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Chapitre 6

— C'était juste stupide, gronda Archeus.

Décidément, Riley ne l'avait jamais réellement vu en colère. L'extérieur de la petite cabane imaginaire s'était assombri, mais il ne flancha pas. C'était surprenant, mais son passager clandestin ne lui faisait pas peur. Il roula sur le côté, le vrillant de son regard. Peut-être que les récents événements l'avaient rendu un peu plus téméraire, il devait se l'avouer. Être potentiellement en danger de mort aidait, aussi.

— À t'entendre, je commence à me demander si tu as réellement envie de sauver les miens, le piqua-t-il.

Le regard d'Archeus se fit moins ombrageux et l'alien prit une grande inspiration avant de venir s'asseoir à côté de son hôte.

— Je suis désolé. Je ne veux pas être insensible au sort de tes compagnons, commença-t-il. Mais j'ai eu... peur.

Riley arqua un sourcil. C'était bien la première fois que son passager lui exprimait aussi clairement ses émotions. Il s'adoucit. Peut-être devenait-il réellement plus humain, après tout ?

— Je suis toujours en vie, c'est ce qui compte, non ? marmonna-t-il.

Archeus garda le silence et Riley finit par fermer les yeux.

***

Du coin de l'oeil, je vis Andrew qui se chamaillait avec Paul, ce qui me fit momentanément sourire. Parfois, je me demandais comment ils pouvaient aussi facilement oublier dans quelle galère nous étions tous. Quoique... Pour la première fois, nous pouvions souffler un peu plus. Et nous avions de vrais lits, et un toit sur la tête. C'était un luxe inespéré, après plus de deux mois à se battre pour nos vies contre ces êtres venus d'ailleurs.

Je m'étais réveillé trois jours après qu'on ait failli de tout perdre. Eilonwy était traumatisée, et Arya avait abandonné son attitude distante avec moi, même si nous ne communiquions que par monosyllabe la plupart du temps. J'avais fini par comprendre qu'elle se sentait coupable de m'avoir tiré dessus, plus que ce qu'elle ne voulait le montrer. Parfois, je pouvais paercevoir ses yeux hantés, tournés vers des souvenirs inaccessibles. Je ne lui en voulais pas. Elle pouvait arrêter de se flageller mentalement.

Seulement parce que c'était un accident.

Était-ce une tentative d'humour ? Je crus presque entendre Archeus grommeler dans son coin, alors que je rigolais doucement.

Heureusement, il n'y avait pas eu d'autres attaques de Possédés. Je ne ressentais aucune présence près de la ferme, ce qui me soulageait. Le groupe pouvait commencer à se détendre, même s'il y avait beaucoup à faire. J'avais appris que pendant mon inconscience, Isobel avait mis la main sur ce qui alimentait les grilles autour de la propriété - et elle s'amusait follement. Des panneaux solaires et tout un système pour en produire à petite échelle au besoin. Le vieux bougre était plutôt bien équipé. Jack l'aviat enterré à quelques mètres de la maison. Il ne rstait presque plus rien du carnage dans celle-ci, mise à part une tache sombre sur le parquet et une fenêtre condamnée.

Et pour mon état ? Jack m'avait avoué que pendant un instant ils avaient cru que j'allais claquer, à cause de la perte de sang monstrueuse. Mais j'avais tenu bon, et je savais, secrètement, que c'était grâce à Archeus.

Je n'ai pas tout fait. Tu voulais vivre.

Je préférais ne pas débattre sur ce point.

Arya m'avait menacé, au bout d'un moment, de ne pas me lever jusqu'à ce qu'elle me donne son feu vert. Mais, après quelques heures à tergiverser, je n'avais pu résister et avais demandé à Paul de m'aider à m'installer sur le perron de la vieille maison. La douleur avait été terrible et j'avais dû persuader le trentenaire de ne pas rebrousser chemin. Il avait fini par me laisser me reposer et profiter de l'air frais, observant le manège du reste du groupe.

