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heyceleste
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Chapitre 4

— On va bien s'amuser, tu verras ! s'exclame Julyanne, qui remarque mon manque d'enthousiasme.

Elle s'approche et m'ébouriffe les cheveux, ce qui me fait râler. Un sourire moqueur se dessine sur son visage. Mes amis ont décidé que l'activité d'aujourd'hui allait être la randonnée.

Tout en refaisant ma queue de cheval, j'observe la montagne. Elle est gigantesque. Je me demande comment je vais parvenir à la monter. Je lâche un soupir. J'ai l'impression que ce sera une rude épreuve !

Nous commençons à la gravir. Le sentier est étroit, mais assez grand pour qu'il reste sécuritaire. Il y a tout de même quelques embûches. Étonnamment, je me débrouille. Néanmoins, après une demi-heure de marche, les choses se corsent. Des ampoules se mettent à se former dans mes pieds et j'ai de plus en plus de mal à suivre les autres. Je finis par les perdre derrière un troupeau d'arbres. La bonne nouvelle est que je peux maintenant prendre une pause.

Une fois que je me sens d'attaque, je continue la route. Cependant, ma confiance s'éclipse, quand j'arrive devant deux sentiers. Je ne sais pas lequel est celui que mes compères ont emprunté. Je regarde autour de moi, afin de voir si quelqu'un pourrait m'aider, mais je suis seule. Mes membres commencent à trembler. Les battements de mon cœur s'accélèrent. Je vois une grosse pierre. Je m'assois dessus dans le but de me calmer et de trouver une solution.

Malheureusement, ma tentative échoue. Je n'arrête pas de m'imaginer être le personnage d'une émission de survie que Carolanne regarde religieusement. En revanche, je ne risque pas de faire long feu. La possibilité que je puisse manger des insectes me répugne. Un cri de frustration parcourt mes lèvres. Je me place en position fœtale. Je tente désespérément de chasser ces pensées de mon esprit.

J'entends des bruits de pas dans les feuilles mortes. Je m'installe normalement pour être à l'affût. La pression que j'avais accumulée disparaît lorsque j'aperçois une tête blonde parmi les végétaux.

— On te cherchait partout ! On était inquiet.

Julyanne s'approche. À mesure qu'elle avance, son visage devient blême.

— Tu vas bien ?

— J'ai le vertige.

Je suis près de la falaise, à quelques mètres du grand vide. Le bas est extrêmement rocailleux. Si j'avais su qu'elle viendrait, je ne me serais jamais installée à cet endroit.

Son souffle est saccadé. Je crois qu'elle fait une crise de panique. Un nœud se forme dans mon estomac. Je me contente de l'observer, ne sachant pas comment réagir. Je me sens idiote.

Elle ferme les yeux. Je constate, avec soulagement, qu'elle retrouve tranquillement un rythme de respiration régulier. Lorsqu'elle revient à elle, la blonde s'assoit à mon côté. Elle me prend dans ses bras. Mon corps se raidit pendant une fraction de seconde. Néanmoins, je rends son étreinte. Un frisson agréable parcourt ma colonne vertébrale. J'ai le sentiment d'être en sécurité. Nous restons un instant dans cette position.

— Les autres nous attendent un peu plus loin.

Elle se décolle. Je ressens immédiatement un vide. Elle se met debout en prenant le soin de ne pas regarder en bas. Par la suite, elle me tend sa main, mais je parviens à me lever sans son aide. Elle fronce les sourcils. Nous recommençons à marcher.

— Quand je suis dans une forêt, je repense à ce moment. Comme tu sais, j'ai passé mon adolescence à déménager à cause du travail de mon père. Je venais récemment d'arriver à Rouyn-Noranda. Mon frère était parvenu à se créer quelques amitiés, tandis que moi, j'étais seule dans mon coin. Un jour, ses nouveaux amis l'avaient invité à faire une randonnée. Ma mère m'avait forcé à les accompagner. Elle m'avait dit que ça ne me causerait pas de tort de voir des gens. C'est durant cette sortie que j'ai eu mes premières règles. Mon short était blanc, alors c'était bien visible. J'avais tellement honte. Simon et ses amis n'arrêtaient pas de se moquer. Ils me surnommaient Carrie, m'avoue-t-elle en grimaçant.

— C'est vrai que c'est gênant.

— Je crois que ça a été l'expérience la plus gênante que j'ai vécue de toute ma vie ! Même la fois où j'ai vomi sur les pieds d'un mec lors d'un festival, c'était moins pire.

— Tu en as vécu de belles choses, dis donc ! Moi, je crois que le moment le plus honteux que j'ai vécu, c'était durant mon adolescence. Ma mère devait aller me chercher à l'école. Je vois une voiture comme la sienne arriver dans le stationnement, alors naturellement, je me dirige vers elle et monte à l'intérieur. J'ai été surprise de constater que la personne au volant était une inconnue. Tu aurais dû voir le visage de la dame quand elle m'a vue. J'étais tellement gênée. J'ai enchaîné les excuses avant de sortir.

Nous continuons de se raconter des anecdotes embarrassantes jusqu'à ce qu'on aperçoive nos compères qui sont assis sur un tronc d'arbre. Adam me regarde d'un air soulagé et Carolanne me saute dans les bras.

— Je suis contente de te voir. J'ai eu peur qu'il te soit arrivé un truc grave !

Julyanne reste à l'écart, pendant que nous observons le paysage. Nous sommes finalement parvenus à atteindre le sommet de la montagne. C'est impressionnant de voir l'étendue de la forêt. Les feuilles vertes des arbres alternent entre des nuances sombres et lumineuses selon leur espèce.

Après avoir choisi un bon endroit, nous mettons une serviette pour s'y installer. Plus loin, il y a un groupe de personnes qui a l'air d'avoir notre âge. Parmi eux, il y a un garçon qui tape dans l'œil de Carolanne.

— S'il t'intéresse tant que ça, tu as juste à aller lui parler, lui suggère Adam.

— Ça me gêne trop.

— Pourtant, tu passes ton temps à draguer des gars quand nous allons au bar.

— Ce n'est pas pareil. Là-bas, les gens ont l'habitude de se faire séduire.

— Où est la Carolanne qui a confiance en elle ? Tu y vas et puis c'est tout. De toute façon, c'est impossible qu'il ne tombe pas sous ton charme, affirme Julyanne en lui faisant un clin d'œil.

Notre amie se lève. Elle a retrouvé son assurance.

— Tu as raison !

Elle se dirige vers les individus qui la regardent avec curiosité. Elle commence à discuter avec le garçon. Ce dernier lui fait des rictus à chaque fois qu'elle ouvre la bouche. Les joues de Carolanne sont rouges. Un peu plus tard, elle revient vers nous.

— Brendon est déjà en couple, mais il nous invite à passer du temps avec lui et ses amis, annonce-t-elle.

Mes compères acceptent et me laissent seule. Je me couche pour observer le ciel bleu et nuageux. Le soleil fait parfois son apparition. Ses rayons viennent caresser mon visage. Contrairement à la journée d'hier, la température est confortable.

Je ferme les yeux et profite du beau temps. La lumière disparaît. J'ouvre les paupières. Le garçon se tient devant moi.

— Peux-tu te tasser, s'il te plaît ? J'essaie de me bronzer.

— Ce ne sont pas quelques rayons qui vont dissiper ton teint cadavérique.

Ma mâchoire s'ouvre, puis se referme aussitôt. Il ose me dire ceci, alors qu'on ne se connaît pas. Offusquée par ses mots, je prends mon sac et le lance sur lui. Malheureusement, il parvient à l'éviter.

— Arrête de te comporter comme une asociale et viens nous rejoindre ! s'écrit-il en riant.

Lorsque c'est le moment de partir, la bande nous raccompagne. L'après-midi s'est passée sans encombre. Les gens sont sympathiques. Il y a juste Brendon, avec qui je ne m'entends pas. Également, les agissements de sa sœur Mandy me préoccupe.

C'est une fille qui a un sourire contagieux et un rire communicatif. Son tempérament chaleureux nous donne envie d'aller vers elle pour apprendre à la connaître. Elle se soucie du monde qui l'entoure afin de capturer le moindre détail avec son téléphone. Selon elle, les photos racontent une histoire, une émotion à partager avec les autres.

Le problème, c'est que je crois qu'elle ne m'apprécie pas. Elle ne m'a pas adressé la parole une seule fois et évite mon regard. Elle se comporte comme si je n'existais pas. Les ondes que je dégage sont-elles négatives à ce point ?

Brendon se moque de mes talents de randonneuse. Il ne cesse de me comparer à sa copine, qui partage mon amour pour cette activité. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle ne les a pas accompagnés. Nous arrivons devant une pente très à-pic. Je me mets à avancer lentement parce que je ne veux pas me blesser.

Des mains m'attrapent par la taille. Je me retrouve sur l'épaule du garçon. Il me transporte comme si j'étais un sac de patates. Je crie pour qu'il me lâche. Cependant, il fait la sourde oreille. Je lui donne des coups. Mes pieds atteignent le sol quand il termine de descendre la côte. Nos camarades nous observent d'un air amusé.

