Je ne savais pas encore, ce jour-là, que ma vie allait basculer. Que mes certitudes allaient se fissurer, doucement d’abord, puis avec la violence tendre d’un tremblement de terre. Tout ce que je savais, c’est que je n’en pouvais plus. Plus de cette existence vide, silencieuse. Plus de ces jours qui se ressemblaient, de ces heures passées à traduire des mots sans saveur dans un appartement trop grand pour moi seule. Il m’avait suffi d’un livre, d’un déclic. D’un besoin vital de partir.
Je n’étais pas en fuite. Ou peut-être que si, un peu. En quête de quelque chose que je n’arrivais pas à nommer, que je n’osais plus nommer. De paix, peut-être. De sens. D’un souffle nouveau. Je voulais disparaître du radar, me glisser dans un ailleurs où personne ne me connaissait, où je pourrais respirer librement, sans attendre qu’on me regarde de travers ou qu’on me dise qui je suis censée être.
Je ne savais pas encore que ce voyage allait me mener à lui.
À Shawn.
Je ne savais pas que ce garçon, devenu étranger, allait faire fondre mes défenses une à une, avec sa patience, ses silences et ses regards brûlants.
Je ne savais pas que dans ses bras, je trouverais un refuge. Que sa voix deviendrait mon ancrage. Que sa maison deviendrait la mienne.
Je ne savais pas que je découvrirais l’amour dans sa forme la plus vraie, la plus douce, la plus imprévisible aussi.
Je ne savais pas, ce jour-là, que tout allait enfin commencer.