TW : violence / blessures / sang  

Je sens des gouttes de sueur perler depuis mon front alors que mon corps se rapproche inexorablement du postérieur impatient de Kayla, sous le regard avide de Viper, qui lèche ma joue en tirant sur ma chaîne… J’aimerais débander, malheureusement le souvenir de la bouche de Buck a laissé mon sexe dans un état d’érection de compétition… Je sens que les effets de la drogue commencent à s’intensifier ; ma vue se brouille, je n’arrive plus à tourner ma tête qui me semble peser deux tonnes à elle seule et même ma haine à l’encontre de nos geôliers commence à faiblir. J’essaye sans succès de secouer ma tête pour tenter de reprendre le contrôle sous les rires de Viper : 

— Ça va pas, mon chou ? C’est le verrou phéromonal… Bientôt, non seulement tu ne pourras plus me faire de mal, mais tu n’en auras plus envie ! Mes phéromones auront un effet presque réconfortant pour toi et ton ami, vous allez m’aimer en quelque sorte, c’est merveilleux, non ? 

C’est catastrophique ! Pire que tous les scénarios catastrophiques que mon esprit torturé a pu élaborer depuis deux ans… Mon cœur bat de plus en plus vite ; telle une proie effrayée qui lutterait pour ses derniers instants de vie, je me sens acculé au bord d’une falaise, ayant le choix entre être dévoré ou être englouti par le vide ! Je suffoque. Est-ce que Bucky ressent la même chose ou est-il déjà consumé par les effets du psychotrope couplés à son ancien conditionnement ? Je lève un regard implorant vers la blonde diabolique qui me sourit avec un air presque compatissant : 

— Abandonne-toi, mon beau Captain ! Il est inutile de lutter contre Hydra, même si ta hargne t’honore, tes forces seront bien mieux utilisées sous notre supervision ! Le Comte Vermis te donnera de véritables combats à mener, celui de ta liberté est déjà perdu… 

Mes yeux me brûlent et cette sensation familière me ramène à toutes les fois où j’ai retenu mes larmes. Il y en a tellement que je ne pourrais les dénombrer… Aujourd’hui, comme par le passé, mes larmes ne concernent que Bucky. Mon propre sort ne m’inquiète pas ; peu importe que je devienne un esclave sexuel ou un esclave tout court. Mon seul souhait serait que quelqu’un sauve Buck, n’importe qui ! Alors que j’utilise mes dernières bribes de lucidité pour adresser cette prière à l’Univers, j’entends vaguement un fracas derrière moi, mais je ne peux plus me retourner, seule une voix me provient : 

— Putain, on fait une partouze sans moi par ici ? Je m’absente à peine deux jours et je te retrouve la teub à l’air sur des peaux de bêtes, franchement papa… 

Deadpool ! Les voix du Seigneur sont impénétrables, mais franchement, je n’ai jamais été aussi heureux de l’entendre ! 

— Papa ? s’étonne Viper, qui a brutalement lâché ma chaîne et est passée hors de ma vision.

Si elle savait… Je ferme mes yeux pour remercier le Ciel de m’avoir envoyé de l’aide, aussi surprenante soit-elle et soudain, je sens une vive brûlure dans mon cou ! Une grimace tord mon visage alors que j’observe, tétanisé, une silhouette se laisser glisser tête en bas le long d’un épais fil de soie blanche. Je me retrouve nez à nez avec un masque rouge rayé de noir et une voix familière me murmure précipitamment : 

— B‘Jour, Nomad ! Je viens de vous injecter un antidote… On a mis du temps à le trouver avec Wade, ces souterrains sont immenses, vous savez ? On a fini par trouver le labo, il n’était même pas sécurisé, vous vous rendez compte ? Si Monsieur Stark voyait ça… Oh, je vous laisse, ça va prendre deux ou trois minutes, pas de panique ! 

Peter me plante là, après avoir rapidement brisé ma chaîne et lance une toile derrière moi pour voler en direction de Wade, enfin, je suppose…
La douleur est cuisante, j’ai l’impression qu’un venin coule dans mes veines et infiltre chacun de mes organes… Mon flou visuel s’estompe peu à peu, en même temps que mon corps sort de sa torpeur laborieusement… Douloureusement… Une souffrance qui a le mérite d’avoir calmé les ardeurs de la partie inférieure de mon anatomie. Silver Fox se retourne et se lève d’un bond gracieux pour rejoindre ses compères, dans un tourbillon de vert et de jurons qui me donne le tournis.

