La nuit a été trop courte, j'ai enchaîné les cauchemars et les réveils en sursaut. Mon reflet dans le miroir me donne des frissons : des cernes descendant jusqu'à mes pommettes ont une teinte violette, ma joue est légèrement bouffie par la gifle que j'ai reçue la veille. Je souffle un bon coup, espérant faire disparaître ces traits que je déteste tant. Je me passe un coup d'eau fraîche sur le visage ; il n'a pas changé, mais au moins, je suis réveillée.
J'enfile un jean mom troué, un t-shirt moulant noir et mes Converse à plateforme. Un simple café en guise de petit-déjeuner. En sortant de mon appartement, une vague de stress me fait m'arrêter pour reprendre mon souffle. Comme un mauvais pressentiment, mon instinct me crie de rester enfermée chez moi à double tour, chose que j'aimerais bien faire, rien que pour dormir, mais l'hôpital et les patients m'attendent. Je ferme la porte à double tour et descends les escaliers d'un pas pressé. Le vent me fouette le visage, ma queue de cheval virevolte devant mes yeux. Même le temps semble me demander de faire demi-tour. Je frissonne, pourtant il ne fait pas froid. Je regarde autour de moi, espérant trouver la raison de mon mal-être, mais la rue est vide.
Étrangement vide, je traverse la rue, mes pas lourds résonnent autour de moi, ma respiration est saccadée. J'ai la désagréable impression d'être épiée, suivie, traquée. La rue est toujours vide, pas une seule voiture à l'horizon.
Je m'engage dans une ruelle qui mène directement à l'hôpital. Elle est étroite, le trottoir est quasiment inexistant. Le stress fait pulser mes tempes. Je serre la anse de mon sac de sport où se trouvent mes habits de rechange. Mes ongles s'enfoncent dans mes paumes, ma vision se brouille. Je fixe droit devant moi, apercevant l'hôpital qui me paraît s'éloigner à mesure que je m'en approche. Je secoue la tête et ferme les yeux quelques secondes pour me concentrer sur ma respiration.
Quand je rouvre les paupières, mon sang se glace. Mes veines pulsent, mon cœur bat si vite que j'ai l'impression qu'il résonne entre les murs froids de la ruelle sombre. Face à moi, un fourgon noir aux vitres teintées bloque la sortie. Je ne vois plus l'hôpital. Derrière moi, un deuxième fourgon similaire. La rue semble se rétrécir. Je lâche mon sac en panique.
Je suis prise dans un étau, sans issue. Le silence qui règne me glace le sang.
Ma tête bouge frénétiquement, cherchant à fuir cette réalité morbide. Face à moi, une portière claque. Un homme, aussi imposant qu'une armoire à glace, se tient devant le véhicule. Il est cagoulé, vêtu d'un cargo et d'un t-shirt noir, avec des rangers dont l'écho des pas résonne dangereusement jusqu'à moi. Il avance à pas feutrés, et le poids de sa présence fait trembler mes jambes.
Il doit mesurer presque deux mètres. Ses bras, d'une taille disproportionnée, sont recouverts de tatouages plus menaçants les uns que les autres. D'un coup d'œil furtif derrière moi, je remarque deux autres hommes postés devant la deuxième Mercedes. Je n'ai aucune issue, témoin silencieux du piège qui se referme sur moi avec une lenteur macabre. Tous sont vêtus de la même façon. J'ai l'impression d'être dans l'un de mes cauchemars. Je me pince, mais la douleur me confirme que tout est bien réel.
L'homme s'approche de plus en plus, me laissant le temps d'apprivoiser sa présence inquiétante. Il n'est plus qu'à quelques mètres quand mon instinct semble vouloir ma perte : mes jambes se mettent en action, et je cours droit sur lui, espérant l'esquiver. Ma tentative est vaine. Ses bras m'agrippent à la taille avec une force démesurée, et en un éclair, je me retrouve sur son épaule.
Je tente de frapper son dos, mais mes poings, qui la veille ont mis un homme à terre, semblent n'être qu'un simple massage pour lui. Il m'amène jusqu'à la fourgonnette, où un autre homme masqué me recouvre la tête d'un sac en toile de jute. Mes mains sont ligotées dans mon dos, et je heurte violemment le métal froid du coffre.
Le ronronnement du moteur m'indique que mon destin est scellé. Prise au piège dans un fourgon, comme dans un vieux film d'horreur, la situation en devient presque risible. Je serais certainement la première à mourir dans ce genre de scénario, la preuve étant que j'ai couru vers mon bourreau il y a quelques secondes, me jetant directement dans la gueule du loup.
Chaque dos-d'âne, chaque nid-de-poule fait violemment heurter mon corps contre l'acier. Je retiens tant bien que mal des cris de douleur. Une rage silencieuse bouillonne au fond de mon ventre ; je m'imagine déjà lui balancer mon poing dans le nez.
Mon cerveau est en ébullition. J'essaie de mémoriser les virages, les pauses, même les bosses. Au fond, je sais pertinemment que ça ne me servira à rien. L'image du fils Beaumont me revient en tête. Ça ne peut être que lui. J'ai blessé son ego de fillette.
Mais pourquoi me kidnapper ? Pour finir ce qu'il a entrepris hier ? Me frapper, me réduire en cendres, peut-être même me violer ?
Un haut-le-cœur me secoue à l'idée des pires horreurs qu'il pourrait m'infliger.
Je promets de le buter.
Je n'ai pas survécu jusqu'à aujourd'hui pour me retrouver séquestrée par un homme à l'ego brisé. Les hommes tordus semblent être mon quotidien depuis trop longtemps. J'ai grandi dans la violence : les coups, les insultes, les menaces de mort. Je me suis juré de ne plus jamais laisser de telles choses arriver. S'il me détache, je leur ferai vivre la misère.
Je reste immobile pour conserver un maximum de force. Mon omoplate me lance, me rappelant les agissements de ce fils raté qui attise ma colère.
La voiture s'arrête définitivement. Je ne dois pas avoir quitté la ville ; le trajet a été rapide et mouvementé. Quand la porte du coffre s'ouvre, une fine lumière filtre à travers la toile de jute. Les mailles sont trop serrées pour que je puisse percevoir mon environnement.
Le même homme à la carrure imposante attrape mes chevilles et me tire violemment vers lui, arrachant un cri de douleur à mes lèvres lorsque mon dos roule sur le sol. Il me hisse sur son épaule comme un vulgaire sac à patates. La colère bout en moi. Je retiens des larmes de rage.
La lumière disparaît rapidement. Il descend des marches, enfonçant son épaule massive dans mon ventre. Une fraîcheur angoissante caresse mes bras nus. Une odeur de renfermé me fait grimacer. Je suis presque sûre d'être dans une cave.
Mon genou heurte violemment l'encadrement d'une porte, qui semble être en métal. Je souffle de douleur et un cri strident m'échappe, malgré moi, de la gorge serrée.
-Putain de connard, silfflais-je entre mes dents.
-En douceur, putain ! Cris un homme.
Quelle ironie...
L'écho de sa voix me paraît familier. J'ai beau chercher dans ma mémoire, impossible de savoir où je l'ai déjà entendu. Mon cerveau passe rapidement à autre chose lorsque mon corps percute le sol dur et glacial. Il retire le sac posé sur ma tête avec la délicatesse d'un éléphant.
La pièce est plongée dans le noir, seul un faible faisceau lumineux passe sous la porte. L'homme sort, me laissant seule dans cet endroit lugubre. À tâtons, je devine la présence d'une table avec une chaise et d'un matelas miteux entreposés non loin de moi.
Je me redresse tant bien que mal. Mes jambes, fébriles, peinent à supporter mon poids. Lentement, j'avance jusqu'au matelas, où je m'affale dans un fracas assourdissant. Les liens me cisaillent les poignets ; je tente de m'en défaire, mais ils sont bien trop serrés.
Ma vue commence à s'habituer à l'obscurité. Les murs sont noircis par la moisissure, un froid cadavérique me fait frissonner. Un courant d'air glacial passe sous la porte massive qui me fait face.
