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CHAPITRE 36

Comme les autres, Miranda compressait son bras. La prise de sang s'était effectuée dans la douleur et au prix de quatre essais. La jeune femme avait toujours eu de petites veines difficiles à trouver. Philémon l'avait charcutée encore et encore jusqu'à remplir ses quatre tubes à la propreté discutable avant d'arroser généreusement le trou à l'antiseptique. Le scientifique rangeait les échantillons soigneusement dans une mallette, prenant garde à les étiqueter correctement et ne pas les mélanger.

En silence, le groupe se préparait à mettre les voiles pour rejoindre le laboratoire. Philémon les avait avertis : la route ne serait pas sans danger. Des légumes avaient élu domicile sur une partie du chemin, ils allaient devoir être prudents. L'horrible sort de Rose restait dans les esprits de tout le monde. Personne ne voulait un autre accident de ce type si tôt après le dernier.

Miranda enfila son blouson et son sac à dos, puis, machinalement, se dirigea vers Blanche pour vérifier qu'elle avait bien toutes ses affaires. La fillette eut un mouvement de recul quand elle agrippa son sac sans dire un mot, ce qui fit hésiter la jeune femme. Elle finit par reculer d'un pas pour lui laisser un peu d'espace.

Elle hésita. Elle n'aurait peut-être pas d'autres occasions de discuter avec elle avant un moment. Autant le faire pendant qu'ils étaient encore à l'abri.

— Tu tiens le coup ? On ne t'entend presque jamais.

— Je vais bien, répondit-elle d'une petite voix.

Un silence gêné suivit ses mots. Miranda chercha du soutien auprès de Connor, ne sachant pas comment aborder le sujet de son manque d'émotions, mais comme d'habitude lorsqu'on avait besoin de lui, le carillonneur regardait ailleurs. Elle se sentit extrêmement seule.

— On n'a pas beaucoup discuté depuis ce qui est arrivé à ta sœur. Est-ce que tout va bien ? Je ne t'ai pas vu pleurer, ou... On s'inquiète un peu pour toi. Ce n'est pas un événement anodin.

— C'était dans l'ordre des choses. Les plus forts survivent. Elle n'était pas assez forte. Elle n'a jamais été assez forte de toute façon. Elle aurait dû partir il y a longtemps. Moi, je ne finirais pas comme elle, ou comme Bernard. Je suis forte comme toi.

Les épaules de Miranda s'affaissèrent. Elle resta de longues secondes yeux dans les yeux avec Blanche. La jeune femme n'avait pas réalisé l'influence qu'elle avait eue sur ses pairs. Sur les fillettes. Blanche agissait-elle de cette manière par imitation ? Était-elle devenue insensible à ce point face aux horreurs du monde ? Les temps le demandaient, mais était-ce toujours justifié ?

— Blanche... Je ne suis pas une héroïne. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Les choses que je fais, je les fais parce qu'il n'y a pas d'autres choix. Je ne suis pas la plus forte. Je ne sais même pas si je serais encore vivante demain. Il n'y a plus de forts et de faibles dans ce monde. Il n'y a que des gens qui font de leur mieux.

Miranda soupira face au regard d'incompréhension de la fillette.

— Écoute, je sais que... Je sais que je donne l'impression d'avoir la tête froide en toute circonstance, mais ce n'est pas vrai. J'ai peur. J'ai tout le temps peur, Blanche. C'est la peur qui me maintient en vie. La force n'y est pour rien. Connor, Frédéric, le scientifique... Ils ont survécu parce qu'ils sont restés cachés. Ils n'ont pas été forts. Ils ont été intelligents. Ce n'est pas mon cas. Bernard est mort par ma faute. Ta sœur est morte parce que je n'ai pas été assez vigilante. J'ai perdu Louise parce que j'ai manqué de me faire tuer. Je commets des erreurs, je suis loin d'être irréprochable. S'il te plait... Ne me prends pas en exemple. S'il t'arrive quelque chose parce que tu as fait un mauvais choix, c'est moi qui vais devoir en payer les conséquences, et je suis fatiguée de le faire. Tu comprends ?

Blanche ne répondit pas. Elle se contenta de détourner le regard.

— Je ne suis pas ta mère, Blanche. Ce n'est pas à moi de te dire ce que tu dois faire ou comment tu dois penser. Ce qui est arrivé à ta sœur, ce n'est pas juste. Ce n'est pas l'ordre des choses. Il n'y a plus d'ordre des choses, et sa vie ne valait pas plus que la mienne. Je ne vais pas te faire la morale, je serai bien mal placée pour le faire. Je veux juste que tu fasses attention, d'accord ? Le chemin que tu prends, il n'est pas sain. Plutôt que de rejeter tes émotions comme si tout ce qui s'est passé jusque-là était banal, parle-nous, d'accord ? On est là pour ça. Pour se soutenir les uns et les autres. Nous sommes tout ce qui reste de l'humanité, toi et moi. Prenons soin de nous. Tu peux faire ça pour moi ?

— Je... Je crois.

Miranda lui ébouriffa les cheveux et la laissa tranquille. Elle se releva et se retourna. Connor regardait la petite, les yeux dans le vague. Il ne tarda pas à croiser son regard. Miranda se tendit légèrement.

— Elle a raison, finit-il par dire, comme si les mots lui brûlaient la gorge. On n'est plus suffisamment pour trouver normal que des gens meurent autour de nous. Ça ne devrait pas l'être, jamais. Pour nous, c'est sans doute déjà trop tard, mais toi, tu as toute la vie devant toi, petite. Deviens ce que l'on ne pourra jamais devenir. Deviens le meilleur de l'humanité. Le futur, c'est toi. Pas nous. Je sais que ce monde n'est pas idéal pour grandir, et il ne le sera sûrement pas avant encore plusieurs années, mais on peut encore peut-être sauver ce qu'il reste à sauver. Alors, crois-nous quand on dit qu'on ne veut que ton bien, d'accord ? Tu n'as pas besoin d'être forte. Sois toi-même, c'est bien suffisant.

— Dites, intervint Lucrèce, quand vous aurez fini votre discours sur le pouvoir de l'amitié, les petites licornes et les jolis oiseaux, on pourra se mettre en route ? Je suis à deux doigts de dégueuler des arcs-en-ciel là.

Miranda leva les yeux au ciel face à tant d'empathie. Finalement, elle n'avait pas à rougir quand elle voyait la drôle d'énergumène en face d'eux. Lucrèce aurait pourtant gagné à écouter leur sermon, elle aussi. En retrait avec Philémon, Frédéric leur offrit un sourire compatissant.

Le groupe termina de se préparer, puis les survivants quittèrent les appartements. Philémon prit la tête de l'expédition avec Lucrèce. Blanche et Frédéric se retrouvèrent au milieu, comme à leur habitude, tandis que Connor et Miranda fermaient la marche quelques mètres derrière, prêts à réagir si un danger surgissait derrière eux. Ils adoptèrent rapidement un rythme de marche confortable.

Miranda n'arrivait pas à se retirer les mots de Blanche de la tête. « Je suis forte comme toi. » Un sentiment de culpabilité ne la quittait plus depuis. Elle n'avait jamais demandé à être prise en modèle. Devait-elle encourager son comportement ? Elle pouvait toujours apprendre à se battre à la gamine, à trouver des ressources par elle-même... Mais Connor avait raison sur un point : ce n'était pas de cette manière qu'elle s'inclurait dans une nouvelle société. Miranda savait qu'elle était trop solitaire. Trop égoïste parfois. Elle pensait d'abord à sa propre survie avant celle des autres. Elle pourrait sacrifier chacune des personnes de ce groupe si ça lui permettait de retrouver Louise plus rapidement.

Enfin... Peut-être plus maintenant. Bien malgré elle, elle avait fini par faire confiance. À Bernard, aux fillettes, à Frédéric... À Connor, qu'elle avait fini par suivre dans ce plan idiot sans même y réfléchir davantage. Elle avait changé depuis le début de ce bazar. En mieux ? En pire ? Elle ne savait plus. Tout se mélangeait dans sa tête.

— Tu as bien fait de lui parler, lui dit Connor à côté d'elle, comme s'il lisait dans ses pensées.

Miranda se tourna vers lui, surprise qu'il lui adresse la parole. Quand s'étaient-ils rapprochés ? Depuis son retour, elle n'était plus autant sur ses gardes que la dernière fois où ils s'étaient quittés. Elle n'était toujours pas certaine de lui faire confiance entièrement, mais si elle devait être honnête, il restait la personne sur laquelle elle s'appuyait le plus dans ce groupe hétéroclite. Même si elle commençait à apprécier Lucrèce, cela faisait trop peu de temps qu'elle avait rejoint leur groupe pour se faire une idée de sa vraie personnalité. Quant à Frédéric, discret, il n'avait pas l'air d'avoir spécialement envie de les connaître plus que ça. Il les suivait et les aidait au besoin, mais ni Connor ni elle n'était parvenu à obtenir plus d'informations sur son passé. Depuis que Miranda l'avait tiré des griffes de Bruce, il semblait distant. S'il annonçait les quitter du jour au lendemain, Miranda ne serait pas surprise.

— Je ne sais pas, avoua-t-elle. Je ne suis pas sûre qu'elle ait compris ce qu'on ait voulu dire.

— On aura au moins essayé. Laisse-lui le temps de réfléchir par elle-même. Si être parent m'a appris quelque chose, c'est que nos têtes blondes cogitent beaucoup plus qu'on ne le pense. Ce sont des éponges à émotions. Je suis sûr que les choses vont s'arranger.

Miranda réserva son jugement. Devant elle, Blanche se retournait régulièrement, comme si elle sentait qu'ils parlaient d'elle. La jeune femme soupira.

En relevant la tête, elle se rendit compte que Connor l'observait toujours, avec... Quelque chose dans le regard. De l'inquiétude ?

— Quoi ? demanda-t-elle, sur la défensive.

— Je ne sais pas, c'est toi qui n'arrêtes pas de soupirer. Je ne t'ai même pas entendu te plaindre de ce trajet.

— Qu'est-ce que je suis supposée comprendre là ?

— Rien de particulier. Je commence simplement à me demander si Blanche est la seule à avoir été affectée par les récents événements. Tu ne te confies jamais à personne, je l'ai bien compris. Mais... Si jamais tu veux parler, je suis là, d'accord ? Je sais que... Qu'on n'a pas franchement démarré de la bonne manière. Je reconnais aussi avoir abusé un peu de la situation. Mais je voulais que tu saches qu'il n'y a aucune rancune de mon côté. Peu de personnes auraient cru cette histoire d'extraterrestres, et encore moins suivi sur une piste qui risque de ne mener à rien. Malgré nos différences, je suis content de te compter dans ce groupe.

Miranda ne put retenir un haussement de sourcil. Elle ne savait pas si elle était touchée ou suspicieuse vis-à-vis de cette déclaration qu'elle n'avait pas vue venir. Elle aurait aimé répondre qu'elle aussi commençait à comprendre son utilité dans ce groupe, après tant d'insistance de sa part pour arriver à ce résultat, mais le sarcasme ne réussit pas à franchir la barrière de ses lèvres. Elle n'avait plus le cœur à l'antagoniser.

Peut-être qu'il avait raison.

Les derniers événements avaient changé quelque chose. Elle ignorait quoi, mais elle le sentait, elle aussi.

— Je ne vais pas mentir, ce genre de trucs, dit-elle en pointant vaguement Connor de la main, ce n'est pas trop ma came. Mais... Je suppose que je peux faire un effort après tout ce qu'il s'est passé. Je ne suis pas certaine de pouvoir tout pardonner, après tout, Louise a disparu sous ta responsabilité, mais je peux... Essayer d'être plus... De faire plus attention à ce que je dis.

— C'est un début, ça me va.

Lucrèce et Philémon ralentirent la marche. Miranda et Connor se lancèrent un regard inquiet, avant de trottiner pour rejoindre le reste du groupe.

— Il y a un problème ? chuchota la jeune femme, au cas où un intrus les observait.

— Regarde au milieu de la route, sous la plaque d'égout, lui indiqua Lucrèce.

Miranda s'accroupit pour observer ce que leur alliée avait repéré. Au centre de la route, une plaque était en effet légèrement surélevée. Plusieurs feuilles dépassaient du conduit.

— Je n'arrive pas à voir ce qui se trouve dessous. Il y a un moyen de contourner ?

— Peut-être en prenant à droite, répondit Philémon, mais ces feuilles sont partout ici. Regardez.

Il pointa une grille un peu plus loin, située contre un bâtiment. Les mêmes feuilles débordaient sur le trottoir.

— Je suis déjà passé par ici, il ne s'est jamais rien passé, dit Philémon. Si on reste discret, ça ne devrait pas les énerver de trop.

Miranda n'avait pas très envie de marcher au-dessus d'un nid géant de légumes non identifié. Elle passa en revue son Végétodex dans sa tête, à la recherche d'un légume qui pourrait correspondre à cette description, en vain. Il n'y avait pas assez d'informations. Elle se tourna vers Connor.

— On peut tenter d'y aller en file indienne, proposa le carillonneur. Si quelqu'un repère un mouvement, on se replie immédiatement. Faisons-lui confiance.

Cette dernière phrase s'adressait à elle tout particulièrement. Miranda serra les dents. Elle décida de se ranger à l'avis général, bien malgré elle.

Elle était fatiguée de rester sur ses gardes. Si les autres pensaient que c'était sécurisé, alors elle aussi. Advienne que pourra. 

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8 days ago
Je suis enfin à jour :D Ouarf la mort de Rose, je ne m'y attendais pas ! Maintenant je sais qu'il ne faut pas que je m'attache trop à un perso xD
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