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IlonaBell
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Chapitre 2

  MINJUN

민준

Au crépuscule

  Cette inconnue est là, à côté de moi, tout en ayant une distance de quelques mètres. Elle me fixe d'un œil rond. Je me demande pourquoi elle me fixe de cette manière aussi dérangeante, mais je m'en fiche en fin de compte. 

   Le bus finit par arriver, je monte en premier, cette fille vient après. C'est perturbant d'être observé de la sorte. Elle n'a donc aucune gêne ? Je ne devrais pas y faire attention. 

   Le bus est blindé comme à son habitude. Depuis le temps que je le prend, je l'ai jamais vu vide, durant les horaires où je le prend en tout cas. 

   Cette fille est comme légèrement bronzée, sacré différence avec moi. Je suis blanc comme un cachet d'aspirine. Puis elle a de longs cheveux châtain avec une frange. Des boucles d'oreilles dorées. J'imagine qu'elle n'a pas de parapluie. Sa chemise est trempée malgré la veste qu'elle porte sur son dos. Et sa jupe, plissée, courte au-dessus des genoux, n'arrange pas les choses. Elle tremble, mais la chose qui me dérange le plus c'est que je ne l'ai jamais vu prendre cette ligne. Jamais. Donc sans surprise, elle se retrouve debout en s'agrippant à la barre de fer. Voilà pourquoi c'est bien de garder les habitués, les autres finissent souvent debout ou alors l'inverse. Un vrai problème.

   Arrivé à mon arrêt je descends immédiatement, je remarque qu'elle aussi. Cette personne n'est vraiment pas discrète pour le coup.

   J'observe du coin de l'œil la vitrine à ma droite, histoire de tenter de savoir qui me prend en filature. Encore cette fille. Elle me suit j'ai l'impression. Je dois faire semblant de ne pas la voir. Qui sait ? Elle cache peut-être une arme. Un couteau ? Je dois être prudent, même les femmes peuvent attaquer. Il n'y a pas que les hommes qui doivent être considérés comme une menace à mon avis.  

   Je commence à stresser, mon cœur s'affole et tambourine contre ma cage thoracique. J'en ai des frissons.

   J'ai réussi à atteindre la porte de l'immeuble. Je regarde le reflet de la vitre, je ne la vois plus. Je commence à avoir peur putain. Ça va aller. Je tourne la tête en tremblant, je la vois devant la porte de l'immeuble d'à côté. Elle habite là ? Dans ma rue ? Le même trottoir ? Juste à côté de mon immeuble, là où j'habite ? Punaise, je l'ai pas vu venir celle-là. Plus de peur que de mal. J'ai eu peur pour rien au final. Je soupire avant de rentrer. 

   À peine entré chez moi que mon chien me saute dessus, je tombe à la renverse sur mon tapis et me voilà attaqué de léchouille baveuse ! 

— C'est bon, c'est bon, calme toi je suis rentré. 

   Il se lève puis recule tandis que je me redresse pour être assis, une main sur ma jambe dressée. Je souffle un peu puis me lève.

— Je t'ai manqué ? 

   Je souris avant de l'attaquer de gratouille, il s'allonge sur le ventre aussitôt. Je retrouve mon appartement après une belle frayeur ! 

   Donc, cette fille habite à côté ? Jamais je n'y aurai cru, puis je ne l'ai jamais vu non plus à part aujourd'hui. Après, je ne peux pas connaître mes voisins en plus des locataires de l'immeuble d'à côté.

Il n'y aurait aucun intérêt. 

   Je suis crevé, j'ai envie de dormir. Je m'écroule sur mon lit mais mes pensées se dirigent sur autre chose. La console. Après mûre réflexion je me dis : une partie et je pars dormir.

   Je me lève brusquement, réveillé par mon chien qui s'est avachi sur moi pour me réveiller. C'est pas pour rien qu'on dit qu'ils sont intelligents. C'est véridique. Je m'habille précipitamment, pas le temps de me coiffer. Seulement de m'habiller.   

