ses recommandations. Vers 22h, ses yeux brûlaient et sa nuque était douloureusement raide.

Elle se leva pour s'étirer et alla se chercher un café à la kitchenette déserte. En revenant vers son bureau, elle remarqua une lumière dans le couloir menant aux bureaux de direction – quelqu'un d'autre travaillait tard.

Élisa reprit son analyse, vérifiant et revérifiant chaque donnée, chaque conclusion. Elle ne pouvait pas se permettre la moindre erreur, surtout après avoir relevé celle de son prédécesseur. Vers minuit, elle finalisa enfin le document et l'envoya à l'impression.

La salle d'impression était située près des bureaux de direction. En s'y dirigeant, Élisa remarqua que la lumière qu'elle avait aperçue plus tôt provenait du bureau le plus spacieux au bout du couloir – celui d'Alexander Drake. La porte était entrouverte, laissant filtrer un rai de lumière.

Elle récupéra son rapport et s'apprêtait à retourner à son bureau quand une voix grave et autoritaire l'arrêta net.

"Qui est là ?"

Élisa se figea. La voix venait du bureau de Drake.

"Élisa Moreau, monsieur. Département stratégie," répondit-elle, tentant de maîtriser le tremblement dans sa voix.

Un silence. Puis : "Entrez."

Serrant son rapport contre sa poitrine comme un bouclier, Élisa poussa lentement la porte du bureau. L'espace était impressionnant – trois fois plus grand que les autres bureaux de direction, avec des baies vitrées offrant une vue spectaculaire sur Manhattan illuminé. Le mobilier était minimaliste mais visiblement coûteux : bois sombre, cuir noir, métal brossé.

Alexander Drake se tenait debout près de la fenêtre, contemplant la ville en contrebas. Il avait retiré sa veste et desserré sa cravate. Sa chemise blanche impeccable contrastait avec son pantalon noir parfaitement coupé. Même dans cette posture plus détendue, il irradiait une autorité naturelle qui emplissait la pièce.

Il se tourna lentement vers elle. En personne et de près, son visage était encore plus saisissant que sur la photo ou aperçu de loin. Ses traits étaient d'une symétrie parfaite, mais c'était surtout ses yeux qui captivaient – d'un gris presque translucide, ils semblaient analyser et disséquer tout ce qu'ils regardaient.

"Mademoiselle Moreau," dit-il, sa voix plus basse et plus veloutée qu'elle ne l'aurait imaginé. "Minuit passé et toujours au travail. Impressionnant."

Élisa déglutit, cherchant à maintenir une apparence professionnelle malgré la tension qui s'emparait de son corps.

"Le projet Artemis requiert toute mon attention, Monsieur Drake."

Un sourire subtil étira ses lèvres, à peine perceptible mais transformant momentanément la sévérité de son visage.

"Catherine vous met déjà à l'épreuve, je vois." Il fit un geste vers les fauteuils disposés devant son bureau. "Asseyez-vous un moment. Montrez-moi ce qui vous maintient éveillée si tard."

Ce n'était pas vraiment une invitation, mais plutôt un ordre formulé poliment. Élisa s'avança et prit place dans l'un des fauteuils en cuir. Drake contourna son bureau imposant et s'installa en face d'elle, non pas dans son fauteuil de direction, mais dans le second fauteuil visiteur, éliminant la barrière physique entre eux. Cette proximité soudaine la rendait étrangement consciente de chaque détail – son parfum subtil mêlant des notes boisées et épicées, la manière dont sa chemise épousait ses épaules larges, la force contenue dans ses mains aux longs doigts élégants.

"Alors," dit-il en croisant les jambes, "qu'avez-vous découvert dans le dossier Artemis qui mérite de sacrifier votre sommeil ?"

Élisa hésita. Parler de l'erreur qu'elle avait identifiée à Drake lui-même était risqué, mais éviter le sujet serait perçu comme un manque de transparence.

"J'ai identifié une... divergence dans les projections pour le marché vietnamien, monsieur," commença-t-elle prudemment. "Les estimations précédentes n'ont pas pleinement intégré les nouvelles restrictions d'importation pharmaceutique."

Les yeux de Drake se plissèrent légèrement. "Richardson."

Ce n'était pas une question, mais une constatation, prononcée avec une note de déception.

