Dorian. 17 heure 32. Vancouver, Colombie-Britannique.

Je suis assis à la table de cuisine seul, ma mère n'avait pas envie de quitter l'hôpital, mais elle m'a forcé à partir pour que je mange et que je me repose. Je regarde mon assiette, mais je ne la touche pas, elle est encore pleine de nourriture, je ne sais pas pourquoi, j'ai fait un repas alors que je n'ai pas faim.

Ils m'ont promis qu'il n'allait pas mourir si je ne suis pas présent. Je sais qu'ils ne peuvent pas choisir, mais je serais en colère si je ne suis pas là, je ne serais pas en colère contre ma mère, mais contre moi.

J'ai tellement peur de ne pas être présent quand il va partir. Je ne veux pas qu'il pense que je ne voulais pas être là dans un moment pareil. Je veux lui tenir la main pendant ce moment pour qu'il sache que je penserais toujours à lui.

Il n'est pas mon père biologique, mais il a signé des papiers pour m'adopter, donc c'est mon père, je le considère comme tel depuis aussi loin que je me souvienne, il a toujours été mon père, même avant qu'il écrive sa signature dans le bas d'une feuille.

Tout ça me fait penser à mon géniteur, il n'a jamais mérité que je l'appelle papa. C'est un vrai connard, il l'a toujours été.

Je suis couché en boule dans mon lit, je tiens mes jambes avec mes bras. Ma mère m'a mis un casque sur les oreilles pour camoufler le bruit. Je sais que mon père cri beaucoup quand il est en colère, ce qui veut dire la plupart du temps.

Je mets pause à la vidéo avant de retirer les écouteurs, je déteste avoir ça sur la tête. J'entends un gros fracas provenant d'en bas. Je dois aller voir, je dois m'assurer que tout va bien, ma maîtresse d'école dit que je suis mature pour mon âge, je n'ai que six ans et ce n'est pas normal.

Je sors de ma chambre en marchant sur la pointe des pieds, je traverse le couloir puis, je descends les escaliers.  J'essaie d'éviter les planche qui craque, je connais par cœur, c'est lesquels.

Mes yeux s'écarquillent quand je vois ce qui se passe, ma bouche s'entrouvre à cause de mon état de choc. Ma mère est au sol, elle saigne à l'arcade sourcilière et au coin de sa bouche, mon père lui donne des coups de pieds sur tout le corps. Je dois l'aider, je dois sauver celle qui m'a mis au monde. Je m'approche, je me retrouve juste derrière mon père quand il prend au couteau. Je bouge, je me mets devant lui avant de la pousser, la lame manque sa trajectoire, elle devait atteindre ma mère, mais elle a atteint ma main. Je vois le sang et ma vue se brouille par mes larmes, ça fais vraiment mal, j'essaie fermer ma main, mais je n'y arrive pas.

J'entends un cri, mon père s'écroule au sol, il n'est pas mort, mais il ne peut plus faire de mouvement, ma mère l'a poignardé, je ne l'ai même pas vu se lever. Les larmes coulent sur mes joues, mes yeux piquent, ma main me fait mal. Elle prend son téléphone, je n'entends pas ce qu'elle dit, je suis trop perdu dans mes pensées, je suis trop perdu dans la douleur. Elle s'approche difficilement de moi, elle me prend dans ses bras.

- Mon Doudou, je suis là, c'est fini, maintenant, il ne nous fera plus de mal, on va partir que tous les deux et on ne le reverra plus jamais, je te le promets.

La police arrive rapidement avec deux ambulances, il embarque mon père, puis amène ma mère à l'hôpital, un agent de police reste avec moi pour que je ne reste pas seul, ils ont soigné ma main, mais elle est encore douloureuse.

Mon téléphone sonne, c'est ma mère, pitié, faites en sortes qu'elle m'appelle seulement pour me dire de revenir. Je l'entends renifler.

- Doudou, chéri, je suis désolé, il n'est plus là, il est parti...

Je reste figé, mon pire cauchemar se produit, il est mort et je n'étais pas présent. Je n'étais pas présent...

Je raccroche, je n'arrive pas à croire que j'ai manqué ce moment-là, je lance mon téléphone contre un mur, il explose en morceau. Je balance l'assiette au sol, elle éclate, la nourriture se retrouve donc au sol. Je suis tellement en colère, je m'en veux d'avoir accepté de quitter l'hôpital, je n'ai pas pu faire comprendre à mon père que je penserais à lui tous les jours pour le reste de ma vie. Je m'accroupis pour nettoyer, mais je sens les larmes glisser sur mes joues, je m'assois contre le mur, je l'ai perdu...

Le seul homme qui m'est jamais fait de mal, le seul à qui j'ai toujours eu confiance, je n'ai jamais douté de lui.

*******

Je suis enroulé dans ma couverture, j'écoute ma série, Dean et son frère Sam sont vraiment super drôle. Les Winchester sauve le monde, mais ils ne font que des conneries. J'ai besoin de rire pour ne pas sombrer.

Je sens mon téléphone vibrer dans ma poche, je sens déjà la mauvaise nouvelle arrivée.

Je le prends, c'est l'hôpital, ils vont m'annoncer que mon père est mort, évidemment, mais je suis déjà au courant. Je réponds, je veux en finir rapidement.

- Est-ce que je parle à monsieur Wilson ?

Je hoche la tête avant de me rendre compte qu'il ne peut pas me voir.

- Oui.

- Votre mère a pris la route après l'annonce de la mort de votre père, on pense qu'elle s'est rendu dans un bar puisqu'elle a été amenée ici en état d'ivresse, on vous demanderait de bien vouloir vous déplacer jusqu'ici ou de contacter quelqu'un qui pourrait le faire...

Je n'entends pas le reste de la phrase, ma mère a eu un accident...?

- Je viens.

Je me dirige vers ma chambre pour m'habiller, je prends les premiers vêtements que je trouve. Je les enfile en vitesse, je prends ensuite mes clés et je pars.

Je ne vois pas le temps de la route passer, je suis trop préoccupé pour y penser. Je rentre dans l'hôpital, je me dirige au comptoir.

- Ma mère... S-Sam Wilson.

Elle pianote quelques secondes sur son ordinateur.

- Elle n'est pas autorisée aux visites pour l'instant, vous pouvez vous asseoir, le médecin viendra vous voir.

Je m'assois sur la chaise la plus proche avant de prendre une grande inspiration. Je ne peux pas perdre ma mère, je viens de perdre mon père, s'il te plaît, j'aimerais qu'au moins cette fois l'univers soit de mon côté. Je passe ma main sur mes yeux, je déteste cet endroit, je ne veux plus jamais remettre les pieds ici après ça.

- Salut, Dorian, je ne savais pas que tu étais ici, tout va bien ?

Je relève la tête, je vois Amara, ma Amara. J'ai besoin de compagnie dans un moment comme celui-ci et je suis heureux que ça soit elle qui soit présente.

- Johnson, oui, je vais bien, pourquoi tu es ici ?

Elle prend une grande inspiration.

- Je vais te le dire parce qu'on est ami et que je t'aime bien, quand j'avais neuf ans, ma maison a pris feu, j'étais à l'intérieur avec ma meilleure amie, c'est elle qui a fait tomber la bougie, mais c'était un accident. Je me suis mis à courir pour sortir, mais je n'étais qu'une enfant, je n'étais pas assez vite, j'ai maintenant une brûlure à l'épaule, je viens ici à chaque trois mois pour m'assurer que la blessure ne s'infecte pas pour m'assurer que tout va bien.

Je ne m'attendais vraiment pas à ça, elle a tellement traversé et ça me fait chaud au cœur qu'elle me parle de son passé. Je ne sais pas comment me sentir, je suis vraiment triste et c'est normal, je vais être dans cet état pendant un moment, mais en même temps, je suis heureux, la fille que j'aime me parle d'elle et de son passé, ce qui veut dire qu'elle me fait confiance.

- Et toi ?

- Ma mère est une ancienne alcoolique, elle a rechuté cette nuit, elle a eu un accident de voiture, je sais qu'elle est ici, mais je n'en sais pas plus.

- Ton père, il n'est pas là ? Je suis désolé si je suis indiscrète.

J'affiche un sourire triste, je n'ai pas envie d'en parler, mais ça me ferait peut-être du bien.

- C'est lui la raison du pourquoi, ma mère à rechuter, il est mort hier d'un cancer, elle ne l'a pas supporté...

- Toutes mes condoléances, je suis vraiment désolé, je n'aurais jamais dû te demander ça, quand je viens ici, j'ai besoin de parler, c'est pour ça que je parle trop.

Ce qui me remontrait le moral, c'est que tu ne t'arrêtes pas de me parler, ce qui me remontrait le moral, c'est que tu m'embrasses...

- Ne t'inquiète pas, j'aime bien t'entendre parler, j'aime ta voix.

Le médecin vient m'annoncer que ma mère est hors de danger, mais qu'elle dort, donc je peux attendre un peu ou y aller maintenant. Je le remercie, puis je fini par décider d'attendre un peu, elle a besoin de repos.

Je ne prends pas le temps de réfléchir, je plaque ma bouche sur celle d'Amara. Je sens ses lèvres chaudes et j'adore ça. Nos langues s'enroulent à celle de l'autre, elle a été surprise au début, mais au final, elle ne me repousse pas. Après avoir passé la pire semaine de ma vie, l'univers me récompense enfin.

Je sens une de ses mains dans mes cheveux, je glisse les miennes autour de sa taille.

Je t'aime...

J'ai juste envie de lui dire que Zéphyr n'est pas là pour les bonnes raisons et qu'elle devrait me choisir, mais il n'est plus dans le coup, pour l'instant, mais j'ai de l'espoir sur le fait que ça pour toujours. J'ai envie de redevenir ami avec lui, mais je ne le comprends pas, en plus, comment on pourrait redevenir comme avant ?

Je me recule à bout de souffle, je colle mon front au sien. J'ai l'impression qu'on a été créé pour s'embrasser, on se complète. Elle est douée, c'est certain.

- Amara, je...

Je t'aime tellement, s'il te plaît ne me brise pas le cœur.

- Mademoiselle, Johnson, vous pouvez me suivre, on va vous examiner.

Je sursaute en me reculant, je n'avais pas vu l'infirmier arrivé. Elle me fait un petit sourire avant de se lever et de partir avec l'homme.

J'ai ressenti de la joie en cette journée merdique, ça fait vraiment du bien. Je me lève pour aller ma mère, je suis heureux qu'elle aille bien, merci papa de veiller sur moi, je suis sûr que c'est toi qui fais en sortes que tout ça arrive.

Mon père est peut-être mort, mais il continue d'être présent. Il continue d'être dans nos cœurs, mais il est aussi dans l'air, il est partout.

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Voilà enfin le chapitre 10.

Je vais peut être prendre du retard avec le 11, j'ai un peu de mal à l'écrire.

Bref, j'espère que ce chapitre vous plaît.

Enfin, le baiser entre Amara et Dorian !!

N'hésitez pas à me donner votre avis.

Bisou 💋