Je m'endors, Tard. Trop tard.
Et à peine mes paupières fermée , je me retrouve ailleurs.
Dans un couloir sombre Humide. Le sol est froid sous mes pieds nus.
Une ampoule vacille au plafond. L'ombre d'un homme apparaît au bout du couloir.
— Papa ?
Ma voix résonne. Elle semble étrangère, trop jeune, trop fragile.
L'homme ne répond pas. Il tourne lentement la tête. Son visage est flou, Son regard vide.
— Papa, pourquoi tu nous as laissées ?!
Je cours vers lui , Mais plus je cours, plus il s'éloigne.
Le sol se dérobe. Je tombe, Encore et encore. Une spirale sans fin.
— Tu m'as abandonnée !
Sa voix explose alors. Grave. Lointaine.
— Tu n'étais pas assez forte. Tu n'étais pas assez digne.
Je hurle, Je me débats dans le vide.
Et je me réveille.
En sueur Essoufflée,Le cœur battant à m'en briser la poitrine.
Les larmes me brouillent la vue.
— Ava ?!
La porte s'ouvre brusquement. Maman accourt, une boîte de médicaments à la main.
— Ava, regarde-moi. Ça va, ma fille. C'est un cauchemar, juste un cauchemar...
— Il était là... papa... il me parlait...
Je me recroqueville, tremblante, le souffle court.
— Ava, écoute-moi. Respire. Respire, bébé...
Elle sort rapidement deux comprimés et les glisse dans ma main.
Je recule brutalement.
— Non ! Je commence à hurler paniquée. Non ! Je veux pas ! Il va revenir si je dors !
— Ava, chérie... tu dois les prendre. Regarde-moi C'est maman.
— Non ! Je veux pas ! Il va revenir si je dors !
Je crie. Je me débats. Les draps s'enroulent autour de moi comme des chaînes.
— Ava ! s'exclame ma mère , d'une voix plus ferme cette fois. Arrête !
Elle se redresse, son visage tendu par l'angoisse... et la colère.
— Ça suffit maintenant, Ava ! Tu vas pas encore recommencer ! Pas après tout ce qu'on a traversé !
Je la regarde, haletante, choquée. Ce n'est pas la voix douce et patiente de tout à l'heure. C'est une voix dure Une voix brisée.
— Tu crois que j'en peux plus, moi ? Que c'est facile de te voir souffrir comme ça chaque nuit ? Tu crois que je dors, moi ? Hein ? Tu veux finir à l'hôpital ?!
Je baisse les yeux, incapable de parler.
Ma gorge est nouée. Mes mains tremblent.
Elle sort son téléphone, le visage fermé.
— Tu veux pas les prendre ? Très bien, j'appelle le Dr Philippe. Il m'a dit de le faire si tu recommençais à refuser les médicaments.
— Non, maman... non... je veux pas qu'il vienne...
— Trop tard. Je le préviens. Il doit augmenter ta dose. Tu peux pas continuer comme ça.
Elle compose le numéro, s'éloigne dans le couloir pour parler.
Je reste là, figée, le regard dans le vide.
Et quand elle revient, elle ne dit rien. Elle pose le téléphone, revient près de moi et me glisse les cachets dans la main à nouveau.
Cette fois, je les prends, Parce que je n'ai plus la force, Parce que je ne veux pas qu'elle pleure encore.
Et là j'entends des petits pas venant dans ma chambre...
Nina...
sa peluche dans les bras, les yeux remplis de larmes.
— Nina...? je murmure faiblement.
Mais elle ne bouge pas. Elle a peur.
Elle m'a vue hurler, pleurer, me débattre contre maman.
Ma petite sœur. Mon bébé.
Je tends la main vers elle, mais elle recule doucement, puis disparaît dans le couloir sans dire un mot.
— Nina, reviens , je souffle
Elle reviens dans la chambre puis s'avance lentement. Elle grimpe sur le lit et vient se blottir contre moi, sa petite main cherchant la mienne
Je la serre fort, aussi fort que je peux
— J'ai eu peur, Ava, elle murmure la voix brisée
— Moi aussi, je réponds la gorge nouée
Maman ne dit rien. Elle s'allonge doucement de l'autre côté de moi et nous entoure toutes les deux avec ses bras fatigués
Et dans ce lit trop petit pour contenir tant de douleurs, on finit par s'endormir, toutes les trois, comme si c'était la seule chose à faire pour tenir jusqu'au lendemain
Quand j'ouvre les yeux, la lumière du matin filtre à travers les rideaux entrouverts.
Le silence est doux, presque irréel.
Je sens le poids léger de Nina encore blottie contre moi, sa peluche écrasée entre nos deux corps.
Maman s'est levée plus tôt, comme toujours. Elle nous a laissées dormir.
Je reste allongée quelques secondes, à écouter la respiration paisible de ma petite sœur.
Et malgré la fatigue, malgré les souvenirs flous de la nuit, une chaleur étrange me traverse. Comme si, pour une fois, je n'étais pas seule.
Je me redresse doucement, pour ne pas réveiller Nina. Je sors du lit, m'étire, puis j'enfile un gros pull et sors de la chambre à pas feutrés.
Dans la cuisine, maman est là, une tasse de café à la main. Ses traits sont tirés, ses yeux cernés. Mais elle me regarde avec douceur.
— Bien dormi ?Je hoche lentement la tête.
Elle s'approche, me caresse la joue du bout des doigts.
— Le psychologue m'a répondu, il peut passer demain matin. Il veut te parler un peu, juste pour voir comment tu vas.
Je ne réponds pas tout de suite. Je me contente de fixer la table, les miettes de pain, le bol de céréales de Nina, à moitié vide.
— Tu sais que je t'aime, hein ? dit-elle doucement.
Je hoche la tête, encore. C'est tout ce que je peux faire.
Elle m'embrasse le front, puis retourne à sa tasse.
Je prends mon sac. J'ai cours aujourd'hui. Et même si je n'ai aucune envie d'y aller, je dois sortir de cette maison. Respirer un peu d'air, même s'il est lourd.
— Je reviens vers dix-sept heures, je dis en passant la porte.
Maman me fait un petit signe de la main. Et je sors.
Il fait gris dehors, mais je préfère ça au soleil qui m'éblouit trop.
Chaque pas me tire du passé, me ramène un peu plus dans le présent.
Je suis censée aller en cours, Mais mes pieds ne me mènent pas vers l'arrêt de bus.
Ils bifurquent, presque naturellement, vers une ruelle tranquille. Je m'assois sur un vieux banc, le cuir de mon sac serré contre moi.
J'ai pas la force aujourd'hui.Pas après cette nuit.Pas après ce rêve.Pas après Nina qui pleure et maman qui appelle le psy comme si j'étais en train de devenir folle.
Je reste là longtemps, le regard dans le vide. À fixer les passants, les voitures, les chiens qui aboient et les gens qui rient trop fort.
Puis je rentre. Je dors un peu. Je m'isole.
Le soir arrive plus vite que prévu.
Je me prépare pour aller au club.
J'enfile une robe noire, moulante mais sobre, avec un col droit. J'attache mes tresses en un chignon haut, maquillage léger mais regard accentué.
J'essaie de cacher que je suis à bout.
Quand j'arrive dans le club la musique vibre déjà dans les murs. Les lumières rouges enveloppent tout. Le monde semble lointain ici, presque irréel.
Je prends mon plateau et commence à servir les tables.
Mais alors que je traverse l'espace entre les deux bars, je sens une présence derrière moi.
Froide. Lourde. Comme une ombre qui me suit.
— Tu sais sur qui tu as renversé le verre de whisky se soir là ?
Sa voix est posée, grave. Mais tranchante comme une lame.
Je me retourne lentement.
C'est lui
Costume noir, masque de contrôle parfait sur son visage.
Ses yeux gris me fixent, intenses, glacials. Il se tient droit, imposant, à quelques centimètres de moi.
— Je... je savais pas qui c'était je murmure.
Il s'approche un peu plus.
Je recule, mon dos heurte le mur derrière moi.
— Ce vieux déchet n'aurait jamais dû te parler comme ça dit-il. Mais toi...
Il se penche légèrement, ses yeux plantés dans les miens.
— Tu n'aurais pas dû le provoquer.
Je déglutis. Mon souffle devient plus court.
— C'est pas ce que je voulais... il m'a manqué de respect.
Il hoche lentement la tête, presque amusé.
— Tu as de la chance que je t'aie à l'œil Ava. Sinon, tu aurais disparu avant même de quitter la salle.
Je reste figée. Mon cœur tape trop fort, il connaissais mon nom... bordel
Il m'observe, puis se redresse.
— Reste à ta place. Sers les verres. Et ne te mêle jamais de ce qui ne te regarde pas je doute que tu voudra retourner dans ton trou à rat qui te sers de pays
Et sur ces mots, il tourne les talons et disparaît dans les couloirs sombres du Red Moon.
Je reste là, la gorge nouée. Les mains tremblantes.
Il connaît mon nom, mon pays
Et maintenant, je sais qu'il me surveille.
Je reste encore quelques secondes figée contre le mur, le souffle court.
Puis je me secoue. Je dois continuer à faire semblant. Comme si rien ne s'était passé.
Je retourne derrière le bar, les gestes mécaniques. Mon sourire forcé se colle à mon visage. Je tends des verres. Je prends des commandes. Je fais semblant de ne pas sentir les regards qui pèsent sur moi.
Mais au fond de moi, tout est différent maintenant.
Il m'a parlé.
Et pas comme un simple employeur. Comme un prédateur qui surveille sa proie.
Vers deux heures du matin, la foule commence à se disperser. Les clients quittent peu à peu le club titubants, riants, inconscients du monde dans lequel ils mettent les pieds.
Je range mon plateau, nettoie rapidement le comptoir. Puis je récupère mes affaires dans le vestiaire, les mains encore tremblantes.
Je n'ai même pas la force de parler aux autres filles. Elles semblent toutes trop à l'aise ici.
Moi, je suis en décalage. Comme si j'étais entrée dans une pièce dont je n'aurais jamais dû franchir la porte.
Je quitte le club sans un mot. L'air extérieur me fouette le visage. Froid, brut, réel.
Je monte dans ma voiture, claque la portière, puis reste un instant sans bouger.
Les lumières rouges du club se reflètent encore sur le pare-brise.
Je les regarde jusqu'à ce qu'elles disparaissent dans mon rétroviseur.
Je roule en silence. La ville est presque vide à cette heure. Juste quelques phares au loin, des enseignes lumineuses qui clignotent, des ombres qui disparaissent dans les ruelles.
Je tourne à gauche. Une autre à droite. Et c'est là que je les vois.
Des phares.
Trois,Puis cinq, Puis plus. Des voitures noires Identiques Silencieuses.
Elles surgissent comme des ombres, m'entourent lentement, méthodiquement.
Devant,
Derrière
À mes côtés.
Mon cœur se met à battre trop fort.
Je ralentis. Elles aussi.
Je panique. Je veux tourner,Partir,Fuir. Mais elles me bloquent.
Puis l'une des voitures de tête s'arrête au beau milieu de la rue. Les autres aussi. Le silence devient lourd, presque irrespirable.
La portière s'ouvre.
Il descend...je suis dans la merde jusqu'au bout cette fois ci
Même dans l'obscurité, sa présence est écrasante. Il marche avec lenteur, précision, jusqu'à ce qu'il arrive à ma fenêtre.
Je ne bouge pas. Je serre le volant jusqu'à en avoir mal aux doigts.
Il ne frappe pas à la vitre. Il ne crie pas. Il se contente de me regarder. Ses yeux gris brillent dans la nuit.
Il penche légèrement la tête, comme s'il m'étudiait.
Puis sa voix résonne. Calme. Tranchante.
— Tu veux jouer à la fille forte... Mais t'es pas faite pour ce monde.
Je le fixe, incapable de parler. Mon souffle est coupé.
— Tu crois encore que t'as le choix ?
Il rit doucement, un rire froid, sans aucune chaleur.
— Ce club, ce que tu as vu, ce que tu sais maintenant... ça te lie. Et on ne quitte pas ce genre d'endroit en un claquement de doigts.
Je serre les dents. Je veux lui dire de me laisser tranquille. Que je veux juste vivre Étudier ,Respirer, Mais aucun mot ne sort.
Il s'approche encore. Ses doigts effleurent la vitre sans la frapper.
— Sois prudente. T'as pas encore tout vu.
Puis il se redresse, tourne les talons, et retourne vers sa voiture.
Une à une, les voitures s'écartent, s'évaporent dans la nuit comme elles sont venues.
Je reste là, tremblante.
Le moteur tourne encore. Mon cœur aussi.
Je n'ai plus aucun doute je suis piégée.
J'ai eu du mal à faire leur rencontre mais j'ai eu de l'inspiration bon voilà ✨🌙