Campée à la barre, Rez regardait les volcans gris de l’Ofrya grandir au loin. L’archipel se dressait au milieu d’un océan plat, sous des nuages étouffants. L’atmosphère lugubre avait créé une tension au sein de son équipage, qui devenait de plus en plus palpable à mesure qu’ils approchaient de leur destination. Même si ce n’était pas leur premier voyage dans les eaux ofryannes, les pirates savaient à quel point celles-ci pouvaient être traître.
Rez n’était pas inquiète. Elle connaissait le chemin parfait pour atteindre Ashary. Lorsqu’elle était enfant, elle se rendait au moins une fois par an en Ofrya. Malgré leurs terres désolées, les Ofryans avaient trouvé le moyen de relancer leur commerce et Nesh était particulièrement friand de leurs tukis, des fruits sucrés qui ne poussaient que là-bas. Au fil des ans, il était devenu ami avec le gouverneur et ils avaient même le privilège de séjourner dans la Résidence. Un privilège dont Rez avait continué à profiter.
— Tu es nerveuse ?
Rez arqua un sourcil en toisant Venko du coin de l’œil. Il était en train de nettoyer sa longue-vue avec un chiffon, astiquant ses moindres recoins. C’était son rituel quotidien, car cet objet était sa possession la plus précieuse.
— Nerveuse ? Pourquoi est-ce que je serais nerveuse ? répliqua-t-elle.
— Une certaine oshai, que tu n’as pas quitté en les meilleurs termes.
Rez souffla et reporta son attention sur l’horizon.
— Je n’ai aucune raison d’être nerveuse, affirma-t-elle.
— Bien entendu.
Son ton sonnait faux. Pour le plus grand malheur de Rez, Venko la connaissait trop bien. Il était là lorsque les pirates du Serpent Noir l’avaient repêchée. Il l’avait vue grandir. Et il connaissait tous les détails de sa relation compliquée avec la célèbre oshai d’Ashary.
— Je ne veux aucuns problèmes. Le gouverneur nous tolère, mais je ne veux pas savoir ce qu’il se passerait si un membre de l’équipage le mettait en colère.
— Je m’occuperai de les garder dans le droit chemin, promit le timonier.
Il réassembla sa longue-vue, puis se leva et s’éloigna en direction du pont. Rez tourna légèrement la barre du navire, évitant les récifs invisibles qui se trouvaient sous la surface de cette eau trop calme.
Quelques minutes plus tard, ils accostèrent sur le port de la cité flottante d’Ashary. Après avoir fait circuler l’interdiction de quitter le navire à son équipage, Rez descendit avec Roni et Mika, son quartier-maître, qui était aussi une Voyageuse de l’ordre des Spares.
Elle traversa les rues familières de la cité flottante, jusqu’à arriver sur la terre ferme face à la Résidence. C’était une véritable prouesse architecturale, qui avait été taillée dans les murs de coulées de lave. La porte était grande ouverte et personne ne l’arrêta lorsqu’elle entra. La sécurité était moindre ici, car il y avait très peu de gens qui seraient assez stupides pour attaquer Rov Dashen. Pas quand son oshai n’était jamais bien loin.
Roni et Mika dans son sillage, Rez marcha jusqu’à la Grande Salle. Malgré les années, elle était toujours autant frappée par la beauté de la Résidence. Sans doute le fruit du travail d’un canalisateur, qui avait façonné le lieu pour lui donner un aspect irréel. Les murs avaient été parfaitement taillés et sculptés à certains endroits pour former des motifs harmonieux. Tout un mur racontait l’histoire de l’Effondrement, le jour où les volcans de l’Ofrya étaient entrés en éruption et avaient tué la majorité de la population.
Au centre de la pièce, une table sortait du sol, représentant l’archipel dans toute sa splendeur terrifiante. Et plus loin, sur un trône formé de la même roche, était assis le gouverneur d’Ashary. Il écoutait avec attention le rapport que lui faisait l’un de ses conseillers.
Les pirates s’arrêtèrent à l’entrée de la pièce, attendant que leur présence soit remarquée.
— Trois dettes ont été réglés, mademoiselle Lidar a accordé deux délais supplémentaires et nous avons un retard de paiement qui devra être réglé demain, annonça le conseiller.
— Des délais mérités, rétorqua une jeune femme à la chevelure albâtre.
