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1 - Prologue
2 - Chapitre I
3 - Chapitre II
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Chapitre I

On m'avait toujours dit que je devais être obéissante comme ma sœur, mais la vie en avait décidé autrement. Quand ma mère a appris qu'elle était enceinte de moi, elle n'aurait jamais imaginé que je serais l'opposée d'Ivy, ma grande sœur. Elle était douce et timide, avec une peau laiteuse et des yeux clairs, tandis que moi... moi, j'aspirais la terreur et le chaos.

En grandissant, ma mère a fini par se faire à l'idée que je ne lui ressemblerais jamais. J'étais une fille à papa. Mais mon père est mort lorsque j'avais six ans, dans un combat , sous mes yeux.

J'ai pris l'habitude de me promener dans la forêt, malgré l'interdiction de ma mère. J'aime observer les renards et les loups au pelage grisâtre. Mais ces temps-ci, la neige a recouvert toute la plantation, et les animaux se font rares. Je sors donc moins souvent... sauf quand je me dispute avec Ivy. Comme aujourd'hui. Elle m'a encore reproché de ne pas aider maman à faire le ménage. Je déteste ça.

Le soleil commence à se coucher, projetant une lueur orangée sur les cimes des arbres. Je sais que je devrais rentrer avant que maman ne voie mon chaperon blanc tout taché. Alors je cours, filant entre les arbres enneigés, et j'atteins le village en moins de dix minutes. Le calme régnait dans les environs, personne n'osait sortir en fin d'après midi car d'après une légende, il y aurait des créatures morbides qui rodent et si tu as le malheur de les croiser, seul dieu savait ce qu'il pouvait t'arriver. Je n'y avais jamais cru puisque j'étais déjà sortie tard le soir et il n'y avait rien à part des vampires et le clan des brûlés qui rôdaient au-delà du mûr. 

Il était protégé par des hommes de la garde royale qu'on surnommé"les géants", ils sont très grands de taille, assez grands pour les apercevoir de ma chambre et ils sont tous très musclés afin d'assurer la sécurité des citoyens. C'est déjà arrivé que des vampires entrent dans notre territoire, la scène qui s'est produite ce jour-là restera à jamais gravée dans ma tête. C'était l'enfer sur terre, ces créatures faisaient partie du monde des démons. Mais grâce aux nymphes, dryades et même les naïades, elles nous ont aidé à redonner vie à notre région, elles vivent chacunes de leurs côtés mais plus les siècles passent plus elles sont en train de disparaître.

En poussant la porte de la maison, une délicieuse odeur de poulet rôti m'enveloppe. Mon estomac gronde. Je monte rapidement à l'étage pour prendre un bain, laissant l'eau chaude détendre mes muscles fatigués.

Je ferme les yeux et savoure la sensation de l'eau qui glisse sur ma peau. Chaque goutte ruisselle lentement, traçant des chemins brûlants le long de mes bras. La vapeur danse autour de moi, floutant les contours de la pièce. J'immerge mes mains, puis mes épaules, sentant la chaleur délier chaque tension. Le silence est parfait. Juste moi, l'eau, et cette sensation d'être loin du monde. La chaleur de l'eau me détend.

Ces derniers temps, avec la neige qui prend place sur la région, fallait stopper toutes les récoltent mais c'était aussi la saison des bals victoriennes. Chaque année, la reine prépare une série de bal afin de réunir tous les peuples comme les Tolkiens, un peuple de magiciens , les Lysdors ont les surnommés les guérisseurs ou encore les lycanthropes qui sont les chasseurs et pour finir nous, les Chamans.

- Talia !! crie ma mère. C'est l'heure du dîner, sors de cette pièce tout de suite !

Je rouvre les yeux en soupirant avant de me rhabiller.

Je descends les escaliers à pas lents, traînant encore un peu les pieds, comme si cela pouvait retarder le moment où j'aurais à affronter le regard de ma mère. L'odeur du poulet rôti emplit la pièce, réconfortante et alléchante, mais l'ambiance autour de la table est bien plus lourde que prévu.

Ivy est déjà installée, le dos droit, ses mains sagement posées sur ses genoux. Son regard clair glisse vers moi un instant, mais elle détourne aussitôt les yeux, comme si elle sentait la tempête qui allait éclater.

Je m'assieds en face d'elle, attrapant distraitement un morceau de pain. Mais à peine ai-je tendu la main vers le plat que ma mère se fige. Elle se retourne lentement, un torchon encore serré entre ses doigts.

Ses yeux s'arrêtent sur mon chaperon blanc, jeté négligemment sur le dossier de ma chaise.

Le silence s'installe. Un silence pesant, tendu comme une corde prête à rompre.

- Encore ? murmure-t-elle d'une voix glaciale.

Je ne réponds pas. J'aurais dû le cacher.

- C'est la deuxième fois cette semaine, Talia ! s'emporte-t-elle.

Sa voix monte brusquement, et même Ivy sursaute légèrement.

- Je t'ai interdit de sortir, et pourtant, tu rentres encore avec ton chaperon déchiré ! Tu crois que le tissu pousse sur les arbres ?

- Ce n'est qu'un bout de tissu, je réplique en haussant les épaules.

- Ce n'est pas qu'un bout de tissu ! rétorque-t-elle avec fureur. C'est une marque de respect ! Une preuve que tu appartiens à cette famille, à ce village ! Et toi, tu le traînes dans la boue comme si ça n'avait aucune importance !

Je la regarde, serrant les dents.

- Peut-être parce que ça n'en a pas, justement, je lâche d'un ton froid.

Sa mâchoire se contracte.

- Tu ne comprends rien, souffle-t-elle en secouant la tête, les lèvres pincées.

Elle pose brutalement le torchon sur la table et croise les bras, me toisant avec cette expression de lassitude et de colère qu'elle me réserve si souvent.

- À partir de maintenant, tu ne sortiras plus, Talia. C'est fini.

Le couperet tombe. Un ordre sans appel.

Je sens un frisson de rage remonter le long de mon échine. Mes poings se serrent sur mes genoux, mais je me force à ne rien dire. Ce serait inutile. Maman ne discute pas, elle impose. Et moi... je refuse qu'on m'impose quoi que ce soit.

Ivy se racle doucement la gorge et attrape une assiette, brisant le silence pesant.

- Mange, Talia, murmure-t-elle, presque timidement.

Je l'ignore. L'appétit m'a quittée.

Je ne dis rien d'autre pendant tout le repas. Mais dans ma tête, une seule pensée tourne en boucle : cette interdiction ne m'arrêtera pas.

La rage monte en moi comme une vague impossible à contenir. Soudain, je me lève brusquement, renversant ma chaise dans un bruit sourd qui résonne dans la pièce. Ivy sursaute, maman se fige, et le silence s'abat sur la maison.

- À vos ordres, mère, dis-je en insistant sur chaque mot avec un sarcasme cinglant.

Elle pince les lèvres, mais avant qu'elle ne puisse répondre, sa voix se fait plus douce, presque inquiète.

- Talia, tu n'as rien mangé... Reste assise.

Un ricanement amer m'échappe. Je croise les bras et plante mon regard dans le sien.

- Depuis quand tu te préoccupes de ma santé ? C'est nouveau, ça.

Un silence. Un soupir. Son visage se ferme, et aucun son ne sort de sa bouche. Parce qu'elle sait que j'ai raison.

Depuis la mort de papa, elle s'est négligée, elle nous a abandonnées. Ivy et moi avons dû nous débrouiller seules. J'ai appris à survivre en vendant le pain que Ivy faisait malgré ses quatorze ans. J'ai appris à chasser pour qu'on puisse manger, parce que maman n'était pas là. Maman ne nous voyait plus.

Alors pourquoi, soudainement, fait-elle semblant de se soucier de moi ?

Je tourne les talons, prête à quitter cette pièce étouffante. Mais au moment où j'allais atteindre l'escalier, Ivy se lève précipitamment et m'attrape le poignet.

- Qu'est-ce qui te prend ?! je m'énerve en tirant sur mon bras, mais sa prise est ferme, bien trop ferme.

Je vois son regard paniqué, son souffle court.

Et puis, elle lâche une phrase. Une seule phrase.

- Tu vas te marier.

Je cesse tout mouvement.

Le silence tombe comme une chape de plomb sur la maison.

Mon cœur s'arrête.

Mon souffle se bloque.

Mon cerveau se vide.

Je me tourne lentement vers ma mère, incapable de dire un mot. Mon corps est figé, mais un frisson me traverse.

Elle évite mon regard.

-Pourquoi ça serait a moi de me marier ? Ivy est plus âgée que moi, plus belle et beaucoup plus intéressante.

-Parce que c'est ainsi, je décide qui doit se marier, Ivy n'est pas encore prête.

- Avec qui ? Ma voix est plus froide que jamais. Elle surprotégée Ivy, elle était toujours au petit soin avec elle. 

Maman ne répond pas tout de suite. Elle baisse légèrement la tête, comme si elle savait déjà que sa réponse allait déclencher un ouragan.

- Avec un homme respectable... finit-elle par dire d'une voix faible. Il t'apportera tout ce dont tu as besoin.

Un rire sec et incrédule m'échappe.

- Un homme respectable ? je répète. Qui ?

Ivy relâche doucement mon poignet. Son visage est pâle, et elle semble hésiter à parler. Finalement, c'est elle qui lâche le nom :

- Le Loup.

Un frisson d'horreur me traverse.

Le Loup.

Même sans l'avoir jamais vu, je connaissais ce nom. Tout le monde le connaissait. Il terrifie tout le village d'Acacia.. Un homme grand, ténébreux aux yeux perçants, toujours accompagné d'une barbe taillée qui renforce son air imposant. Il est riche, influent... et dangereux.

On raconte qu'il a détruit des familles entières pour obtenir ce qu'il voulait. Qu'il n'hésite pas à briser ses ennemis sans la moindre pitié. Il règne sur le commerce du village avec une main de fer, personne n'a osé le défier ou encore enfreindre une règle qu'il impose.

Je sens mon cœur cogner violemment contre ma poitrine.

- Tu plaisantes.

Maman relève enfin la tête et secoue la tête, impassible.

- Non. J'ai parlé avec sa mère. Cette union nous sauvera de la pauvreté.

Je cligne des yeux, abasourdie.

- Nous sauver ? je répète d'une voix étranglée. Donc tu es prête à me vendre comme un vulgaire morceau de viande pour qu'on ait un peu plus d'argent ?

- Ce n'est pas comme ça qu'il faut le voir, Talia... tente-t-elle.

- Et comment alors ?! je hurle presque.

Ma respiration est saccadée, mon corps tremble de rage. Je déteste la situation dans laquelle je me trouve, ce sentiment d'impuissance et de soumission. Un feu s'illumine dans mon corps qui bouillonne, ma mâchoire se contracte et mes poings se serrent. J'ai une seule envie, hurler.

Crier de toute mes forces me sentir libérer.

- Je refuse !

- Tu n'as pas le choix.

Son ton est tranchant, définitif. Ne laissant aucune place à une contradiction.

Et c'est à ce moment-là que je comprends que pour la première fois je ne pourrai rien faire face à elle.

Elle ne me laissera pas partir.

Elle ne me laissera pas décider.

Alors, il ne me reste qu'une seule solution : fuir.

***********

Le soleil venait à peine de se lever lorsque je quittai la maison déjà habillée.

Je n'avais presque pas dormi. Toute la nuit, les paroles de ma mère résonnaient dans ma tête.

"Tu n'as pas le choix."

"Tu te mariera avec le Loup"

Mais si. J'avais toujours le choix. Je refuse de me laisser contrôler et encore moins par un homme. Je ne pouvais pas rester là, à attendre que ma vie m'échappe. Il fallait que je prenne l'air, que je réfléchisse, que je trouve une issue à cette situation absurde.

Je quittai le village en silence, prenant soin de ne pas attirer l'attention. Pour une fois, je ne portais pas mon chaperon blanc. À la place, j'avais enfilé un long chaperon noir qui tombait jusqu'à mes chevilles, me conférant l'allure d'une ombre mouvante. Un tissu sombre couvrait la moitié inférieure de mon visage, ne laissant visible que mes yeux.

Je ne voulais pas être reconnue, je souhaite simplement trouver une solution à ce problème qui prend trop de place dans ma tête.

J'avais attaché ma monture à Nyx, un shire, à un arbre non loin du village. Un magnifique cheval noir, fort et indomptable. Il était mon secret, ma liberté. Peu de gens savaient que j'avais réussi à l'apprivoiser, et je comptais bien garder cela pour moi car si cela venait à se savoir, je ne suis pas sûr que ça plaise à ma famille, enfin si on peux appeler sa une famille. 