   Je pars brusquement de l'appartement puis verrouille la porte. Pourquoi ça passe pas ? Je tremble et comme un imbécile je loupe le verrou.

   Enfin ! Réussi.

— Bonjour Monsieur Kim ! Me salue la voisine. Alors ? On se lève du mauvais pied ?

— Le gauche ? Oui. Comment allez-vous Madame ?

— Bien, merci mon garçon. Maintenant dépêchez-vous, vous me semblez pressé avec le temps ! Rigole-t-elle.

— Oui merci madame, au revoir ! Je bredouille avant de partir.

  C'est l'une des plus vieilles dames de mon étage, elle est gentille et drôle. Je ne m'attache pas aux personnes âgées en général, ni aux gens d'ailleurs, mais cette dame a le don de me mettre à l'aise, de me mettre à l'aise.

Je marche dans la ville, je me précipite à grandes enjambées vers la fac. Je suis à la bourre ! Foutue réveil. Je sens mon téléphone vibrer. Ce n'est pas le moment. Une seconde, deux secondes, trois secondes, quatre secondes et puis zut ! Je prend mon smartphone pour regarder qui a bien pu m'envoyer un message alors que je suis pressé. Le nom affiché en grand sur l'écran de la notification: Maman.

Rien que de lire ça, ma tête bourdonne. Je prends même pas le temps d'ouvrir la notification, j'ai pas envie de lire ou même regarder son message. 

   J'entre dans le bâtiment principal de l'école, je bouscule quelqu'un sans faire gaffe. 

— Désolé.

— T'inquiète. Minjun c'est ça ?

   Le noir de grande taille au sweet blanc me regarde avec un sourire de travers comme s'il pensait avoir écorché mon prénom. 

— C'est ça.

   Il se met soudainement à soupirer avant de sourire puis me dire:

— J'ai eu peur ! Je croyais avoir mal prononcé !

— Contrairement à d'autres tu écoutes, t'es peut-être le seul à bien prononcer mon prénom.

— C'est coréen c'est ça ? 

— Ouais c'est ça.

   Soudain, il tend sa main vers moi avant de me dire:

— Moi c'est Ethan.

— Enchanté.

   Je sers sa main en retour, il a une poigne d'enfer. Voyant mon expression, il me dit:

— Je suis dans le club de basket, d'où la force de mes mains t'inquiète.

— J'avais deviné.

— Tu viens ? On va en cours ! s'exclame-t-il.

  J'en avais presque oublié qu'il était dans ma classe. Ce qui est surprenant c'est qu'il arrive à prononcer mon prénom contrairement aux profs ou aux autres. Marcher à côté de lui donne une sensation étrange, l'impression d'être devenu un minimoys à côté. Il doit faire deux mètres ce gars, c'est pas possible autrement, ou alors je suis trop petit. Ce n'est pas surprenant qu'il soit basketteur, il me semble l'avoir déjà vu sur le terrain mais je fais pas gaffe. Je ne suis pas particulièrement ouvert et sociable.

   On s'assoit à une table. Je comptais m'asseoir seul mais il m'a fait signe pour venir avec lui alors je n'ai pas pu dire non.

— Je peux te poser une question ?

— Ouais bien sûr ! s'exclame-t-il.

— Comment tu sais que mon prénom est Coréen ?

— Facile ! La façon de prononcer ressemble au Coréen ! 

— Personne n'a deviné à part toi, j'affirme d'un air suspicieux. Tu es louche...

— Moi ? Louche ? 

Premier signe: Rigole nerveusement.

Deuxième signe: fuit mon regard.

Troisième signe: Tape en continue sa main sur la table. Très agaçant d'ailleurs.

— Bon d'accord j'avoue. Il m'arrive de regarder des k-drama par moment...

— Tu dis k-drama quand tu en regardes un peu ?

— Oui bon OK, j'en regarde h24 mais sérieux c'est une dinguerie ces séries ! Sweet home tu l'as vu ? Un chef d'œuvre !