— Tant que cet argent termine dans mes caisses, je me fiche de comment vous procédez, soupira Dashen.
Le regard de Dashen passa au-dessus de la tête de son conseiller et un sourire carnassier étira ses lèvres lorsqu’il aperçut la pirate.
— Capitaine Nikav ! Quel plaisir de vous revoir à Ashary ! s’exclama-t-il avec trop d’entrain.
La fille aux cheveux blancs fit volte-face. La surprise quitta rapidement son visage, pour laisser place à de la colère.
— C’est toujours un plaisir de venir vous rendre visite, gouverneur, répondit la capitaine sur le même ton.
— Et puis-je savoir ce qui vous amène cette fois-ci ? Le plaisir ou les affaires ?
Rez jeta un coup d’œil en direction d’Althéa, qui s’était retranchée dans sa position de rejet favorite : les bras croisés, le regard perçant et les sourcils froncés.
— Le plaisir, mentit Rez. Nous passions proche des côtes ofryannes et Roni m’a fait remarquer que nous n’avions pas mangé de tukis depuis une éternité.
— Votre équipage a la permission de quitter le navire, s’exclama Dashen en avançant vers elle. Quant à vous, vous êtes toujours la bienvenue à la Résidence, très chère.
— Merci, Dashen.
D’un geste de la main, il appela des domestiques, qui accoururent dans leur direction. Il leur ordonna d’aller préparer une chambre pour la capitaine, puis frappa dans ses mains.
— Vous tombez à pique, j’ai des visiteurs Ascyans pour lesquels j’organise un dîner ce soir. Vous devez nous rejoindre.
— De quel genre de visiteurs parlez-vous ? S’ils sont de la noblesse ascyanne, je doute qu’ils apprécient de dîner avec moi, répliqua-t-elle.
Dashen balaya sa remarque d’un geste de la main.
— Et bien je souhaite vous avoir comme invitée, alors leur opinion n’est pas importante, déclara-t-il.
Il se pencha vers elle et lui glissa sur le ton de la confidence :
— Entre nous, ce dîner a l’air très barbant. Vous avez tendance à rendre les choses plus… amusantes.
Rez esquissa un sourire.
— Alors comment pourrais-je refuser ?
— Parfait ! s’écria Dashen en frappant dans ses mains. Les affaires me rappellent, à ce soir capitaine.
Rez acquiesça et fit volte-face, non sans jeter un dernier regard en direction de l’oshai.
— Prévenez les autres, j’ai quelques affaires à régler et je vous rejoindrai ensuite, dit-elle à Roni et Mika.
— Passe le bonjour à Althéa pour moi, lui murmura Roni avant de partir.
Rez roula des yeux, puis gravit les marches en pierre, montant plusieurs étages jusqu’à atteindre le niveau où se trouvait la chambre qu’elle occupait lorsqu’elle se rendait à Ashary. Elle abaissa la poignée et soupira en constatant qu’elle était fermée. Elle s’adossa donc au mur voisin et attendit.
Plusieurs minutes passèrent, mais elle savait qu’elle ne tarderait pas. Elles étaient pareilles. Même énervées, elles étaient attirées l’une vers l’autre comme des aimants.
Althéa apparut au bout du couloir, avançant de son pas silencieux et léger comme une plume. Si l’oshai ne voulait pas être vue, elle ne l’était pas. Elle se déplaçait sans même entraîner une brise sur son passage. Mais Rez savait toujours quand elle était proche. Elle la sentait avant de l’entendre, avant de la voir, avant de la toucher.
Sans un mot, ni un regard, Althéa déverrouilla la porte de sa chambre et y pénétra. Rez considéra la porte restée entre-ouverte comme une invitation et s’engagea à sa suite.
— Qu’est-ce que tu fais vraiment ici ? demanda Althéa sans préambule une fois la porte refermée derrière elles.
— Je l’ai déjà dit, je suis ici pour le plaisir, répondit la pirate en s’approchant lentement d’elle.
Althéa ricana, lui tournant toujours le dos.
— Tu as toujours une idée derrière la tête. Tu ne viendrais pas ici seulement pour manger des tukis.
— Peut-être que je suis venue pour toi, rétorqua-t-elle en s’arrêtant à quelques centimètres d’elle.
— Tu ne viendrais pas seulement pour moi.
