Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Nameless0401
Share the book

15 – Ce Qu’un Regard Ne Dira Jamais

Il y a des choses que les mots refusent de dire.
Des vérités qu’on n’ose pas nommer.
Des départs qu’on ne formule pas.
Mais que les yeux avouent, malgré nous.

Un regard, c’est souvent la première chose qu’on partage.
Avant même de parler, on se rencontre par les yeux.


On s’y plonge.
On s’y accroche.
On s’y comprend, parfois.
Et puis, un jour, sans crier gare, ce regard change.
Il s’éloigne.
Il glisse.
Il devient vague, absent, fuyant.

On dit que les yeux ne mentent pas.
Mais ce n’est pas tout à fait vrai.
Ils ne mentent pas, mais ils se taisent autrement.
Ils détournent, ils se figent, ils regardent ailleurs.
Ils disent "je ne suis plus là", sans le dire.

Il faut du courage pour soutenir un regard quand on ne ressent plus rien.
Et encore plus pour le soutenir quand on sait qu’on est en train de blesser.
Alors on regarde à côté.
On regarde l’assiette, la rue, le téléphone.
On évite les yeux qui nous cherchent.
Parce qu’on sait que si l’on s’y attarde, on devra dire quelque chose.
Et parfois, on ne sait pas quoi dire.
Ou on ne veut pas.

Quand on ne regarde plus quelqu’un qu’on a aimé,
ce n’est pas par distraction.
C’est souvent parce qu’on ne veut pas affronter la trace de ce qu’on a détruit.

Le regard contient tout.
L’amour, la peur, l’absence, la tendresse, la fuite.
C’est un miroir qui ne pardonne pas.
On peut contrôler sa voix, ses gestes, même son sourire.
Mais les yeux, eux, trahissent.

Ils révèlent la lassitude.
Ils révèlent l’agacement qu’on tente de masquer.
Ils révèlent la distance qui s’est creusée sans bruit.

Et pourtant, combien de fois a-t-on continué à espérer un regard ?
Combien de fois a-t-on voulu y lire encore ce que l’on y lisait au début ?
Combien de fois a-t-on soutenu un regard vide,
en priant pour y voir un reste d’éclat ?

On ne dit pas assez à quel point un regard absent fait mal.
C’est une forme de silence particulier.
Il ne résonne pas comme une phrase.
Il ne claque pas comme un mot cruel.
Mais il s’installe.
Et il pèse.

Quand on ne se regarde plus, on commence à se perdre.
Pas d’un coup.
Mais doucement.
L’un s’éloigne,
l’autre attend,
et les regards ne se croisent plus qu’en surface.

Il y a ceux qui continuent à regarder, même quand l’autre détourne les yeux.
Ce sont souvent les plus blessés.
Ils cherchent.
Ils insistent.
Ils espèrent qu’à force de regarder, ils seront enfin vus.
Mais on ne force pas un regard.
On ne tire pas un regard vers soi comme une corde.
Il vient ou il ne vient pas.

Il y a dans l’attente d’un regard une forme de supplication silencieuse.
Un "vois-moi" muet.
Un "dis-moi que je compte encore".

Et quand ce regard ne vient pas,
on apprend à se contenter de moins.
D’un battement de cil.
D’un regard jeté par habitude.
On se dit que c’est déjà ça.
Mais ce n’est rien.
C’est juste une illusion.

Ce que le regard ne dit plus, le corps le ressent.
Et l’âme s’en souvient.

On oublie parfois qu’aimer, c’est aussi se voir.
Se regarder vraiment.
Pas juste se croiser.
Pas juste se tolérer.
Mais voir l’autre avec attention, avec douceur, avec présence.

Quand on se regarde vraiment,
on dit "je te reconnais".
"Je suis là".
"Tu existes pour moi".

Mais quand le regard devient mécanique,
quand il traverse sans s’arrêter,
quand il évite,
alors l’amour s’est déplacé, ou éteint.

Ce n’est pas forcément de la malveillance.
Parfois, c’est juste de l’usure.
Du désintérêt tranquille.
De la fatigue relationnelle.
Mais pour celui qui attend encore,
ce regard manqué est une blessure lente.

On reste, souvent, parce qu’on se souvient d’un regard.
Un regard du début.
Un regard qui disait tout.
On pense qu’il va revenir.
Qu’il est juste perdu un moment.
Qu’il se cache.

Mais les regards perdus ne reviennent pas toujours.
Et certains ne savent plus regarder.
Parce qu’ils n’en ont plus le besoin, ni le désir.

Alors on se rend invisible à force de vouloir exister.
Et c’est là que l’on commence à se quitter soi-même.

Ce chapitre n’est pas là pour accuser.
Il est là pour éclairer.

Tu mérites un regard entier.
Un regard qui ne te traverse pas comme une ombre.
Un regard qui s’arrête sur toi avec curiosité, tendresse, attention.

Si tu sens que tu cherches sans cesse ce regard,
alors pose-toi.
Demande-toi si tu veux encore mendier ce qui devrait être offert.
Demande-toi si ce regard est devenu un leurre.

Il n’y a pas d’amour sans regard.
Et il n’y a pas de lien durable sans cette reconnaissance continue.
Un regard qui dit :
"Je te vois."
"Tu comptes."
"Tu es encore là pour moi."

On ne peut pas bâtir une relation avec quelqu’un qui regarde toujours ailleurs.
Même s’il dit qu’il t’aime.
Même s’il reste.

Ce n’est pas la présence physique qui fait l’amour.
C’est la qualité de la présence.
Et souvent, elle commence par les yeux.

Tu ne mérites pas un regard par intermittence.
Tu ne mérites pas des yeux qui se posent sur toi seulement quand tu t’éloignes.
Tu ne mérites pas de devoir provoquer l’attention.

Tu mérites un regard qui te cherche quand tu n’es pas là.
Qui s’éclaire quand tu entres.
Qui reste posé, même dans le silence.

Et si tu n’as plus ce regard,
alors il est peut-être temps de fermer les yeux toi aussi.
Pas pour fuir.
Mais pour te retrouver.

Fermer les yeux, ce n’est pas renoncer.
C’est décider de ne plus te nourrir d’un vide.
C’est te rappeler que tes propres yeux aussi comptent.
Que ton regard sur toi est aussi un début de guérison.

Alors, la prochaine fois que tu sentiras que tu regardes quelqu’un qui ne te voit plus,
ne force pas.
Ne supplie pas.
Ne te perds pas.

Tourne-toi.
Et cherche ce regard qui te reconnaîtra sans que tu aies à le provoquer.

Un regard vrai.
Un regard simple.
Un regard qui ne dira peut-être pas "je t’aime",
mais qui, par sa seule intensité, te dira :
“Je suis là. Et je te vois.”

Comment this paragraph

Comment

No comment yet