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2 - - 𝑅𝑒𝓃𝒸𝑜𝓃𝓉𝓇𝑒 𝓈𝑜𝓊𝓈 𝓁𝑒𝓈 𝐸𝓅𝒾𝓃𝑒
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- 𝑅𝑒𝓃𝒸𝑜𝓃𝓉𝓇𝑒 𝓈𝑜𝓊𝓈 𝓁𝑒𝓈 𝐸𝓅𝒾𝓃𝑒

𝑃𝑜𝑣 𝐸𝑥𝑡𝑒́𝑟𝑖𝑒𝑢𝑟 :

La douce après-midi londonienne fit frissonner notre jeune protagoniste dès son arrivée dans la grande ville. L'effervescence de la capitale ne lui avait pas vraiment manqué, mais l'atmosphère si particulière de cette nouvelle saison lui soufflait quelques promesses - de celles qui font frémir le cœur.
Les Hastings tenaient à rendre visite à leur belle-famille dès leur arrivée, les Bridgerton.
Mais cette visite fut de courte durée pour Mademoiselle Basset, qui, sans plus attendre, décida de partir à la recherche d'une sensation plus attrayante : la bibliothèque de Londres.

𝑃𝑜𝑣 𝐿𝑒́𝑛𝑎 :

- « Roulez un peu plus vite, je vous prie ! » demandai-je en frappant sur le toit de la calèche, légèrement impatiente.

À peine la requête formulée, le rythme s'accéléra. Nous filions désormais à toute allure à travers les rues de Londres, et je sentais l'excitation me gagner à mesure que nous approchions de notre destination.
Pour être honnête, je ne suis guère de ces demoiselles patientes, toujours prêtes à attendre sagement qu'on leur serve le monde sur un plateau. Pourtant, je sais me montrer raisonnable quand il le faut. Mais cette fois... impossible de contenir mon impatience. Deux jours entiers sans nouveauté dans mes lectures, c'était déjà bien suffisant !
Grâce aux conseils avisés d'Eloise et de Pénélope, j'avais appris que de nouveaux arrivages étaient attendus pour la saison. L'idée de découvrir de nouvelles histoires m'emplissait déjà de joie. Je pourrais enfin apaiser mon esprit en me plongeant dans un nouveau roman.

Pensais-je, en regardant le paysage de la ville défiler sous mes yeux.

Enfin, la calèche s'arrêta devant l'imposant bâtiment. Un valet m'aida à descendre - j'avais expressément demandé à venir seule, trouvant agaçant d'être perpétuellement chaperonnée lorsque je cherchais la solitude et le silence que m'offrait la lecture.

Je fis signe au valet de m'attendre et montai les marches avec détermination, croisant quelques passants. Un sourire discret naquit sur mes lèvres dès que je franchis les portes. Je ne me lasserai jamais de cette atmosphère feutrée. Entourée de ces hautes étagères, je me sentais vivante, à ma place, enveloppée par des milliers de mots et de mondes à explorer.

Ici, je suis libre. Libre de lire ce que je désire, de plonger dans les univers que renferment ces pages.

En levant les yeux, je repérai aussitôt l'escalier menant à l'étage supérieur - là où sont précieusement conservés mes ouvrages préférés. Je ne fis durer le suspense qu'un instant avant de gravir les marches, pressée de retrouver mes refuges familiers.
En traversant les allées silencieuses, mes pensées se perdirent entre les rayonnages. Il y avait peu de monde à cette heure, la plupart de la bonne société étant occupée à se préparer pour le bal tant attendu de Lady Danbury, marquant l'ouverture officielle de la saison mondaine.

Un sourire attendri se dessina sur mon visage. J'étais impatiente de la retrouver. Lady Danbury est plus qu'un pilier de la haute société - elle est une amie de ma défunte mère, une tutrice durant toute mon enfance, une figure à la fois agaçante et profondément chère à mon cœur.
Toujours prompte à fourrer son nez là où elle ne devrait pas, elle le fait avec un tel panache que je ne peux que l'aimer davantage pour cela.

Un soupir discret m'échappa, teinté d'un soulagement. Une partie sombre de notre histoire était enfin résolue. Simon et moi avons dû affronter nos propres démons, mais grâce à Daphné Bridgerton - douce et forte Daphné - son cœur s'était ouvert l'année dernière. Il est désormais apaisé et heureux. Et secrètement... je rêve qu'un miracle semblable se produise pour moi cette saison.
C'est pour cela que j'ai cédé. Pour cela que j'ai accepté de faire mon entrée cette année.

Je laissai glisser ma main sur une étagère familière. La plupart des ouvrages me sont presque aussi connus que les lignes de ma propre main. Chaque titre évoque une histoire précieuse, un monde dans lequel je me suis perdue, puis retrouvée.
Mais soudain, mes doigts s'arrêtèrent sur un livre... un livre que je ne reconnaissais pas. Il n'était pas là auparavant.

Oh... Enfin une nouveauté.

Je me demande quel écrivain a trempé sa plume pour concocter une histoire aussi prometteuse...?

Je recule brusquement, poussant un léger cri de surprise. Le livre fermement serré contre moi, je croise une paire d'yeux d'un vert pastel étrangement clair, figés sur moi, sans même un battement de paupière.
Seigneur ! Je crois bien avoir manqué de hurler. Cet homme est apparu de nulle part. Je ne l'avais ni vu ni entendu s'approcher de l'autre côté de l'étagère.

Tentant de calmer ma respiration saccadée, je le fixe, interdite.

- « Au revoir. » Souffle-t-il, déjà prêt à s'éloigner.

Je m'approche instinctivement de l'étagère, interloquée.

- « Hé ! Attendez ! » ma voix fend le silence.
« Comment êtes-vous arrivé là sans qu'on vous entende ? Ce n'est pas... habituel. M'espionniez-vous, par hasard ? »

L'homme s'avance, s'arrêtant à ma hauteur, ses yeux me scrutant comme s'il cherchait à m'évaluer.
Un petit sourire moqueur étire ses lèvres.

- « Tss. Rassurez-vous. Vous ne suscitez aucun intérêt suffisant pour que je vous espionne. Je n'ai pas de temps à perdre avec de telles... futilités. »

Mes yeux s'écarquillent à sa réplique. Pardon ? C'est une première. Des hommes prétentieux, arrogants, j'en ai vu passer - mais lui... lui, c'est un cas à part. L'apothéose de l'insolence.
Je fouille ma mémoire : aucun visage familier. Il n'est certainement pas d'ici.

- « Sur ce, soyez gentille et rendez-moi le livre que vous tenez. »

Je secoue légèrement la tête, un petit grognement m'échappant. Baissant les yeux vers l'ouvrage, je reprends contenance.

- « Et pourquoi donc ? Je l'ai pris la première, et je n'ai nullement l'intention de le céder. Il fallait être plus rapide, monsieur. » lançai-je en croisant son regard à travers l'étagère.

Je ne rate pas la crispation sur ses traits. Ma réponse ne lui a manifestement pas plu. Un sourire effronté étire mes lèvres.

J'observe de plus près le livre entre mes mains : une couverture bleu roi, richement bordée, le titre en relief attirant mon attention :
 "Extraordinaire - Ma vie en tant que Numéro 7"
Mais ce n'est pas un roman. C'est une biographie. Mon regard remonte vers l'inconnu, qui semble reprendre contenance avec difficulté.