"Je ne remets pas en cause l'ensemble du travail précédent," s'empressa d'ajouter Élisa. "Simplement, les données réglementaires ont évolué depuis la dernière analyse."

Drake tendit la main. "Montrez-moi."

Élisa lui remit le rapport, observant avec une fascination mêlée d'appréhension comment ses yeux parcouraient rapidement les pages, s'arrêtant précisément aux endroits critiques qu'elle avait identifiés. Sa capacité à absorber l'information était impressionnante.

"Vous proposez une réorientation vers la Thaïlande et la Malaisie pour compenser," nota-t-il sans lever les yeux du document. "Pourquoi pas l'Indonésie ?"

La question semblait simple, mais Élisa comprit qu'il s'agissait d'un test.

"L'Indonésie présente un potentiel de croissance supérieur à long terme," répondit-elle, "mais son cadre réglementaire est actuellement instable en raison des élections à venir. J'ai suggéré une approche progressive, en commençant par des marchés plus prévisibles pour les deux prochaines années."

Drake leva finalement les yeux du rapport, la regardant avec une intensité renouvelée. "Une analyse prudente mais pas timorée. Intéressant."

Il se leva soudainement et se dirigea vers un meuble bas d'où il sortit deux verres et une carafe en cristal contenant un liquide ambré.

"Vous buvez du whisky, Mademoiselle Moreau ?"

La question la prit au dépourvu. "Parfois," répondit-elle honnêtement.

Drake versa deux doigts de liquide dans chaque verre et lui en tendit un. Leurs doigts s'effleurèrent pendant la transaction, et Élisa ressentit une décharge électrique à ce contact fugace.

"À la perspicacité," dit-il en levant son verre.

Élisa leva le sien, prenant une petite gorgée. Le whisky était exceptionnel – riche, complexe, avec une finale légèrement fumée qui réchauffait délicieusement sa gorge.

"Macallan 25 ans," précisa Drake en remarquant son appréciation. "Un plaisir rare qu'il faut savoir reconnaître."

Il y avait quelque chose dans sa façon de prononcer ces mots qui semblait porteur d'un double sens. Élisa s'efforça de maintenir un visage impassible malgré la chaleur qui montait lentement le long de son cou.

"Catherine vous a fixé un délai impossible," poursuivit Drake en regagnant son siège. "Typique de sa méthode. Elle cherche à vous pousser à l'erreur."

"Je préfère y voir une opportunité de démontrer ma capacité d'adaptation," répondit Élisa, surprise par sa propre audace.

Drake sourit plus distinctement cette fois, un éclair d'amusement traversant ses yeux gris. "Diplomatie et résilience. Des qualités essentielles chez BlackTower." Il reposa son verre. "Néanmoins, votre analyse, bien qu'impressionnante pour un délai si court, comporte une faille."

Le cœur d'Élisa manqua un battement. Une erreur dans son rapport ? Après toutes ces heures de vérification ?

"Page 17," indiqua Drake. "Votre projection des coûts logistiques pour la Thaïlande."

Élisa parcourut rapidement la page en question, scrutant les chiffres. Soudain, elle le vit – elle avait utilisé le taux de change du trimestre précédent pour calculer certains coûts d'importation, surestimant légèrement les économies potentielles.

"Je vois l'erreur," admit-elle, mortifiée. "Je corrigerai cela immédiatement."

"Ce n'est pas catastrophique," tempéra Drake, "mais chez BlackTower, nous visons la perfection, pas l'excellence. L'excellence est le minimum requis."

Sa voix n'était pas particulièrement sévère, mais la critique était claire. Élisa sentit une vague de honte l'envahir. Comment avait-elle pu manquer quelque chose d'aussi fondamental ?

"Je comprends, Monsieur Drake. Cela ne se reproduira pas."

Il l'observa pendant un long moment, comme s'il évaluait quelque chose au-delà de ses simples paroles.

"Vous avez fait trois ans de stage chez BergerStein avant Columbia, n'est-ce pas ?"

La question la surprit. Comment connaissait-il son parcours avec autant de précision ?

"Oui, monsieur. Dans leur division analyse de risque."

"Et votre mère dirige une petite entreprise textile à Lyon."

