Mattia,
J’enfile ma combinaison noire carbone, mes bottes, je prends mon casque et mes gants avant de me diriger au garage. Mon équipe est déjà en place pour l’entraînement d’aujourd’hui, c’est l’avant dernier avant la prochaine course. On fait un essai aujourd’hui, à Imola, pour tester les nouveaux ajustements et réglages de ma moto.
Je m’approche du directeur de mon équipe, Antonio Conti. Il est dans ma team depuis que je suis rentré en moto gp, autrement dit 8 ans, on est assez proche. Alors qu’on discute, je vois un membre de la technique qui arrive. Je ne connais pas son nom mais je vais retenir sa tête pour être arrivé à cette heure-ci.
- Tu es en retard. Lâche-je froidement.
- Seulement d’une minute… bredouille l’homme
- Je m’en fou ! Que ce soit 1 minute ou 10, tu n’as pas à être en retard ici. Sinon je te vire, Capisce ?! M’écris-je en colère.
S’il y a bien une chose qui me met hors de moi, c’est le manque de sérieux et de ponctualité dans le travail. On a pas le droit à l’erreur et je n’accepte pas que quelqu’un me tire vers le bas, je recrute seulement les meilleurs.
Je contourne cet imbécile pour me diriger au bord de la piste, Imola est ma ville natale, je connais cette piste tellement bien que je pourrais piloter les yeux fermés.
J’enfile mon casque aux couleurs de l’écurie. La « Xanera Motorsport » est la plus prestigieuse d’Italie et parmi les meilleures du monde. Cette équipe aux tonalités beaucoup plus sobres, noir carbone et bleu électrique, que beaucoup d’autres, aux couleurs jaune vif ou rouge, s’est fait son nom discrètement et rapidement.
Une fois mes gants ajustés, j’enfourche ma moto. J’allume le moteur, mon monstre au moteur V12 hybride turbo rugit parfaitement bien. Mon dieu, j’aime ce bruit, je la laisse tourner. Je visualise rapidement le circuit dans ma tête avant de démarrer, je fais un petit tour pour la chauffer.
Après mon arrêt au paddock pour discuter avec les techniciens je repars. En à peine deux secondes je suis à plus de 100 k/h. C’est un véhicule d’une puissance presque brutale, qui l’a rend très nerveuse surtout dans les virages. Certains pilotes n’aiment pas ce type de machines, considéré comme trop dangereuse à piloter. Personnellement, je crois qu’elle est parfaite pour moi et mon caractère, elle m’a trouvé et on se complète parfaitement, comme une baguette et son sorcier.
Je ne sais pas si cette sensation existe ailleurs qu’en sport mécanique. Cette sensation d’adrénaline à chaque fois que tu accélères. Le cœur qui bat tellement qu’il pourrait nous échapper, la respiration qui se coupe et cette petite voix de ta conscience, qui te dit que tu n’as pas le droit à l’erreur sans pour autant te demander de ralentir.
Alors j’accélère… 230... 250...300...320… virage long, je lâche l’accélérateur, freine, 170 k/h, prise parfaite.
Je retourne au paddock, après quelques tour, je laisse les mécaniciens faire leur boulot pendant que je débrif avec Antonio et les techniciens.
- Brûlure !
On entend ça depuis l’intérieure de la zone technique. On s’arrête de parler pour se diriger à la hâte à l’extérieure, où ils vérifient ma moto. Je vois un mécaniciens, Enzo je crois, assis par terre le visage crispé par la douleur, se tenant le bras gauche. Sa main est brûlé, on voit déjà des cloques, son avant-bras se teinte de rouge dans l’extension de la blessure.
- Cazzo… tu pouvais pas faire attention ?! Et vous appelez les secours, Coglioni.
Je souffle tendu et frustré, il est l’un des mécaniciens les plus importants de l’équipe. La prochaine course est la semaine prochaine et il se blesse maintenant, il n’a pas été prudent et c’est sa faute. Il aurait dut faire attention.
Des collègues l’aident à se relever, pour qu’il puisse mettre la bras sous l’eau tiède. Moi… moi je fais les cent pas en réfléchissant. Comment je vais faire, je ne peux pas courir avec un mécanicien en moins… trouver un remplaçant à quelques jours de la course, c’est presque infaisable.
- Matti ?
Je me retourne presque en sursaut, j’étais trop perdu dans les abysses de mes pensée. Je ne dis rien et regarde Antonio pour qu’il continue.
- Ça va aller bambino, on va trouver une solution.
Bambino… même à 27 ans, il continue de m’appeler comme ça, il n’en démord pas. Secrètement, j’aime ce surnom. Mais plutôt perdre ma moto que de l’avouer.
- Comment veux-tu que ça aille. C’est impossible de trouver un autre mécano en si peu de temps. Rétorque-je froidement, un blanc s’en suit.
- Enzo va s’en sortir, tu penses ?
- J'espère. Mais si ce n’est pas le cas, il faudra faire sans. On a une course à préparer, Antonio.
- Tu peux toujours ne pas faire l’Adria, elle n’est pas si importante… ni pour ta carrière, ni pour t’entraîner au GP.
Je vois qu’il utilise des pincettes pour ne pas me blesser. Blessé ? Loin de là. Furieux ? C’est évident. Je hausse le ton.