Sans hésitation, je montai en selle et pressai mes talons contre ses flancs. Il se mit aussitôt au galop, fendant l'air glacial du matin.

La forêt s'étendait devant moi, majestueuse et immuable. J'aimais cet endroit plus que tout. Ici, personne ne pouvait me dicter ma conduite. Ici, j'étais libre. Mais, les souvenirs de mon père refont toujours surface pour me rappeler tout ce qu'il m'avait appris: comment chasser, comment me servir de ma dalle, de l' arc et d'une épée comme une guerrière. Je revois son visage marqué par le temps me crier lorsque je n'arrivais pas à me défendre ou lorsque je ne tuais pas correctement un sanglier. Je ré entend ses paroles m'expliquer les bonnes postures , comment faire et ses leçons de morales.

Le vent fouettait mon visage, faisant voler mon chaperon, j'aime prendre de la vitesse, voir les paysages défiler à une vitesse affolante. J'aurais voulu que cette course ne s'arrête jamais. J'étais arrivée à mon endroit favori. 

Le bord d'une falaise qui se trouve à l'ouest de la forêt où vivaient certaines nymphes dont des naïades. La neige s'était calmée mais le froid faisait rougir le bout de mon nez, malgré que mon visage soit caché par ce tissu que j'avais trouvé par hasard dans ma chambre, il ne m'était d'aucune utilité. Mes mains gantées étaient gelées mais j'étais beaucoup trop énervé pour m'en soucier. Que devrais-je faire pour éviter ce mariage ? Et si je m'échappais ? Après tout, c'était ce que j'avais toujours voulu.

Découvrir le monde.

Être libre.

Mais les créatures du monde des démons de l'au-delà du mûr avait brisé mon rêve à tout jamais de fuir vers le bonheur. Que reste-t-il à faire ? Accepter ce destin, malgré moi. Plutôt mourir que d'épouser un homme qui doit être laid et vieux, prétentieux et arrogant, violent et irrespectueux. Je préférais encore être avalée par cette forêt maudite, par ses arbres tordus et ses murmures glaçants, que de devenir la chose d'un inconnu.

Je fermai les yeux un instant, laissant le silence s'emparer de moi. Seul le bruit discret du vent dans les branches et le craquement de la neige sous les sabots de Nyx me rappelaient que je n'étais pas encore un fantôme et qu'il fallait d'une façon ou d'une autre que j'affronte ce problème. Le ciel s'était teinté d'un gris étrange, comme suspendu dans une attente douloureuse. Je n'avais plus peur. Juste ce poids au fond du ventre, ce mélange d'angoisse et de colère que je ne parvenais plus à différencier.

Une partie de moi voulait fuir, chevaucher jusqu'au bout du monde sans jamais me retourner.

L'autre... l'autre restait figée là, incapable de bouger, tiraillée entre ce que je devais faire et ce que je voulais être.

Puis, dans cet instant de calme précaire, un frisson s'infiltre entre les plis de mon manteau.

Quelque chose changea, le vent s'était refroidi subitement créant une sorte de tourbillon.

D'un coup, Nyx ralentit, ses mouvements deviennent étrangement saccadés. Ses muscles se crispèrent sous moi, et je sentis un frisson parcourir son corps. Je ne sais pas ce qu'il se passe mais rien de très bon.

- Qu'est-ce qui te prend ? murmurais-je en serrant les rênes.

Ses oreilles frémirent. Un grondement sourd s'échappa de sa gorge, il bougeait dans tous les sens, j'essaie de suivre son rythme.

Puis, sans prévenir, il se cabra violemment.

Je m'approchai instinctivement à sa crinière, mais c'était comme si une force invisible l'avait possédé. Son regard s'affolait, et ses sabots frappaient le sol avec une puissance terrifiante.

- Nyx ! Calme-toi !

Rien n'y fit. L'angoisse et l'incompréhension s'alimentent en traversant mes veines , mon cœur pompait le sang d'une vitesse affolante. Je ne comprends pas le comportement soudain de Nyx et du frisson que j'avais ressenti.

Puis, soudainement, mon corps fut projeté dans les airs.

Un hurlement m'échappa alors que je me sentis envolée, comme arrachée à la gravité elle-même. Le monde tourna autour de moi, le ciel et la terre se confondirent dans une danse chaotique. C'était peut-être la fin pour moi et on allait trouver mon corps écrasé contre la falaise sans vie.

