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- Prologue : La boucle infinie -

Altair

Je crois que j'avais trois ans la première fois qu’elle m’a frappé. Pas une gifle. Non. Pas cette chose impulsive qu’on regrette.
Elle, elle a frappé avec méthode. Une cuillère en bois. Puis une ceinture. Puis ses mains. Toujours dans un silence presque religieux.
Je ne savais pas pourquoi. Et je n’ai jamais su.
Elle disait que j’étais mauvais, maudit, que mon existence salissait la sienne.
Je pensais que si je souriais assez, si je me taisais assez, elle finirait par m’aimer.
Je ne savais pas encore qu’on ne peut pas mendier l’amour d’un monstre.

À quatre ans, j’ai appris à me cacher. Sous le lit. Derrière les rideaux. Dans le silence.
Mais elle me trouvait toujours.
Elle jouait à des jeux.
Elle m’enfermait dans le noir, des heures, parfois des jours. Sans eau. Sans nourriture.
Parfois avec des bruits. Parfois avec des mots.


"Tu n’existes pas."


"Tu es un poison."


"J'aurais dû avorter au lieu de supporter ta naissance."


Je pensais que c’était vrai. Qu’il y avait quelque chose de pourri en moi.
Je m’excusais tout le temps. Même quand je respirais.

À cinq ans, je ne pleurais plus. Pas parce que j’étais fort. Mais parce que ça l’énervait moins.
Si je pleurais, elle souriait. Et ce sourire… ce n’était pas celui d’une mère.
C’était celui d’un prédateur qui savoure sa proie.
Elle a commencé à marquer mon corps.
Des brûlures de cigarette. Des coupures avec des objets qu’elle cachait dans des tiroirs verrouillés.
Elle aimait que je supplie.
Mais à l’intérieur, quelque chose avait déjà commencé à mourir.

À six ans, elle m’a coupé les cheveux en hurlant que je ressemblais trop à lui.
Je ne savais même pas qui il était.
Elle m’a obligé à dormir sur le sol, sans couverture. Elle ouvrait les fenêtres en hiver, me forçant à grelotter jusqu’au matin.
Et si je tombais malade, elle me disait que c’était la preuve que mon corps ne méritait pas de vivre.
Je regardais les murs. J’écoutais les craquements du plancher. Et j’attendais que la douleur passe.
Mais elle ne passait jamais.

À sept ans, j’ai commencé à parler à quelqu’un dans ma tête.
Une voix calme. Silencieuse. Qui me disait de tenir.
Une voix qui me disait qu’un jour, ce serait fini.
Que tout ce qu’elle m’infligeait, je pourrais le retourner.
Pas pour faire souffrir.
Mais pour que jamais personne ne m’approche sans y penser à deux fois.

À huit ans, elle m’a plongé la main dans l’eau bouillante. Juste pour voir si je crierais.
Je ne l’ai pas fait.
Et elle a ri. Comme si c’était une victoire.
Je me souviens encore de l’odeur de ma chair. De la douleur comme une marée noire qui me noyait.
Mais je me suis accroché à cette voix dans ma tête.
Ma seule amie.

À neuf ans, elle m’a dit que je ne serais jamais aimé. Jamais voulu.
Et j’ai failli la croire.
Jusqu’au jour où elle m’a regardé, et que j’ai compris qu’elle avait peur.
Pas parce que j’étais dangereux, mais parce que je ne réagissais plus.
Mes pleurs avaient cessé.
Mon corps avait fini de trembler.
Elle n’avait plus d'emprise sur moi.

À dix ans, j’ai compris que j’étais seul. Mais dans cette solitude, il y avait une étrange liberté. Plus de prières. Plus d’espoir. Plus de besoin. Juste moi. Et cette rage froide, qui dormait sous ma peau comme un animal enchaîné. Un jour, il se réveillera.

Et ce jour-là, ce ne sera pas moi qui supplierai.

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