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AlexandraEndersen
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V. New Town, New Job

— V —

New Town, New Job

Oslo, Norvège — 1987

Dans le Nord du centre ville de la capitale norvégienne, dans un des quartiers les plus malfamés, se situait un magasin de disque, nommé Stormblåst[1], où seul les fans de métal avaient le droit d'y mettre les pieds. Et si vous ne l'étiez pas, mais que vous passez la porte par mégarde, le propriétaire, un type un peu mégalo', aux longs cheveux corbeau, aux yeux perçants et à la présence prédatrice, vous le faisait rapidement comprendre en vous invitant d'un regard meurtrier à déguerpir le plancher. Un simple froncement de sourcils suffisait à vous glacer le sang et renvoyer les profanes en dehors de ce sanctuaire du métal.

Cela amusait beaucoup les amis du leader qui rigolaient bien de la situation, trouvant cette intimidation savamment dosée particulièrement divertissante. C'était tout un groupe d'amis faisant parti du même clan, le Black Council et qui considéraient Stormblåst comme un bastion, un quartier général où se jouaient les grandes décisions du métal underground norvégien, mené d'une main de fer par le charismatique propriétaire du disquaire et accessoirement guitariste du groupe Helvete.

Accoudé négligemment au comptoir de la caisse, un jeune homme à la silhouette élancée regardait avec une expression mi-amusée, mi-désespérée la montagne de cartons empilés dans un coin de la pièce. Ses longs cheveux noirs ondulés encadraient un visage encore juvénile, mais marqué par une certaine nonchalance.

Les cartons débordaient de vinyles fraîchement arrivés, arborant des pochettes aux dessins sombres et cryptiques. Il savait pertinemment que leur rangement serait un calvaire, d'autant plus qu'il travaillait avec son acolyte qui était connu pour sa propension à disparaître dès qu'un effort prolongé était demandé.

Le jeune homme jeta un coup d'œil à l'horloge murale, son visage se crispant légèrement en voyant l'aiguille s'approcher dangereusement de l'heure d'ouverture. Leur ami et leader, arriverait bientôt pour lancer la journée, et il n'était pas question de l'accueillir avec ce chaos. Pourtant, il ne bougea pas, se contentant de tapoter distraitement le comptoir du bout des doigts, cherchant une motivation qui tardait à venir.

— Il est où Heist ? demanda-t-il en ouvrant l'un des cartons, sortant un vinyle dont la pochette semblait tout droit sortie d'un cauchemar apocalyptique.

— On s'en fou où il est, ricana un autre jeune homme, étendu sur une banquette près de la fenêtre, les bras derrière la tête, un sourire narquois aux lèvres, les yeux rivés sur une télévision diffusant le film Evil Dead.

— Faust arrête tes conneries et viens m'aider à tout ranger, sinon tu le connais il va nous chier une pendule.

Faust haussa un sourcil, s'apprêtant à répliquer avec sa désinvolture habituelle, mais il fut interrompu par un tintement métallique. La sonnette de la porte d'entrée venait de retentir, résonnant dans le silence relatif du magasin. Le jeune homme accoudé au comptoir leva à peine les yeux, perplexe. Après tout, le magasin n'était pas encore ouverts et la pancarte avec écrit « åpen [2] », n'était pas posée sur la porte tant que Heist n'était pas arrivé, car c'était lui le propriétaire. Le patron. Le chef.

— On n'est pas encore ouvert ! beugla Faust sans détourner son regard de l'écran, sa voix traînante trahissant une totale absence d'intérêt.

Mais une réponse inattendue s'éleva, claire et assurée.

— Je suis au courant. Je suis là pour savoir si vous embauchez. La porte n'était pas fermée à clé, alors je suis entrée.

Cette voix appartenait manifestement à une jeune femme. L'homme au comptoir se redressa légèrement, surpris, tandis que Faust, toujours avachi, esquissait un sourire amusé.

Une silence tomba pendant quelques secondes, comme suspendu dans l'air poussiéreux de Stormblåst. Une intruse à l'allure inconnue venait de braver la désorganisation matinale du sanctuaire du métal, et son assurance n'était pas pour passer inaperçue.

***

Briana se tenait immobile, les mains enfoncées dans les poches de sa veste en cuir, contemplant la façade de Stormblåst depuis plus de dix minutes. Le magasin se dressait face à elle, modeste mais imposant à sa manière, avec son enseigne noircie et ses lettres gothiques qui semblaient chuchoter à quiconque osait les regarder. Elle avait suivi les conseils d'Hilda et traversé toute la capitale pour trouver ce fameux disquaire.

Le chemin n'avait pas été simple. Elle avait dû demander son itinéraire à plusieurs passants, mais la plupart lui avait jeté des regards perplexes, secouant la tête comme si ce lieu n'existait que dans l'imagination de quelques initiés. Ce n'est qu'après être entrée en collision avec un jeune homme vêtu d'un blouson en jean couvert de patches de groupes de metal qu'elle avait obtenu une direction claire. Lui, au moins, connaissait l'endroit. Pourtant, même cet échange avait été teinté d'étrangeté : le garçon avait semblé la dévisager un peu trop longtemps, comme s'il cherchait à comprendre ce qu'elle faisait là.