- « Très bien... Je vais reformuler, plus aimablement. » dit-il, sa voix légèrement plus mesurée.
« Pourriez-vous me rendre ce livre, s'il vous plaît, Miss... ? »

- « Miss Basset. »

- « Bien. Miss Basset, je doute sincèrement que cette biographie vous intéresse. Elle ne vous serait d'aucune utilité. »

- « Et vous, qu'en savez-vous ? Ce livre m'intéresse. Autrement, je ne l'aurais pas choisi. Vous n'avez qu'à repasser quand j'en aurai terminé. »

- « Ne jouez pas avec ma patience, Miss ! Donnez-moi ce livre ou je- »

- « Ou quoi ? » répliquai-je, un sourire narquois aux lèvres.
« Vous allez vous en prendre à moi ? Voilà une belle démonstration de galanterie, vraiment. »

Il marmonne un juron, visiblement agacé. Ses yeux croisent les miens, et il s'approche au point que je peux sentir sa respiration contre l'étagère.

- « D'accord... Changeons d'approche. Que voulez-vous en échange ? »

Je hausse légèrement un sourcil, intriguée. Son insistance, presque désespérée, ne trompe pas.

- « Ce livre semble vous être précieux... Quelle en est donc la valeur à vos yeux pour que vous en arriviez là ? »

- « Vous n'en avez pas la moindre idée. Alors, parlez. Il ne me reste que peu de temps. »
dit-il, en sortant un monocle de sa poche.

Je baisse les yeux sur l'ouvrage, mes doigts effleurant doucement la couverture.

Hum... Il semble y tenir plus que de raison. À sa place, je souhaiterais sans doute qu'on me le rende aussi... Soupir. Qu'est-ce que je ne ferais pas ?

- « Très bien. Tenez. Je ne veux rien en échange. Je ne vais pas abuser de votre... extrême 'gentillesse'. »lançai-je avec une ironie à peine voilée en lui tendant le livre.

Il tend la main, prêt à s'en saisir, mais je le retiens d'un léger geste.

- « À une seule condition. »

Il soupire d'exaspération, mais son regard curieux me pousse à poursuivre.

- « Lorsque vous aurez terminé cette biographie, je veux que vous me la rendiez... en main propre. »

Je le fixe, attendant sa réponse. Mais il arrache brusquement le livre de mes mains.

- « Certainement pas. Tss. Je compte l'étudier. Vous ne l'obtiendrez pas... sauf si je l'en décide, c'est-à-dire : jamais. Sur ce, Miss Basset, bonne fin de journée. Au plaisir... de ne plus jamais recroiser votre chemin. »

Et sans m'accorder un dernier regard, il tourne les talons et disparaît dans l'allée, le livre solidement contre lui.

Je reste là, bouche entrouverte.

Argh ! Il m'a bien eue... Mais bon sang, qui est cet homme ?
Ce n'est pas ainsi qu'un gentleman s'adresse à une demoiselle. Même moi, qui ne demande pas de révérences, j'attends un minimum de respect !
Son attitude, son ton, ce regard à la fois distant et perçant... C'est perturbant. Et pourtant, terriblement intriguant. Il n'a même pas pris la peine de se présenter. Et puis... que faisait cette biographie au beau milieu de mes romans ?

Ahh... Tant de questions, et aucune réponse.

𝑃𝑜𝑣 𝑒𝑥𝑡é𝑟𝑖𝑒𝑢𝑟 :

Cette rencontre impromptue laissa dans l'esprit de notre jeune protagoniste un sillage de doutes et de questions suspendues. Chaque mot échangé, chaque regard, chaque silence... elle ne pouvait s'empêcher d'y repenser, comme à un rêve éveillé. L'étrangeté de l'homme, l'importance presque fiévreuse qu'il semblait accorder à ce livre, tout cela la hantait.

Tandis qu'elle descend les escaliers boisés de la bibliothèque, sa main glissant distraitement sur la rampe, une pensée tenace s'impose à elle : le reverrait-elle ?
Au fond, elle l'espérait. Inconsciemment. Car, après tout, son séjour à Londres ne faisait que commencer.

Devant elle, la ville s'étendait dans une brume légère, pleine de promesses et de secrets. Les pavés résonnaient sous ses pas, les calèches passaient en cadence, et les voix basses des passants tissaient une symphonie urbaine aussi vibrante que mystérieuse. Chaque ruelle semblait dissimuler une histoire, chaque façade murmurait le passage du temps.

Elle s'arrêta un instant, observant les silhouettes élégantes qui allaient et venaient, son esprit revenant inexorablement à cet homme au regard perçant et aux manières... déroutantes.

Puis une pensée la traversa, soudaine et lumineuse : le bal de Lady Danbury. Ce soir.
Une occasion rêvée d'observer, d'écouter, et peut-être... de découvrir.

Un sourire discret se dessina sur ses lèvres. Oui, elle se préparerait pour cette soirée. Elle en avait l'intime conviction : le destin n'avait pas dit son dernier mot. Peut-être qu'au détour d'une conversation anodine ou d'une valse, un nom serait lâché, une vérité révélée. Peut-être qu'il serait là.

En attendant, elle se laissa porter par l'après-midi, flânant au gré des vitrines, des effluves de thé et des murmures de la ville. Ses pensées voguaient entre ce qu'elle venait de vivre... et tout ce qui restait à venir.
Londres, avec ses mystères et son charme insaisissable, s'apprêtait à être le théâtre d'une aventure hors du commun.

𝟷𝟾:𝟹𝟶 - 𝘉𝘳𝘪𝘥𝘨𝘦𝘳𝘵𝘰𝘯 𝘏𝘰𝘶𝘴𝘦

- « En effet, c'est un vrai mystère... Tu peux me rappeler le titre du livre ? Et, tu te souviens du nom de l'auteur ? Un indice quelconque qui expliquerait pourquoi cet homme semblait autant tenir à cette biographie ? » demande Eloise en s'asseyant sur le lit.

- « Oui, raconte tout ! Et surtout ce moment où il t'a quasiment proposé n'importe quoi en échange du livre... C'est si mystérieux ! » enchaîne Pénélope, les yeux brillants d'excitation.

Je relève doucement la tête pour croiser le regard curieux de ma belle-sœur et de son amie. Toutes trois assises en tailleur sur le lit, dans l'ancienne chambre de Daphné qu'Eloise a désormais héritée, nous avons l'air d'un petit cercle de conspiratrices.

- « Eh bien... Je dois avouer que je n'ai pas eu le temps d'examiner le livre en détail. L'homme... Il me mettait tellement de pression pour que je le lui rende... Mais... »

- « Mais ? » font-elles en chœur, penchées vers moi.

- « Certains éléments m'ont frappée. Le titre : "Extraordinaire - Ma vie en tant que Numéro 7"  La couverture bleu roi, assez singulière... Et surtout, une sorte d'emblème : un petit parapluie noir avec les initiales V.H. inscrites juste en dessous. »

- « Un parapluie noir comme symbole... » répète Eloise, songeuse, les yeux rivés dans le vide.

- « V.H... » murmure Pénélope. « Aucune idée de qui cela pourrait être. Aucun visage ne me vient en tête qui corresponde à la description que tu nous as faite de cet homme. »

- « Tu es sûre qu'il avait les cheveux noirs, des yeux verts très clairs, presque pastel, et qu'il semblait plutôt jeune ? » poursuit Eloise, un brin frustrée. « Cet inconnu est un véritable casse-tête ! Et dire qu'il ne t'a même pas révélé son prénom... »

- Soupir. « Tu ne crois pas si bien dire, Eloise... Il m'a complètement soufflée avec son ton sec, presque menaçant, juste pour obtenir ce fichu livre ! »

- « Et en plus, ce livre n'avait rien à faire dans cette section ! » renchérit Pénélope, agacée. « J'espère vraiment qu'un jour on comprendra au moins une partie de tout ça... »

Eloise allait répondre quand la porte de la chambre s'ouvrit brusquement.