Mais mon pouvoir.

Je l'avais senti s'activer malgré moi. Une chaleur étrange s'était éveillée dans mon corps au moment où Nyx m'avait rejetée. Je sentais la présence d'une personne qui avait une forte aura, une chose en moi l'appeler afin de venir m'aider.

Mais ce fut bref. Trop bref.

Car l'instant d'après, la gravité me rappela brutalement à l'ordre.

Je chutai.

Rapidement.

Je vis la falaise en contrebas. Mon cœur se serra. Mon corps allait passer par-dessus et j'allais mourir lorsque mon crâne fusionnera avec la roche et que mon corps tombera dans le fleuve.

C'est la fin.

Mais avant que mon corps ne percute le sol, une main puissante s'abattit sur mon bras. Mon pouvoir s'illumine en moi ce qui me force à fermer les yeux.

Un choc.

Puis, une force inhumaine m'arracha à la mort certaine. Je fus violemment ramenée en arrière, mon corps percutant quelque chose de ferme et chaud. J'haletais, mon cœur tambourinait dans ma poitrine. Que s'est-il passé ?

C'est alors que je le vis.

Un homme. Très grand ou c'était moi qui étais petite.

Un inconnu au regard bleu comme l'océan enragé.

Sa poigne était ferme, son souffle régulier. Il était grand, imposant, vêtu de noir comme une ombre vivante. On se regardait comme si le temps s'était arrêté, je ne contrôlais plus mon corps. Il m'était impossible de détourner les yeux de ses iris, de sa personne...

Son regard... Il était différent de tout ce que j'avais vu jusqu'ici. Il ne ressemblait à aucun villageois, à aucun noble. Il dégageait une aura... surnaturelle. Je ne l'avais jamais vu auparavant, c'était sûr. On se souvient des hommes comme lui. Il était peut-être un homme de garde, ces hommes sont connus pour être grand et fort pour veiller les entrées et sorties de la ville et assurer la protection de tous citoyens à l'apparition de forces maléfiques. Il ne parlait pas, il se contentait seulement de m'observer avec son regard scrutateur. Le temps semblait s'être arrêté.

- Qui es-tu ? soufflai-je, encore sous le choc. C'était tout ce que je pouvais dire.

Un sourire au coin effleura ses lèvres et son souffle chaud me réchauffa mon visage rougit par le froid et la peur. 

Puis, il disparut.

Littéralement.

Rapidement.

Une rafale de vent souleva les feuilles autour de moi, et en un battement de cils, il n'était plus là. Il devait être vieux vu comment il va vite. Il a une force de pouvoir que je n'avais jamais encore ressenti de toute ma vie, Pas même mes parents avec une telle force de pouvoir.

Seul le silence de la forêt me répondit.

Je restai figée, les pensées en vrac. Essayant de comprendre ce qu'il venait de se passer. Un homme dont je ne connaissais pas l'identité vient de me sauver d'une mort certaine, le comportement de Nyx qui avait d'ailleurs disparu et ce sentiment de pouvoir alors que j'étais une chamane. 

Cet homme était apparu de nulle part, m'avait sauvée... et s'était volatilisé avant que je ne puisse le remercier.

Qui était-il ? Et que faisait-il dans la forêt à cette heure-ci ? 

Mais plus étrange encore...

Pendant un instant, j'ai senti mon pouvoir raisonner avec lui. Ce n'était pas un chamane lui non plus. 

Et ça, ça me terrifiait plus que tout. Je ne sais pas pourquoi mon pouvoir s'était allumé en sa présence. Je me fais peut-être des idées, je devrais en parler à Grand-mère ? Non, elle me prendra pour une folle qui essaye de trouver un moyen pour ne pas me marié. Personne ne doit savoir que je suis différente d'eux, si cela venait à s'apprendre, je ne sais pas ce qu'il pourrait m'arriver. J'ai entendu dire que celui qui vit dans un peuple qui n'est pas le sien, la mort lui tiendra compagnie. 

Je mis longtemps à rejoindre le village à pied, longeant les sentiers glacés, jetant des regards nerveux derrière moi comme si j'allais revoir ce regard bleu perçant surgir. Mais il n'y avait que le silence et le craquement du givre sous mes pieds.

