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KiriaParker
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Chapitre 13 - Martin

— Lâchez rien ! crié-je pour qu’ils entendent. Encore 5 minutes à tenir.

Je garde les yeux ouverts, j’analyse bien les mouvements pour leur donner la moindre indication. Mais pas besoin. Les jaunes et rouges ont déroulé leur jeu si aisément que j’ai l’impression d’avoir une équipe différente de la semaine dernière. Chaque joueur a réalisé les consignes que j’ai communiquées au mot près, n’offrant aucune chance à l’adversaire. Dès le départ, ils ont su imposer leur rythme et fait courir comme il fallait les locaux.

Je préfère cependant qu’ils restent concentrés jusqu’au coup de sifflet final. Une remontée est vite arrivée quand on se laisse surprendre et au vu de leurs efforts, je ne leur souhaite pas de la vivre. Ni aujourd’hui ni un autre week-end.

Une nouvelle interception qui se conclut sur un but, plus rien ne peut les arrêter. Les parents qui sont venus les soutenir applaudissent. Parmi eux, Arthur lève ses pouces en l’air en signe d’approbation. Il a insisté pour m’accompagner. Il prétend que c’est pour encourager les jeunes, même si au fond, je crois que c’est surtout pour moi plus que pour eux. Je me demande d’ailleurs pourquoi il ne les entraînerait pas. Il était déjà présent la semaine dernière et juste avant le début du match aujourd’hui, il les a quelque peu motivés.

Debout, les bras croisés, je continue de leur donner des conseils. Le nombre de fois où je me suis moqué des différents coachs pour se tenir de cette manière et me voilà à les recopier inconsciemment !

Je jette un coup d’œil sur le banc. Ils ont tous joué, peut-être pas le même temps de jeu, mais j’ai réussi à ce qu’ils puissent tous touché le ballon lors de la rencontre. Thibaut m’a dit que gérer les remplacements pouvait être plus compliqué que les entraîner à proprement parler. Il ne faut jamais en délaisser un au risque qu’il se sente exclu. Même si son niveau est un cran en dessous, il a toute sa place dans le collectif. Et je crois bien avoir accompli ce pari. J’ai même pu effectuer les changements avec les deux gardiens afin que chacun puisse avoir son moment de gloire. Résultat : les deux ont brillé durant la rencontre.

Sans difficulté, Nathan et ses coéquipiers sont parvenus à conserver l’avantage. Ils sautent et fêtent fièrement leur réussite. Je ne peux m’empêcher d’être heureux d’eux à ce moment précis. J’en omets presque que cette équipe n’est pas la mienne. Que ces couleurs ne me représentent pas.

Je serre la main de la coach adverse qui ne démérite pas quand même. Elle m’adresse un sourire puis se concentre sur ses joueurs. Elle les réconforte pendant que je félicite les miens avant de les envoyer aux vestiaires. Sans rechigner, ils y vont dans la bonne humeur sans oublier de remercier le public.

— Une belle victoire ! s’exclame mon coéquipier en me rejoignant. Prêt pour ton premier match avec nous, maintenant ?

C’est un peu mon métier. Il est donc indéniable que je sois prêt pour la rencontre, sinon pourquoi serais-je handballeur ? J’ai juste une drôle de sensation. Porter le jaune et le rouge de Nousty n’a pas la même signification que le bleu de Montpellier. Une pression différente aussi. La victoire reste importante, mais le club connait plus de liberté. Moins d’enjeux si ce n’est seulement de se maintenir dans le classement afin de ne pas descendre de division.

Je ne me suis jamais caché d’avoir des envies de nouvelles couleurs, de nouvelles expériences, voire, de découvrir un nouveau championnat. Mais, je n’avais jamais pensé à changer d’équipe de cette manière. En prêt, dans un autre club de niveau équivalent, oui. Venir en supplément dans une compétition inférieure, non. Et pourtant, d’une certaine manière, j’ai hâte de prendre part au match de ce soir. Peut-être est-ce juste parce que je n’ai pas pu jouer, me contentant seulement d’observer les confrontations, mais je suis d’attaque pour la rencontre.

Nous saluons rapidement les parents qui attendent les enfants. Certains sont déjà sortis, les autres se font désirer, profitant de leur belle victoire. Arthur les félicite avant de m’entraîner vers la sortie du complexe.

— T’es sûr de tout avoir, hein ? me redemande-t-il.

Je lui ai déjà affirmé que toutes les affaires nécessaires sont rangées dans mon sac. Il me manque seulement le maillot que je n’ai pas encore reçu. Sylvain doit en trouver un et cela s’est avéré plus compliqué que prévu.

— Eh bien, direction Tardets alors !

— C’est loin d’ici ?

Je le questionne une fois dans la voiture alors qu’il démarrait le GPS.

— Non, pas vraiment. On a déjà dû parcourir la moitié du chemin en venant ici, explique-t-il. T’as quand même eu de la chance, c’est pas facile tous les week-ends de concilier les matchs des jeunes avec les nôtres.

Je veux bien l’imaginer. Je ne pense pas que je les aurais entraînés si nous jouions juste après à l’opposé. Un beau casse-tête pour de nombreuses équipes. Organiser les différentes rencontres pour correspondre aux coachs et aux disponibilités des horaires ne semble pas simple.

— Pourquoi tu ne les entraînes pas ? Tu les encourages régulièrement et ils t’adorent, poursuis-je.

— Ça ne fait pas de moi un coach pour autant, explique-t-il.

Je hausse les épaules à moitié convaincues, mais je n’insiste pas. Il ne souhaite pas rentrer plus dans la discussion, donc je m’en contenterai pour l’instant. Mais je ne peux m’empêcher de me demander ce qu’il entend dans sa réponse. Que lui manquerait-il pour prendre la tête de l’équipe ? Je reste persuadé que les jeunes apprécieraient travailler avec lui et ne se soucieraient pas de mon départ ainsi.

C’est Arthur qui anime la conversation. Je me contente de discuter à ses nombreuses questions, toutes plus ou moins en rapport avec le hand, plus particulièrement les joueurs avec qui j’ai pu jouer et que j’ai affrontés. Je peux même affirmer que son idole est l’international danois Nicolai Jespersen. Je comprends, c’est un monstre en match. Je suis bien heureux de l’avoir en tant que coéquipier et non en tant qu’adversaire. Même si nous nous retrouverons assurément face à face lorsque je porterai le maillot français.

— Tu irais dans quel club, si t’avais le choix ?

C’est une bonne question ! J’aime Montpellier qui m’a accueilli, mais je ne refuserai jamais une proposition au PSG. Barcelone me tente également, même si le championnat reste moins impressionnant en Espagne. L’Allemagne peut être une excellente option aussi, si j’ai l’occasion d’y évoluer, je ne rejetterais certainement pas l’offre.

— Paris, finis-je par dire.

Il acquiesce sans rajouter un mot de plus, un peu comme s’il se retenait de poser une question.

— Nantes, ça ne t’a jamais effleuré l’esprit ?

Je savais qu’il me le demanderait. Tout le monde m’a interrogé au moins une fois à ce sujet. Jouer dans le même club que mon père, être sa relève, n’est-ce pas un de mes objectifs ? Et j’ai toujours donné la même réponse : non. Je ne rêve pas de porter les mêmes couleurs que lui. Je veux me faire mon propre nom et être reconnu pour moi, pas pour être le fils de Mateo Gomez.

— Le meilleur joueur pour toi ? demande-t-il pour changer de sujet.

— Hugo Kaplan, réponds-je sans hésitation.

Il fait mine d’être déçu par mon choix, mais ne le commente pas. Kaplan et Jespersen sont les deux meilleurs handballeurs actuels. Une opposition entre la France et le Danemark et une rivalité entre Paris et Montpellier constante depuis quelques années que tous les fans suivent assidument. Qui parviendra à prendre le dessus sur l’autre ? Une question qui intéresse les passionnés qui ne manquent jamais la rencontre entre ces deux grands joueurs !

Arthur finit par se garer. Nous rejoignons le complexe sportif où quelques coéquipiers nous attendent déjà. Je me mêle plus facilement que je ne l’aurais cru à leur discussion. Estéban reste en retrait. Je le comprends un peu. Dans un sens, nous ne sommes pas si différents. Nous sommes tous les deux loin de notre famille. Sauf que lui a changé de pays. Enfin, j’étais bien jusqu’à l’arrivée d’Elie. Depuis qu’il nous a rejoints, il ne cesse de tester mes limites. Comme si je lui avais vraiment fait quelque chose alors que je ne le connaissais pas jusqu’à présent. J’ai du mal à l’envisager comme quelqu’un de sympa. Arthur n’a pas arrêté de me dire qu’il n’agissait pas ainsi habituellement.

L’échauffement terminé, nous retournons aux vestiaires pour entendre les derniers mots de Sylvain avant le début de la rencontre. Je tronque mon t-shirt d’entraînement par le maillot jaune et rouge avec le numéro 18. J’écoute d’une oreille. Il ne dit rien d’extraordinaire : l’objectif est de rentrer avec les trois points pour s’assurer une bonne place dans le classement.

— L’équipe qui commencera sur le terrain est Gabriel, Vincent, Jérémy, Elie, Benoit, Arthur et Mathias, conclut le coach.

J’aurais préféré être dans la liste. Pour éviter le regard de défi que me lance Elie, mais surtout pour m’empêcher de trop réfléchir. Sur le terrain, je me contente de jouer. Plus rien n’existe autour. Or quand je me retrouve sur le côté, mon esprit ne cesse de passer au crible les moindres mouvements des joueurs rajoutant une pression. Je déteste ce sentiment. J’ai l’impression de devenir impuissant et de perdre toute contenance lorsque je mettrai un pied sur le terrain.

Le match commence.

Je les observe assis sur le banc de touche au milieu des autres remplaçants. Le ballon passe d’un joueur à un autre, d’une équipe à l’autre pendant que les secondes défilent. J’analyse le placement de chaque sportif, les mouvements du gardien pour mieux préparer mon entrée. La moindre ouverture, je n’hésiterai pas.

Personne n’arrive à prendre l’avantage. Les handballeurs se répondent consécutivement. But contre but. Arrêt contre arrêt. Impossible de déterminer le vainqueur avec ce début de match.

Nouveau tir, mais premier échec pour Tardets. Une chance pour nous permettre d’avoir deux buts d’avance. Le repli adverse est mauvais. Arthur et Elie ont réussi à passer la défense aisément. Une dernière passe pour Elie qui sans difficulté marque.

C’est dur de le reconnaître quand je vois son comportement en dehors du terrain, mais Elie se débrouille et place correctement ses coéquipiers en tant que demi-centre. Il gère aussi bien l’attaque que la défense et d’une main de maître.

— Martin, prépare-toi, m’annonce Sylvain sans quitter des yeux le match.

Je me relève. Je veille à mettre un peu de résine sur mes mains pour mieux réceptionner les ballons et je suis prêt à rentrer sur le terrain. Je vais enfin pouvoir jouer. Pas le match que j’attendais, mais au moins, je peux toujours courir un peu. Je ne suis pas certain d’apporter quelque chose en plus à l’équipe ou qu’ils me procurent quelque chose, mais je compte bien faire mon maximum.

Celui que je remplace frappe dans mes mains et je peux désormais me placer à mon poste. Quelques murmures s’échappent parmi les adversaires et même dans les tribunes, mais je ne m’y attarde pas. Je suis uniquement là pour jouer, donc je jouerai. Qu’importe le reste.

Je me positionne. Elie se situe sur ma gauche et l’ailier à ma droite tandis que le pivot se trouve en face de moi, au milieu de la défense. Un schéma au final classique. Le ballon est en notre possession, à l’aile opposée. J’évalue les possibilités qui se présentent devant moi en attendant de me lancer. Rien ne me permet de tracer un chemin vers les buts. Je réceptionne le ballon, mais sans opportunité, je finis par donner le ballon à mon autre coéquipier.

Nos deux équipes ne cessent de se passer le ballon sans qu’une puisse prendre l’avantage complètement. Même en essayant de décaler la défense ou en intégrant un deuxième pivot pour nous laisser plus d’ouverture, pas moyen de décoller du score. Tout le match se déroule de cette manière, malgré quelques moments où une de nos deux équipes prend deux buts d’avance, elle les reperd aussitôt.

Je passe mon bras droit sur le visage plein de sueur avant de dégager quelques mèches rebelles. Concentré sur les adversaires devant moi, il n’est pas question que je quitte des yeux l’attaquant face à moi et le ballon. Même si la fatigue commence à se faire sentir à l’approche de la fin du match, je ne suis pas prêt à concéder un nouveau but. Le ballon arrive dans les mains du demi-centre, il tente une feinte stoppée par la défense de Elie. Obligé d’effectuer une passe, j’en profite pour l’intercepter en prenant de cours l’arrière. Je puise dans mon énergie pour traverser le terrain en dribble pour mener à bien cette contre-attaque. Tardets essaye de me rattraper, mais je parviendrai au bout, quoiqu’il en coute. Et le ballon filera dans les buts pour égaliser. En soutient, Arthur est là, si jamais. Mais je me retrouve seul, éliminant les défenseurs. Il ne reste que le gardien. Il prend toute la place dans les cages, me bloquant les options alors que je saute devant la zone. Je donne un effet au ballon et finis par le lâcher. Il termine sa course au fond des filets, prenant de cours le dernier rempart de l’équipe adverse. 27-27.