- « Ah, vous voilà ! Désolée de vous interrompre, mais il est déjà tard ! Léna, nous devons rentrer pour nous préparer pour le bal de Lady Danbury. Et toi aussi, Eloise. » Daphné entre dans la pièce, visiblement pressée.

Eloise lève les yeux au ciel, un soupir faussement dramatique s'échappant de ses lèvres. Pénélope se lève du lit, arrangeant machinalement ses cheveux.

- « Eh bien, je vous laisse. Mère doit déjà s'impatienter. À ce soir, mes chères enquêteuses ! »

- « Oui, oui... À ce soir, si je ne meurs pas étouffée dans ma robe de bal avant d'atteindre la voiture ! » plaisante Eloise.

Je laisse échapper un petit rire, saluant Pénélope qui quitte la chambre.

- « Ne dis pas de bêtises, Eloise. Je suis sûre que tu seras splendide dans cette robe. Allons-y, Léna, la voiture nous attend ! » m'interpelle Daphné.

- « J'arrive ! » dis-je en attrapant ma pochette. « Et toi, Eloise, tu as intérêt à venir ce soir. »

- « Wow ! Tu me laisses tellement de choix, j'en suis toute émue... » réplique-t-elle avec un faux air de tragédienne.

Je lui adresse une grimace amusée avant de suivre Daphné hors de la chambre. Ensemble, nous descendons rapidement les escaliers pour rejoindre Simon et Amélia dans la calèche en direction de Hastings House.

𝟷𝟿:𝟷𝟻 - 𝘏𝘢𝘴𝘵𝘪𝘯𝘨 𝘏𝘰𝘶𝘴𝘦

- « Est-ce vraiment nécessaire de garder les yeux fermés aussi longtemps... ? » marmonnai-je, les paupières toujours closes.

- « Encore un peu de patience, j'y suis presque ! » s'exclama Laeti avec sa vivacité habituelle.

Je grogne doucement, mon impatience s'accroît alors qu'elle ajuste les derniers détails de ma robe. Lati est bien plus qu'une simple femme de chambre - elle est une amie fidèle, presque une confidente, depuis mon adolescence.

- « Argh... » soufflai-je en soupirant. Eloise a peut-être raison. Pourvu qu'on ne finisse pas toutes étouffées dans nos corsets avant même d'arriver...

- « C'est bon, tu peux ouvrir les yeux ! Regarde-moi ce chef-d'œuvre ! Ce soir, tu vas tous les éblouir ! »

J'ouvre lentement les yeux... et reste un moment sans voix. La robe est magnifique. D'un bleu givré bordé de motifs floraux argentés, elle évoque à merveille le thème du bal : jardin d'hiver.

- « Merci, Laeti... Elle est... somptueuse. J'ai encore du mal à croire que le moment est enfin arrivé. Mon tout premier bal... Mon premier pas vers un éventuel époux... »

- « Hourra ! » rit-elle en tapant des mains. « Je suis plus excitée que toi, j'te jure ! Tu as intérêt à bien profiter ce soir, et surtout, à TOUT me raconter demain matin à la première heure ! Hii ! Tous les hommes n'auront d'yeux que pour toi, ma belle ! Et si la reine ne te désigne pas diamant de la saison... Je me charge de lui glisser deux mots, foi de Laeti ! »

Son enthousiasme m'arrache un éclat de rire. Laeti a toujours eu ce don de faire tomber la pression d'un simple mot.

- « Laeti... ricanais-je. Le pire, c'est que tu en serais vraiment capable, je n'en doute même pas ! »

Elle me  un regard à la fois fier et espiègle, juste au moment où la porte s'ouvrit sur Daphné. Radieuse. Sublime dans une robe ivoire finement brodée, elle semblait sortir d'un rêve.

- « Oh... Woah... Daphné... ! Tu ressembles à une déesse, cette robe te va à ravir ! »

- « Et toi, Léna, regarde-toi ! Tu vas faire tourner toutes les têtes ce soir, crois-moi ! »

- « Oui, votre grâce, c'est exactement ce que je m'efforçais de lui faire comprendre ! » lança Laeti, ravie. « Sur ce, je vous laisse. Appelez-moi si besoin. »

- « Merci, Laeti, » lui dis-je avec gratitude tandis qu'elle nous quittait avec une révérence.

Daphné me fit signe de m'asseoir près d'elle sur le canapé.

- « Alors, comment tu te sens ? Joyeuse ? Nerveuse ? Terrifiée ? » demanda-t-elle en plaisantant légèrement, tentant d'alléger l'ambiance.

- « Je... En toute honnêteté, je ne sais pas. Un mélange de tout ça, sans doute. J'ai peur de faire une erreur, de vous décevoir, ou de ne pas être à la hauteur... »

Elle m'écouta avec bienveillance et prit doucement mes mains entre les siennes.

- « Tu sais... À mon premier bal, j'étais dans le même état. J'avais l'impression que tout pouvait basculer à la moindre maladresse. Mais j'ai appris une chose essentielle : il faut suivre son cœur, rester fidèle à soi-même. Souris, respire, vis l'instant. Tu n'as qu'un seul premier bal, Léna. Ce n'est pas le moment d'être parfaite - c'est le moment d'être toi. »

Un silence doux s'installa, le genre de silence plein de sens, de gratitude et de force.

Daphné a raison. Ce soir, je dois lâcher prise, faire confiance à mon instinct. M'autoriser à vivre pleinement cette soirée, sans chercher à cocher toutes les cases. C'est le début de mon histoire... et je suis prête.

𝟸𝟶:𝟷𝟻 - Bal "Jardin d'hiver" de Lady Danbury

J'observe le lieu tant attendu de ce premier bal mondain à travers la fenêtre de la calèche. Le décor est majestueux. Un frisson me parcourt les bras : cette fois, nous y sommes. Je suis bien décidée à vivre pleinement cette soirée.

La calèche s'arrête, m'arrachant à mes pensées. Daphné descend la première, suivie de Simon qui me tend la main avec sérieux.

- « Hé, Léna, regarde-moi. »

Je me tourne vers lui.

- « Oui, Simon ? Un problème ? »

Il respire profondément avant de parler.

- « Tu n'es plus une enfant, tu viens d'avoir vingt ans, et tu es une magnifique jeune femme. Mais tu portes encore notre nom. Tu es sous notre influence... et sous ma responsabilité. »

Je plisse légèrement les yeux, un sourcil levé.

- « Que veux-tu dire exactement ? »

- «Je veux que tu sois prudente. Très prudente. Si jamais il se passe quoi que ce soit, tu nous mets, Daphné ou moi, immédiatement au courant. C'est important. »

- « Très bien, je vous promets d'être sage. Mais je compte bien profiter du bal sans causer d'ennuis ! »

Son regard s'adoucit, puis il sourit avec un air taquin.

- « Vous avez intérêt, jeune fille, sinon gare à vous. »

Je ris doucement pendant qu'il m'aide à descendre. L'imposante salle de bal s'ouvre devant moi, et l'extérieur, déjà à couper le souffle, promet un intérieur tout aussi somptueux.

- « Alors, prête à vivre ton premier bal officiel ? » me murmure Daphné, accrochée à mon bras.

J'acquiesce, attrapant Simon de l'autre côté, et nous avançons ensemble dans l'allée.

Dès notre entrée, une vague de regards se tourne vers nous. Mon cœur s'emballe. Mais je garde le sourire, comme Daphné me l'a conseillé, et nous traversons la salle avec élégance.

Nous rejoignons rapidement Lady Danbury, entourée de trois femmes devant la piste de danse.

- « Lady Danbury, ravie de vous revoir, » dit Simon.

- « La salle est splendide, et le thème est brillamment pensé ! » ajoute Daphné.

- « Vos grâces ! Quel plaisir de vous voir ! Et qui voilà ? Miss Basset... Vous êtes resplendissante ce soir. Soyez la bienvenue ! »

Je m'avance avec un sourire sincère.

- « Bonsoir, Lady Danbury. Merci infiniment. Daphné a raison, la salle est absolument magnifique. C'est un honneur de vous revoir. »

- « Merci, ma chère. J'ai tout fait pour que ce bal d'ouverture soit mémorable. Et dire que la famille Hastings est enfin réunie à Londres ce soir ! Profitez bien de la soirée, Miss Basset. Restez vigilante, et surtout... ouvrez l'œil pour trouver un prétendant digne de ce nom ! »

Elle ponctue ses mots d'un clin d'œil complice avant de s'éloigner accueillir d'autres invités.

Simon et Daphné s'apprêtent à faire leur tour.

- « Léna, nous allons saluer quelques invités. Amuse-toi, mais sois prudente. Tu sais où nous trouver. »

- « Et n'oublie pas, suit ton cœur ! » ajoute Daphné, un sourire taquin aux lèvres.

Je leur adresse un geste de la main en les regardant s'éloigner, puis je me faufile hors de la grande salle, évitant les premiers prétendants trop empressés.

Mon visage s'illumine à la vue d'Éloïse Bridgerton et Pénélope Featherington dans les jardins. Elles m'appellent, tout sourire.

- « Léna ! Cette robe te va à merveille ! » s'exclame Pénélope.

- « Oui, elle enterre même celles de Cressida et sa clique... » ajoute Éloïse avec malice.

- « Merci les filles ! Et vous aussi, vous êtes ravissantes. »

Soudain, deux gentlemen s'approchent, interrompant notre échange.

- « Mesdemoiselles, bonsoir. Miss Bridgerton, m'accorderez-vous une danse ? »

L'autre s'adresse à moi :

- « Miss Basset, votre robe est... époustouflante. Puis-je vous inviter à danser ? »

Je retiens un soupir, échangeant un regard complice avec Éloïse.

Elle répond avec un air faussement désolé :

- « Navrés, messieurs, nos carnets sont déjà complets. »

Je renchéris avec un sourire théâtral :

- « Oui, vraiment navrée. »

Les gentlemen repartent, déçus. Pénélope étouffe un rire derrière sa main.

- « Et dire que ce n'est que le début... » soupire Éloïse.

- « Vous êtes là depuis longtemps ? » demandé-je.

- « Un peu. J'ai réussi à fuir les filets de ma mère, sinon j'enchaînerais les danses inutiles. »

- « Je compatis... Mais qui sait ? Peut-être trouverons-nous un homme qui sort du lot ! » soufflai-je avec une pointe d'espoir.

- « Tu veux dire, comme lui ? » s'exclame soudainement Pénélope.

Nous suivons son regard. Un homme entre dans la salle, marchant d'un pas assuré. Plus je le fixe, plus la réalité me frappe : c'est lui. L'homme de la bibliothèque. L'arrogant. Le mystérieux. Je ne m'attendais pas à le revoir si tôt...

- « Les filles...? » murmurai-je.

- « Oui, c'est bien lui ! Ton mystérieux inconnu de la bibliothèque ! » dit Éloïse, les yeux écarquillés.

- « Il ressort du lot, c'est clair ! Et s'il était de Londres, on l'aurait reconnu depuis longtemps, » ajoute Pénélope.

Je respire profondément, tentant de remettre mes idées en ordre.

- « Oui... C'est forcément lui. Mais que fait-il ici ?! »

- « Il est sûrement issu d'une grande famille, c'est le seul moyen d'avoir une place ici ce soir, » conclut Éloïse.

Je hoche la tête, mes yeux rivés sur l'entrée du bal. Tout en moi hurle de courir après lui. Les paroles de Daphné résonnent dans mon esprit : Tu n'as qu'un seul premier bal, Léna. Ce n'est pas le moment d'être parfaite - c'est le moment d'être toi.

Mon cœur bat à tout rompre. Ce soir, je ne veux pas hésiter. Je vais obtenir mes réponses.

Sans que je m'en aperçoive, mes jambes s'élancent d'elles-mêmes vers les portes de la salle de bal. Éloïse et Pénélope me regardent m'éloigner, mi-surprises, mi-intriguées.

- « Hé ! Léna ! Où est-ce que tu vas ?! » s'exclame Éloïse, sa voix teintée d'inquiétude et d'agacement.

- « Ne vous en faites pas ! Je vais simplement m'entretenir avec notre cher homme mystère ! » lançai-je en riant, tout en accélérant le pas vers la salle.

Je souris à moitié en entendant les rires et encouragements des filles derrière moi. Mon corps semble animé d'une volonté propre, vibrant d'un mélange d'adrénaline et de curiosité brûlante. Je me faufile à travers la foule, le regard en alerte, déterminée à retrouver cet homme qui a fait chavirer ma logique dans cette fichue bibliothèque.

Mais à mesure que j'avance, l'ambiance autour de moi change subtilement. Des murmures se propagent comme un frisson collectif. Curieuse, je tends l'oreille, et j'apprends bientôt qu'une certaine Miss Sharma aurait giflé en pleine joue le duc de Manchester. Un sourire narquois s'étire sur mes lèvres. Intérieurement, je la félicite - il l'avait sûrement bien mérité.

Je secoue légèrement la tête pour me recentrer. Mon regard furète de tous côtés. Où est-il ? Il me doit des réponses. Mais alors que je ne regarde pas devant moi, je heurte de plein fouet un dos solide.

Mes yeux s'écarquillent lorsque je réalise à qui j'ai affaire : Maître Winslow, un vieil ami de la famille.

Je recule d'un pas, inclinant la tête, embarrassée.

- « E-Excusez-moi... Maître Winslow ! Je ne vous avais pas reconnu. Quelle surprise de vous voir ici ce soir ! »

Il se retourne, un air étonné adoucit ses traits tandis qu'il me scrute - toujours cette différence de taille qui le rend encore plus impressionnant que Simon.

- « Eh bien, Miss Basset, quelle agréable surprise ! Le moment n'est peut-être pas des plus convenables, mais... me ferez-vous l'honneur de cette prochaine danse ? »

Je ris doucement, un peu nerveuse, en balayant la salle du regard. Il approche de la quarantaine, et très honnêtement, il ne m'attire pas. Mais bon... une danse n'a jamais tué personne. Et puis, je ne vois pas le mystérieux inconnu nulle part. Peut-être s'est-il éclipsé. Je soupire intérieurement. Je suppose que mes recherches devront attendre.

- « Très bien, Maître. Je vous l'accorde. C'est... mon tout premier bal officiel, tout ceci est encore un peu nouveau pour moi. »

- « Ne vous inquiétez pas. Une simple danse avec vous suffira à illuminer ma soirée. Je suis persuadé que vous vous débrouillez déjà à merveille. » dit-il avec assurance.

