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Sunnysunny15
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Chapitre 4

Finalement, la jeune fille avait fini par s’assoupir au cours de ses pensées tortueuses, réveillée en sursaut le lendemain par ses habituels cauchemars. Ces derniers tournaient toujours autour des mêmes sujets : un clown, une course-poursuite, un meurtre… ou alors elle revivait sa première paralysie du sommeil à l’âge de trois ans, où un monstre aux longs cheveux s’était infiltré par la fenêtre de sa chambre pour la regarder dormir. Cet épisode l’avait tellement traumatisée qu’elle s’en était rappelée malgré son jeune âge et se l’était ressassé en boucle pendant des années avant de se convaincre que ce n’était pas réel… Dans tous les cas se remémorer ces mauvaises nuits lui filait des sueurs froides, qu’elle chassa en jetant un œil habitué aux moindres recoins de sa chambre. Heureusement il n’y avait pas plus de monstres sous son lit que de nuages dans le ciel bleu qui se laissait voir à travers la fenêtre de la petite pièce.

L’adolescente fut surprise de voir autant de lumière de si bonne heure, le soleil ne se levant pas avant sept heures du matin en cette période de l’année. Elle vérifia l’heure sur son portable encore en charge, et découvrit avec horreur qu’elle avait largement dépassé son temps de repos.

- Huit heures dix?! Non mais c’est une blague ?! Oh chié !! lâcha-t-elle en oubliant toute forme de calme retrouvé ou de politesse.

Elle saisit au vol sa tenue préparée la veille, à savoir un simple jean noir avec un haut blanc, la base de la base, ainsi que son sac de cours usé par le temps mais toujours fidèle au poste malgré tout. En moins de vingt minutes elle était lavée, chaussée et habillée, courant à travers les feuilles mortes jonchant les trottoirs avec les cheveux en bataille et ses affaires juchées sur son épaule.

Elle rattrapa un bus au passage mais les embouteillages poussèrent Ozalée à améliorer ses compétences en course à pied. Ses marmonnements tracassés fuguèrent dans le même vent d’automne qui la rafraîchissait, et poussait les autres canadiens à se couvrir d’une doudoune tout en la jugeant d’un regard critique sur sa tenue légère. Ce constat ne fit que l’exaspérer davantage en la poussant à accélérer sur le boulevard qu’elle rencontrait.

« Oui j’ai trop chaud et alors ? Changez de région si vous êtes pas contents pauvres tâches !! » pensa-t-elle en se retenant de sortir ça à voix haute.

Elle bifurqua dans plusieurs rues avant d’enfin apercevoir son lycée. Évidemment les grilles étaient déjà fermées. Essoufflée et totalement en nage, Ozalée prit le temps de vérifier l’heure sur son portable avant de rejoindre l’accueil : neuf heures passées.

- Bon… C’est pas si mal… soupira-t-elle en entrant

L’instant d’après elle était arrivée devant la porte de sa classe, occupée à rassembler son sang-froid pour rentrer. Elle détestait être en retard et devenir le centre de l’attention, surtout si c’était pour être dévisagée par une trentaine de paires d’yeux d’ados sans âme à moitiés avachis sur des tables sales… Elle attendit une pause dans le monologue du prof de français avant d’assener trois coups secs à ce qui la séparait d’un gentil cauchemar éveillé. Son ventre se noua. La porte s’ouvrit. Elle remit son habituel masque impassible en fixant un point invisible.

- Oh Ozalée ! On ne t’attendait plus, entre. Où est ton mot d’excuse ? Lui demanda l’homme avec un sourire jovial.

Elle lui tendit son carnet dans le silence le plus complet. Loin de se démonter devant l’attitude fermée de son élève, le professeur l’invita à s’asseoir et poursuivit son cours. L’adolescente traversa le labyrinthe de tables en ravalant la moindre émotion. Les évènements de la veille se réveillèrent dans sa mémoire en croisant ses amis. Pardon, « ex-amis ». Tora la dévisageait avec insistance, s’attirant un regard noir de reproches. Les autres garçons s’empressèrent de se baisser sur leur cahier. La concentration de la jeune fille était minée de toute part… Justine ne put s’empêcher de noter la tension ambiante qui grandissait dans le groupe dernièrement. Elle rongeait son frein, mourant d’envie de poser des questions à son amie mais consciente qu’elle risquait de se heurter à un mur. Laela aussi partageait son inquiétude, à la différence près qu’elle comptait tirer les vers du nez aux garçons.

Elles connaissaient le caractère solitaire de la blonde, mais quitter le groupe comme ça durant une sortie… Jamais elle n’avait fait ça auparavant. Ils avaient dû faire une sacrée connerie pour la faire fuir ainsi. Et leur posture coupable ne démentait rien.

Dès que la sonnerie annonçant la récréation retentit, le groupe se rassembla au fond de la salle dans un silence gêné. Ozalée s’était éclipsée en un éclair dans un endroit quelconque de l’établissement, ne souhaitant clairement pas s’attarder avec eux. Laela soupira de frustration tout en retenant Justine de partir à sa poursuite, cela ne servirait à rien, elle ne cracherait pas le morceau. En revanche les autres… Elle s’appuya sur leur petit îlot de tables.

- Bon… J’en connais quatre qui vont passer à table et vite ! Qu’est-ce qu’il se passe depuis hier ?

Tous, mis à part Sly, affichèrent un certain malaise devant son regard inquisiteur. Tora prit une inspiration avant d’ouvrir la bouche.

- Ce n’est rien de grave, laissez-nous gérer ça.

Laela fit crisser ses ongles sur le bois du meuble.

- J’appelle pas ça une réponse.

Elliot déglutit.

- Depuis quand tu te la joue cheffe de gang ? Ricana Sly, pas le moins du monde intimidé.

- Depuis que vous agissez comme des gamins surpris en pleine connerie. Pour la deuxième fois : qu’est-ce qu’il s’est passé ?

- … On te l’a déjà dit, elle avait une- recommença Tora avant d’hésiter sous le regard scrutateur des deux filles.

- Ne nous ressors pas l’excuse de cette fichue migraine, vous nous prenez peut-être pour des imbéciles mais on est loin d’être aveugles quand il s’agit de mensonges… le coupa Justine, de plus en plus irritée par la situation.

- Mmh…

Le jeune homme baissa la tête, reconnaissant qu’il les enfonçait plus qu’autre chose. Pendant qu’Elliot s’appliquait à disparaître le mieux possible, Dayan pressa affectueusement l’épaule de son ami en lui adressant une œillade entendue : en parler sincèrement était le mieux.

Il prit le relais et plongea son regard dans celui de Laela.

- On a découvert un problème chez elle. Et c’est… vraiment spécial…

- Déjà qu’elle est spéciale de base… osa commenter Elliot.

L’œil sombre de Justine le fit taire instantanément.

- Spécial ? Répéta Laela. C’est-à-dire ?

- Tora a découvert quelque chose pendant l’accident, et nous l’avons aussi constaté en la confrontant en dehors des vestiaires.

L’attention de Justine passa d’un garçon à l’autre.

- Confronté ? Vous vous en êtes pris à elle ?

- C’était de simples questions, inutile de montrer les griffes, tempéra Sly en s’éloignant d’une démarche assurée vers les autres tables vides.

- Mais vous l’avez quand même embêtée… constata la jeune fille, visiblement déçue.

- Ce n’était pas le but recherché… mais vous savez comment elle est… c’est compliqué… Se justifia Dayan.

- C’est pas une raison !

- Vous n’étiez même pas là quand ça s’est déroulé ! Arrêtez de vous mêler de ce qui vous regarde pas ! S’emporta Tora.

- Les embrouilles au sein du groupe nous concerne tout autant que vous ! C’est notre amie ! On ne s’attaque pas entre nous ! Gronda Laela en haussant le ton.

Le jeune homme pouffa, cynique.

- Notre amie ? Parce que tu arrives à la trouver amicale ? Y a des moments où je me dis que jouer avec un glaçon serait plus marrant que de traîner avec elle tellement c’est une coincée finie ! Elle a pratiquement rien d’une amie ! Je vois même pas ce qu’elle fout encore avec nous après tout ce temps !

- Tora ! S’indignèrent Dayan et les deux filles.

- QUOI ?

Un bruit d’affaires retournées fit pivoter leur têtes vers Sly, occupé sur un bureau.

- Mais enfin qu’est-ce que tu fais ? Râla Laela pour la énième fois.

Le fouineur se tourna vers le groupe, le sac d’Ozalée entre les mains, et son contenu étalé sur le sol de la classe.

- Bah quoi ? C’est pas assez évident ?

- Tu fouilles dans ses affaires ? Non mais ça va pas? Lâcha Justine.

- Là tu vas beaucoup trop loin Sly, déclara Laela, rembrunie pour de bon en se rapprochant. D’abord les embrouilles, ensuite ça, tu comptes violer son intimité jusqu’à quel stade ?

- Jusqu’à trouver la preuve de ce que nous avançons : elle a un secret, un truc spécial qu’elle nous cache et qui ne va pas tarder à être découvert, répliqua Sly en brandissant un cahier relié en cuir sombre. Un journal par exemple !

- Donnes moi ça crétin ! (elle lui arracha des mains) Et de quoi vous parlez à la fin ?

- De ses yeux… débuta Dayan avant qu’une silhouette n’apparaisse dans l’encadrement de la porte.

- Oh shit… jura Elliot en changeant de couleur.

- Quitte à faire ça vous pourriez au moins être discrets, marmonna Ozalée en foudroyant Sly et Laela du regard.

Elle se rapprocha d’eux, le pas calme en apparence, mais un froid polaire avait envahi la pièce. Ses yeux analysaient le moindre centimètre carré de la posture des deux prétendus coupables ainsi que le bazar gisant à leurs pieds. Son carnet de notes dans les mains de Laela… Son vieux sac de cours dans celles de Sly… et tout le reste de ses affaires personnelles étalé sans respect comme s’ils cherchaient quelque chose de précis ou voulaient juste aggraver sa mauvaise journée…

Son ventre se noua au souvenir d’une vieille histoire similaire et ses traits ne tardèrent pas à se durcir plus qu’ils ne l’étaient déjà. Elle nota leur air coupable. Tous… même Justine… qui tentait de lui expliquer la situation en bougeant ses mains dans tous les sens… Mais il était trop tard, elle n’écoutait plus. Envahie par une déception étouffante.

« J’aurais dû le deviner… ils sont comme les autres… Ne leur fais plus confiance… » rumina la jeune fille.

Ce n’était pas la première fois qu’elle se faisait trahir, mais cette fois-là faisait vraiment mal sans qu’elle ne puisse se l’expliquer… Au moins elle était fixée.

- Dégagez… leur intima-t-elle en rassemblant ses biens avec des gestes frénétiques, accroupie près de son bureau.

- Attends que je t’explique… (Laela toucha son épaule) C’est Sly qui a fait ça, pas m-

- Dégage ! Me touche pas ! Lui hurla Ozalée en se redressant brusquement, renversant sa table de travail d’un coup d’épaule.

Le vacarme produit fit tressaillir tout le groupe, y compris Sly pour le coup, qui sentait une sueur froide envahir doucement sa colonne vertébrale. Mais un détail lui permit de reprendre contenance avant de laisser paraître quoi que ce soit.

La paire d’yeux bleus qui les fixait brillait d’une manière encore plus surnaturelle que la veille. Un rictus fier se dessina malgré la surprise.

- Et bien, la voilà cette preuve, on vous l’avait dit !

- Mais… que… balbutia Laela, décontenancée et immobile.

- Qu’est-ce qui t’arrive ? Paniqua Justine en se précipitant vers la blonde.

Ozalée eut un mouvement de recul, ses doigts camouflant l’une de ses orbites. Elle était d’une pâleur cadavérique. Le froid s’intensifia dans la classe et fit grelotter les plus frileux.

L’angoisse broyait l’adolescente de l’intérieur. C’était un cercle vicieux… la peur amenait la peur… Bientôt elle ne vit plus que des silhouettes inquiétantes dans son champ de vision, de plus en plus proches… de moins en moins amicales… Un sentiment de panique la gagna. Elle ramassa ses dernières affaires et s’enfuit en courant, retenant ses larmes à grande peine.

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