« Ma féminité est ma force, mon rouge à lèvres est ma signature. » — Kendall Jenner
Nova Núxta
Athènes, Grèce
"Ain't got no tears left to cry"
La voix d'Ariana Grande glisse dans l'air comme une caresse, se mêlant aux effluves voluptueuses des roses qui restent accrochées à mon épiderme.
L'eau du bain, tiède, embrasse mes courbes avec une douceur languide, laissant les pétales écarlates flotter autour de moi comme des vestiges d'une séduction impitoyable.
D'un geste paresseux, j'effleure le bord de la baignoire, mes ongles vernis d'un rouge profond contrastant avec mon teint olive, éclatant comme des étoiles dans la nuit. La lumière tamisée vacille, projetant sur les murs des ombres dansantes, sensuelles, presque menaçantes.
La nuit me réclame autant que je m'abandonne à elle. Elle murmure à mon oreille, me drape de son obscurité hypnotique et veille sur moi comme une maîtresse possessive.
Elle me rappelle qui je suis : une femme façonnée dans la cendre, et trempée dans la haine.
Dans la pénombre, les astres scintillent, témoins d'un monde dominé par la haine des hommes, où les femmes existent en silence, écrasées par des lois invisibles.
Je tends le bras vers la coupe abandonnée sur le marbre, l'attrape du bout des doigts avant de la porter à mes lèvres. Le vin pourpre caresse ma langue, s'infiltre comme un secret. Il a la saveur de la nuit, des secrets murmurés, de la tentation et du désir.
Une vibration brise le silence, écho lointain d'une réalité qui cherche à m'arracher à ma morosité. Mon téléphone, posé négligemment sur la coiffeuse, s'illumine d'un nom familier. Luce.
Un sourire s'étire sur mes lèvres. Lentement, je sors du bain, laissant l'eau ruisseler sur ma peau comme un amant délaissé. J'attrape un peignoir, me drape dedans puis décroche enfin.
— Τι θέλεις, γλυκιά μου;
( Que veux-tu, ma douce ? )
Ma voix s'élève, douce et langoureuse, teintée d'un rire discret.
— On a un problème.
Sa voix calme, assurée, résonne à l'autre bout du fil, mais une tension discrète se cache sous ses mots, presque imperceptible pour quiconque ne connaît pas Luce aussi bien que moi. Elle ne laisse jamais entrevoir ses failles. C'est ce qui la rend à la fois insaisissable et fascinante.
— Un problème..Quel mot délicieux.
Du bout des doigts, je caresse mon cou encore perlé d'eau, savourant la chaleur persistante du bain sur mon corps.
Dans le miroir, mon reflet m'observe, le regard brumeux, les lèvres encore marquées par le vin.
Une rose abandonnée repose sur le marbre, ses pétales alourdis par l'humidité.
Les problèmes ont toujours été ma distraction préférée.
— Λύσε το
( Résous-le )
— Tu sais bien que si je t'appelle, c'est que je ne peux pas.
Je soupire, amusée, en ajustant le peignoir autour de ma silhouette avec une lenteur calculée avant de me poser lentement sur le rebord du bain. Mon pied nu effleure le sol froid tandis que l'autre jambe, croisée avec élégance, dévoile un éclat de ma peau satinée sous la soie noire.
— Μην με κουράζεις
( Ne me fatigue pas. )
— Nova, c'est sérieux.
Elle marque une pause, comme si elle mesurait chaque mot avec précision.
— Viens seule.
Luce, sans un mot de plus, coupe l'appel dans un geste fluide, laissant l'écho d'un silence lourd s'installer.
Un rire bas, glacial, m'échappe, léger comme une menace. Je me redresse lentement, savourant ce moment suspendu. Mes doigts glissent sur mon rouge à lèvres signature Chanel, le frôlant d'une manière presque insolente.
Je l'applique avec une lenteur exquise, chaque geste précis, calculé, comme une danse sensuelle. Le rouge bordeaux, presque pourpre, se dépose sur mes lèvres avec une froideur envoûtante, m'enveloppant d'une aura impitoyable, puis je m'admire dans le miroir, séduisante, irrésistible.
Je fais ensuite glisser le peignoir de mes épaules, la soie se répandant autour de mes jambes avec sensualité. J'attrape une combinaison en cuir noir, moulante, sensuellement découpé pour épouser chaque courbe de mon corps. Le décolleté plongeant est parfaitement mesuré pour capter tous les regards, mais le véritable pouvoir réside dans ma posture, dans mon regard.
Je chausse mes Louboutins So Kate, leur talon aiguillant chaque pas d'une grâce assassine, empreinte d'un magnétisme fatal, chaque claquement résonnant comme une menace silencieuse.
Mon makeup est impeccable : un smoky eyes intense et des lèvres d'un rouge provocateur. La silhouette se dessine une telle perfection qu'elle en devient fatale.
Puis, j'enfile un long manteau de fourrure sombre, son poids luxueux drapant mes épaules avec une élégance indécente. La douceur du tissu contraste avec la froideur de la nuit, et chaque caresse de mes doigts sur la fourrure me rappelle l'aura à la fois dangereuse et envoûtante que j'incarne.
Comme une rose couverte d'épines, prête à écorcher ceux qui s'en approchent trop.
Je la sens avant même de la voir.
Luce.
Assise sur un siège en cuir brun, tel un spectre impassible, son regard acéré suit chacun de mes pas avec l'assurance insolente de celles qui savent qu'elles possèdent le monde. Elle est élégante, redoutable, une arme déguisée en femme. Son parfum de jasmin glisse jusqu'à moi, se mêle au mien, enivrant l'espace d'une sensualité glacée.
— Toujours aussi théâtrale. Nova.
Je penche la tête, amusée, le regard pétillant.
— Toujours aussi impatiente, Luce.
Ma voix traîne sur les mots, chaude et légèrement cassée, avec une profondeur irrésistible qui capte immédiatement l'attention. Mon accent grec se glisse subtilement dans certaines intonations, rendant ma diction douce et mélodieuse, avec une légère traînée dans les voyelles.
— Ce n'est pas moi qui ai pris une éternité à me préparer.
Je m'avance, mes talons frappant le sol avec un écho sec et impitoyable. Nos regards s'entrelacent, une tension palpable, une attraction douce-amère qui ne cesse jamais.
— Certaines choses méritent qu'on leur accorde du temps.
Je m'arrête face à elle. Le silence s'installe, vibrant, tendu comme un souffle suspendu entre deux battements de cœur. Il n'y a que peu de personnes avec qui je peux être moi-même, sans façade, sans jeu. Luce est l'une de ces précieuses exceptions.
— Έτοιμη ;
( Prête ? )
Elle ne répond pas immédiatement, se contentant d'un sourire en coin, avant de déposer lentement son verre. La chaleur du vin entre en collision avec la froideur de nos intentions. Le moment est arrivé.
— 'Ετομη
Mais quelque chose me manque. Une présence. Un éclat de voix, un rire trop fort, des talons qui claquent avec autant de hargne que de grâce.
Je fronce légèrement les sourcils.
— Et Stella ? Elle devait être là.
Luce soupire doucement, presque attendrie.
— Elle a eu un imprévu. Rien de grave. Elle nous rejoindra après. Elle aurait voulu te le dire elle-même mais..
Je secoue la tête, mon expression se détendant. Inutile qu'elle termine. Je comprends. Stella est comme nous : imprévisible, entière, libre. Et si elle n'est pas là ce soir, c'est qu'elle a une bonne raison. Mais ça ne m'empêche pas de ressentir le vide qu'elle laisse.
— Elle aurait pu m'envoyer un mot. Je déteste commencer sans elle.
Luce arque un sourcil, un éclat moqueur dans ses prunelles.
— Tu détestes surtout qu'elle t'ignore. Mais soyons honnêtes, tu serais partie même si elle t'avais suppliée d'attendre.
Je ris doucement, un rire bas, presque sensuel.
— Touché.
Le silence qui s'installe à la douceur d'un secret bien gardé. Mes doigts effleurent distraitement la manche de ma fourrure pendant que mon regard se perd dans la lumière tamisée. Mon esprit, lui, s'échappe ailleurs. Pas vers le danger qui rôde, non. Mais vers cet ancien observatoire de verre, notre refuge à toutes les trois.
Là-haut, entourées de poussières d'étoiles et de constellations effacées, on rêvait à voix basse. Luce, Stella et moi. Trois cœurs battant au rythme d'un monde qu'on comptait bien faire plier. Trois âmes étoilées, perdues dans l'infini. Trois étoiles filantes, prêtes à brûler le ciel.
Je reprends doucement :
— Elle me manque.
Luce hoche la tête.
— À moi aussi. Mais elle sera là au bon moment. Elle l'est toujours.
Je lève les yeux vers elle, un sourire doux flottant sur mes lèvres.
— Et toi, Luce, tu restes ?
Elle me fixe sans ciller, et sa voix glisse, basse, envoûtante, enveloppante.
— Πάντα
( Toujours )
Je tends la main, et elle la prend sans un mot, comme si le geste avait toujours existé.
Le geste est simple.
Mais il contient tout.
Les pactes silencieux. Les nuits sans sommeil. Les promesses d'éternité qu'on ne formule jamais, mais qu'on vit jusqu'à s'y perdre.
Nos doigts s'entrelacent.
Et pendant un instant, le temps se suspend.
La nuit s'ouvre devant nous, effrontée, parée d'étoiles et de promesses cruelles.
Mais ce soir, elle ne régnera pas.
Ce soir, elle nous appartient.
Je relâche sa main, lentement, comme on se détache d'un rêve.
Et puis dans un souffle, à peine un murmure contre l'intimité de la nuit :
— Tu le sens ?
Luce fronce légèrement les sourcils, son regard brillant d'un éclat sombre, presque absent, comme si elle captait une mélodie que seuls les plus perdus peuvent entendre.
— L'odeur de sa peur. Elle se faufile dans l'air, prête à éclater comme une étoile mourante.
Elle incline la tête, un sourire naissant au coin de ses lèvres, vénéneux et délicieux.
— Il croit qu'il contrôle encore tout, mais il va vite comprendre qu'il n'est qu'une étoile déchue, prête à s'éteindre sous la lumière de nos pas.
— Oui..et nous serons les seules à briller dans l'obscurité de sa chute.
Le murmure de ma voix flotte dans l'air, lourd de promesses, tandis que l'ombre autour de nous semble s'alourdir, prête à s'incliner devant notre pouvoir.
Luce sourit lentement, un sourire qui se veut à la fois tendre et cruel.
— La nuit sera notre empire, Nyx, et lui..il s'éteindra dans l'ombre de notre éclat.
Et la nuit retient son souffle.
Parce que ce soir.
Ce sont les reines qui mènent la danse.
Et même les ombres, ces spectres discrets, se courberont et s'inclineront devant nous, conscientes qu'aucune âme n'osera défier notre emprise.