Il m'offre son bras, et je l'accepte, bien que mon sourire soit plus poli que sincère. M'y connaître en danse ? Quelle idée... Je suis bien meilleure en lecture ou en écriture, mais qui donc cela intéresserait-il dans ce monde où une fille n'est estimée que pour sa grâce sur une piste de danse ?

Nous rejoignons la piste. L'orchestre entame un nouveau morceau. D'autres couples s'avancent autour de nous, et très vite, une sensation de malaise s'installe. Maître Winslow me sourit avec tendresse, sans percevoir mon inconfort. Danser avec un homme qui travaille pour mon frère... quelle étrangeté.

Mon regard dérive autour de moi, et soudain, je la remarque. Une jeune femme, en plein milieu d'une danse, avec un partenaire trop insistant. À chaque fois que nos regards se croisent, j'ai l'étrange impression qu'elle m'envoie un appel muet, un cri silencieux que seule une autre femme pourrait entendre.

Bon, Léna. Reprends-toi. Ne réfléchis pas trop. Si j'étais à sa place, j'aurais voulu qu'on m'aide. Alors, pas question de rester là à observer.

La musique touche à sa fin. Je me penche vers Maître Winslow.

- « Merci pour cette danse, Maître. Ce fut un plaisir. »

Avant même qu'il ne réponde, je file en direction de la jeune femme. Je n'attends pas que son cavalier ouvre la bouche - je m'interpose avec grâce et conviction.

- « Pardonnez-moi, mais Miss... est attendue ailleurs. Je me charge de la raccompagner. »

Je saisis sa main avec douceur et la tire avec moi, l'éloignant de cet homme et de l'atmosphère suffocante de la salle. Sans un mot de plus, nous filons vers une sortie donnant sur un immense jardin.

« Ici, au moins, nous trouverons un peu de répit », songeai-je en découvrant un banc dissimulé derrière un rideau de buissons en fleurs.

- « Assieds-toi, je t'en prie. Permets-moi également de te tutoyer », dis-je avec un sourire chaleureux. « À vrai dire, je peine encore à croire ce que nous venons de faire... Abandonner ainsi nos partenaires au beau milieu de la piste de danse ! »

Elle s'installa avec grâce, soulagée, et me répondit dans un souffle :
- « Avec plaisir... Et merci infiniment. Je crois que je n'aurais pas supporté une minute de plus... »

Je pris place à ses côtés, l'observant avec une curiosité sincère avant d'oser :
- « Dis-moi, sans vouloir paraître indiscrète... Cet homme t'a-t-il offensée d'une quelconque manière ? »

- « Pour être honnête... » répondit-elle en baissant les yeux. « On m'a imposé cette danse, et j'ai manqué de courage pour décliner. Quant à lui, il se montrait bien trop familier... Cet homme ne me plaît pas du tout. »

Un éclair d'indignation traversa mon regard.

- « C'est inacceptable. Sois assurée qu'au prochain bal, nous ferons tout pour l'éviter. »

- « Merci, vraiment... J'ai l'habitude de ce genre de situations, malheureusement. »

Je haussai un sourcil, intriguée.

- « Tu sembles pourtant si douce et forte à la fois... Comment parviens-tu à rester si calme ? »

- « Il le faut bien », répondit-elle avec un sourire mélancolique. « Mais trêve de sombres pensées... J'aimerais connaître le nom de mon héroïne ! »

Souriant, je redressai légèrement la tête, consciente du poids du nom que je portais :

- « Je me prénomme Léna, Miss Basset pour les convenances. Mais entre nous, Léna suffira. »

Aussitôt, je la vis se figer, ses yeux s'écarquillant de stupeur.

- « Miss... Léna Basset ? » balbutia-t-elle. « La sœur de Simon Basset, duc d'Hastings ?! »

- « Eh bien... Oui », répondis-je, un peu déconcertée.

Son visage s'illumina.

- « Simon m'a tant parlé de toi lorsque nous étions enfants... Je suis Armélie Sharma ! Ou Armel, pour les amis. »

Je clignai des yeux, surprise par cette révélation.

- « Tu connais Simon ? Mais comment ? »

- « Nous nous sommes rencontrés il y a de nombreuses années. Je n'ai fait que passer à Londres de temps à autre... jusqu'à aujourd'hui. Je viens d'Inde. »

Je laissai échapper une exclamation émerveillée.

- « L'Inde... Cela doit être un pays magnifique. Moi, je n'ai jamais quitté le Royaume-Uni. »

- « L'Inde est un monde vibrant et coloré... Mais ce soir, je suis ravie d'être ici. »

Notre échange fut interrompu par l'arrivée d'un homme dont la simple présence apportait une légèreté inattendue : Benedict Bridgerton en personne.

- « Que vois-je ? Deux jeunes demoiselles conspirant à l'abri des regards ? » lança-t-il avec un sourire espiègle. « Et voici donc la mystérieuse héroïne du bal ? »

Je ris doucement tandis qu'Amel rougissait légèrement.

- « On raconte que tu as giflé un duc ce soir », plaisantai-je en chuchotant.

- « Ce n'était pas prémédité », répondit-elle, embarrassée. « Il a eu des propos déplacés... Et mes nerfs ont parlé avant ma raison. »

Benedict éclata de rire, manifestement admiratif.

- « Une femme de caractère, voilà qui est rafraîchissant ! »

Je me levai pour les présenter :

- « Benedict, je te présente Miss Armélie Sharma. »

- « Enchanté, Miss Sharma », déclara-t-il en s'inclinant élégamment.

Armel sembla de nouveau troublée, ce qui me fit sourire.

- « Allons, Benedict n'est pas si effrayant », le taquinai-je.

- « Je m'efforce d'être charmant, pourtant », protesta-t-il avec fausse indignation.

Armel, retrouvant son aplomb, répondit :

- « Non, non, ce n'est rien ! C'est juste que... j'ai croisé votre frère Anthony plus tôt aujourd'hui. Quelle drôle de coïncidence de rencontrer deux Bridgerton dans la même journée ! »

- « Ah, si vous saviez... Rencontrer un Bridgerton est souvent le signe que toute la fratrie n'est pas loin ! » dit Benedict en riant.

Je ne pus m'empêcher d'ajouter, malicieuse :

- « Et de découvrir que chacun d'entre eux a son petit défaut... »

- « Calomnie ! » feignit-il de s'offusquer.

Nous éclatâmes de rire. Puis, d'un geste théâtral, Benedict tira de sa veste une petite flasque en argent.

- « Un peu de réconfort liquide, mesdemoiselles ? »

Armélie ne se fit pas prier.

- « Moi, je dis oui, après tout ce qui s'est passé ce soir ! »

Je regardai la scène, hésitante. Mais les conseils de Daphné résonnèrent en moi : suis ton cœur.. Et si mon cœur me disais : Alors pourquoi pas quelques gorgées ?

- « À ce bal... plutôt désastreux, donc ! » proposai-je avec un rire nerveux.

- « Désastreux ? Nous allons le rendre plus amusant ! » s'exclama Benedict.

Armel prit sa première gorgée, grimaçant légèrement.

- « Wow... ton whisky est... particulier ! Mais pas si mauvais ! »

- « C'est du bon vieux whisky, rien de mieux pour survivre à ces soirées mondaines ! » répondit Benedict.

J'avalai aussi quelques gorgées, appréciant malgré moi la chaleur qui se propageait dans ma gorge.

- « Doucement, ma chère ! Laisse-en un peu pour ton beau-frère préféré ! » plaisanta-t-il.

Je ris doucement et lui tendis le flacon.

- « À cette soirée, donc ! » lança Armel, de plus en plus à l'aise.

- « Oui, à cette soirée et à l'idée de ne plus trop prendre ces bals au sérieux ! » ajoutai-je.

- « À nous, et à notre discrétion ! » déclara Benedict. « Car croyez-moi, si vos proches apprenaient que je vous encourage à ne pas chercher un mari, je serais un homme mort ! »

Nous éclatâmes de rire, tandis qu'Armel réclamait une nouvelle gorgée.

Après quelques verres, Armel, exaltée, proposa :

- « Venez, allons marcher un peu... La musique est devenue insupportable ici ! »

Je lui pris le bras, ravie de cette idée.

- « Excellente suggestion ! Benedict, tu suis ? »

- « Bien sûr, je ne vais pas vous laisser seules dans ce grand jardin ! » répondit-il, amusé.

Le jardin, baigné dans la lumière dorée des lanternes suspendues aux branches, semblait soudain devenir notre royaume secret. Nous avancions entre les massifs de roses et les statues de marbre, comme des enfants s'échappant d'un bal d'adultes.

Nous traversâmes les jardins en fleurs, riant ensemble, lorsque Benedict soupira :

- « Ahh... Quelle délivrance ! Échapper aux mères acharnées à caser leurs filles, voilà mon plus grand bonheur ce soir ! »

Armel acquiesça vivement.

- « Je comprends... Lady Danbury s'est mise en tête de me trouver un mari convenable... Je n'en peux plus ! »

Je me retournai vers elle, étonnée :

- « Lady Danbury ? Oh, je l'adore, même si elle est redoutable ! »

- « Elle est une amie proche de la famille, mais oui... Elle est redoutable ! » approuva Amel.

- « Lady Danbury est un vrai phénomène... Heureusement qu'elle n'est pas là pour entendre nos critiques ! » plaisanta Benedict.

- « Oui, elle nous ferait passer un sale quart d'heure ! Mais, s'il te plaît, Benedict, appelle-moi Armel ! »

- « Très bien, Armel ! » dit-il en riant. « Et Léna, veux-tu finir le flacon ? »

Je pris la flasque avec un sourire narquois et vidai les dernières gouttes.

- « Argh... J'y aurais bien repris goût, tu sais ! » plaisantai-je.

Benedict éclata de rire :

- « Avec vos robes, je suis sûr que vous pourriez dissimuler tout un bar sans que personne ne s'en aperçoive ! »

- « Benedict Bridgerton, tu es incorrigible ! » répondis-je, faussement outrée.

Benedict rit de bon cœur avec Armélie à ma remarque.

- « Hmm... Peut-être bien, mais n'oublie pas que je reste ton beau-frère préféré~ ! » s'exclama-t-il avec une espièglerie tout à fait Bridgertonienne.

Je roulai ostensiblement des yeux en lui donnant un léger coup de coude, feignant l'agacement. À mes côtés, Amélie étouffa un petit rire avant de soupirer d'une frustration théâtrale.

- « Ah... N'empêche, nous voilà à court de remontant, maintenant. » Elle jeta un regard désolé à la flasque vide. « La prochaine fois, je suivrai peut-être ton idée, Benedict : ramener un flacon d'alcool dans nos robes ne serait pas si mal. »

Je plaquai une main faussement outrée contre ma poitrine.

- « Oh là là, Amel ! Tu n'es pas sérieuse, j'espère ? » dis-je en riant doucement. « Tes deux sœurs... ta mère ! Tu imagines leur réaction si elles découvraient une flasque dissimulée sous ta robe ? Eheh... Et surtout pas au prochain bal donné par la Reine demain soir ! »

Benedict, le regard pétillant, renchérit immédiatement :

- « Et pas que ! Imaginez donc... » dit-il en agitant les mains d'un air dramatique, « ...le flacon glissant malencontreusement sous votre jupon, et tombant avec fracas aux pieds d'un prétendant éperdu ! »

À peine avait-il terminé que nous éclatâmes tous les trois d'un rire sincère, l'image mentale étant beaucoup trop délicieuse pour être ignorée.

Le poids des convenances, l'étouffement des attentes semblaient soudain bien loin ; seuls demeuraient la complicité et cette délicieuse ivresse, aussi bien dans nos esprits que dans l'air tiède du jardin.

Mais soudain, un éclat de voix perça la nuit - strident, reconnaissable entre mille.
Cressida Cowper.

Je ne pus empêcher une grimace instinctive, immédiatement remarquée par Amélie et Benedict, qui s'efforcèrent de contenir leur fou rire.

- « Oh non... » soufflai-je en secouant la tête.

- « On dirait que nous avons de la compagnie », marmonna Benedict, scrutant les haies au loin.

Il baissa la voix, adoptant un ton plus sérieux :

- « On ferait mieux de se disperser. Je vais tenter de faire diversion. Séparez-vous et essayez de revenir discrètement au bal. »

D'un même mouvement, Amélie et moi hochâmes la tête. Puis, dans un bruissement léger de soie et de tulle, nous nous dispersâmes dans deux directions opposées, nos cœurs battant d'une exaltation nouvelle.

Je courus à travers les allées du jardin, veillant à ne pas faire trop de bruit malgré ma robe entravante. Le froid de la nuit effleurait mes bras nus, mais l'adrénaline me tenait étrangement au chaud.

Enfin, essoufflée, je ralentis. Un petit lac miroitait sous la lumière pâle de la lune, et, au bout d'un pont de bois délicatement ouvragé, se dressait un ravissant kiosque.
Je m'y dirigeai, le pas plus lourd, sentant soudain l'alcool faire son œuvre.
Un léger fou rire me prit sans raison. Mon estomac me chatouillait ; ma vision se brouillait un peu.

- « Oh non... » murmurai-je en m'appuyant contre la rambarde du pont.

Le monde tournait lentement autour de moi, comme si la danse que j'avais fui continuait à me poursuivre dans ce coin isolé du jardin. Les étoiles elles-mêmes semblaient danser au-dessus du lac.

Je tentai de reprendre contenance, me mordant la lèvre pour ne pas éclater de rire à nouveau, mais tout semblait si... absurde et merveilleux à la fois.

- « Wow... Eh eh... mince... Ahaha... » balbutiai-je, la voix pâteuse sous l'effet de l'alcool. « Je ne pensais pas que l'alcool me ferait... Ahahah - oh, misère ! Oups - pardon - pfff... Ahah... Eh bien, si un jour... eheh... je tente de cacher de l'alcool sous ma robe, je le glisserai sous mon corset. Aucune... aucune... chance qu'il tombe - ehe - ahhh ! »

Mon rire s'étrangla dans ma gorge alors que l'une de mes chaussures heurta une roche dissimulée sous l'herbe. Je perdis l'équilibre, et avant même d'avoir le temps de crier, je basculai de tout mon poids dans un buisson de roses.

- « Ahhh... Merde... Aïe- Pourquoi- ahh... Ce genre de chose n'arrive- argh- maintenant... Merd- ah... »

Des épines acérées griffèrent ma peau, s'accrochant à ma robe, mes gants, mes cheveux... Chaque mouvement me tirait des gémissements de douleur mêlés de frustration.

Piégée comme une vulgaire poupée de chiffon dans un cauchemar végétal, je finis par appeler, la voix suppliante :

- « Oh ?? Heyy ! Hello ?! Quelqu'un est là ?? S'il vous plaît, j'ai besoin d'aide ! »

Les pas précipités que j'entendis approcher semblèrent répondre à mes prières. Un soupir, puis deux bras solides saisirent mes poignets avec fermeté. En une traction experte, je fus arrachée du piège épineux.

Je grimaçai tandis que les branches s'accrochaient une dernière fois à ma robe, abandonnant au passage mes pauvres gants. Essoufflée, échevelée, griffée de toutes parts, je relevai enfin les yeux vers mon sauveur... pour sentir mon cœur bondir dans ma poitrine.

- « Attendez... Vous !? » m'écriai-je, éberluée.

L'homme face à moi - ce mystérieux inconnu de la bibliothèque - me dévisagea, oscillant entre l'incrédulité et l'agacement manifeste.

- « Comment se fait-il que, parmi toutes les personnes sur lesquelles je pourrais tomber... ce soit encore vous. J'ai l'impression de vivre une mauvaise blague. »

Il glissa les mains dans ses poches, l'air exaspéré, marmonnant pour lui-même :

- « Qu'ai-je donc fait au destin pour mériter cela ? »

Je restai figée, incapable de croire à une telle coïncidence. Ou peut-être... un signe du destin ?
Je toussotai pour masquer mon trouble, tentant de reprendre contenance.

- « Eh bien... Pas de chance pour vous, monsieur. Je dirais au contraire que le destin fait bien les choses. Il se trouve que je vous cherchais justement plus tôt dans la soirée. J'aurais quelques questions à vous poser concernant- »

- « Stop. » Il leva une main sèche pour m'interrompre. « Je vous arrête là, Miss. Je ne répondrai à aucune question. Et surtout pas à une petite fille incapable de marcher droit. Un simple "merci" et "au revoir" suffiraient. »

- « Hein ? Petite fille ?! Comment osez-vous- »

Je fis un pas en avant, furieuse, et dans mon élan, le flasque caché dans ma robe tomba lourdement à ses pieds. L'homme baissa les yeux, ses sourcils arqués d'un air aussi surpris que narquois. Il ramassa le flasque, le tournant entre ses doigts.

- « Oh... Regardez ce que nous avons là. Une petite fille qui veut jouer dans la cour des grands... » susurra-t-il en me jetant un regard moqueur.

Rouge de honte, je redressai la tête avec toute la dignité que je pouvais encore rassembler.

- « Hum... Et alors ? Je ne suis pas une petite fille. Et vous ne savez rien de moi pour oser me juger ainsi ! »

Il me tendit le flasque avec un détachement glacial avant de tourner les talons. Piquée au vif, je m'écriai :

- « Quoi, vous allez encore fuir ? Comme toujours ?! »

Il s'immobilisa net. Sans se retourner, il répondit d'une voix calme mais vibrante d'une tension contenue :

- « Vous croyez vraiment que c'est de la fuite ? Peut-être que je choisis simplement les batailles qui méritent d'être livrées. »

Je serrai les poings, bouillonnant de colère.

- « Donc selon vous... je ne vaux même pas la peine d'une bataille ? » soufflai-je, défiant.

Finalement, il pivota, revenant lentement vers moi. Ses yeux sombres accrochèrent les miens sans ciller.

- « Rassurez-vous. Cela signifie exactement ce que cela semble signifier. Vous êtes insignifiante, princesse. Désolé de vous l'apprendre. »

Je crispai ma mâchoire sous l'insulte à peine voilée. Je fis un pas vers lui, réduisant l'espace entre nous.

- « Comment osez-vous être aussi grossier et méprisant envers moi, monsieur... !? Vous m'appelez princesse comme une insulte, et vous me jugez sans rien savoir de moi. Cela me déçoit de votre part. »

Il plissa les yeux, son sourire moqueur s'effaçant légèrement.

- « Déçue de moi ? » répéta-t-il dans un rire bref, sans chaleur. « Vous ne me connaissez même pas assez pour être déçue. Vous autres, enfants dorés de la haute société, croyez être uniques... mais au final, vous suivez tous le même chemin. Vous vous cachez derrière vos titres et vos jolies robes. »

Il s'approcha encore, si près que je pouvais sentir la tension électrique entre nous.

- « Quant à ce surnom... princesse... » Il pencha la tête, son regard brûlant. « Il semble vous atteindre plus que vous ne le prétendez. Aurais-je effleuré un point sensible ? »

Je restai pétrifiée, tiraillée entre l'envie de lui répondre avec rage et celle, inexplicable, de... céder à cette tension.

- « Vous... Vous ne savez rien de moi. » ma voix trembla légèrement sous l'intensité du moment. « Vous ne savez pas ce que je vaux, ni ce que j'ai dû affronter. Vous ne pouvez pas réduire ma vie à vos préjugés. »

Il haussa un sourcil, visiblement amusé par ma véhémence, mais son regard restait sombre.

- « Peut-être. Ou peut-être que je comprends bien mieux que vous ne l'imaginez. »

Soudain, des voix retentirent au loin. Il détourna brièvement la tête, l'oreille tendue.

- « On reprendra cette bataille plus tard. » sa voix était ferme.

Avant que je puisse protester, il me prit la flasque des mains, me désigna un grand arbre d'un signe du menton et ajouta :

- « Cachez-vous. Et ne discutez pas. »

À contrecœur, je lui obéis, me faufilant derrière le tronc tout en jetant un dernier regard vers lui, mon cœur battant à tout rompre, incapable de comprendre pourquoi ce mystérieux inconnu parvenait à me faire ressentir tant de choses à la fois.

𝑃𝑜𝑣 𝐸𝑥𝑡𝑒́𝑟𝑖𝑒𝑢𝑟 :

Tandis que Léna, dissimulée derrière un arbre, retenait son souffle, l'inconnu - toujours empreint de cette nonchalance insolente qui semblait lui coller à la peau - s'avança d'un pas tranquille vers les nouveaux arrivants.

Un couple d'une quarantaine d'années, bras dessus, bras dessous, flânait dans les allées, riant doucement, insouciant comme des promeneurs égarés dans un rêve.

Sans se presser, l'homme mystérieux porta à ses lèvres le flasque qu'il avait subtilisé, feignant de boire avec un naturel désarmant, l'air de celui que rien n'atteint.

- « Tiens donc... » murmura-t-il d'une voix teintée d'amusement. « Je ne m'attendais pas à croiser un couple dans ce coin reculé. »

Il ajouta, plus fort, d'un ton presque charmant :
- « Bonsoir. »

Le mari, un homme à la moustache bien taillée et à l'œil rieur, répondit à son salut, curieux mais sans malice.

- « Bonsoir, mon ami. Que faites-vous ici, seul, à une heure aussi avancée ? Vous cherchez quelqu'un, peut-être ? »

Avant qu'il n'ait pu obtenir une réponse, sa femme, vive et espiègle, éclata d'un petit rire cristallin.

- « Oh voyons, chéri. Regarde-le ! » s'exclama-t-elle en tapotant affectueusement le bras de son époux. « Ce jeune homme est simplement venu boire un verre en cachette. Quel coquin ! »

L'inconnu esquissa un sourire, faussement pris en faute, jouant à la perfection son rôle.

- « Votre épouse a l'œil, monsieur. Je cherchais juste un coin tranquille pour savourer un peu de liberté... loin des obligations et des regards insistants. »

Le mari rit de bon cœur, d'un rire franc et complice, comprenant ce besoin universel d'échapper, ne serait-ce qu'un instant, aux mondanités.

