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heyceleste
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Chapitre 1

— Bouh !

Mon cœur arrête de battre et mon souffle se coupe pendant une fraction de seconde. Je tente de me ressaisir. Je mets ma main sur ma poitrine et prends de grandes inspirations pour faire entrer de l'air dans mes poumons. Je me tourne afin de voir qui m'a causé cette peur. Je constate qu'il s'agit de Julyanne. Les commissures de sa bouche s'étirent pour former un sourire malicieux.

— Ça va pas !

— Désolée, c'était trop tentant.

Je lui lance un regard noir. Nous sommes chez les garçons. Ils habitent dans un appartement avec de hauts plafonds. Ses planchers légèrement délavés et les poignées rondes de ses portes lui donnent un air ancien. Je l'aime beaucoup. Notre cercle a la coutume de se réfugier ici pour passer le temps.

Il est situé en plein cœur de Montréal, la ville où nous résidons, ce qui est pratique. Nous sommes à proximité des restaurants, commerces et écoles. D'habitude, les logements de ce type sont dispendieux. Étonnamment, ils sont parvenus à en trouver un d'un prix abordable.

— Tu es en retard, constate notre ami.

— Moi aussi, je suis contente de te voir, Adam.

Elle lui donne un bisou. Le garçon s'essuie la joue en râlant. Il est un peu grognon, mais nous l'apprécions quand même. Julyanne s'assoit sur le canapé, entre lui et son coloc.

Puisqu'elle est face à moi, je la contemple. Ses cheveux blonds en bataille lui donnent un air rebelle, son regard brillant fait ressortir ses prunelles brunes, son visage est parsemé de taches de rousseur et ses lèvres pulpeuses sont colorées d'un joli rose, qui me donne envie de les embrasser.

Il y a quelque temps, j'ai réalisé qu'elle ne me laissait pas indifférente. De nature chaleureuse et bienveillante, sa présence est agréable. J'apprécie sa façon de voir la vie. Néanmoins, je me montre distante. Je ne veux pas que mes sentiments pour elle s'agrandissent. Ma précédente relation m'a laissé un goût amer. Je n'ai pas envie d'avoir de nouveau le cœur brisé.

— Coucou Julyanne, je te sers une bière ? demande ma meilleure amie.

Megan est la personne qui compte le plus à mes yeux. Avant de croiser son chemin, j'étais persuadée que tous les gens étaient mauvais. Elle m'a prouvé le contraire. C'est grâce à elle, si j'ai fait la rencontre de la bande.

— Avec plaisir ! Gang, il y a un truc qui me tracasse et j'aimerais connaître votre avis. Pensez-vous que l'on vit dans une simulation ?

— C'est quoi cette question ! s'exclame Adam.

— Les gens, quand ils sont tracassés, c'est parce qu'ils ont eu un conflit. Ju, c'est parce qu'elle se demande pourquoi le ciel est bleu, se moque Megan en lui donnant son breuvage.

La blonde le saisit et boit une gorgée.

— J'ai fait de l'insomnie la nuit dernière, alors j'ai regardé des vidéos sur YouTube et je suis tombée sur une vidéo qui parlait de ça. Je pense qu'il y a des êtres supérieurs qui nous contrôlent, un peu comme si on était des Sims. Ce qui confirme davantage ma théorie, c'est que parfois nous allons dans une pièce pour chercher quelque chose et finalement, on oublie ce qu'on voulait. C'est comme si l'être supérieur voulait qu'on fasse un truc, mais que finalement il avait changé d'avis, alors il avait annulé l'action. Ça explique également pourquoi nous avons autant de sosies. L'être supérieur avait la flemme de créer plusieurs personnages, alors il a simplement fait des copier-coller, raconte-t-elle.

Julyanne a peut-être raison. J'ai souvent l'impression d'être impuissante face à certaines tournures que prend ma vie. Également, il y a des journées où je me sens tellement mal, que j'arrête d'éprouver des émotions. C'est comme si je n'existais pas réellement.

— Si c'était le cas, je ne pense pas que l'être supérieur nous laisserait nous rendre compte que nous vivons dans une simulation. C'est un peu tiré par les cheveux, je trouve, affirme Adam.

— Moi, je crois que tu penses trop, déclare Bryan en mettant son bras autour de sa taille.

Un frisson désagréable parcourt ma colonne vertébrale. Ces deux-là se sont toujours bien entendus, mais dernièrement, j'ai remarqué qu'ils s'étaient beaucoup rapprochés. Bryan est un individu réservé qui participe rarement à nos discussions.

Cela ne change pas le fait qu'il a un style vestimentaire hors du commun. Il a l'habitude de mettre des colliers avec des clous et des trucs dans le même genre. En ce moment, il porte un chandail à l'effigie d'un groupe de metal underground au nom illisible. Néanmoins, il n'est pas le seul à se démarquer. Julyanne porte des habits gothiques et la chevelure de Megan est d'un rouge flamboyant.

— En tout cas, j'espère que nous sommes bien réels. Imaginez, un matin, je me réveille et me rends compte que je suis une chèvre. Par la suite, j'apprends que toutes les choses que j'ai vécues étaient finalement un rêve. Je vais trouver ça insultant après tout le travail que j'ai fait pour rendre ma vie meilleure, dit Carolanne.

Cette dernière est installée dans une mauvaise posture sur le fauteuil, qui est légèrement à l'écart. Pleine d'énergie, elle n'arrive pas à tenir en place. Elle parvient souvent à m'étourdir.

Adam la scrute brièvement. Il sait que nos conversations l'intéressent peu. Elle préfère quand il y a du mouvement. Il nous propose de jouer à Action ou Vérité, ce que nous acceptons en chœur.

Il se tourne vers Julyanne.

— Très bien. Je commence par la plus courageuse. Action ou vérité ?

— Action, évidemment !

— Embrasse passionnément Bryan.

Je me fige. J'espère au plus profond de mon âme qu'elle ne le fera pas. Malheureusement, elle se met à califourchon sur lui. Ils entament un baiser enflammé. Mon corps commence à bouillir. Je serre les poings pour contenir ma colère. Je remarque que mes jointures sont devenues blêmes. À la suite d'un moment qui me semble une éternité, elle se détache de lui. Cependant, les doigts de Bryan viennent enlacer les siennes. Il va falloir que je trouve un moyen de les séparer. Je ne supporte pas de les voir ensemble.

Je sirote ma bière. La boisson se répand dans mon sang. La pression que j'avais accumulée diminue.

— Wow, c'était tout un baiser ça..., commente Adam.

— Je fais ce qu'on me demande, répond la blonde en lui faisant un clin d'œil. Caro, action ou vérité ?

— Vérité.

Adam se lève. Il va en direction de la cuisine. Il a sûrement un petit creux.

— Pourquoi as-tu arrêté de parler avec le gars ? Il me semble que tu l'appréciais.

— J'en étais sûre ! s'écrit-elle en roulant les yeux. En effet, tout se passait bien. Un jour, il m'a invité à sortir. Nous avons fait une balade en voiture et on s'est arrêté dans un champ. Il m'a embrassé et j'ai répondu à son baiser. Nous avons ensuite décidé d'aller plus loin. Je voulais lui faire une pipe, alors j'ai baissé son pantalon et son boxer. Je vais vous épargner les détails, mais en résumé, j'ai remarqué qu'il ne se lavait pas. J'ai prétexté que j'avais un rendez-vous chez le dentiste, mais que j'avais oublié et j'ai quitté sa voiture en vitesse.

Je grimace.

— Beurk, c'est dégoûtant ! m'exclamé-je.

— Tu aurais pu lui expliquer. Le pauvre, il doit maintenant se demander pourquoi tu l'ignores, lui fait remarquer Julyanne.

— Je sais, mais je ne savais pas comment lui dire et je ne voulais pas le vexer. Si ça se trouve, la prochaine partenaire qu'il aura, sera plus courageuse que moi et lui dira.

Adam revient vers nous. Dans une main, il tient une assiette qui contient un sandwich et dans l'autre, il a une bouteille de sriracha. Il s'assoit et dépose ses affaires sur la table basse. Il noie son repas dans le liquide. Je le dévisage.

— Bon, Éléonore. Action ou vérité ?

Je dis « action ». Je ne me vois pas répondre à des questions intimes.

— Goûte à la sauce sriracha.

Je lâche un soupir. Carolanne sait que je ne supporte pas les choses épicées. Elle s'approche avec le récipient. Elle me demande d'ouvrir la bouche. Je m'exécute. Finalement, le goût est tolérable... Je retire mes paroles ! C'est comme si mon palais avait pris feu. Je gémis. Je me dirige à toute vitesse dans la cuisine. Je saisis le lait. À mesure que je l'avale, la sensation de brûlure s'estompe.

— Tu exagères ! Reviens t'asseoir avec nous, m'ordonne Adam.

J'essuie ma mâchoire avec mon bras et remets la pinte dans le frigo. Les tourtereaux sont encore ensemble. Je retourne m'installer à côté de Megan. Je me souviens qu'elle m'a déjà avoué qu'elle trouvait Bryan mignon. Je lui pose la question du jeu et heureusement pour moi, elle dit la bonne réponse. Je ne sais pas ce que j'aurais fait autrement.

— Tu dois embrasser la personne que tu trouves la plus séduisante dans cette pièce.

Comme je l'avais prévue, Megan s'approche de lui et plaque ses lèvres contre les siennes. Julyanne les regarde d'un air perplexe. Je me retiens de sourire. Quand ils terminent, la blonde enlève sa main et la frotte frénétiquement contre sa jupe. Il y a désormais une distance entre eux.

Le jeu continue et les défis s'enchaînent jusqu'à ce qu'on arrête pour discuter de banalités. Je pose un œil sur l'horloge. Il se fait tard. J'annonce à la bande que je vais rentrer.

Affalée sur mon canapé, je m'empiffre de réglisses devant une série, quand on cogne à ma porte. Je mets mon épisode sur pause et vais ouvrir. C'est avec stupéfaction que je tombe sur Julyanne.

— Je peux entrer ?

Avant que je puisse répondre quoi que ce soit, elle pénètre dans ce sous-sol un peu miteux, qui me sert de logement. C'est le seul endroit que j'ai trouvé avec mon salaire de serveuse. Heureusement, il est situé dans un quartier sympathique et j'ai réussi à le rendre chaleureux.

— J'aime beaucoup ton appartement. Les couleurs sont harmonieuses et tes cadres sont superbes !

— Oh, merci.

Je sens mes joues prendre une teinte rougeâtre. Je baisse la tête pour qu'elle ne le remarque pas.

Julyanne commence à visiter ma demeure. Elle inspecte chaque recoin. Elle se permet même de me voler une friandise. Elle est maintenant dans l'encadrement de la porte de ma salle de bains.

— Ne te gêne surtout pas !

Elle se tourne brusquement et se retrouve contre le mur. Je m'approche d'elle. L'odeur de son parfum à la vanille vient chatouiller mes narines. Une ribambelle de papillons s'envolent dans mon ventre. J'aime cette proximité entre nous.

— Ça fait un an que tu traînes avec nous et on ne sait toujours rien à ton sujet. J'avais envie d'en savoir plus sur toi. Par exemple, j'ai vu que tu as plusieurs peluches dans ta chambre. Ça prouve que derrière tes airs de dur à cuire, tu es quelqu'un de tendre.

J'apprécie le fait qu'elle s'intéresse à moi. Habituellement, à cause de ma nature réservée, les gens ne cherchent pas à apprendre à me connaître. Néanmoins, Julyanne n'est pas comme eux. Son rictus malicieux apparaît de nouveau. Je me souviens brutalement qu'elle a embrassé Bryan quelques heures plus tôt. Mon désir pour elle se transforme en dégoût.

— Peux-tu m'expliquer ce que tu fais chez moi ? Nous ne sommes pas amies, à ce que je sache.

J'aperçois une lueur que je n'avais jamais vue dans son regard auparavant. Je pense que je l'ai blessée. Mon cœur se serre. Julyanne ne mérite pas que je la traite ainsi. Cependant, j'ai le sentiment que mon intervention était nécessaire. Je dois me faire à l'idée qu'il ne se passera jamais rien avec elle.

Je l'observe en train de fouiller activement dans sa sacoche.

— Je voulais juste te donner ça, déclare-t-elle, avec un sourire crispé.

Elle me tend mon téléphone. Je l'avais probablement oublié chez les garçons. Je me recule d'elle après l'avoir saisi. Quand je lève les yeux, je me rends compte qu'elle a quitté mon appartement.

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