— Je ne regarde pas de k-drama.

   Ses yeux s'écarquillent brusquement, choqués de la révélation que j'ai faite. Il me regarde sans un mot avant de crier:

— Mais comment ? 

— Ethan Stewart ! hurle le professeur. Asseyez-vous ou allez dans le bureau du directeur !

— Désolé monsieur !

   Il s'assit puis recommence à me regarder avant de me redemander, en chuchotant cette fois-ci:

— Mais comment tu peux ne pas en regarder ? C'est impossible, t'es un monstre mec ! 

— Ça ne m'intéresse pas voilà tout, je suis pas trop série en plus.

— T'as jamais vu Stranger Things non plus alors ? C'est américain en plus. Et The Penthouse ? C'est LA série à voir mec !

— Rien vu de tout ça.

— Mec, soupire t-il. T'es pas humain. 

   Durant l'heure, il n'a pas arrêté d'être dans ses réflexions. Il ne m'a pas posé plus de question que ça, je suppose que c'est enfin finit l'interrogatoire. Ça n'a jamais été mon délire les séries, c'est trop long. En plus de ça on regarde juste, il n'y a aucune action. On utilise simplement le cerveau et les yeux pour ça mais on n'utilise pas les mains par exemple ! Jouer à un jeu vidéo c'est comme regarder un bon film ou une bonne série sauf qu'on est dans l'action. Lorsque je joue à The Last of us, c'est comme regarder une bonne série ! Ça me procure le même effet mais en mieux.C'est pour ça que je trouve ça meilleur. Largement mieux !

   À peine sortie de la salle qu'Ethan recommence à me poser des questions comme:

— Mais comment c'est possible ? Ça vient de ton pays d'origine mec !

— Je suis d'origine coréenne mais je suis né en France, rien de plus.

—Tu fous quoi alors de tes journées si tu ne regardes pas de films ou de séries ?

— Je joue aux jeux vidéo.

   Il soupire de joie avec un large sourire puis s'exclame avec des yeux brillants:

— Là, tu me parles !

   Je souris malgré moi en regardant ses grands airs, ses gestes iconiques. Un peu de sociabilité ne fait pas tant de mal que ça en fin de compte.

   Arrivé à la cantine, on n'est pas seul. Il y a ses potes, d'autres joueurs de basket. Je ne me sens pas à ma place ici, ils sont tous là entrain de rire et de parler. Moi, je ne parle pas. Je mange, c'est tout, rien d'autre, rien de plus, rien de moins. Je commence à me sentir de trop, mais surtout agacé par le boucan que les gens font à la cantine, alors je prends mon plateau puis part pour le vider. 

   Les gens sont si bruyants ici et tous logés au même endroit, les casiers. C'est l'endroit même où je suis obligé de bousculer les gens pour passer, si je suis polie on ne m'écoute pas ou alors on ne m'entend pas. 

— Bah alors pourquoi t'es parti ? me demande-t-il après avoir couru pour me rejoindre.

— C'est trop bruyant, je pourrais presque devenir claustro dans cette cantine.

— Ah ouais ? Je comprends. On mangera dehors la prochaine fois si tu veux.

— Si tu veux. 

   Je n'ai pas tellement l'habitude d'être entouré, alors je ne suis pas habitué à ce qu'une personne veuille manger avec moi. J'ai parfois l'impression de faire pitié.

— Dit. Je te fais pitié ? Je lâche sèchement.

— Non pas du tout, répond-il en faisant des gestes.

— OK.

— Je trouve juste que t'as l'air cool alors je suis venu vers toi, bredouille-t-il.

   Il ne me dit pas tout. Je le sens mais je m'en fou. Je ne suis pas compliqué, si on me cache des trucs c'est OK. Je ne vais pas chercher plus loin même si ça me concerne car j'ai tout simplement pas l'envie de me battre davantage. Je dois déjà me gérer et ça, c'est un boulot à temps plein. 

— Alors, on se revoit demain ?