C'était vraiment curieux. Je trouvais incongrue l'idée de rester ici quelques temps, et pourtant, Jack avait pris la décider de le faire. Mais, pour notre santé mentale, c'était une occasion inespérée. Et, de toute manière, je ne pourrais pas aller bien loin maintenant.

— Tu ne devrais pas être là.

Heureusement, ce n'était que Jack, et non sa soeur. Il dut lire le soulagement dans mon regard, car il éclata d'un rire tonitruant.

— Oh, elle sait que tu lui as désobéi. Elle se retient pour ne pas te cogner et aggraver ton cas, fit-il.

Un sourire goguenard étira mes lèvres puis je me crispai, traversé par une vague de douleur. Les anti-douleurs que m'avaient donnés Arya commençaient à ne plus faire effet. J'avais insisté pour qu'elle ne m'assomme pas avec ceux-ci ; il fallait les économiser aussi longtemps que possible.

— Non mais, plus sérieusement, tu devrais rester allongé, reprit Jack, un pli inquiet sur le front.

Je ne répondis pas, reportant mon attention sur les alentours.

— On va rester longtemps ici ? demandais-je plutôt, même si je connaissais déjà la réponse.

Je devinais aisément ce qui traversait l'esprit de Jack. Nous resterions ici, si tout va bien. Si rien ne venait nous tomber dessus. Mon côté pessimiste - ou bien était-ce celui d'Archeus ? - me faisait douter de ce calme apparent. Jack eut un sourire qui balaya mon hésitation. Oui, profitons du moment.

Ma position devenait inconfortable et je tentai de me redresser légèrement. La grimace s'étalant sur mes lèvres ne passa pas inaperçu. Jack se releva, me surplombant de sa grande stature.

— Allez, au lit maintenant !

Je grommelai pour la forme, n'aimant pas qu'on me parle comme à un enfant, mais il n'avait pas tort. Cette simple sortie m'avait épuisé, et la douleur commençait vraiment à se faire intense. Je n'opposai aucune résistance lorsque le géant m'aida à me relever. J'aperçus au loin Arya qui regardait dans notre direction. Aux abris !

Aidé d'Archeus, je pus me plonger dans un sommeil réparateur… Peut-être un peu trop réparateur.

J’avais l’impression de me reposer à nouveau dans la cabane isolée, mais mon corps était si lourd que je n’avais pas envie de me lever. À travers mes paupières mi-closes, je ne voyais pas Archeus, ce qui ne m’inquiéta nullement. Le temps s’était suspendu, jusqu’au moment où j’eus l’impression d’à nouveau tout ressentir. Avant de pouvoir me redresser, je me sentis propulser hors de cet espace mental particulier, pour revenir dans le monde réel.

Lorsque je rouvris une paupière, sentant une présence dans la petite chambre, la première que je constatai fut que la nuit était tombée. Puis, je vis Marco. Ou plutôt son regard perplexe, penché au dessus de moi.

— Marco ? grommelai-je, la voix pâteuse.

— Arya m'a dit de venir changer tes pansements, balbutia le cuisinier.

Voyant son air se transformer en quelque chose d'insidieux, insaisissable, un sentiment d'urgence me poussa à me redresser. Aucune douleur ne vint me tirailler les côtes, je ne ressentais qu'une légère démangeaison. Archeus s'agitait, mais je ne lui portai pas attention, l'inquiétude s'infiltrant par tous les pores de ma peau. J'avais une sale impression.

Avec des gestes saccadés, je repoussai la main suspendue de Marco et défit ce qui restait de mes bandages. La faible lumière de la lampe me permit de voir, avec une horreur fascinée, une peau presque nette. Il ne restait que des cicatrices, mais ma blessure était guérie.

Je relevai aussitôt la tête vers Marco, qui avait reculé prestement.

— Attends !

Trop tard. Avant de pouvoir me dépêtrer des draps, l’homme était sorti de la pièce. Un juron se fraya à travers ma gorge. Je me sentais faible après être resté allongé aussi longtemps ces derniers jours.

J’étais parvenu à me remettre debout, cherchant ma veste pour dissimuler la blessure disparue, lorsqu’Arya jaillit dans la chambre comme un diable. Impossible de dire quoi que ce soit qu’elle était déjà sur moi, me poussant au sol avec violence. La lame contre ma gorge me dissuada de bouger, me laissant pantelant, les yeux écarquillés.

— Arya !

Je pouvais entendre Jack, qui avait fait irruption à son tour, avec Paul et Isobel. Mais nous ne les écoutions pas, nous regarder en chiens de faïence, à quelques centimètres l’un de l’autre. Une bouffée de colère m’envahit, mais je la réprimai violemment, sentant la lame entailler quelques millimètres de ma peau.

La jeune femme se redressa, pour observer mes blessures cicatrisées. Son regard furieux se fit tout simplement enragé - était-ce un peu de crainte que je voyais dans son regard ? - et elle revint vers moi, pressant davantage. Si elle continuait, elle allait causer des dégâts. Et je n’étais pas certain de pouvoir me remettre d’une carotide sectionnée.

— Comment ? Tu es un des leurs ? cracha-t-elle.

J’avais l’impression que peu importe ce que j’allais dire, la vérité, un mensonge, c’en était fini. Un grondement sortit de ma gorge, sentant Archeus de plus en plus furieux dans mon esprit, ruant dans les brancards. Avant d’avoir la possibilité de désamorcer sa colère, je - lui ? - me saisis de la lame contre la peau, m’entaillant sévèrement la paume. D’une poussée, je projetai Arya sur le côté comme si elle ne pesait rien. Le souffle écourté par ma colère, je me redressai. Mes yeux tombèrent sur le couteau, que je jetai brusquement, serrant le poing pour réduire le saignement.

Je pouvais entendre Archeus dire mon nom, mais je le repoussai. Il fallait que nous nous calmions, tous, eux, moi, l’alien. Je levai les mains en signe de reddition. Je ne voulais pas que tout finisse en bain de sang. Alors, je pris la parole.

— Je peux tout vous expliquer.

Je tournai la tête vers Jack. C’était avec lui que j’avais le plus de chance de m’en sortir, ou du moins d’être écouté.

— Je sais que tout ça est dingue, mais vous devez m’écouter. Je ne vous veux aucun mal.

La désagréable impression de répéter encore et encore le discours qu’Archeus m’avait servi au début de notre cohabitation me serrait la gorge. Je me l’éclaircis, implorant du regard le géant blond.

Ce dernier s’interposa entre sa soeur et moi, posant sa main sur le bras de celle-ci. Elle s’était relevée, prête à en découdre. Mon regard se tourna vers Marco et Isobel, qui semblaient vouloir se ranger du côté de la tireuse d’élite. Paul et Andrew me regardaient avec un mélange de surprise et d’horreur. Et, Eilonwy, cachée derrière ce dernier, ne disait toujours rien.

— On va tous se calmer, dit fermement Jack.

Je sentis la pression s’amenuiser sur mes épaules, même si le regard du chef du groupe ne mentait pas. Il n’était pas bienveillant. Censé être celui qui protégeait les siens des monstruosités dehors, il venait de réaliser que j’en faisais peut-être partie, que j’étais potentiellement une menace. Est-ce que je pouvais lui en vouloir ?

D’un geste, Jack m’invita à sortir de la chambre et tout le monde se tassa à mon approche. J’essayais de ne pas me laisser atteindre par ce malaise, cette détresse, qui m’était beaucoup trop familier. Ravalant ma colère, les mains toujours légèrement écartées, je me dirigeai vers le rez-de-chaussée, suivi de très près par Jack. Mon regain de force s’envola et je tremblais de fatigue. Mais je m’installai sur la chaise que me désignait Jack. Et puis, je parlai.

***

Archeus n’était pas d’accord, je pouvais le sentir par tous les pores de ma peau. Chaque parcelle de mon être était tiraillée entre ce que moi je voulais, et ce que mon parasite m’enjoignait de faire avec prudence.

J’avais presque tout dit : la possession d’Archeus - en évitant le sujet de mon plongeon volontaire - ma première rencontre avec un Possédé, ma capacité à sentir leur présence, ma force qui se développait depuis plusieurs semaines. Je n’avais pas besoin de m’étaler sur ma guérison miraculeuse ; j’étais encore un peu sonné par celle-ci. Je passai sous silence aussi ma capacité à me projet dans cette reconstruction mentale, ni du fait qu’Archeus avait tendance à influer sur mes gestes. Même si je gardais le contrôle, je ne pensais pas qu’ils verraient d’un bon œil ce risque.

Maintenant, j’attendais leur réaction, regardant toujours Jack. Je ne l’avais pas lâché visuellement de tout mon monologue. Il était le seul, à mon sens, qui pouvait retenir les autres de commettre un geste regrettable.

Arya s’approcha de son frère. Elle n’avait rien perdu de sa fureur, mais il y avait quelque chose d’indéchiffrable dans son regard. J’espérais que ce n’était pas de la pitié, même si elle pouvait augmenter mes chances de survivre.

— On ne peut pas lui faire confiance, mordit-elle.

Elle n’avait pas pris la peine d’attirer Jack à l’écart, s’en fichant que je les entende. Que tous les entendent.

— Qu’est-ce qui nous dit qu’il ne se retournera pas contre nous ? S’il est habité par une de ces choses, pourquoi ne cherche-t-elle pas à nous éradiquer, comme toutes les autres ? Et s’il s’en prenait à Eilonwy ? À un de nous quand on aura le dos tourné ?

Je serrai la mâchoire ; le terrible sentiment d’injustice enfla dans ma poitrine. Pour qui me prenait-elle ?

— Je te signale que, pour l’instant, c’est qui m’as tiré dessus, grondais-je, les points aux jointures blanchies contre mes cuisses.

Il fallait que je montre patte blanche, que je ne leur pas une raison de croire toutes ces horreurs que disait Arya. Mais c’était difficile. À nouveau, je me retrouvais mis à l’écart ; pire, deviendrais-je le bouc-émissaire de toute cette catastrophe ? J’étais moins intouchable que les Possédés, qui avaient réduit notre monde en lambeaux.

Arya me dévisagea pendant de longues secondes silencieuses, puis se rembrunit, tournant la tête vers son frère. J’aurais tout donné pour savoir ce qui se passait dans la tête de la tireuse colérique. Elle ‘avait montré une part d’elle plus humaine, plus empathique.

Pouvais-je vraiment lui en vouloir de s’être murée dans cette carapace de Haine et de colère, avec tout ce qui s’était passé ? Après tout, même si on se côtoyait depuis quelques temps, personne ici ne saisissait la portée de ce que tous un chacun avait pu perdre.

Mais tu les as sauvés. Plus d’une fois.

Je ne pus empêcher un rictus mauvais transparaître sur mon visage, gagné par la colère insidieuse d’Archeus. Ce n’était pas faux.

— Je vous ai avertis plusieurs fois de la présence de ces monstres, je pense avoir fait mes preuves, nuançai-je.

Tu aurais pu les laisser mourir, aussi. Tu les as rejoints. Ils te sont redevables. C’est grâce à toi s’ils sont en vie.

— Arrête, soufflai-je.

Je n’aimais pas ce qu’il instiguait en moi. Nous nous étions sauvés mutuellement. J’aurais fini par me faire sauter la cervelle si j’avais continué ma route seul.

Riley…

Je secouai al tête pour me défaire de la voix envoûtante.

— C’est lui qui te parle ?

Surpris, nous nous tournions d’un seul bloc vers Eilonwy, dont la voix fébrile venait de percer le silence lourd de la pièce.

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2 Comments

1 month
La petite en cache bien des choses ? J'adore comment chaque personnage prend sa place, sa consistance, ça ressort vraiment bien
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1 month
Ravie pour mes personnages !
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