Ce n'était pas une question, mais une affirmation qui la déconcerta complètement. Drake semblait connaître des détails personnels que même ses collègues ignoraient.

"Vous avez fait des recherches sur moi," constata-t-elle, incapable de masquer sa surprise.

"Je m'intéresse à tous mes employés prometteurs," répondit-il avec désinvolture. "Particulièrement ceux qui remarquent ce que d'autres ont manqué."

Il se leva à nouveau, signalant la fin de leur entretien. Élisa se leva à son tour, consciente qu'elle venait de vivre quelque chose d'inhabituel – une conversation privée avec le PDG lors de son deuxième jour.

"Corrigez cette erreur avant de soumettre le rapport à Catherine," dit-il en la raccompagnant vers la porte. "Et Mademoiselle Moreau?"

"Oui?"

"Ne mentionnez pas notre conversation. Catherine n'apprécierait pas que j'interfère avec sa... méthode d'évaluation."

Élisa acquiesça, comprenant les implications. Drake ouvrit la porte, mais alors qu'elle s'apprêtait à sortir, il ajouta, sa voix soudain plus basse :

"L'ambition vous sied bien. N'ayez pas peur de montrer vos... talents."

La façon dont il prononça le mot "talents" envoya un frisson le long de sa colonne vertébrale. Ce n'était pas explicitement inapproprié, mais le sous-texte était difficile à ignorer.

"Merci pour vos conseils, Monsieur Drake," répondit-elle formellement avant de s'éloigner dans le couloir, sentant son regard peser sur elle jusqu'à ce qu'elle tourne au coin.

De retour à son bureau, Élisa corrigea immédiatement l'erreur identifiée par Drake. Son esprit, cependant, tournait en boucle sur leur échange. L'homme était indéniablement brillant, mais aussi intensément intimidant. Et cette façon qu'il avait de la regarder, comme s'il voyait à travers ses défenses soigneusement construites...

Elle termina les corrections et finalisa le rapport vers 2h du matin. Épuisée mais déterminée à ne pas rentrer si tard, elle décida de dormir quelques heures sur le canapé de la salle de repos avant l'arrivée des autres employés.

Le sommeil fut agité, peuplé de rêves confus où des yeux gris la poursuivaient à travers des couloirs sans fin.

***

"Tu as une tête horrible," fut la première remarque de Zoey lorsqu'elle trouva Élisa à son bureau le lendemain matin, fraîchement douchée dans les vestiaires du personnel mais visiblement épuisée.

"Merci pour ta franchise," répondit Élisa en étouffant un bâillement. "J'ai passé la nuit ici à terminer le rapport Artemis."

Zoey écarquilla les yeux. "Palmer t'a fait avancer la deadline?"

"Apparemment, remettre en question le travail de Richardson était une erreur tactique."

"Je t'avais prévenue," murmura Zoey. "Tu as trouvé quoi exactement?"

"Des projections vietnamiennes complètement irréalistes. J'ai recommandé une réorientation vers la Thaïlande et la Malaisie."

Le visage de Zoey pâlit légèrement. "Et tu vas présenter ça à Palmer ce matin? Elle était la principale alliée de Richardson."

Élisa sentit son estomac se nouer. "Je n'ai pas le choix. Les données sont claires."

"Tu es soit très courageuse, soit très naïve," soupira Zoey. "Bon courage."

À 8h55 précises, Élisa frappa à la porte du bureau de Catherine Palmer, le rapport corrigé à la main. Elle avait pris soin de se maquiller pour dissimuler les cernes sous ses yeux et avait changé de chemisier grâce à la tenue de rechange qu'elle gardait toujours dans son sac.

"Entrez," ordonna la voix sèche de Palmer.

La directrice adjointe était assise derrière son bureau, tapant furieusement sur son clavier. Elle ne leva pas les yeux quand Élisa déposa le rapport devant elle.

"J'ai finalisé l'analyse préliminaire du projet Artemis, comme demandé."

Palmer continua de taper pendant quelques secondes avant de daigner jeter un regard au document. Elle le feuilleta rapidement, s'arrêtant sur la section concernant le Vietnam. Ses lèvres se pincèrent en une ligne mince.

"Vous maintenez donc votre position sur les projections vietnamiennes."