— Ouais.

   Il me fait un grand signe de la main avant de partir en courant, de rentrer chez lui j'imagine. Je ne vois pas l'intérêt de courir alors je préfère marcher, je profite du vent. Le vent frais qui frôle ma peau, qui tente de passer à travers mes vêtements pour me congeler comme un mister freez. Un vent qui semble doux à la première sensation mais qui en réalité peut être meurtrier selon la température. Cependant, jamais je n'ai ressenti de la douleur par rapport au froid. Sauf une fois. Un jour enneigé, en hiver pendant les vacances, il y avait de la brume et les lacs étaient complètement gelés. Recouverte de glace particulièrement froide et fragile. Je ne veux même pas y penser, ça me déprime plus qu'autre chose. 

   Je passe toujours par le fleuve, pour le longé. L'atmosphère qui y réside me détend, un sentiment particulièrement étrange. Souvent, je m'y arrête et en général c'est le mercredi comme je finis à midi. Je m'arrête pour prendre mon carnet avant de dessiner le paysage. Je dessine toujours le même, ce fleuve. Seulement, le ciel change alors il n'est pas jamais identique à celui d'hier ou de la minute d'avant. Avant que la nuit tombe, j'y vais aussi. Pile quand le soleil s'endort car il a une couleur particulière comme une immense flamme qui s'éteint. Rien qu'en regardant la couleur orange du couché de soleil, on ressent sa chaleur. C'est dur à expliquer mais quand on la voit, on comprend ce que j'avance. Le levé de soleil, quant à lui, est plus doux avec la couleur bleu clair qui apparaît et les nuages blancs mélangés à sa couleur. Ces deux ciels sont ceux que je préfère dans la journée. 

***

   Cette fois-ci, on a mangé dehors. Comme il l'avait dit hier en fin de compte. Je pensais qu'il aurait oublié mais non, je me suis trompé. Alors je me retrouve dans les gradins en extérieur avec lui, qui mange brutalement son sandwich et ses chips. Je suis plus dans la dégustation quand je mange, c'est sacré. Cependant, lui, c'est tout le contraire. 

   Soudain il se met à tousser, lâche sa nourriture pour se frapper le torse.

   Je me lève aussitôt puis me positionne dans son dos.

— Continue de tousser et fais pas gaffe à ce que je fais.

   Je tire soudainement son ventre trois fois fortement, le soulevant presque, il finit par recracher son bout de sandwich, le criminel de cette affaire.

— Oh la frayeur, soupire-t-il. Merci mec, tu m'as sauvé ! 

— De rien, je réponds avant de m'asseoir pour recommencer à manger.

— C'était quoi ce que tu m'as fait ? 

— La méthode Heimlich, c'est un geste de premier secours quand quelqu'un s'étouffe. Comme toi il y a deux secondes.

— C'est une dinguerie ! Tu m'as sauvé mec ! S'exclame-t-il en rigolant nerveusement.

— Je vois pas ce qui t'impressionne là dedans…

— Hé les gars ! Crit-il à ses potes qui jouent sur le terrain. Ce gars m'a sauvé la vie les mecs !

   Soudain, ils se mettent tous à hurler de joie en levant les bras en l'air pour sautiller comme des lapins et se taper de joie entre eux. Je les regarde blasé tandis qu'Ethan fait bouger les gradins en sautant lui aussi. Faite que je sois en vie et que ça ne s'écroule pas.

   J'ai fini par partir, j'ai un truc à faire. Il a essayé de m'en dissuader mais j'ai persisté à y aller alors avant que je m'en aille il s'est précipité pour enregistrer son numéro sur mon smartphone et le mien avec.

   Les autres sont en cours, il n'y a pas trop de monde à cette heure-là aux casiers. C'est mieux comme ça je trouve. Alors que je m'approche de la salle du club, dans un autre couloir bondé, je la vois de nouveau. Cette fille au teint bronzé, celle que j'ai vu avant-hier soir dans mon bus habituel. Je la reconnais.

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