— Arrêtez de nous regarder comme ça. Ce n'est pas drôle ! m'exclamé-je en croisant mes bras sur ma poitrine.

— Tu devrais être contente que je sois venu t'aider !

— Ouais, c'est ça ! grommelé-je.

Je sens qu'on me scrute. Je constate qu'il s'agit de Mandy. Les commissures de ses lèvres s'étirent pour former un léger rictus. Ses prunelles vertes me fixent avec intensité. C'est comme si elle cherchait à lire mon âme. Elle s'approche de moi. Les battements de mon cœur s'accélèrent.

— Je m'excuse pour l'attitude de mon frère. Il est un peu spécial, déclare-t-elle en tortillant une mèche brune de sa couette.

Ma présence la déstabilise. Mon rythme cardiaque diminue. Je suis soulagée qu'elle ne ressente pas de la haine à mon égard. Son comportement me laisse perplexe. D'habitude, ce sont les autres qui me font peur, pas l'inverse. Je tente de la mettre en confiance.

— Tu m'étonnes ! Tu te rends compte que la première chose qu'il m'a dit, quand il m'a vu, c'est que je ressemble à un cadavre ! réponds-je.

Elle lève les yeux au ciel.

— Brendon a l'âge mental de trois ans. Il n'arrive pas encore à distinguer le bien du mal. Il ne sait pas que ce n'est pas correct de faire des commentaires sur le physique des gens.

Visiblement, je ne l'intimide plus. J'aime sa répartie.

Nous marchons en silence. Ce n'est pas nouveau qu'on me fait la remarque que j'ai le teint pâle. Mes parents m'en ont tellement parlé, que cela a fini par me complexer.

Quand j'étais ado, je voulais absolument être foncée. J'avais appris que l'eau aidait à accélérer le bronzage et on avait une petite piscine pour que notre bichon maltais puisse se rafraîchir l'été. Un jour, le soleil était à son apogée. Les rayons qui plombaient sur le balcon m'avaient convaincu de placer le bassin à cet endroit. Je m'étais ensuite installée à l'intérieur. J'avais fini par m'endormir. C'étaient les cris de ma mère qui m'avaient réveillée. Ma peau était recouverte de cloques. J'avais dû aller à l'hôpital. Durant le chemin elle m'avait engueulée, alors que techniquement, c'était en partie de sa faute si j'avais eu cette idée.

— Au fait, j'aime trop ton top. Tu l'as acheté où ?

— Merci. Je ne sais pas, je l'ai pris dans une friperie.

— J'ignore comment vous faites pour trouver du linge intéressant. À chaque fois que j'y vais, je tombe sur des guenilles.

— Le secret, c'est de chercher. C'est peut-être long, mais ça en vaut la peine. Tu peux trouver des trucs que tu ne vois nulle part ailleurs et qui ont un prix abordable.

— Je n'en doute pas. Franchement, je n'ai pas la patience pour ça.

Je regarde Mandy avec interrogation lorsqu'elle arrête d'avancer.

— Regarde comme c'est beau !

Elle s'est arrêtée à côté d'une petite clôture en bois qui délimite les arbres. Juste en face, il y a une grosse pierre. Elle s'assoit dessus et m'invite à faire de même. Quand je la rejoins, elle sort son cellulaire pour prendre un selfie.

Nous continuons notre chemin. On arrive devant une pente.

— Je vais t'aider, dit-elle en me tendant son bras.

— Avec plaisir !

Je saisis sa paume.

— Tu n'as pas l'air d'être quelqu'un de très sportif.

— C'est faux ! Je fais des marathons... de séries.

Un rictus se dessine sur son visage.

— Sérieusement, tu ne fais aucun sport ? demande-t-elle.

— Non, ce n'est pas trop mon truc. Toi, je suppose que tu en fais ?

— Effectivement ! J'aime bien les randonnées et la marche. J'ai même une application qui compte mes pas ! Sinon, en hiver, je fais du ski alpin.

— Moi, ce sont mes amis qui me forcent à faire des randonnées. J'ai seulement fait du ski de fond et la dernière fois date du primaire. Je m'étais emmêlée dans mes skis et j'étais tombée face première dans la neige. C'était de toute beauté.

Elle lâche un rire. Nous continuons de discuter de tout et de rien jusqu'à ce qu'on arrive dans le stationnement. Adam et Carolanne me sourient malicieusement. Je découvre que nos mains sont toujours enlacées. Je retire la mienne, légèrement embarrassée.

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