Les minutes s'étirent, se transformant en heures interminables. Je suis épuisée. Mon manque de sommeil se fait ressentir, mais je ne peux pas flancher. Pas maintenant. Je dois résister, garder des forces pour l'affronter.
Je ne sais pas ce qui m'attend lorsqu'il reviendra dans la salle. Peut-être sera-t-il accompagné du fils Beaumont. J'attends avec impatience de le mettre six pieds sous terre.
La douleur ne m'effraie pas. Je suis trop habituée aux violences physiques, ma résistance n'est plus à prouver. Je sais que je peux tenir plusieurs jours sans boire ni manger, j'en ai déjà fait les frais. Celui qui m'a enfermée ici ignore tout de mon passé, et c'est mon plus grand avantage.
Je sais exactement quelles forces garder pour l'affronter.
La pièce est encore plus froide qu'à mon arrivée. Mon envie d'aller aux toilettes ne fait que grandir. Mes jambes bougent à un rythme démesuré, à la fois pour retenir cette envie et tenter de me réchauffer.
Après ce qui me semble être des heures d'attente, le mince filet de lumière sous la porte disparaît, laissant place à l'ombre de deux pieds. Je me redresse, prête à affronter la personne qui ouvrira enfin cette foutue porte de prison.
Un cliquetis résonne entre les quatre murs. Une lumière m'aveugle un instant avant de laisser progressivement apparaître la même silhouette.
Cet homme massif ne semble pas vouloir me laisser en paix. Toujours cagoulé, il se tient dans l'encadrement de la porte. Sous la lueur des néons, je distingue enfin ses yeux gris, perçants, qui me transpercent d'un regard indéchiffrable. Il tient un plateau entre ses mains et le dépose brutalement sur la table.
Puis, d'une démarche nonchalante, il s'approche dangereusement de moi. Il sort une chaîne et l'attache autour de ma cheville. Je tente de lui foutre un coup de pied, mais il l'esquive avec une facilité déconcertante.
Je suis maintenant enchaînée au mur. Lorsqu'il défait les liens de mes poignets, je n'hésite pas une seconde et lui assène un violent coup de poing en pleine joue. Mais son visage ne bouge pas d'un millimètre. Seule la douleur fulgurante dans mes phalanges témoigne de l'impact.
Un rire sinistre s'échappe de sa gorge. Sans un mot, il referme la porte, la claque avec une telle violence que les murs vibrent.
Je baisse les yeux vers le plateau qu'il a déposé. Des pâtes au ketchup accompagnées d'un steak saignant. Mon corps se fige.
Ce repas me rappelle trop de souvenirs... Les soirées passées aux côtés de Mike et Elio.
L'idée qu'ils puissent être impliqués me traverse l'esprit, mais je la chasse aussitôt. Ça n'aurait aucun sens. Après tout ce que j'ai fait pour eux... quel serait l'intérêt ?
Mon ventre gargouille. Je m'approche lentement de la table en métal. Et là, en découvrant le plateau, un soupir m'échappe.
Il est à l'effigie d'Hello Kitty.
Où est la caméra cachée ?
La chaîne alourdit mes pas, son bruit métallique résonne comme dans un mauvais film d'horreur. Je saisis le plateau et retourne m'asseoir sur le matelas moisi. Faire la grève de la faim n'est pas une option. Il me faut des forces pour tabasser ce connard qui m'a enfermée ici.
Le plat me réchauffe légèrement, mais une autre urgence me tord l'estomac : mon envie d'aller aux toilettes devient insoutenable. Ma vessie me fait mal, je ne tiendrai pas très longtemps avant de finir par inonder ce matelas qui doit déjà être imbibé de tout un tas de choses. Qui sait si la personne enfermée ici avant moi ne s'est pas lâchée dessus ?
Cette pensée me soulève le cœur. J'ai du mal à avaler le maigre repas que je viens d'ingurgiter.
- Y'a moyen d'aller faire pipi ou je dois me pisser dessus ?! hurlé-je, la voix tremblante de rage.
Le silence.
Mais je sais que quelqu'un m'a entendu.
Les minutes s'étirent, interminables. Je remue frénétiquement les jambes pour me retenir.
Puis, la porte s'ouvre brusquement.
L'armoire à glace me jette un objet qui atterrit lourdement à mes pieds.
Un pot.
Un putain de pot pour enfant.
Non, mais sérieusement ?
Je l'attrape et, sans réfléchir, le balance de toutes mes forces contre la porte. Un vacarme monstrueux explose dans la pièce, résonnant entre les murs comme une détonation.
- Au cas où vous n'auriez pas remarqué, mon cul de déesse ne rentre pas sur ce truc ! hurlé-je jusqu'à m'en casser les cordes vocales.
Mes pensées s'emballent, attisant ma colère.
Cette situation... elle m'échappe.
Et, pire encore, elle me rappelle un passé que j'ai tout fait pour oublier.
Je me revois enfermée au sous-sol, des jours entiers sans voir la lumière du jour.
J'entends le bruit de ses pas. Réguliers. Pesants. Comme le tic-tac d'une horloge maudite, scandant la fin inéluctable de ma vie. Comme s'il détenait la dernière pièce du puzzle, celle qui signerait mon arrêt de mort.
Je n'étais qu'un pantin.
Lui, le marionnettiste.
Un jouet qu'il manipulait à sa guise.
Ses cris résonnent encore dans mon esprit, déchirant mes souvenirs. Me rappelant pourquoi... et surtout pour qui je suis encore en vie.
Pour tenir une promesse.
Celle d'une rédemption qu'elle ne connaîtra jamais.
Je dois me montrer forte pour toi, pour la vie que tu m'as donnée et qu'il a prise sans aucun scrupule. Me battre pour te faire justice, pour récupérer la dignité qu'il nous a prise. Ma rage pour lui me donne la force de me battre, de transformer mes démons en une force assourdissante pour faire trembler mes ennemis. Je refuse d'abandonner, pour toi, je me battrai quitte à en perdre la vie. Je mourrai digne, la tête haute, personne ne m'enlèvera ma dignité une nouvelle fois.
Le cliquetis du verrou m'extirpe de mes pensées, qui m'ont rendue encore plus assoiffée de vengeance. Le colosse fait son apparition. Je ne supporte plus de voir sa silhouette, mes narines se gonflent de fureur. Il s'approche pour défaire la chaîne qui me lie au mur, son visage proche du mien, ses pupilles grises me menacent en silence.
- Bouge, t'as deux minutes.
Sa voix rauque et froide se perd dans la froideur qui nous entoure.
Un long couloir s'étire derrière ma prison bétonnée. Je vois une simple chaise à côté, me signifiant qu'il était là depuis le début sans répondre à mes demandes. Ce qui ne fait qu'accroître la haine que j'éprouve à son sujet. Il tient fermement mon poignet, déjà meurtri par Beaumont, ce qui me fait grimacer. Je suis traînée au fond du couloir où se trouvent des toilettes derrière une porte qui ne ferme pas à clé. Mon envie est pressante, alors je n'y prête pas attention et me dépêche d'enlever mon pantalon en observant les alentours, à l'affût d'une échappatoire qui semble inexistante.
Il y a bien une brosse à chiottes, mais je doute de l'efficacité de ce truc pour me défendre contre un colosse pareil. Je pourrais tenter de courir, mais il me rattraperait rapidement. Je ne vois aucune issue à mon malheur. À peine ai-je poussé la porte que je suis déjà prisonnière de sa main de fer. Il me balance sur le matelas. Sans réfléchir aux conséquences, je lui lance le plateau Hello Kitty dans le dos. Je prends conscience de mon erreur quand il fait demi-tour avec une rapidité qui me glace le sang.
- Ma patience a des limites, me dit-il en attrapant mon poignet violacé.
Ma conscience a quitté mon corps, c'est la rage qui guide mes pas et mes actes. Un violent coup de pied part dans ses parties. Il retient un cri étouffé, mais ne bouge pas.
Merde, il est inhumain, ce type.
