Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Seka54
Share the book

La vie à un prix...

La mienne, semble-t-il, n’en a aucun. Elle ne pèse rien dans la balance du destin, rien dans les consciences de ce monde. Et pourtant, je persiste. Non par espoir, ni par foi, mais par cette obstination viscérale propre aux êtres que l’on a privés de tout, sauf de leur volonté de tenir debout, encore un jour, encore une nuit.

Les médecins d’Artoval, drapés dans leurs toges d’arrogance, m’appliquent des bandages inutiles, me gavent d’infusions tièdes aux senteurs fades, pensant calmer une douleur qu’ils ne comprennent pas. Leurs plantes humaines — celles qu’ils vénèrent comme des panacées — n'ont aucun effet sur moi. Le poison qui me ronge est ancien, subtil, tenace. Il coule en moi comme un fleuve souterrain, inodore mais implacable.

Je leur ai parlé des montagnes de Settek — hautes terres oubliées, brumeuses et redoutées, là où croissent les herbes que nul ici ne connaît, sinon dans les récits que l’on croit mythiques. Je leur ai décrit les feuilles argentées de la Vireline, dont les extraits peuvent purifier les veines même après les morsures de l’ombre. Je leur ai parlé du Sernoréa, cette fleur qui ne s’ouvre qu’à la lumière des deux lunes, et dont la sève seule peut suspendre les ravages de certains venins.

Mais le roi d’Artoval, tout engoncé dans sa superbe et son sceptre vide de sagesse, m’a ri au visage. Il m’a écouté d’un air condescendant, avant de me congédier comme un charlatan ou un fou.

Il ne voit en moi qu’un être venu d’ailleurs, un vestige d’un passé ou d’un futur qu’il rejette. Mes savoirs — issus d’un monde que leur science ne saurait concevoir, d’une époque que leurs chroniques ont effacée — sont pour lui source de malaise, non de respect. Ma maîtrise des plantes, du combat, de la survie, de la traque, de la symbiose avec la nature, ne vaut rien à ses yeux. Ici, tout ce qui dépasse la norme effraie, et tout ce qui effraie doit être réduit au silence.

Dans ce royaume figé dans sa suffisance, l’étranger est une anomalie, et l’érudit, une menace. Le savoir ancien, incarné, vivant, est traité comme une superstition. La vérité est ici une herbe que l’on arrache, de peur qu’elle ne pousse trop haut.

Alors je marche seul, blessé mais debout. La souffrance est devenue mon ombre fidèle. Je n’attends plus qu’un signe, un souffle, ou une étoile assez téméraire pour m’indiquer la voie vers les montagnes interdites. Là-bas, peut-être, je trouverai non seulement le remède à mon mal… mais la preuve que cette vie, que l’on dit sans valeur, en possède une que nul roi ne pourra jamais estimer.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet