Lorsque les cinq coups de l’après-midi retentirent, Dagon sortit rapidement de l’établissement sa valise dans une main, sa guitare sur l’épaule et son sac sur l’autre. Il n’avait pas l’intention de rentrer tout de suite chez lui, il voulait profiter encore un peu de la présence de son cousin qui devait l’attendre devant de lycée. Techniquement, il devait l’attendre, mais il n’était toujours pas arrivé, cela n’étonna guère le chanteur qui souffla un bon coup. Au même moment, la vibration de son téléphone le fit revenir à la réalité. En parlant du loup, le voici qui le prévenait qu’il l’attendait dans l’impasse cachée derrière l’école. Ca sens l’arnaque ça, pensa le jeune homme, enfin, jusqu’à qu’un nouveau message l’interpelle:
«Je me sentais pas bien, j’ai préféré me cacher pour reprendre contenance»
Traduction: «j’en avais marre, j’ai repris ma forme.» Du Valentin tout craché, mais le chiross ne pouvait en vouloir à son cousin, il le comprenait même.
Cette sensation constante d'oppression, la peau qui irrite, le sentiment que son corps va se déchirer à tout moment comme un vêtement devenu trop petit et ceux jusqu’à qu’on reprenne forme. Même si cette transformation comme certain l’appelait pouvait être douloureuse, c’était surtout un repos qui nous était apporté, une libération qui nous soulage. Les souvenirs de sa dernière nuit chez Léon lui revirent en mémoire, même alors qu’il était en état de choc, il était soulagé de ne plus être sous forme humaine, si il avait porté ses vêtements adapté, surement ne se serait-il pas rendu compte qu’il avait de nouveau ses ailes et ses oreilles. Si seulement il avait changé sa boucle d’oreille ce jour-là.
«On ne refait pas le monde avec des “si” Dagon…»
Les mots de Elias lui revenaient en mémoire, lorsqu’il était rentré après sa dispute, Elias et leur père l’attendait, l’un blasé, l’autre à l’écoute, comme toujours. Il avait merdé ce jour-là et comme un lâche avait décidé de fuir ses responsabilités. Il savait qu’il allait se faire démolir par son aîné, mais si ça signifiait ne pas affronter le jugement de son ancien petit-ami, alors il était prêt à faire ce sacrifice.
Arrivé dans l’impasse, il remarqua rapidement la longue silhouette de son cousin, adossé au mur, il l’attendait, le sourire aux lèvres. Quelque chose clochait, plus il avançait, plus la réponse lui apparaissait. Pourquoi il n’a pas ses cornes de sortie ?
Il n’avait pas repris sa forme, il était encore sous forme humaine. Un guet à pans ! À peine allait-il faire demi-tour que son cousin l’attrapa pour le coincer dans le fond de la rue. Il remonta son regard vers celui qu’il considérait comme un frère de cœur, la peur aux yeux.
- Désolé Dag’, mais va falloir que tu affrontes tes cauchemars aujourd’hui.
Par pitié, tout sauf ça, tout sauf lui. Il le suppliait, encore et toujours, mais rien n’y faisait. Valentin avait toujours eu ce sale caractère, celui de s’occuper des affaires des autres. Il essaya le tout pour le tout, tant qu’il le pouvait, il frappa de toutes ses forces le diaphragme de son agresseur, mais celui-ci ne bougea pas d’un millimètre, la grimace qu’il lui offrait ravis cependant le chiross.
- Dagon…?
- Non, non, non, tout sauf sa voix.
- S’il te plait, est-ce qu’on peut parler ?
Il essaya une dernière fois de s’échapper, lâchant ses affaires sur le sol, il se refusait à croiser ses yeux, les larmes commençaient à couler. Tout sauf ces regards de terreur, de dégoût. Combien de fois va-t-il devoir supporter ses jugements ?!
Valentin comprenant la situation, releva le menton de son acolyte et calmement le rassura.
- Dagon, tu n’es plus là-bas, tu n'es plus ce petit garçon. Hey ! Regarde moi, je suis là, Léonard ne va rien te faire, je suis là pour ça.
- Je veux pas… lâcha-t-il dans un soupir
- Je sais, je sais, mais je te promets que tout va bien se passer. Je te le jure sur notre nom.
Ces billes apaisantes. Il abandonna, en même temps que la prise de son cousin le lâchait, il n’osa cependant pas lever sa tête vers son ex-amant, qui restait à bonne distance. Il a encore peur, c’est sûr.
- Cinq minutes, c’est tout ce que je te demande. Laisse-moi cinq minutes pour tout t’expliquer et puis, on décidera. Ensemble.
- J-je, il déglutit, je t'écoute.
- Je vais être honnête avec toi. J’ai eu peur. Non, j’étais pétrifié par la peur. La seule chose qui m’a protégé ce jour-là, c’était que je ne t’ai pas vue te changer, j’ai entendu seulement.
- Bonne nouvelle…
- Après ton départ je n’ai cessé de repenser à ça… Sur quoi d’autre m’as-tu mentis ?
- Excepté tout ce qui entoure ce “secret” rien. Je suis et j’ai toujours été le Dagon que tu connais. Le trouillard, idiot et lache mec que tu connais.
Le silence revint, le batteur avança d’un pas, sans même le voir, il l’entendait s'approcher. Un deuxième, puis un troisième et enfin il ne restait que cinq mètres entre eux. Il espionna son regard: triste et… Doux ?! Il l’observa enfin entièrement. Les yeux cernés, la peau pâle, les vêtements… Sa tenue des mauvais jours ?
- C’est bizarre que tu décrive mon copain comme quelqu’un de lache, trouillard et idiot. Moi, je connais un Dagon qui à surtout peur d’être seul. Un Dagon qui est un grand frère aimant, un confident incroyable, un petit-ami taquin. C’est l’homme que j’aime sincèrement. Un homme qui à travers son passé essaye chaque jour d’avancer. Qui continue de se battre même si tout est sombre.
Tu n’es pas un lâche Dagon, tu as seulement peur de te retrouver seul, mais tu ne l’es plus. Vanessa, Valentin, ta famille, tu as beaucoup de monde qui t’entoure. Et sache qu’ils tiennent sincèrement à toi. Rien qu’il y a une semaine, Elias m'a menacé juste pour mettre fin à ta douleur. Celle que j’ai provoquée.
- N-non ! Tu n’as rien provoqué !
- Dagon. Je t’ai fait peur, je t’ai rejeté.
- Tu avais tous les droits d’avoir peur… Tu as vu un monstre sous tes yeux…
- Un monstre ?! Non, j’ai vu qui tu étais, celui que tu me cachais pour protéger ta famille. J’ai honnêtement plus peur de ton cher frère que de toi. Laissons-nous le temps d’apprendre nos derniers secrets.
Plus qu’un mètre qui les séparait, Valentin s’était déplacé sur le côté. Il remarqua du mouvement dans la poche droit de Leon qui sortit un petit coffret très discret.
- Je croyais te connaître par cœur. Lorsque j’ai découvert ce nouveau “toi”, J’ai crut que mes bases s’était effondré, quel idiot j’ai été. Ce jour-là, c’est tout autre chose qui s'est effondré, le sommet. Un sommet qui a toujours été instable. Alors… Je sais que le chemin sera sinueux et tu sais à quelle point j’adore ça… Mais, reconstruisons ensemble ce sommet. On est jeune, on a encore toute la vie et je ne veux pas qu’on se mette une charge lourde. Donc, considère cette bague comme le début de notre nouveau parcours.
Dagon Aléon Shamens… Veux-tu être mon petit-ami ?
Les larmes coulaient en cascade des joues du garçon, ils avaient souvent plaisanté sur l’idée du mariage, mais Dagon avait toujours refusé à cause de cette tâche sur leur relation. Aujourd’hui, alors qu’il pensait ne plus jamais plus voir ce regard amoureux et désireux de son lapin rose. Le voilà près de lui, à genoux, une alliance entre les mains.
- T-tu sais que va falloir que tu supportes mon apparence car ce que je suis actuellement n’est pas “moi”.
- Je le sais, j’apprendrais de nouveau les partitions de ce corps.
- Tu sais que ma famille est comme moi, qu’il faudra que tu apprennes à les connaître.
- Je me préparerais et tu m’apprendras tout ce que je dois savoir.
- J’ai pas de besoin particulier, mais… Des fois mon corps me fait des surprises pas forcément agréables. Je ne sais pas facile à vivre je-
- Dagon. Je suis prêt à apprendre même dix langues pour vivre avec toi. Je veux tout savoir de toi, tes passions, ta famille, les anecdotes les plus embarrassantes. Je t’aime sincèrement Dagon et personne ne pourra me faire changer d’avis.
Il n’eut pas le temps de continuer son discours que le chanteur l'enlaça, les faisant tous les deux chavirer sur le sol. le batteur le regard surprit de son action, mais à peine allait-il sortir un mot que son petit-ami le coup d’un baisé tout ce qu’il y a de plus romantique.
- Oui, je veux être ton petit-ami Leonard !
Devenu rouge comme une tomate, le garçon ne savait plus quoi dire. Il ne reprit ses esprits que lorsque son “nouveau” copain lui tendit la main, le relevant il lui glissa par la même occasion la bague au doigt, Dagon n’attendait plus que ça de la voir de plus prêt.
Léon le connaissait par cœur, même s'il pensait le contraire: la bague était en argent terni, une obsidienne incrustée. La forme en elle-même était cylindrique, rien de plus normal pour un alliance, les gravures étaient cependant personnalisées, le symbole de leur groupe entourait la pierre, et rajouté sur les côtés il y a peu, les symboles qui représentait Dagon et Leonard. Il tourna son regard vers son cousin qui lui fit un clin d'œil. Il n’y avait que lui pour réalité un tel travail en peu de temps.
- Elle te plait ?
- Oui, mais je préfère quand même celui qui me l'a offert !
Son lapin rigolait, se calant contre son corps il murmura calmement.
- Reste avec moi ce week-end…
Le chiross lui répondit d’un baisé sur le front:
- Désolé mon coeur, j’ai des plans de prévu pour ce week-end. Le week-end prochain ça te va ?
Le garçon aux cheveux rose fit la moue, mais accepta tout de même.
Un week-end plein de douceur les attendait.