Le souffle court et les poumons enflammés, j’arrive, au bout d’un temps infini à entendre le tumulte derrière moi, à pivoter sur ma jambe droite. Mon équilibre est précaire… Je remonte mon pantalon avec de grands efforts, tout en fronçant mes sourcils pour ajuster ma vue récalcitrante à la recherche de Bucky. La pièce est sens dessus-dessous, mais je ne vois aucune trace de lui, ni de Rumlow… Kayla est au corps à corps contre Peter, qui doit rivaliser de pirouettes pour contrer ses attaques et ses coups de feu ! Les espaces confinés tels que celui-ci ne sont pas vraiment ceux qui lui permettent de mettre tous ses atouts à son service et la petite araignée a bien du mal à esquiver, à la fois son adversaire et les… Crachats ? Oui, ça m’a tout l’air d’être des crachats que lance Viper contre Peter et Wade ! Si Peter arrive avec succès à éviter le mucus verdâtre expectoré par la mutante, Deadpool semble rencontrer plus de difficultés… Son costume paraît fondu en de nombreux endroits, dévoilant d’horribles pustules à la surface de sa peau ! Alors que Peter réussit à projeter un filet de toile pour obturer la bouche de Viper, Wade se rapproche d’elle pour tenter de l’immobiliser, mais la mutante siffle brusquement un crachat qui dissout instantanément la soie de l’araignée et atterrit… Sur le visage de Deadpool ! 
Son masque fond en crépitant tandis que le mercenaire hurle à pleins poumons, le visage bouilli par le fiel toxique. 

— Bébé ! s’inquiète Peter.

— Bébé ? Encore des tarlouzes, mais c’est une malédiction ! crie la brune, en ceinturant son adversaire.

— La modernité, Kayla… lui souffle la blonde.

— Ils feront une belle addition à notre cheptel ! Occupe-toi du balèze, Phélie, je me charge du gamin ! 

— Je ne suis pas un gamin ! s’agace Peter.

— Je vais vous faire bouffer mes jumelles, bande de salopes rétrogrades ! hurle Deadpool, dont un œil vient de dégringoler de son orbite grignotée par l’acide… 

— T’as perdu un œil, bébé ! se moque Kayla.

— Quand je l’aurai retrouvé, je vais te le carrer dans le… 

Bon. Ils ont l’air de très bien gérer la situation. Il est temps pour mes jambes, qui se décident enfin à m’obéir, de partir à la recherche de Bucky ! Je passe en titubant à côté de Wade, qui s’est mis à quatre pattes pour chercher son œil, alors qu’un nouveau est déjà en train de pousser dans son orbite creuse… Avant de quitter la pièce, je me saisis du bouclier aux couleurs d’Hydra et me lance dans le dédale de couloirs sombres en me cognant plusieurs fois dans les murs ! J’ai encore quelques petits problèmes de coordination…  

Je tourne et vire dans les conduits humides, mais ne trouve aucune trace d’eux jusqu’à tomber, après un virage, sur une jeune femme toute de rouge vêtue ! Grande, brune, les cheveux longs cintrés par un bandeau, elle porte une tenue pour le moins légère et déchirée en plusieurs endroits, dévoilant une bonne partie de ses fesses rebondies… Elle paraît encore plus déboussolée que moi et se tient le cou là où, manifestement, elle aussi a reçue une injection d’antidote. Lorsque j’arrive à sa hauteur, ses pupilles sont largement dilatées quand elle lève ses yeux sur moi, affolée : 

— Laissez-moi tranquille ! 

— Je ne vous veux pas de mal ! Je suis Capt… Mon nom est Steve Rogers, je cherche un de vos kidnappeurs ! 

— Rumlow… gémit-elle, effrayée.

— Oui… Il a enlevé un ami à moi… Un ami très cher…

— Ils viennent de passer, ils m’ont bousculée… À l'instant… Ils sont partis par là, vers la sortie… Votre ami essayait de se débattre… J’aurais voulu l’aider, mais… sanglote la jeune femme.

— Ce n’est rien, je vais m’en occuper ! Restez ici, il y a du grabuge plus loin, cachez-vous… Comment vous appelez-vous ?

La jeune femme semble réfléchir intensément avant de bredouiller, incertaine : 

— Elektra… Je… Je crois que c’est Elektra… 

— Restez cachée, Elektra ! Tout va bien se passer…

~*~

J’ai enfin quitté le boyau pour regagner l’air frais, mais je n’ai pas rattrapé Bucky et son ravisseur… Une fois dehors néanmoins, mes sens semblent s’aiguiser et mes gestes sont plus maîtrisés ! La douce chaleur printanière qui règne au-dehors et le gazouillis paisible des oiseaux contraste étrangement avec le cauchemar que je vis…  Après plusieurs inspirations, je me dirige vers la forêt quand j’entends du bruit venant du côté opposé. Aussitôt, je rebrousse chemin et ne tarde pas à découvrir que les hautes gerbes sont écrasées de ce côté-ci, confirmant le passage récent des deux hommes ! Je tente de courir pour réduire l’écart entre nous quand j’entends un cri étouffé : 

— Слезь с меня, сволочь ! (1)

Bucky ! 