Ce n'était pas une question, mais Élisa répondit néanmoins :

"Les données réglementaires récentes ne laissent pas place au doute, madame. J'ai inclus une annexe détaillant les nouvelles restrictions et leur impact calculé."

Palmer ferma le rapport d'un geste sec. "Vous réalisez les implications de cette 'correction', n'est-ce pas? Nous avons déjà présenté au client une stratégie basée sur les projections originales."

"Je comprends la délicatesse de la situation," répondit prudemment Élisa. "Mais présenter des données erronées pourrait avoir des conséquences plus graves à long terme."

Palmer la fixa avec une expression glaciale. "Votre travail était d'affiner l'analyse existante, pas de la démolir."

"Mon travail est de fournir l'analyse la plus précise possible," corrigea doucement Élisa, surprise par sa propre audace.

Un silence tendu s'installa. Palmer semblait osciller entre colère et calcul.

"Très bien," dit-elle finalement. "Puisque vous êtes si convaincue de votre analyse, vous la présenterez vous-même lors de la réunion du comité cet après-midi."

Élisa sentit son sang se glacer. "Le comité?"

"Le comité exécutif. 15h, salle de conférence Olympus." Palmer esquissa un sourire sans chaleur. "Monsieur Drake lui-même sera présent."

C'était clairement une punition – jeter la nouvelle recrue dans la fosse aux lions pour lui enseigner l'humilité. Mais Élisa ne pouvait pas reculer maintenant.

"Je serai prête," affirma-t-elle, s'efforçant de paraître plus confiante qu'elle ne l'était.

"Nous verrons," répliqua Palmer. "Ce sera tout, Moreau."

En quittant le bureau, Élisa sentit ses jambes trembler légèrement. Présenter devant le comité exécutif après seulement deux jours dans l'entreprise? C'était sans précédent – et probablement conçu pour l'humilier publiquement.

La matinée passa dans un brouillard anxieux tandis qu'Élisa perfectionnait sa présentation, anticipant chaque question possible, chaque angle d'attaque. Zoey lui apporta un sandwich qu'elle grignota distraitement sans quitter son écran des yeux.

"C'est un piège," marmonna Zoey. "Palmer veut te voir trébucher devant Drake."

"Ou peut-être veut-elle que je renonce et que j'adopte les chiffres erronés," répondit Élisa. "Dans les deux cas, je refuse de céder."

À 14h45, Élisa se dirigea vers la salle Olympus, située au dernier étage de la tour. Ses diapositives étaient impeccables, ses arguments solides. Si elle devait tomber, ce serait avec honneur.

La salle de conférence Olympus était intimidante – une vaste pièce dominée par une table en marbre noir autour de laquelle étaient disposés une douzaine de fauteuils en cuir. Une baie vitrée offrait une vue vertigineuse sur Central Park. Les membres du comité exécutif commençaient à arriver – hommes et femmes au regard acéré et aux costumes impeccables, incarnations de l'élite du monde des affaires.

Catherine Palmer entra, lui adressant à peine un regard, et prit place à l'extrémité de la table. L'atmosphère devint soudain plus tendue quand Alexander Drake apparut à son tour. Il portait un costume gris anthracite qui soulignait sa silhouette athlétique, sa présence éclipsant instantanément celle des autres dirigeants.

Son regard balaya la salle avant de se poser brièvement sur Élisa. Aucun signe de reconnaissance ne trahit leur conversation nocturne, mais elle crut déceler une lueur d'intérêt dans ses yeux gris.

"Commençons," annonça-t-il d'une voix qui n'admettait aucune contradiction. "Catherine, je crois que vous avez une présentation concernant le projet Artemis?"

Palmer se redressa. "En effet. J'ai chargé notre nouvelle analyste, Mademoiselle Moreau, d'examiner les données. Elle a... des observations à partager."

Le ton condescendant était évident pour tous. Drake tourna son attention vers Élisa.

"Eh bien, Mademoiselle Moreau, impressionnez-nous."

Le défi était lancé. Élisa sentit tous les regards converger vers elle – certains curieux, d'autres déjà sceptiques. Elle prit une profonde inspiration et commença sa présentation, consciente que les prochaines minutes pourraient définir toute sa carrière chez BlackTower.

Et peut-être, plus troublant encore, que les yeux gris d'Alexander Drake ne quittaient pas son visage un seul instant.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet