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LeenFeuerwisp
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Chapitre 6 - Une invitation impromptue

Rob

J'abattis la faux dans un geste net et précis, arrachant le foin sur mon passage. Mon oncle était quelques mètres plus loin, réalisant les mêmes gestes que moi afin que le travail se fasse plus vite. Ma tante passait parfois avant de nous hydrater et nous la remercions pour cela. Nous avions commencé depuis l'aurore et maintenant, nous étions sous le soleil frappant de midi. Mon oncle était courbé sous son chapeau et je sus qu'il ne tiendrait pas longtemps.

Je passai mon bras sur mon front, chassant la sueur et réitéra la coupe. Nous nous étions occupés de plus de la moitié et à ce rythme, nous aurions fini dans quelques heures, mais avant ça, il fallait du repos. Je lâchai ma faux et me dirigea vers mon oncle qui suait à grosses gouttes. Il me lança un regard épuisé en me voyant arrivé, mais continua ses mouvements rendus dangereux par la fatigue. J'interceptai l'un d'eux et posai une de mes mains sur son épaule.

— Il faut te reposer. Allons prendre un déjeuner et nous reprendrons en suite.

Il hocha la tête. Il n'avait aucune conviction de résister face à ma proposition. C'était tentant et il mourrait d'envie de se reposer. Il laissa la faux dans ma main et me contourna pour regagner la maison. Je le regardai y aller, déposai la faux au sol et m'apprêtai à le rejoindre lorsque je sentis une aspérité sur la terre. Je baissai la tête et vis que dans les traces de pas de mon oncle se trouvait celle d'un animal et une petite bute de terre quelques pas plus loin prouver qu'il c'était mis à courir.

Je me baissai, passai ma main dans la terre humide et fermai les yeux. J'inspirai, l'odeur du foin et de la boue envahissant mes narines. C'était une brebis, l'une des nôtres, mais quelque chose l'avait fait fuir d'ici. Je me redressai et suivis ses petits pas saccadés. Elle avait eu suffisamment peur pour courir à un petit bond vif. Je suivis sa trace jusqu'au petit ruisseau qui marque la fin de notre propriété. Je m'accroupis et posai ma main sur la tête de la petite brebis qui avait été ouverte à l'abdomen.

Ses yeux étaient vitreux, mais elle respirait toujours. Elle ne tiendrait pas, mais c'était arrivé il y a peu. On avait éviscéré cette petite bête. Je la caressai, lui offrant peut-être une mort plus douce que mourir seul dans une agonie terrifiant. Son dernier souffle lâché, je me tournai vers la touffe d'herbe haute quelques pas plus loin. Celle-ci remua vivement et un petit dragon en sortit. Enfin, plutôt qu'un dragon, c'était un héraut. On disait souvent que les hérauts transmettaient des messages de Thiel.

Je tendis la main et il vint s'y frotter joyeusement, la gueule couverte de son repas sanglant, mais surtout, un petit message était enroulée à sa patte. J'y défis le petit nœud et y vis le sceau de Thiel. Je lus le message écrit de sa main. Je me laissai tomber au sol, refermer le message avant de l'accrocher à la patte du héraut. Je grattai sa tête avant de lui faire signe de s'en aller. Il fit un grand bond, sautant de l'autre côté du ruisseau et bondit encore une fois avant de prendre son envole.

Son corps semblait trop lourd pour lui. Son corps pendait tandis que ses ailes battaient aussi frénétiquement que celle d'un papillon. C'était ridiculement amusant à vrai dire. Je le regardai disparaître dans les nuages avant de rebrousser chemin, le cadavre de la pauvre brebis sur le bras. Elle avait été au mauvais endroit au mauvais moment. Les hérauts étaient de vrais gloutons qui chassaient des proies deux fois ou même dix fois plus grosses qu'eux et ne finissaient jamais.

Chaque être vivant méritait le respect, alors après avoir pris une des pelles de la ferme, je creusais à quelques mètres de la maison, loin des champs. J'y glissai le cadavre de la bête et refermai le trou. Je soupirai et posai la pelle contre l'arbre qui était juste à côté. Les hérauts n'étaient que des gaspilleurs.

Lorsque je me retournai pour retrouver la maison, mon cœur cessa de battre. Je crus rêver, encore une fois, mais si ça avait été réel hier, ça l'était aujourd'hui encore. Une flopée de papillons mit mon estomac sens dessus dessous alors que je m'élançai vers Lunathiel qui se préparait à toquer à notre porte. Il était beau aujourd'hui encore, tout de blanc vêtu comme un ange descendu sur terre. J'interceptai son geste, le cœur fou. Il sursauta et un sourire radieux mangea son visage candide.

Je baissai ma main en constatant que mes mains étaient couvertes de sang et je me détournai de lui afin d'aller arranger ça. Je partis hâtivement vers le premier coin d'eau pour arranger ça. Je frottai énergiquement afin de ne pas le laisser attendre trop longtemps. Finalement, son visage m'apparut, baissé juste à côté de mon épaule.

— Vous n'avez tué personne, n'est-ce pas beau dragon ?

Je me rembrunis.

— Je ne suis pas un dragon, marmonnai-je, et je n'ai tué personne. J'ai enterré une brebis qui a été éviscérée.

Il grimaça et hocha la tête.

Je secouai mes mains, l'essuyai sur mon pantalon que le sang de l'animal avait épargné contrairement à mon haut. Je me redressai et me mis face à lui avec l'impression que ma poitrine se soulevait réellement avec la force à laquelle battit mon cœur. Lunathiel et son air angélique à croquer n'étaient qu'à quelques centimètres de moi ; lui et ses lèvres si douces et aussi bonnes qu'un gâteau de lait ; lui et sa voix cristalline. Ses beaux orbes blancs aux mille reflets m'examinèrent et je devinai qu'il cachait quelque chose dans son dos.

— Éloignons-nous un peu, murmurai-je. Ma tante et mon oncle se reposent pour le moment. Il n'aimerait pas trouver un noble sur leur terrain, de peur d'avoir des problèmes.

Et si j'avais ressenti de la faim, elle avait complètement disparu. Mon estomac était plein désormais.

— Et pas vous ? s'intéressa le bel ange.

— Pas lorsque c'est vous.

Ma confession sembla lui plaire puisqu'il glissa sa main dans la mienne, ne se souciant pas de la saleté que je n'avais pas réussi à enlever sous mes ongles. L'autre était toujours dans son dos et je crus discerner une chose noire, mais je m'en désintéressai. Je refermai mes doigts sur les siens et le tira à ma suite. Nous marchâmes quelques minutes, jusqu'au champ de blé qui n'avait pas été récolté et qui était suffisamment haut pour nous dissimuler une fois assis.

Nous avions marché dans un silence agréable, main dans la main, et sa chaleur s'était diffusée dans mon corps. Je mourus de bonheur et ne me souciai même plus de mon visage qui brûlait. Je m'arrêtai au milieu du champ, me tournai vers lui et crus mourir en le découvrant encore plus angélique dans ce décor. Avec le soleil qui tapait le blé et le rendait doré, Lunathiel semblait avoir une auréole autour de lui, ou alors étais-je trop fou de lui pour voir autre chose.

— Je... Je n'ai pas de veste pour que vous puissiez vous y asseoir aujourd'hui, bégayai-je.

— Hum, ce n'est pas grave.

Je crus qu'il allait s'asseoir, mais il me fit signe de le faire et je relâchai sa main après une seconde d'hésitation, mécontent de perdre ce contact des plus agréables. C'était pourtant bien plus que je ne pouvais espérer de lui ! Je devenais trop gourmand. Je me laissai tomber au sol avec résolution quant à calmer ce péché, mais à peine avais-je mis les fesses au sol que Lunathiel vint confortablement s'installer sur moi. Je me raidis autant que mon corps me le permit.

J'ouvris de grands yeux alors que ses longues jambes élancées s'étendirent devant lui, frôlant mon poignet. Une vague brûlante coula dans mes veines et je retins mon souffle, comme si ça allait retenir celle-ci de descendre dans une région sud !

— J'ai un présent pour vous. En gage de remerciement, mais aussi pour autre chose...

Il posa le paquet noir sur ses cuisses. C'était en réalité enveloppé d'un tissu noir et duveteux et décoré d'un large nœud doré. C'est un emballage de qualité, entièrement luxueux, et j'avais peur de découvrir ce qu'il pouvait y avoir à l'intérieur. Je le regardai et son petit air impatient me rendit ainsi également. Je tirai sur le nœud afin d'ouvrir le tout et restai interdit. Je lui jetai un regard auquel un léger sourire gêné me répondit.

— Ce soir, si... si je ne suis pas accepté par un dragon de flamme, les nobles ont préparé la fête de Redorance. Et... même si vous n'osez pas m'avouer que vous êtes un dragon, vous en avez cruellement l'apparence, alors vous mélanger à la Redorance ne sera pas un problème puisque tout le monde n'y verra que du feu. Il ne vous manquait qu'une tenue.

La Redorance était une fête très fermée pour les nobles de grandes familles qui avaient échoué à être un libéré de bon rang. Un ether ou un feu étaient le minimum pour un noble et après ça, c'était plus des catégories de déshonneur. Alors la Redorance était là pour les dragons vagabonds, de bonnes catégories, qui allaient « courtisés » les nobles. C'était la seconde chance des nobles. Mais qu'est-ce que, moi, je venais faire dans cette histoire ? Et puis surtout...

— Vous serez assurément choisi par un dragon de flamme, murmurai-je. Pourquoi m'offrir ça ?

— J'aimerais que vous veniez à la Redorance afin de me courtiser.

La tenue était assurément très belle. À l'image de son emballage, c'était une tenue en velours noir brodé d'or. Ça avait dû coûter une vraie fortune et quelque chose semblait m'échapper.

— C'est aujourd'hui la cérémonie pour les libérés convoqués par les flammes. Vous risqueriez d'être en retard.

Mon cœur s'étreignit douloureusement lorsque son sourire disparut, mais ce qu'il me demandait là semblait un peu surréaliste. Il allait assurément réussir le « test » d'aujourd'hui alors pourquoi il jouait avec mon cœur comme ça ? S'il réussissait aujourd'hui, ce qui allait être le cas, il n'allait pas avoir besoin de la Redorance. Ça me frustrait. Je trouvais ça vraiment cruel.

— Est-ce que je vous ai... vexé ? s'enquit-il doucement. Si c'est le cas, je suis véritablement navré. Je... Je n'ai pas remarqué que c'était aussi déplacé. Vous avez certainement raison.

Il referma le paquet et sentir son poids s'alléger sur moi me fit paniquer. Je le retins par la main, incapable de le laisser partir. La raison aurait voulu que je le laisse s'en aller parce qu'il n'y avait rien de raisonnable à sa demande, mais... impossible pour moi de faire ainsi.

— Est-ce que vous avez un libéré ? demanda-t-il.

Je soupirai alors que son poids revenait sur moi. Je relâchai son poignet et ses mains glissèrent immédiatement autour de mon cou avant de poursuivre leur course dans mes cheveux. Il rapprocha nos visages à quelques centimètres l'un de l'autre et je me sentis rougir. Lui aussi. La légère rougeur sur ses joues était craquante.

— Je ne veux pas que vous en ayez. Et si... vous me choisissiez ?

Quoi ? Qu'est-ce qu'il... Je ne comprenais pas. Il avait pourtant été détruit hier quand « Sent Equin » ne l'avait pas choisi et puis il m'avait embrassé, nous nous étions embrassés et aujourd'hui il revenait avec des demandes plus folles les unes que les autres. Pourquoi ? Qu'est-ce que je ne comprenais pas au juste ?

— Je suis un roturier, précisai-je, alors je ne peux rien vous offrir. Et... « Sent Equin » ?

Ses sourcils se froncèrent et que ce simple geste m'hypnotise autant me désespérait.

— Sent Equin n'a pas su saisir sa chance et puis je ne vous avais pas encore rencontré. Je vous l'ai dit. Je suis tombé sous votre charme.

— Lunathiel, murmurai-je alors que ses lèvres frôlaient les miennes.

— Aussi fou et insensé que cela soit. Je vous prends comme vous êtes, dragon ou homme.

C'était fou, oui, et bien trop insensé ou plutôt inattendu pour que j'ose y croire. Ses lèvres glissèrent sur ma joue dans une caresse qui alluma mes reins et je voulus moi aussi le toucher avec l'aisance dont il faisait preuve. Ses longs doigts fins s'accrochaient à mes cheveux alors que sa bouche mutine embrassait mon cou ici et là. C'était doux, merveilleusement doux et chaque fois que sa peau touchait la mienne, je croyais défaillir ou pire, exploser !

— Lunathiel, j'ai beaucoup transpiré, me plaignis-je.

Il sentait les herbes et les fleurs de bain. Je sentais la sueur et ce n'était absolument pas comparable ! Je lâchai un gémissement lorsque ce bel ange fit glisser sa langue sur mon cou et continua ainsi en mêlant sa langue humide à ses baisers.

— Vous allez être en retard pour votre cérémonie !

Plus je me laissai aller avec lui et plus j'avais envie de fondre dans ses bras. Il rigola doucement et raffermis sa prise. Ma peau se fit aspirer par sa délicieuse bouche et je crus sincèrement que mon pantalon allait exploser. Je me sentais si honteux. Il devait le sentir sous sa cuisse. Par Thiel !

— Rob !

Je sursautai en entendant la voix de ma tante. Je plaquai la tête de Lunathiel dans mon cou, plongeant mes doigts dans ses beaux cheveux lunaires, avec la surprise. Lunathiel cessa ses attentions et je déposai à la hâte le paquet sur le sol avant de soulever Lunathiel afin de me relever. Debout, je vis ma tante beaucoup plus loin. Lorsqu'elle me vit, elle agita vivement la main dans un signe qui me demandait de venir. Je lui fis également un signe de main, heureux qu'elle ne puisse pas voir l'état de mon visage.

Lunathiel avait enroulé ses bras autour de ma cuisse et son regard malicieux sur moi me rendait encore... plus dur que je ne l'étais et dans cette position, nul doute que Lunathiel était en première ligne pour le voir. Je posai une main sur sa tête, profitant pour lui accorder quelque caresse et la façon qu'il eut de frotter son visage contre ma main menaça de briser mon contrôle. Ma tante repartit et je m'accroupis à nouveau, obligeant Lunathiel à lâcher prise.

Il me sourit, très visiblement fier de lui, et il déposa un léger baiser sur mes lèvres.

— Au plaisir d'être intime avec vous encore, susurra-t-il. J'espère que vous considérerez à nouveau ma demande de venir à la Redorance. J'aimerais sincèrement me perdre dans vos bras plutôt que dans les bras d'un autre dragon.

Il se releva et je fis de même. Sa main se posa sur mon bras qu'il pressa, mordillant outrageusement sa lèvre et jouant d'un regard... lubrique ?

— En espérant vous revoir très, très bientôt, Rob.

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