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FubukiANDHylas
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Chapitre 3

Toutes les deux marchaient dans le silence le long des couloirs du domaine, seulement éclairé par la lueur d'une bougie que Sotiras tenait sur un bougeoir. Sur le chemin, la nouvelle arrivante observait tant bien que mal ce qui l'entourait, non pas pour essayer de rebrousser chemin et fuir, elle ne savait que trop bien qu'elle serait perdante si elle retournait dans les rues de la ville, mais simplement pour essayer de s'imprégner de ce lieu étrange. Des choses aussi inexplicables, elle n'en avait jamais vu autant en une soirée, mais étrangement, elle n'était pas vraiment surprise. Alors qu'elles marchaient, la demoiselle réfléchissait en même temps à sa condition, pour elle, l'appellation “employée de maison” était juste une jolie manière de dire “esclave”, mais elle n'allait pas s'en plaindre, pour une fois, ses conditions n'avaient pas l'air aussi terribles, même finir en “repas” n'avait pas l'air aussi affreux que ça. Savoir qu'elle aurait enfin sa propre chambre, un bain avec de l'eau claire et sûrement même des repas chauds, c'était le paradis. 

Après un temps qui paraissait infini, les deux s'arrêtèrent devant une porte dont Sotiras ne tarda pas à enclencher la poignée, laissant passer la demoiselle avant de passer sa main au mur. Une petite détonation se fit et un lustre avec quelques bougies s'alluma. 

— Ici sera ta chambre, la clé est dans ton armoire, commença le bras droit du Maître. Tu pourras trouver différentes tenues, si elles ne te plaisent pas, nous pourrons chercher du tissu au village. Les tenues de travail sont à gauche et celles de repos à droite. 

La jeune femme était complètement ébahie face à cette pièce qu'elle trouvait immense. C'était la première fois en 24 ans d'existence qu'une chambre lui était attribuée et qu'elle avait enfin des affaires rien qu'à elle, que personne n'avait préalablement portées et usées. Ajouté à ça un lit, un vrai, avec un matelas certainement pas infesté de puces, d'autant plus avec un sommier, des oreillers et une couette. Fini les couvertures fines avec du papier, se batailler pour ne pas mourir de froid ou même se lever avec un mal de dos. Puis, alors qu'elle s'émerveillait, une odeur douce et divine se mit à lui chatouiller les narines, ses yeux se posèrent instantanément sur la table où était disposée une cuisse de poulet et des légumes, son ventre se mit à gargouiller aussitôt. 

— Ah... pardon... fit-elle, la main posée sur son ventre. 

— Tu n’as pas à t’excuser, ce repas est pour toi, alors ne te sens pas embarrassée, tu devrais manger tant que c’est chaud. 

Alors que la jeune femme s'assit sur la chaise, commençant à manger avec appétit, la seconde femme lui prépara un pyjama, la journée avait été longue et éprouvante pour tout le monde. Elle s’apprêtait à sortir, mais lui dit avant : 

— La salle d’eau est au bout du couloir, je laisserai la porte ouverte pour que tu puisses t’y retrouver. 

— Merci, Sotiras... 

Un signe de tête de la part de celle-ci et elle fila déposer le change dans la salle de bain, mais à peine avait-elle eu le temps de faire trois pas qu’un petit gobelin venait déjà la chercher. 

— Le... le..., balbutia-t-il complètement essoufflé. 

— Calme-toi et reprends ton souffle. 

— Ou... oui, madame. Le... hum... le Maître vous demande, madame... 

— Je dois d’abord déposer ça, montra Sotiras à la petite créature. 

— Je le ferai pour vous, dit-il en tendant les bras. 

À ses mots, la demoiselle déposa les vêtements dans ses bras et partit sans rien ajouter vers le bureau du Maître. De son côté, il était difficile pour Eileen de se souvenir du jour où elle avait mangé à sa faim, encore plus avec un repas aussi délicieux que celui-là. Une fois fini, le ventre bien rempli, elle se hâta en direction de la salle de bain. Heureusement pour elle, la porte était ouverte et de la lumière s'en dégageait, comme avait dit Sotiras, car dans le noir il était difficile de se repérer, d’autant plus dans un lieu qu’elle ne connaissait pas. Une fois face à la porte, elle toqua et une voix masculine lui répondit aussitôt. 

— Ah ! Tu es encore entière à ce que je vois, tu as réussi à survivre à Sotiras en mon absence ? 

La jeune femme ne put s'empêcher d'esquisser un sourire à la remarque de l’angelot. 

— Sache, qu'elle est beaucoup plus gentille quand tu es absent, répondit-elle d'un ton moqueur. 

— Bien joué, tu m'as eu ! Mais ce n'est que partie remise. Bon, le bain est prêt, je vais aller la chercher là-bas pour qu'elle t'aide à te nettoyer, tu peux déjà te déshabiller et t'installer dans la baignoire. 

— Très bien, merci beaucoup. 

Le brun lui fit un petit hochement de tête tout en lui offrant un sourire chaleureux avant de sortir de la pièce, laissant seule la demoiselle qui se déshabilla et entra dans la baignoire en un rien de temps. L’eau chaude sur sa peau lui procurait un bien fou, la détendant instantanément. Ça lui changeait des douches froides prises à la hâte. 

Sur le chemin pour chercher Sotiras, Ezra tomba sur un gobelin, lui demandant ainsi s'il n’avait pas vu sa comparse à la chevelure de feu, il lui indiqua qu’elle avait été appelée au bureau du Maître. Il remercia le petit être avant de partir à la salle indiquée. Une fois devant, il toqua et, avec l’autorisation, il entra. 

— Veuillez m’excuser, Maître, je voulais juste indiquer que la demoiselle était dans son bain et attendait Sotiras. 

L’homme fit un simple hochement de tête, laissant la démone repartir avec le brun. Sur le chemin, il essayait du mieux qu’il pouvait de tirer les vers du nez pour savoir le pourquoi du comment elle avait été dans le bureau de Monsieur. 

— Alors, de quoi vous parliez, le Maître et toi ? fit-il avec son petit air curieux. 

Mais son amie ne lui répondit pas, complètement perdue dans ses pensées. Malgré plusieurs tentatives de son acolyte d’attirer l’attention vers lui, il finit par abandonner, continuant le chemin en silence. Arrivé à la salle d’eau, il posa sa main sur son épaule, lui souhaitant une bonne soirée avant d’aller se poser dans sa chambre. Elle frappa aussitôt à la porte, faisant sursauter la femme dans le bain et d’une petite voix, qui répondit : 

— Oui... ? 

— C’est Sotiras, fit la rouquine qui entra dans la pièce. 

À l’intérieur, la femme ferma la porte à clé et passa sa main sur l’entrée de la serrure, bouchant le petit trou pour que les plus curieux ne puissent pas jeter un œil non sollicité. Toujours dans ses pensées, c’est un peu machinalement que la démone se posa à genoux aux côtés de la jeune rousse, commençant à délicatement lui frotter le dos, laissant le devant se faire savonner par la nouvelle arrivante. Sotiras estimait, bien qu'elle la voyait déjà en tenue d'Eve, que son intimité lui appartenait et qu’elle n’avait pas à la toucher tant qu’elle ne sollicitait pas son aide. Malgré la fatigue présente, c’était un moment apaisant, calme et silencieux. En quelques frottements, l’eau se troubla à vue d’œil, signe de la crasse installée au fil des mois à ne pas pouvoir se doucher correctement. 

Une fois le corps bien savonné, Sotiras réchauffa en un claquement de doigts l’eau claire dans une bassine, mais à peine avait-elle eu le temps de se retourner, que la jeune fille qui peinait à se laver les cheveux reçut du savon dans les yeux et s’exclama : 

— Sotiras ! À l’aide ! À l’aide ! J’ai du savon dans l’œil, ça pique ! Je ne vois plus rien, au secours ! 

La rousse se retourna, sortit complètement de son état second, regardant quelques secondes la deuxième se débattre avec sa tête pleine de mousse, elle ne put s’empêcher d’éclater de rire. 

— Il faut rincer voyons, essayant tant bien que mal de lui verser de l’eau propre. Arrête de bouger ! Si tu gigotes partout, on ne va pas y arriver ! 

— Mais je n’y peux rien, moi, si ça pique ! 

Une fois que l’eau filet sur sa paupière et qu’elle put dégager la mousse, elle s’exclama à nouveau. 

— Ahhhh ! Ça fait du bien ! Ça va beaucoup mieux, ouvrant grand les yeux et remerciant la dame avec un grand sourire. 

— Plus qu’à te rincer les cheveux, et on aura fini ! Mets ta tête en arrière et pose tes mains sur tes yeux, ça va éviter le même scénario. 

Il fallut plusieurs minutes aux filles pour réussir à extraire tout le savon des cheveux. Les pauvres étaient dans un état catastrophique, des nœuds partout, des longueurs abîmées par le temps et une coupe qui méritait un rafraîchissement. 

Quand elles eurent enfin fini la douche, Sotiras chercha une serviette pour que la fille puisse s’en envelopper dedans. 

— Tu sais qu’on ne sait toujours pas ton nom ? 