— Bien joué, me félicite Arthur alors que nous nous replaçons en défense.

Le temps défile sans que personne ne lâche. Tout se jouera jusqu’à la dernière minute. La tension monte de plus en plus dans la salle. Les encouragements se font de plus en plus entendre. J’essaye tant bien que mal de faire le vide et de rester concentrer sur la défense. Si l’égalité n’est pas une mauvaise option en soi, je préfère tout donner pour arracher la victoire.

Fatigue ou erreur, l’ailier parvient à désorganiser notre défense offrant une possibilité à l’attaque de reprendre l’avantage. L’arrière qui me fait face réceptionne la passe de son demi-centre et saute tandis que je vais au contre. J’effleure le ballon qui file vers les buts sans sourciller. Je retombe dans la zone, perdant l’équilibre et évite de justesse le tireur et j’observe notre gardien arrêter la course du ballon.

Tout n’est pas perdu. Je m’empresse de me relever et de partir en attaque pour les derniers instants du match. Le chrono défile pendant qu’Elie fait tourner la balle, la gardant un maximum de temps pour éviter une contre-attaque et perdre.

Elie récupère le ballon de Arthur. Impossible pour lui de percer la défense adverse, pas dans cette position. Il me lance un rapide coup d’œil, je vois à son regard qu’il n’a pas plus envie que ça de me faire la passe, pourtant, il ne souhaite pas non plus compromettre la victoire qui se dessine. Sans savoir s’il me la ferra, je m’élance. L’opportunité est là, je ne vais pas m’en priver. Dans ma course, je réceptionne parfaitement le ballon. Un sourire en coin se trace sur mon visage quand je saute, surplombant l’arrière adverse. Déjà plus grand que lui, je saute aussi plus haut. J’ai l’avantage. Je n’ai plus qu’à viser et marquer. Sans réfléchir plus longtemps, j’arme mon bras gauche et je tire sans ménager mes forces.

Le ballon termine dans les filets, au second poteau sans que le gardien n’ait pu faire quoique ce soit pour l’intercepter malgré sa bonne position. Je lève les yeux vers le tableau de score qui affiche 27-28. J’entends les coéquipiers sur le banc de touche applaudir avant que l’arbitre ne siffle la fin du match.

— Tu aurais pu mieux faire, me souffle Elie avant que les joueurs nous rejoignent.

— Avec une meilleure passe, ça aurait été plus facile, mais je me contente de ce que je reçois, répliqué-je.

Je remonte mon maillot pour essuyer la sueur qui coule sur mon visage. Une bonne douche ne serait pas de refus, je dois bien l’avouer. Je ne pensais pas m’investir autant ni à un tel niveau de jeu pour un championnat amateur. Certes, la sensation diffère de celle que je connais habituellement, mais je ne reste pas moins fier de ce match.

Sylvain nous félicite et même si des points sont à revoir, il nous laisse tranquilles dans les vestiaires pour profiter de notre victoire. Il reviendra sur le négatif à l’entraînement.

— Qui est chaud pour aller en boîte ? propose Arthur qui commence à se déshabiller pour rejoindre les douches.

Assis sur un des bancs du vestiaire, j’attends Arthur qui n’est toujours pas prêt alors qu’il était un des premiers à se changer. Je continue de faire défiler les actualités sur mon téléphone. Je vois passer la défaite du PSG. Une bonne chose pour Montpellier. Au moins, cela va permettre à l’équipe de racoler au classement s’ils gagnent demain.

— Let’s go !

Il se lève suivant ses paroles, sac sur l’épaule, parée à partir. Je le rejoins en continuant d’observer les réseaux sociaux, écoutant le joueur d’une oreille distraite. Les joueurs n’attendent plus que nous, discutant autour d’un verre avec l’autre équipe. Je range mon portable bien que je reste en retrait. Certains handballeurs viennent à ma rencontre soit pour des photos soit pour simplement échanger à propos du hand.

— Faites pas trop les idiots, nous sermonne gentiment Sylvain alors qu’une majorité partait. Sinon je ne vous épargnerai pas lundi !

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