- « Eh bien, vous avez bien raison, mon cher ! » dit-il en jetant un regard tendre à sa femme. « Mais faites attention de ne pas abuser des bonnes choses. »

Il pencha la tête légèrement, comme pour donner un conseil paternel :

- « Avec un peu de chance, vous trouverez, vous aussi, une personne pour égayer vos nuits... comme la mienne égaye les miennes. Bonne soirée à vous ! »

Après un dernier sourire aimable, le couple reprit son chemin, s'éloignant à pas feutrés dans les ténèbres parfumées du jardin.

L'homme mystérieux resta immobile un instant, jouant son rôle jusqu'au bout. Puis, lentement, son regard glissa vers l'endroit où Léna se cachait.

Ses yeux, sombres et insondables, brillaient d'un éclat difficile à interpréter - un subtil mélange d'amusement, d'irritation... et peut-être, d'une once d'intérêt.

Alors que le couple s'éloignait dans l'ombre du jardin, leurs éclats de rire se fondant peu à peu dans le silence nocturne, l'homme resta figé un instant.

Son regard sombre demeura fixé sur l'endroit où Léna était tapie, un mince sourire naissant sur ses lèvres.

- « Bon, t'as assez joué à cache-cache, princesse, » murmura-t-il, sa voix basse se fondant dans la brise nocturne.

𝑃𝑜𝑣 𝐿𝑒́𝑛𝑎 :

À ses mots, je poussai un soupir de soulagement, puis sortis de ma cachette, froissant au passage quelques feuilles mortes sous mes pieds.
Je rejoignis l'inconnu, entendant au loin ses jurons marmonnés contre le couple - ce qui me tira un sourire amusé malgré moi.

Lorsqu'il se retourna enfin, ses yeux glacials croisèrent les miens. Toujours aussi distant. Pourtant, sous cette carapace d'indifférence, je perçus une lassitude nouvelle, presque imperceptible.

Je pris la parole, calmement, rassurée de voir que l'incident s'était clos sans éclat :

- « Wow... Il s'en est fallu de peu ! »

Il ricana doucement, ce même sourire moqueur ourlant ses lèvres, et me tendit la flasque avec une désinvolture provocante avant de replonger les mains dans ses poches.

- « Croyez-moi, c'est la première et dernière fois que je vous couvre. Voici votre "whisky". »

Je grognai légèrement en récupérant l'objet maudit, l'enfouissant prestement dans un pli de ma robe. Mon ton devint plus défensif, blessée par sa remarque :

- « Vous avez dû nous couvrir tous les deux, je vous signale ! Et puis... je ne connais même pas votre titre, que je sache... »

Il m'interrompit sèchement, me coupant net :

- « Mon titre n'a aucune importance pour vous. »

Je clignai des yeux, déconcertée par la brutalité de sa réponse.
Son ton n'était pas seulement sec, il était tranchant, presque... amer ?

Pourtant, au lieu de reculer, je persistai, m'efforçant de rester calme.

- « Peut-être, mais vous êtes ici, tout comme moi. Si vous n'avez rien à cacher, pourquoi refuser de me dire qui vous êtes ? »

Il soupira lourdement, visiblement excédé par mon insistance.
Son silence, aussi pesant que du plomb, m'encercla, me poussant à tenter de lire ce visage fermé - en vain.

Quand enfin il ouvrit la bouche, ce fut pour abattre d'un coup sec ce qu'il restait de mon espoir :

- « Peu importe. Je ne vous dois rien, princesse. »

Il me fixa avec une lueur de dédain, son regard me traversant comme une lame.

- « Cessez d'être aussi persistante et agaçante... On dirait une vraie petite fille, je le jure... »

Ses mots me frappèrent de plein fouet.
Un feu d'épuisement et de frustration monta en moi, brûlant dans mes veines. Ma chute dans les rosiers, mes égratignures, l'alcool dissipé - tout pesait soudain plus lourd.

Je serrai les poings, sentant ma gorge se nouer, mais je n'allais pas lui donner la satisfaction de me voir faiblir.

Je pris une grande inspiration, la voix vibrante d'un contrôle précaire :

- « Très bien, la "petite fille" va vous laisser, » crachai-je d'un ton sec, refoulant ma colère.
« Vous êtes l'homme le plus déroutant que je connaisse. »

Je grommelai ces derniers mots pour moi-même, frustrée au plus haut point.
D'un geste rageur mais digne, je soulevai l'ourlet abîmé de ma robe et tournai les talons, m'éloignant à grands pas vers le petit ponton qui menait au kiosque près du lac.

Chaque foulée m'allégeait un peu plus du poids de sa présence, mais en même temps...
Un vide grandissait en moi, difficile à ignorer.

Pourquoi sa présence me troublait-elle autant ?
Et pourquoi, malgré toute cette colère, avais-je encore envie de comprendre qui il était vraiment ?

𝑃𝑜𝑣 𝐸𝑥𝑡𝑒́𝑟𝑖𝑒𝑢𝑟 :

Léna s'éloignait, ses pas rapides résonnant faiblement sur les pavés du jardin.

L'homme resta immobile, les mains enfoncées dans les poches, son regard sombre accroché à la silhouette fuyante de la jeune femme.

Un souffle d'agacement passa sur son visage, mais il ne bougea pas tout de suite.
Il laissa le silence retomber autour de lui, repensant à leurs échanges, à cette fougue, à cette insistance insupportable... et pourtant étrangement rafraîchissante.

Un ricanement bref franchit ses lèvres, presque amer.

- « Petite idiote... » murmura-t-il, sans vraiment de méchanceté.

Puis, au bout de quelques secondes, il se décolla enfin de l'ombre du grand arbre sous lequel il était resté caché.
Discrètement, il se mit en marche, suivant Léna à distance.

Elle ne se doutait de rien.

Le sentier serpentait jusqu'au petit kiosque en bois au bord du lac, baigné d'une lumière pâle.
De là, il l'observa sans bruit, caché par l'épaisseur des arbres.

Léna s'était assise sur le banc du kiosque, ramenant ses jambes contre elle pour échapper à la fraîcheur de la nuit.
Ses traits tirés, ses blessures encore visibles, elle semblait lutter contre la fatigue... puis, lentement, sa tête bascula contre le pilier de bois derrière elle. Elle s'endormit, épuisée.

Un long moment passa.

Il resta encore un instant à observer la jeune femme assoupie, son visage apaisé par le sommeil.
Puis, sans un bruit, il se détourna, se fondant dans la nuit comme une ombre.

Seules les feuilles agitées par le vent témoignèrent de son passage.

...

𝒯𝑜𝓊𝓉 𝒶𝓋𝒶𝒾𝓉 𝒸𝑜𝓂𝓂𝑒𝓃𝒸𝑒 𝓅𝒶𝓇 𝓊𝓃𝑒 𝒸𝒽𝓊𝓉𝑒, 𝓊𝓃𝑒 𝒻𝓁𝒶𝓈𝓆𝓊𝑒 𝒹'𝒶𝓁𝒸𝑜𝑜𝓁, 𝑒𝓉 𝓊𝓃 𝓇𝑒𝑔𝒶𝓇𝒹 𝒾𝓂𝓅𝑜𝓈𝓈𝒾𝒷𝓁𝑒 à 𝑜𝓊𝒷𝓁𝒾𝑒𝓇.

𝒜 𝓈𝓊𝒾𝓋𝓇𝑒.

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