— En effet. Mais j'avais cru comprendre que "bout de viande", "repas", "esclave", et "bétail" sont des surnoms qui vous tenaient particulièrement à cœur. Je n'avais donc nullement besoin de vous révéler mon prénom, dit la jeune femme d'un ton taquin et moqueur en s’enroulant dans la serviette que son interlocutrice tenait. Elle sortit de la baignoire. 

La rousse à la chevelure de feu secoua sa tête avec un petit sourire amusé. 

— On peut continuer de t'appeler ainsi si tu le souhaites ! 

— C’est à vous de voir, mais si jamais les petits surnoms attendrissants que vous me donnez ne vous amusent plus, vous pourrez m’appeler Eileen, répondit la demoiselle à son interlocutrice tandis qu’elle se séchait. 

Voilà enfin un nom à ce visage et ce corps abîmés par le temps. Eileen, dorénavant sèche, prit la chemise de nuit et les sous-vêtements qu’on lui avait posés sur un meuble, tandis que la démone préparait tout un tas de choses sur un autre : des ciseaux, plusieurs brosses, des peignes de toutes formes et diverses concoctions qui dégageaient des parfums exotiques. 

Habillée, la demoiselle à la chevelure en pagaille se posa sur la chaise qui l’attendait, jetant un coup d’œil aux produits face à elle. Avec tout ce qui était disposé, elle comprenit vite que ses cheveux étaient certainement semblables à un champ de bataille. Saisissant une crème démêlante, la démone en donna une noisette à Eileen pour qu’elle puisse en appliquer aussi, afin d’alléger le travail. Elle commença donc à étaler la crème avant de faire des sections et démêler petit à petit. Eileen retenait quelques râles qui chatouillaient le bout de sa langue. Les nœuds passant dans la brosse n’étaient pas très agréables. 

— Étant donné que tu restes plus longtemps, il va falloir que je t’informe d’une nouvelle règle : tu as interdiction de te rendre dans l’aile Ouest du manoir. Seuls le Maître et moi y sommes autorisés. 

— Et que se passera-t-il si, par mégarde, je m’y aventure ? 

— Je ne te garantis pas que le Néant ne t’engloutisse pas. 

— Bien... très bien... je ferai en sorte de ne pas y aller. 

Un petit silence se réinstalla à nouveau entre les deux. Sotiras était bien concentrée pour ne pas trop faire mal à la jeune fille. Un miroir était aussi installé face à Eileen, pour qu’elle puisse constater l’évolution capillaire qui s’opérait derrière elle. Mais pour le moment, elle était plus préoccupée par Sotiras qui avait encore l’air dans ses pensées. 

— Quelque chose ne va pas ? Tu as l’air ailleurs. 

— Mmh... ? Oh euh... je pensais encore à tout à l’heure. Ce n’est pas dans mes habitudes de faire du mal comme ça. Encore moins en sachant comment tu devais finir. 

— Sotiras, je comprends. Je t’ai moi aussi répondu, avec des mots durs, certes, mais je l’ai fait. C’est une soirée particulière et le fait que Ezra ait dépensé autant pour..., elle avala sa salive, moi t’as surprise. Ce n’est pas parce que je viens de la rue que je suis stupide. 

— Je n’ai pas dit que tu étais stupide, simplement je... 

— Sotiras, je ne t’en veux pas, elle se tourna vers la femme, et si on recommençait à zéro ? Salut, moi c’est Eileen, finit-elle avec un grand sourire. 

La démone se mit à sourire doucement, baissant la tête amusée, puis la releva en prenant un air sérieux. 

— Sotiras, enchantée. Puis-je continuer de démêler votre chevelure de lionne ? 

— Avec plaisir ! Faites, faites ! 

La soirée continua, le démêlage des cheveux d’Eileen avançaient plutôt bien. Les deux femmes continuaient de papoter en toute tranquillité malgré la fatigue qui commençait à peser sur les paupières. Une dernière coupe avant de révéler le tout. 

— Oh waouh... Ça fait des mois que je n’avais pas vu mes cheveux ainsi... Merci beaucoup, je me sens un peu plus jolie maintenant. 

— Avec plaisir, allez, file de là. Demain, il va falloir se lever tôt pour que je puisse te faire visiter. 

— Bien ! Mais tu ne veux pas un peu d’aide pour nettoyer ? 

La démone lui fit signe de s’en aller, lui donnant un bougeoir pour qu’elle puisse s’y retrouver dans la nuit. C’était une journée particulière, elle qui pensait encore rester dans la rue pendant des années, voilà donc qu’Eileen se retrouvait sur la montagne la plus crainte de tout Bryminster, dans un endroit étrange, avec des personnes bizarres. Pourtant, la seule question à qu’elle se posait, était pourquoi finirait-elleq en repas ? Le Maître était-il un cannibale ? Ou était-ce encore autre chose ? 

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