Une solide bouffée d’espoir chevillée au corps, je m’élance dans sa direction, oubliant toute douleur… Après une centaine de mètres, je suis sur leurs talons : 

— Lâche-le, Rumlow ! hurlè-je, d’une voix éraillée, la gorge en feu.

L’intéressé fait volte-face, plaque Bucky contre lui et sort un couteau Kraken dont il fait glisser la lame sous le cou de son captif.

— T’approche pas, Cap ou je le saigne comme un porc !

Je peux voir dans le regard de Bucky qu’il lutte intensément pour échapper à son tortionnaire, mais il n’a pas reçu l’antidote, aussi son corps est-il complètement sous le contrôle de Rumlow ! C’est déjà un exploit qu’il ait réussi à hurler, j’en étais moi-même incapable il y a seulement une dizaine de minutes… Sa résistance est exceptionnelle, je me fais rapidement la réflexion qu’il a dû donner bien du mal à Hydra autrefois, avant de se conformer.

Alors que je réfléchis à mon angle d’attaque, j’entends soudain un raffut de véhicules arriver en trombe sur les ruines ! Brock l’entend lui aussi et je vois dans ses yeux la panique l’envahir. Tandis que je l’observe resserrer ses doigts sur le manche de son Kraken et tendre le cou de Bucky de son autre main, qui tire violemment ses cheveux en arrière, mon esprit s’affole à la certitude de ce qu’il s’apprête à faire pour m’empêcher de le poursuivre ! 

— DERRIÈRE ! BAISSE-TOI, BUCK ! hurlè-je, les yeux écarquillés, tentant le tout pour le tout.

Surprit, Brock se retourne en brandissant son couteau tactique, poussant Bucky sur le côté, qui tombe lourdement sur ses genoux, ses mains toujours entravées par ses chaînes.
Mon corps et mon esprit semblent se scinder sous le coup de l’émotion et j’ai à nouveau l’impression que mon corps ne m’obéit plus lorsque je m’accroupis pour lancer le bouclier dans les jambes de Rumlow…
D’un mouvement aussi précis que violent, le bouclier atteint sa cible et tranche nette les jambes du mercenaire d’Hydra juste au-dessus de ses genoux, éclaboussant de gerbes carmin le funeste blason de l’arme défensive, devenue vengeresse des offenses faites à Buck ! Faisant abstraction des hurlements de mon adversaire et de la multitude d’hommes en noir qui déboule de tous les côtés, armés jusqu’aux dents, je me précipite sur Bucky, qui n’a pas sourcillé… Pourvu que je ne l’aie pas blessé, Seigneur…

Je me jette au sol devant lui et redresse doucement son visage, obstrué par ses longues mèches brunes, elles aussi parsemées d’innombrables larmes de sang. Pas le sien. Un soulagement sans nom m’envahit en constatant qu’il n’est pas blessé… Pas physiquement, du moins… 

Retrouvant ma force ordinaire, j’arrache sans peine sa chaîne et lui libère les mains, que je serre dans les miennes. Sanglotant lamentablement, je l’embrasse tout en libérant ses lèvres à intervalles réguliers pour bredouiller des : 

— Excuse-moi, Buck… Pardon… Pardon… Pardon… 

Bucky est toujours dans l’incapacité de parler, il se contente de se blottir contre moi et nous restons ainsi au sol durant d’interminables… Minutes ? Heures ? Je ne saurais le dire… Autour de nous, l’agitation règne, des hommes s’accroupissent près de Rumlow avec du matériel médical… Un brancard arrive… J’entends vaguement un hélicoptère… 

Imperturbable, je berce tendrement   Bucky contre mon corps lorsqu’une main se pose délicatement sur mon épaule, me faisant sursauter. Je me tourne et lève mes yeux embués sur une silhouette que je ne pensais pas revoir avant un moment. L’homme retire ses lunettes de soleil et j’aperçois un regard soulagé : 

— Tout va bien, Nomad ?

— Ça va… Les autres ?

— Monsieur Wilson et Monsieur Parker ont appréhendés Viper et Kayla Fox ! Ils vont bien… Il manque quelques morceaux à Deadpool, mais… Plus pour longtemps… 

— Et cette jeune fille… Elektra ?

— Saine et sauve, Nomad ! Il n’y a que… Rumlow dont le sort demeure incertain… Notez que ce ne sera pas une grande perte si jamais… 

— Il reste de l’antidote ?

— Nous en avons trouvé une pleine valise ! Si… Vous pouvez vous lever, nous pourrons lui en administrer une dose ! 

Je frotte le dos de Buck puis passe son bras sur mon épaule pour l’aider à se relever et hoche la tête en direction de l’homme en noir : 

— Merci, Phil ! lancè-je, reconnaissant.

~*~

(1) Lâche-moi, ordure