- Ne pas la faire ?! Importante ou pas, j’ai dis que je la ferais alors je la ferais. Soit tu as un mécano caché dans tes contacts, soit tant pis on fera sans.
- Bambino...
- Les italiens m’attendent à cette course, je ne leur ferais pas faux-bond.
Sur ces mots, je défais la fermeture de ma combinaison et marche d’un rythme régulier et tendu jusqu’aux vestiaires. Je me change, je remets mon t-shirt noir, mon jean brut, mes bottines noirs usé. Je passe ma main dans mes cheveux décoiffé.
En attachant ma chaîne, je retourne au stand. Enzo n’est plus là, emmené par l’ambulance à l’hôpital. Est-ce que je devrais me soucier plus de lui ? Je chasse ce doute, j’ai juste besoin de ses compétences.
- Tonio, tu me donneras des nouvelles d’Enzo.
Je récupère mon blouson de cuir, mes clés, mon deuxième casque et je sors de l’enceinte du circuit pour rejoindre ma moto personnelle. Une Ducati panigale V4 aux couleur de Lamborghini, je l’allume et prends mon temps pour enfiler mon équipement.
Mes pensées envers Enzo ne sont pas dans le soutient. Si Enzo ne se remet pas vite, tout va être décalé. Je n’ai pas de temps à perdre, pas maintenant. Cela fait-il de moi un égoïste ? Je me fou de son bien être ou si son bras n’est pas trop amoché, je veux juste qu’il reviennent pour que mon équipe soit au complet. Après tout, c’est une erreur de débutant, tout le monde sait qu’une moto est brûlante après avoir roulé, surtout pendant les courses.
Je monte sur l’engin, allume la musique dans mon intercom et m’éloigne du circuit dans le vrombissement du véhicule. Contrairement à ce qu’on pourrait penser d’un pilote de course, en dehors du circuit, je roule tranquillement et respecte le code de la route.
Quand j’arrive chez moi, je reçois un texto de Antonio :
Antonio C. :
A.
J’ai trouver quelqu’un qui pourrait faire l’affaire pour la course de jeudi.
Moi.
OK. il a plutôt intérêt à être à assurer.
Je laisse tomber mon téléphone sur le canapé et file à la douche. L’eau tiède qui coule sur mon corps m’aide à réfléchir, j’ai 5 mécaniciens… plus le nouveau qui va arriver. Il remplace Enzo qui s’occupait du moteur et des suspensions… s’il est pas assez bon et rapide je peux le mettre seulement aux suspensions et ça devrait le faire.
***
Enfin Jeudi, le temps est au beau fixe et temps mieux. La météo faisait des sienne ces derniers jours et autant dire que courir sous la pluie ce n’est pas une partie de plaisir. Malheureusement, la plus nous a empêché d’évaluer la vitesse d’exécution de la nouvelle recru, je vais voir ce qu’il vaut pendant les essais libres.
Mais alors que tous le monde se tient prêt il arrive à peine et prend le temps de se servir un café, je sens mes nerfs se tendre.
- Cazzo… jure-je dans mon casque.
Il est tout sourire, on dirait un imbécile. Je serre les dents, même si personne ne peut le voir et lui dit de se grouiller.
Je pars discuter avec mon équipe, on regarde à nouveau le schéma du circuit, je le connais très bien et même s’il n’est pas long, moins de 4 kilomètre, il y a plusieurs virages très serré ou en épingle.
Me concentrer sur le circuit m’aide à me détendre et oublier le petit désagrément. Ma moto déjà allumer, je monte dessus et écoute les dernières informations du directeur.
- Je vais faire comme d’habitude au deuxième virage puis j’essayerais ce que tu m’as dis Tonio. Dis-je assez fort pour que ma voix porte au dessus de mon casque et du bruit des moteurs.
- Merda !
Je descend de ma moto et je retire mon casque furieux. Après 4 tours d’essais, le nouveau à montré son potentiel… autant dire qu’il n’y en a aucun. Même un apprenti est plus rapide que lui.
- Tu es plus lent que ma grand-mère, Skoll ! Et elle est six pied sous terre !
- En fait… c’est Schulz… bafouille le concerné.
- C’est pareil, tu es trop lent ! Ne touche plus ma moto !
Furieux, je me plain auprès de mon directeur, comment il m’a déniché quelqu’un de si nul alors qu’on est une des plus grandes écuries. Après un débat trop long et inutile, je congédie Schulz en dernière ligne, il aidera les mécanos avec le matériel. Mais il ne touchera plus à ma moto.
***
Tout s’est plutôt bien déroulé, j’ai fais de bonnes qualifications aujourd’hui, comme je l’ai ordonné hier, l’allemand est resté en coulisse. J’ai aussi fait une bonne course, je suis arrivé deuxième. Ce n’est pas ce que je voulais évidemment mais sans Enzo, qui était vraiment l’un des meilleurs, de part sa vitesse de travaille mais aussi sa qualité, ce n’est pas pareil.
Je suis épuisé, j’ai hâte de rentrer à l’hôtel je pourrais me baigner pour détendre mes muscles et surtout dormir un peu. Seulement, comme souvent on va aller boire un coup et manger au restaurant.