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Julia_Roswell
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Chapitre 8

Le sable fouettait l’air dans un souffle rauque, soulevant des nuées de poussière brûlante derrière eux. Leurs jambes les portaient à peine lorsqu’ils tombèrent sur l’entrée étroite d’une grotte, à moitié ensevelie sous des débris et des roches sculptées par le temps. Sans réfléchir, Nova s’y engouffra, entraînant Elian avec elle.

Ils rampèrent dans l’obscurité, haletants, jusqu’à ce qu’ils trouvent un renfoncement plus large, protégé du vent et invisible depuis l’extérieur. Là, enfin, ils purent s’arrêter. Le silence tomba, étouffé par les parois rugueuses et le sable qui se déposait lentement autour d’eux.

Elian s’adossa à la roche, tremblant légèrement. Sa respiration saccadée trahissait une peur qu’il ne cherchait même plus à dissimuler. Il passa une main dans ses cheveux humides, puis la laissa retomber sur sa cuisse. Nova, toujours agenouillée face à lui, le regarda un moment sans rien dire.

Puis elle s’approcha doucement et vint glisser ses bras autour de lui. Un geste simple, presque maladroit. Mais Elian se laissa faire, appuyant sa tête contre son épaule, les paupières lourdes. Il n’avait plus la force de se cacher.

— On est en sécurité ici, murmura Nova contre sa tempe. Juste un peu de repos… juste quelques heures.

Il hocha la tête sans répondre, les doigts crispés autour de sa veste. Elle sentait son cœur cogner dans sa poitrine, tout proche du sien. Lentement, sa respiration se calma.

Les heures passèrent, bercées par les craquements lointains du vent et les souffles réguliers de leur sommeil entrecoupé. Ils se tenaient toujours l’un contre l’autre, à la fois pour la chaleur et pour le réconfort que personne d’autre ne pouvait leur offrir.

Quand le jour commença à se lever, une lueur pâle filtra par l’entrée de la grotte. La chaleur grimpa vite, rendant l’air plus lourd, plus sec. Nova entrouvrit les yeux, les bras encore autour d’Elian.

Il l’observait déjà, en silence, le regard fatigué mais étrangement apaisé. Leurs visages n’étaient qu’à quelques centimètres. Elle sentit son souffle sur sa joue.

— Tu m’as sauvé… souffla-t-il, presque honteux.

— Tu l’aurais fait pour moi, répondit-elle tout bas.

Le silence n’était plus aussi apaisant. Il était chargé de questions qu’aucun des deux n’osait poser immédiatement. Nova repoussa une mèche de cheveux collée à son front et s’assit, les jambes ramenées contre elle. Elian, toujours à moitié allongé, gardait les yeux fixés sur l’entrée de la grotte, comme si les bêtes pouvaient surgir à nouveau.

— Tu crois qu’elles nous ont suivis jusqu’ici ? demanda-t-il enfin, la voix rauque.

Nova secoua la tête.
 — Je ne pense pas. Elles chassaient… en groupe. Mais pas comme des animaux. Elles nous ont vus, oui, mais elles semblaient… attendre. Nous tester.

Elian serra la mâchoire, puis se redressa à son tour, posant ses avant-bras sur ses genoux.
 — On aurait dit qu’elles communiquaient. Pas comme des chiens ou des loups. Comme si elles nous reconnaissaient.

Nova frissonna.
 — Peut-être qu’elles sentent d’où on vient. Velmoria… Notre odeur. Nos vêtements.

— Alors on est repérables.

Un silence s’installa, ponctué par un bourdonnement sourd venant de l’extérieur, preuve que la chaleur montait déjà. Nova prit une gorgée d’eau de sa gourde avant de la tendre à Elian.

— Il faut qu’on trouve un moyen de ne pas attirer leur attention, la nuit, dit-elle. Si elles réagissent à notre odeur, on pourrait camoufler nos affaires avec du sable. Ou… utiliser de la cendre ? Ou même de l’huile ? Je sais que les anciennes troupes faisaient ça pendant la Guerre. Camoufler les pistes.

— Ou dormir dans des endroits en hauteur, répondit Elian. Elles sont rapides, mais je doute qu’elles grimpent bien. Et on pourrait couvrir l’entrée de nos abris… comme celui-là, avec des roches ou des débris.

Nova hocha lentement la tête.
 — Et pas faire de feu. Même si on crève de froid.

— Surtout pas. Elles verraient la lumière à des kilomètres.

Un autre silence. Moins pesant, plus pragmatique. Ils construisaient quelque chose ensemble, même dans la peur. Une stratégie. Une façon de survivre.

— Tu crois que c’était des mutants ? souffla Elian, les yeux perdus dans l’ombre. Ou… autre chose ?

Nova ne répondit pas tout de suite. Elle pensa à leurs yeux brillants dans l’obscurité. À leurs mouvements coordonnés. À cette impression d’être jugés.

— Peut-être qu’elles sont ce qu’il reste de ceux qu’on a oubliés, murmura-t-elle. Ceux que Velmoria a laissés dehors, sans se retourner.

Elle sentit Elian se tendre à côté d’elle. Mais il ne répondit pas. Et quelque chose dans ce silence lui dit qu’il pensait la même chose.

Ils restèrent ainsi quelques minutes, puis Nova tourna doucement la tête vers lui, un léger sourire au coin des lèvres, malgré la peur encore présente.

— Promets-moi juste une chose, dit-elle.

— Laquelle ?

— Que si on croise ces choses à nouveau… tu ne m’abandonnes pas.

Il la regarda droit dans les yeux.


 — Je ne pourrais pas. Même si je le voulais. Tu fais partie de moi.

Elle esquissa un sourire, presque imperceptible, puis leva les mains pour venir encadrer doucement le visage d’Elian. Ses paumes, un peu rugueuses à cause du sable, vinrent effleurer ses joues. Elle déposa un baiser sur son front, léger, chargé de tout ce qu’elle n’arrivait pas à dire à voix haute. C’était tendre. Silencieux. Trop plein de choses enfouies.

Ce n’était ni le lieu, ni le moment. Ils avaient une mission. Un but. Elle ne pouvait pas se permettre de se perdre dans ce qu’elle ressentait, ou ce qu’elle pensait ressentir. Et puis… c’était Elian. Son Elian. Celui qui l’avait vue pleurer, rire, se relever. Son meilleur ami, son frère de cœur. Pourquoi, alors, tout semblait vaciller aujourd’hui ? Pourquoi son regard lui brûlait les entrailles et son absence lui faisait peur ?

Elle secoua la tête comme pour en chasser ces pensées, se forçant à remettre de l’ordre dans son esprit. Il fallait avancer.

Un soupir s’échappa de ses lèvres alors qu’elle se redressait. Elle attrapa la main d’Elian dans la sienne, plus par besoin de contact que par nécessité, puis récupéra leurs affaires avant de quitter la grotte qui les avait protégés le reste de la nuit.

Le soleil pointait à peine au-dessus de l’horizon. Les ombres étaient longues, la lumière encore douce, presque dorée. L’air, bien que déjà chargé de chaleur, restait respirable.

— On en est où avec ta boussole ? demanda-t-elle sans le regarder, les yeux fixés sur la plaine devant eux.

Elian sortit l’objet accroché autour de son cou et grimaça.

— On a dévié vers l’Est quand on a fui. On doit repartir par là-bas.

Il désigna du doigt une vaste étendue qui s’étirait jusqu’à une ligne de montagnes floues à l’horizon. Une plaine immense, écrasée de silence et de soleil.

Nova se mordit la lèvre. La distance à parcourir semblait infinie. Mais ils n’avaient pas le choix. Ils devaient marcher, et vite, avant que le jour ne devienne trop brûlant.

Ils se remirent en route. Le sable peu à peu fit place à une terre craquelée, dure, zébrée de crevasses sombres comme des cicatrices ouvertes. Dans le ciel, des vautours tournaient lentement, leurs cris rauques et stridents résonnaient comme un mauvais présage.

Leurs pas, lourds, s’enfonçaient dans la poussière. Leurs souffles sifflaient à l’unisson, confondus avec le murmure du vent qui soulevait leurs cheveux en mèches folles. Chaque pas les rapprochait un peu plus des montagnes qui se découpaient à l’horizon, silhouettes acérées dans la brume de chaleur. Le soleil, impitoyable, grimpait lentement dans le ciel, et la sueur glissait en perles salées le long de leurs tempes, de leurs nuques, traçant sur leurs peaux des chemins brûlants.

Le temps semblait s’étirer comme les ombres au sol. Plus ils avançaient, plus la chaleur devenait une chape de plomb sur leurs épaules. La terre, craquelée par la sécheresse, renvoyait des vagues brûlantes qui mordaient leurs chevilles à chaque pas. Le silence était pesant, brisé seulement par le froissement de leurs pas et le cri lointain d’un charognard solitaire.

Elian, bien que transpirant à grosses gouttes, gardait un rythme constant. Son corps, habitué à la chaleur des sous-sols de Velmoria, à l’humidité des chaufferies et aux fours qu’il entretenait après les cours, encaissait mieux que celui de Nova. Il jetait régulièrement des coups d’œil à la rousse, sans dire un mot. Elle, elle luttait. Son souffle devenait plus court, plus heurté. Ses joues étaient en feu, et ses jambes semblaient plus lourdes à chaque foulée.

Puis, tout à coup, elle chancela.

Elian eut juste le temps de tendre les bras pour la rattraper avant qu’elle ne s’effondre dans la poussière brûlante. Son cœur se serra.

— Nova ! murmura-t-il, la voix rauque d’inquiétude.

Elle essaya de se redresser, mais ses bras tremblaient, ses yeux papillonnaient sans vraiment voir. Il la prit contre lui, une main dans ses cheveux trempés de sueur, l’autre calée sous ses épaules.

— J’peux continuer… murmura-t-elle, mais sa voix n’était qu’un souffle.

— Non. Tu vas t’écrouler pour de bon. T’as besoin d’ombre et d’eau.

Il regarda autour de lui, cherchant le moindre abri. Plus loin, un renfoncement dans une paroi rocheuse offrait une maigre protection contre le soleil. Il la souleva doucement dans ses bras, comme il l’avait fait des années plus tôt, quand elle s’était foulée la cheville dans les escaliers de l’école. Elle était plus légère qu’il ne l’aurait voulu.

— T’as toujours été forte, Nova, mais là, laisse-moi te porter un peu.

Il l’installa à l’ombre, prit la gourde de son sac et humidifia un tissu qu’il posa contre sa nuque. Elle ferma les yeux, les traits tirés par l’épuisement.

— Désolé… souffla-t-elle. J’pensais pouvoir tenir.

— T’as déjà tenu bien plus que beaucoup. Mais on n’est pas obligés de tout porter seuls. Pas avec moi.

Il resta là, à ses côtés, le bras autour de ses épaules, guettant le moindre signe d’amélioration. Et malgré la chaleur, malgré la peur, il se promit que rien ni personne ne la lui arracherait.

Le silence fut brisé par un grondement sourd. Au début lointain, presque confondu avec le vent. Puis plus distinct. Régulier. Mécanique. Des moteurs.

Elian se figea, l’oreille tendue. Nova, toujours allongée dans la maigre ombre, ouvrit les yeux.

— T’as entendu ? murmura-t-elle, la voix encore rauque.

Il hocha la tête, se redressant à moitié pour scruter l’horizon. Au loin, une traînée de poussière montait dans le ciel comme une cicatrice sur le bleu cru du désert. Puis, il les vit : plusieurs fourgons blindés, de type militaire. Lourds. Sombres. Ils roulaient en file droite sur la terre aride, direction nord-est… là où eux-mêmes auraient dû aller.

Elian plissa les yeux. Tous les conducteurs visibles, tous les passagers sur les plateformes arrière… des hommes. Aucun uniforme reconnaissable de Velmoria, ni d’autre cité connue. Juste des visages graves, des armes prêtes, des regards tournés vers l’avant comme s’ils savaient exactement où ils allaient.

Nova tenta de se redresser.

— Il faut y aller. Ils vont peut-être vers Ash, Elian. Ils savent peut-être quelque chose… ou alors ils lui veulent du mal.

Elle s’appuya sur son coude, mais vacilla aussitôt. Elian l’arrêta doucement, posant une main sur son épaule pour la maintenir au sol.

— T’es pas en état, Nova. T’as besoin de récupérer encore un peu.

— Mais si on les perd de vue… !

— Je vais y aller. Juste jeter un œil, voir vers où ils filent. Je laisse mon sac avec toi. Si dans une heure je ne suis pas revenu, tu reprends la route à ton rythme, d’accord ?

Elle serra les dents, la frustration brillant dans ses yeux. Mais elle savait qu’il avait raison. Elle n’était qu’un poids dans cet état, et s’obstiner ne servirait personne.

— Fais attention, murmura-t-elle.

Il hocha la tête, lui caressa rapidement la joue, puis prit une gourde et sa boussole avant de se faufiler hors de l’ombre. Le soleil lui tomba sur les épaules comme une enclume, mais il avança en silence, courbé, glissant entre les rochers et les crevasses, toujours en direction des fourgons dont les moteurs s’éloignaient lentement.

Nova resta seule, le souffle court, la gorge sèche. Ses yeux rivés sur la poussière qui s’élevait au loin. Une angoisse sourde s’installa dans sa poitrine.

Elian, reviens-moi…

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2 Comments

5 days
Plein de mystère avec ces véhicules 👀
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5 days
ouiiii
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