Il resserre encore plus sa poigne, me faisant me tordre de douleur. Je lui crache dessus, ma salive s'incrustant dans sa cagoule. Ses yeux deviennent noirs. J'ai l'habitude de jouer avec la mort, je la nargue depuis trop longtemps, et c'est peut-être ce soir qu'elle m'emportera. Mais j'aurai tout tenté. Ma main libre se referme, et je place toute la force qui me reste pour lui envoyer mon beau crochet au visage. Sa tête tourne légèrement.
Je ne le vois pas arriver. Il place ses mains énormes autour de mon cou. Sa poigne est ferme, mais je sais qu'il n'y met presque pas de force. Il pourrait me tuer sur le coup s'il le souhaitait. Quelque chose semble l'en empêcher. Je profite de cette hypothèse pour lui envoyer un coup de pied dans le tibia. À travers mes chaussures, je ressens la douleur de la force que j'ai placée. Je reste de marbre, et il fait de même. Notre contact visuel semble durer une éternité jusqu'à ce que son téléphone sonne, le faisant relâcher sa prise légère sur mon cou.
- Quoi ? dit-il d'une voix qui trahit la rage qu'il éprouve pour moi.
À travers le téléphone, j'entends son interlocuteur. Je ne reconnais pas sa voix, mais je comprends très bien ce qu'il lui dit.
- Je peux savoir ce que tu fous, les mains autour de son cou ? Dégage de là.
Il raccroche et, sans un regard, il claque la porte derrière lui. Je scrute la pièce pour essayer de savoir comment la personne au bout du fil a bien pu voir la scène, et je la vois, dissimulée dans un coin de la pièce : une toute petite caméra qui me rend ivre de colère. Je dresse un majeur dans sa direction avant de croiser les bras sur ma poitrine en attendant de sortir de ce trou à rats.
Les questions fusent dans mon esprit. Je ne comprends pas ce que je fais ici. Il ne semble pas vouloir me tuer ni même me faire de mal, pourtant je suis enfermée dans une cave miteuse. La lumière qui s'éteint semble m'indiquer que je dois dormir, mais le froid glacial m'en empêche. Je me recroqueville pour tenter de me réchauffer. Mon manque de sommeil de la nuit précédente me rattrape, et mes paupières se ferment dans un mouvement lent et lourd.
***
La porte qui claque me réveille en sursaut.
Connard.
Je lève les yeux au ciel en voyant mon petit déjeuner posé sur la table métallique, des paquets de céréales version miniature, une bouteille de lait et un bol en plastique, comme ceux que l'on donne aux enfants, avec la cuillère assortie.
J'ai l'impression d'être dans un camp de vacances morbide.
Je m'approche doucement de la table, attrape le contenu et la tasse de café fumante. Assise sur le tissu froid, je me délecte du café qui me réchauffe après la nuit de merde que je viens de passer. J'avale rapidement les Chocapic qui ont coloré le lait, qui a désormais un goût chocolaté que je m'empresse de boire. Je souffle d'ennui, plusieurs heures se sont écoulées depuis mon maigre petit déjeuner. Je lance des regards sombres à la caméra en espérant que la personne derrière ait un peu peur, même si je me doute que ce n'est pas le cas.
Je me demande si quelqu'un a remarqué mon absence à l'hôpital, ou est-ce qu'il pense que j'ai abandonné. Tout ceci me semble tellement lointain, la vie que j'essaie de me construire semble s'effondrer comme un vulgaire château de cartes, soufflé tellement rapidement que c'en est pathétique. Je n'aurai donc jamais le droit au bonheur. Une ombre s'arrête devant la porte, le bruit métallique m'indique que la porte est déverrouillée, une nouvelle silhouette apparaît.
L'homme doit faire 1m90, sa carrure est moins imposante, mais son aura me fait trembler. Il est aussi cagoulé et vêtu entièrement de noir. Son assurance me déstabilise, son regard sur moi m'est familier, ce qui me perturbe davantage. Malgré mes efforts pour découvrir qui il est, je reste sans réponse. Il pénètre dans la pièce avec nonchalance et s'assoit, le torse face au dossier de la chaise, à bonne distance de moi. Je ne vois pas la couleur de ses yeux, mais je sais qu'il m'observe. Son regard est pesant, mais pas menaçant. Je reconnais cette sensation sourde qui me hérisse les poils.