Lorsque j'atteignis enfin les premières maisons, l'agitation du village contrastait avec le calme glacial de la forêt. Les enfants couraient en glissant sur la neige tassée, des femmes bavardaient en étendant du linge et les hommes discutaient près discutaient près de la forge où crépitai un feu joyeux qui me mettait mal à l'aise. Je passai inaperçue, jusqu'à arriver face à ma maison en bois. Les volets étaient ouverts, ce qui annonçait déjà que j'allais être réprimander par maman.

Je franchis la porte de la maison familiale en soufflant dans mes mains gelées sachant qu'elles sont déjà en train de ranger ou faire des activités ennuyeuses.

- Te voilà enfin ! gronda ma mère. Tu étais encore dans la forêt, hein ?

Je ne répondis pas, enlevant simplement mon manteau et le tissu qui me couvrait le visage. Ma mère soupira, mais ne dit rien de plus. Elle savait qu'insister ne mènerait à rien.

- Va te laver les mains. Tu vas apprendre à coudre aujourd'hui, et ensuite, tu aideras Ivy à préparer le pain.

Je serrai les dents. Moi, coudre et pétrir de la pâte ? J'étais une aventurière, pas une ménagère.Mais je me force à me taire. Pour aujourd'hui. La journée passe lentement.

Ma mère me montre comment tenir une aiguille sans me piquer, comment faire un ourlet droit, comment réparer un accroc dans une robe. J'avais du mal, mes doigts étaient trop nerveux, par les évènements de ce matin qui me hantent, ils sont trop rapides, comme s'ils cherchaient une épée à manier plutôt qu'un fil à glisser. Ivy m'observait en silence, un mince sourire en coin.

Puis vint l'heure du pain.

Je détestais la sensation de la pâte collée à mes mains, le froid de la farine, l'odeur de levure qui me fait grimacer de dégoût. Je déteste me forcer à faire une chose qui ne me plaît pas. Mais Ivy, douce comme toujours, m'encourageait.

- Ce n'est pas si terrible, tu verras. Un jour, tu feras du pain comme une vraie boulangère.

- Je préfère encore me battre contre un ours, avais-je dit rapidement et de façon satirique.

Elle éclata de rire. Même maman esquissa un sourire en coin.

Lorsque le soleil commença à décliner, je pris mon panier de linge sale et me rendis à la grande fontaine au centre du village. Les femmes s'y retrouvaient à la fin de la journée, échangeant des nouvelles, riant fort, se plaignant de leurs maris. Je restai à l'écart, lavant mes vêtements dans le silence, regardant l'eau glacée rougir mes mains. J'en avais assez de ce temps, je n'ai jamais réellement aimé le froid mais cette année il était bien présent. L'été me manque, la chaleur, le bruit des cigales, les papillons qui volent en direction de la vallée enchantée qui doit être actuellement inhabitée d'animaux. Des renards avec lesquels il m'arrive de jouer ou des bambis qui se cachent des guerriers qui sont autorisés à venir chasser dans notre territoire.

Mais soudain... un bruit de sabots résonna dans les rues et me força à quitter mes pensées.

Les gens se tournèrent, interrompus dans leurs conversations.

Un groupe de gardes royaux, vêtus de leurs armures d'argent et de capes bleues et blanches, s'avança lentement à travers la place. Les enfants avaient cessé de courir et s'étaient réfugiés derrière leurs mères. Tout le monde s'était levé afin de créer un grand cercle autour d'eux. Leur chef, un homme aux épaules larges et à la barbe grisâtre qui annonçait son temps vécu sur terre, se posta au centre et déplia un parchemin orné du sceau royal.

Il parla d'une voix forte, qui couvrit tous les murmures :

- Par ordre de Sa Majesté le roi , les bals d'hiver sont officiellement ouverts. Ils commenceront dans deux jours, au palais royal. Tous les peuples sont tenus d'y assister.

Un murmure d'excitation traversa la foule.

- Les invitations seront envoyées dès demain matin. Préparez vos plus beaux atours.

Il referma le parchemin avec un claquement sec et remonta en selle.

Le cœur battant, je restai figée, le linge encore trempé entre mes doigts.

Deux jours.

Deux jours avant le bal. Deux jours avant que mon sort ne soit peut-être scellé à tout jamais. Deux jours avant que je voie celui qui est destiné à devenir mon mari.

Le Loup.

Je fixai le ciel d'un gris perle.

Tout allait bientôt changer.

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