L’oshai se retourna et la fusilla du regard.
— Tu as repris ta dague et tu es partie sans un mot. Le message était très clair Rez. Alors pourquoi est-ce que tu fais semblant ?
La pirate ressentit un pincement au cœur. Elle leva sa main et attrapa une mèche des cheveux blancs de la jeune femme.
— Peut-être que tu me manquais.
— Arrête de mentir ! s’exclama l’Ofryanne en s’écartant vivement.
Rez poussa un soupir et s’assit sur le lit.
— J’ai trouvé une carte menant à une épave au Sud de l’île. Mon équipage aurait besoin d’une victoire. Et personne ne passe ici sans saluer le gouverneur d’Ashary.
Althéa fronça les sourcils et son regard s’assombrit davantage.
— Enfin un peu d’honnêteté, cracha-t-elle.
Mais Rez savait qu’elle aurait préféré continuer à entendre son mensonge.
— Pourquoi est-ce que tu me pousse toujours à te dire des choses que tu ne veux pas entendre ? souffla-t-elle.
— Va te faire foutre.
Althéa s’assit sur la commode qui faisait face au lit et croisa ses jambes en tailleur. Leurs regards se mêlèrent et Rez eut le plaisir de remarquer que le résultat était toujours le même.
— J’aimerais que l’air marin te rende hideuse, confessa l’oshai.
— Menteuse… la provoqua la pirate avec un sourire.
Elles se toisèrent durant plusieurs secondes, qui semblèrent durer des heures.
— Où est-ce qu’elle est ton épave ? demanda finalement Althéa.
Rez extirpa la carte de la poche de son manteau et se leva pour l’étendre sur la coiffeuse. Elle pointa ensuite la croix rouge du doigt, lorsque la jeune femme à la chevelure blanche passa sa tête par-dessus son épaule.
— J’espère que tu ne compte pas y emmener la Dame Pourpre. Elle s’échouera contre les récifs.
— Changement de programme alors, grommela Rez.
— Tu auras besoin d’un Canalisateur, ou d’un Animaliste à la rigueur. Les eaux sont peu profondes, mais trop pour plonger et survivre.
— J’ai tout ce qu’il me faut, trésor, ne t’inquiète pas.
Althéa lui lança un regard noir.
— Ne m’appelle pas comme ça, gronda-t-elle.
Rez poussa un soupir et se tourna vers elle, s’appuyant à moitié sur la coiffeuse.
— Tu vas rester en colère pendant longtemps ?
L’Ofryanne contracta sa mâchoire, ouvrit la bouche, puis la ferma à nouveau. Elle laissa échapper une exclamation de frustration et retourna s’asseoir sur sa commode.
— Tu fais tout le temps ça ! s’exclama-t-elle entourant ses genoux de ses bras. Tu disparais et tu t’attends à ce que je patiente jusqu’à ton retour et que tout soit comme avant. Mais pourquoi est-ce que je devrais t’attendre ?
La question plana entre elles et Rez croisa les bras.
— Est-ce que je dois comprendre que tu es allée voir ailleurs ? demanda-t-elle.
Althéa écarquilla les yeux et éclata de rire.
— Non mais tu t’entends ? Tu agis comme si j’étais à toi, mais aux dernières nouvelles on ne fait que s’amuser toi et moi.
Rez se renfrogna.
— C’était juste une question, pas besoin de t’emballer, répliqua-t-elle.
— Je vais te tuer, lança l’autre. Tu le mériterais.
— Sûrement, trésor, fit la pirate en esquissant un sourire.
Althéa passa une main dans ses cheveux blancs et posa ensuite son menton sur ses genoux relevés.
— Je ne peux plus faire ça. J’en ai marre de m’impliquer dans quelque chose qui n’a pas d’avenir. Je me suis laissée faire parce que ça m’arrangeait, mais c’est terminé.
Rez se redressa, piquée à vif.
— Qu’est-ce que ça veut dire ?
— Que tu dormiras dans la chambre que Dashen t’a préparée à présent, déclara l’Ofryanne.
La pirate se mordit la joue. Elle ravala sa colère et rétorqua sur un ton désintéressé :
— Comme tu voudras.
— Parfait.
Après un long échange de regard, Rez quitta la pièce. Elle ne comptait pas courir après Althéa pour récolter des miettes d’affection. Elle n’avait pas besoin d’elle.
Elle dévala les marches et sortit de la Résidence sans un regard en arrière, même si elle se doutait que l’oshai la suivait du regard par la fenêtre de sa chambre. Rez traversa Ashary pour retrouver le port. Lorsqu’elle arriva, elle aperçut Venko qui chargeait des tonneaux sur le navire.
— Joyeuses retrouvailles ? lui demanda-t-il lorsqu’il l’aperçut.
Rez le fusilla du regard.
— On dirait que non, gloussa le timonier.
— Tu oublies souvent comment tu dois t’adresser à ta capitaine, Venko, gronda-t-elle.
— Je t’ai vu grandir et je t’ai appris la moitié de tout ce que tu sais, Rez. Je trouve que ça me donne quelques privilèges.
La pirate soupira.
— Des tas même, grommela-t-elle avant de monter à bord de la Dame Pourpre.
Sur le pont, son équipage s’afférait à remplir la cale avec les tonneaux. Ils ne resteraient pas très longtemps à Ashary, elle avait donc décidé de se ravitailler dès leur arrivée.
— La chambre est à ton goût ? lui demanda Roni quand elle arriva à sa hauteur.
— La prochaine personne qui fait une allusion à ce sujet, je la balance par-dessus bord, c’est clair ?
— Entendu. Tu m’as l’air de très bonne humeur en tout cas, ironisa son second.
Rez lui lança un regard d’avertissement qui le fit sourire.
— Je veux que Venko, Vera et toi m’accompagniez à ce dîner ce soir. Hors de question que j’endure ça toute seule.
— Ça ne te dérange pas vraiment d’habitude…
— Roni… Fais attention à toi.
— Pardon capitaine, dit-il en levant les mains en l’air.
Agacée, Rez partit vers sa cabine. Elle étudia à nouveau la carte et réfléchit à la meilleure façon d’approcher de la croix sans risquer d’abimer son navire et sans passer par les Terres de Cendre. Les régions de l’île où les coulées de lave avaient recouvert la verdure étaient sacrées pour les Ofryans. Il était interdit d’y pénétrer, sauf un jour par an, lors de la Fête des Morts. Nul ne pouvait déranger le repos des défunts, sous peine d’être exécuté.
Rez n’avait aucune envie de se mettre à dos Dashen et de donner des raisons supplémentaires à Althéa de la détester. Elle se rapprocherait donc le plus possible par la mer, puis ils utiliseraient les barques. Elle espérait seulement que Dagra pourrait contrôler les flots assez longtemps pour qu’ils atteignent l’épave et récupèrent le trésor.
Rez jubilait. Elle adorait être un problème. Et à cet instant, les membres de la noblesse ascyanne qui dînaient à la Résidence la voyaient comme un problème majeur.
Assis face à elle, le comte Josiph Adumas la toisait avec une colère à peine voilée. Il ne l’avait pas quittée du regard une seule fois depuis qu’elle s’était assise et semblait sérieusement considérer d’essayer de l’arrêter ou de la tuer. Elle sentait toute l’ampleur du dégoût qu’elle lui inspirait. Elle voyait ses pensées comme s’il les prononçait à voix haute. Il réfléchissait à la récompense qu’il recevrait s’il rentrait en Ascya avec la pirate la plus recherchée des Sept Mers.
— Je pense que mettre en place un traité commercial entre Ashary et l’Ascya pourraient grandement vous bénéficier, poursuivit Abriel Serird.
— Vous devriez faire attention à la façon dont vous formulez vos phrases, vicomte, s’exclama Dashen en avalant une bouchée de son plat. Nous autres, Ofryans, sommes extrêmement susceptibles. Et vous entendre suggérer que nous avons besoin de vous… C’est délicat.
Le vicomte leva les mains en l’air, comme pour effacer ses paroles.
— Ce n’était pas mon intention, gouverneur. L’Ascya profiterait aussi grandement de vos…
Il fit une pause, cherchant ses mots.
— Ressources uniques en leur genre, compléta-t-il un peu tard.
Rez jeta un coup d’œil dans leur direction. Elle remarqua qu’Althéa le fusillait du regard et que le gouverneur souriait comme un enfant face à un jouet.
— Qu’en pensez-vous Rez ? l’interpella soudain Dashen. Avons-nous besoin de l’Ascya ?
La capitaine toisa le vicomte et les deux Ofryans. Elle s’attarda sur le visage d’Althéa, qui fixait maintenant obstinément son assiette.
— Je ne vois pas ce qu’ils pourraient vous offrir qui vaille la peine de vous salir en vous alliant avec eux, déclara-t-elle.
— Espèce de… s’écria le comte Adumas en se levant.
Rez arqua un sourcil et l’observa avec amusement.
— Vous feriez mieux de ne pas terminer cette phrase, monsieur le comte, l’avertit Dashen. Rez Nikav est mon invitée, au même titre que vous.
— C’est une sale pirate ! s’offusqua Adumas.
— Elle n’a commis aucun crime en Ofrya, rappela le gouverneur. Rasseyez-vous.
Forcé d’obtempérer, le comte reprit place sur sa chaise. Se délectant de sa rage, Rez le nargua ouvertement en s’installant encore plus confortablement.
— Tu aimes beaucoup trop jouer avec le feu, murmura Roni sur sa gauche.
— C’est pour ça que je t’ai pris comme second. Pour tempérer, indiqua-t-elle.
Roni poussa un soupir et recommença à manger.
— Ashary n’a pas besoin d’un traité avec l’Ascya. Et la capitaine a raison, je ne souhaite en aucun cas m’allier avec un pays qui traite les Mages avec autant de cruauté.
Si le vicomte Serird était dans la modération depuis le départ, ce dernier commentaire eut raison de sa patience.
— Les Mages sont une abomination, qui doit être éradiquée. Si un pays est sale, c’est le vôtre, à cause de cette vermine que vous autorisez dans vos rues.
Dashen haussa les sourcils, puis il s’esclaffa. Il jeta un regard à Althéa, qui fixait le vicomte avec des yeux orageux.
— Vous devriez surveiller vos propos devant mon oshai. Elle n’est pas prône à l’insubordination, mais il y a des situations où je l’autorise à faire ce qu’elle veut. Et elle semble vouloir vous tuer.
— À moins de recevoir un ordre contraire, je risque de le faire, déclara Althéa.
— Et je l’aiderai, ajouta Rez.
Althéa lui lança un regard surpris, puis fronça les sourcils.
— Menacer des membres de la société ascyanne est une déclaration de guerre, annonça le comte Adumas.
— Bon sang, vous êtes encore plus susceptibles que nous ! s’esclaffa Dashen.
Il semblait passer un très bon moment et s’amuser grandement de la situation.
— Je pense qu’il n’est pas nécessaire d’entretenir cette charade plus longtemps, Abriel, déclara Adumas en se levant.
— Bonne nuit, souffla Rez en le saluant de la main.
Après un regard hargneux dans sa direction, les deux hommes prirent congé.
— Et bien… C’était en effet très divertissant ! ria Dashen.
— Vous pensez qu’ils prennent vraiment ça comme une déclaration de guerre ? l’interrogea Atlhéa d’un air inquiet.
Le gouverneur secoua la tête.
— Non je ne pense pas. Ils vont simplement rentrer en sachant qu’il n’y aura jamais d’accords commerciaux entre nos nations.
— Je n’en serais pas si sûr, gouverneur, intervint Venko. Les Ascyans sont fiers. Un rien est un affront à leurs yeux.
Dashen s’adossa à sa chaise et poussa un soupir.
— Peu importe. Ce problème peut attendre demain. C’était une longue journée et je souhaite me reposer. Vous devriez tous en faire autant, dit-il avec un regard appuyé envers Althéa.
Une fois qu’il eut disparut, Roni et Venko se levèrent pour regagner la Dame Pourpre, tandis que Rez s’attardait avec Althéa.
— Tu penses que ça va s’arrêter à ça ? demanda la jeune femme aux cheveux blancs.
— Je ne sais pas… Tout dépend de l’importance de ces deux-là auprès du Roi. Ne t’inquiète pas avant qu’il y ait de problème.
— Je ne m’inquiète pas, rétorqua-t-elle.
Rez haussa les sourcils, peu convaincue.
— Je te connais. Tu t’inquiètes.
Althéa la toisa avec reproche, puis quitta la Grande Salle. Rez soupira en la regardant partir. Elle attendit quelques minutes pour être sûre qu’elle ait atteint sa chambre, puis partit en direction de celle qu’on lui avait préparée.