Maintenant qu'elle y était, une sensation bizarre s'emparait d'elle. Un mélange d'excitation et d'angoisse, comme un pressentiment qu'elle n'arrivait pas à nommer. Ce lieu, cette époque... Tout semblait lui être à la fois étranger et d'une familiarité angoissante. Elle ne savait pas si cela était dû à son périple dans le passé ou le faite qu'elle se retrouvait devant la boutique où tout avait commencé.

Peut-être les deux.

Cette sensation étrange lui rappela en quelque sorte sa première année à l'Université de West Pines. Le même mélange d'inconnu et d'espoir l'avait habitée alors, lorsqu'elle avait franchi les portes du campus, ne connaissant presque personne. Mais, à l'époque, tout s'était arrangé. En quelques semaines, elle avait rencontré ses meilleures amies, celles avec qui elle avait partagé des souvenirs qu'elle pensait indélébiles. Aujourd'hui, cependant, les circonstances étaient tout autres. Elle doutait fortement que ce lieu et cette époque lui réservent le même genre de réconfort. Et d'une certaine manière, c'était pas plus mal, car ce n'était pas sa vie, pas son monde. Elle n'était pas là pour rester.

Du moins, j'espère pas de manière permanente.

Briana n'avait aucune idée du temps qu'elle passerait ici, peu importait ce que « ici » signifiait réellement, mais une chose était sûre, elle devait trouver un moyen de rentrer chez elle, dans son époque. Avant le suicide de Søren. Avant le meurtre de Bjørn. Ces événements tragiques, qui l'avaient tant fascinée au cours de ses recherches, prenaient soudain une toute autre dimension. Ils n'étaient plus de simples faits historiques : ils étaient imminents, tangibles, et elle n'avait aucune envie d'en être témoin.

Si le fait de se retrouver piégée dans cette décennie avait quelque chose de surréaliste, l'idée d'approcher le groupe la rendait carrément nerveuse. Elle connaissait tout d'eux : leurs noms, leurs histoires, leurs tragédies.

À qui parlerait-elle en premier ? Seraient-ils aussi intimidants que leur légende le suggérait ? Ou au contraire, plus humains, plus accessibles ? Ces questions tournaient en boucle dans son esprit, exacerbant son anxiété. Elle savait qu'elle ne devrait pas se laisser distraire par ces pensées. Après tout, les enjeux dépassaient largement ses préoccupations personnelles. Elle se trouvait à Oslo, en 1987, une époque où elle n'avait rien à faire, et où chaque minute passée compliquait un peu plus son retour. Pourtant, malgré tout, une boule d'angoisse continuait de lui nouer l'estomac. La situation était bien trop vaste, bien trop absurde, pour qu'elle parvienne à l'ignorer.

Briana ferma les yeux un instant, comme pour rassembler son courage, puis avança d'un pas hésitant vers la porte d'entrée de Stormblåst. Elle savait que la boutique n'était pas encore ouverte au public, mais les deux silhouettes visibles à l'intérieur laissaient entendre que la porte était déverrouillée.

En entrant, elle eut l'impression de pénétrer dans un sanctuaire. L'intérieur était exactement comme sur les photos qu'elle avait vues en ligne, sur les forums et les comptes Instagram dédiés à Helvete. Les murs étaient tapissés de posters de groupes, certains célèbres, d'autres obscurs, mais tous partageant la même aura métallique. Un crâne de cerf ensanglanté trônait sur une étagère murale, entouré de bougies dont la cire avait coulé en formant des stalactites irrégulières. Les quelques rayons présents dans la boutique, exposaient des vinyls de tous les styles de métal possible. Seul une colonne dans un coin poussiéreux, présentait des disques de musique différente.

L'atmosphère semblait presque palpable, comme si l'énergie brute de la musique suintait des murs eux-mêmes. Un tourne-disque, placé derrière le comptoir, diffusait des riffs de guitares électriques qui résonnaient à travers la pièce, amplifiant la tension qui montait en Briana.

La jeune femme se pinça les lèvres et répondit au jeune homme dont la voix lui semblait anormalement familière, qu'elle cherchait un travail.

— Dommage, on embauchons pas, répondit le même jeune homme toujours allongé, d'un ton moqueur.

— Où est le propriétaire, je veux lui parler, dit-elle en s'avançant vers la voix.

— Qui te dis que ce n'est pas moi.

Le jeune homme se redressa enfin avec une lenteur délibérée, comme s'il prenait plaisir à prolonger le moment. Ses longs cheveux noirs glissèrent sur ses épaules alors qu'il plantait son regard perçant dans celui de Briana. Elle se figea sur place, la respiration coupée. Une étrange sensation de vertige s'empara d'elle, comme si le sol venait de disparaître sous ses pieds.

IM.PO.SSIBLE.

Elle reconnu immédiatement ce visage long et fin, ce sourire taquin, ces yeux clair, ce nez... Le ton de sa voix plaisante était la chose qui n'avait fait que confirmé son impossible intuition.

Au mon dieu !

— Mr. F... murmura-t-elle, à peine audible.

Briana secoua vivement la tête, tentant de chasser ce qu'elle prenait pour une hallucination. Pourtant, la réalité ne se dissipait pas. Et alors que la version beaucoup plus jeune de son professeur de Culture Musicale s'apprêta à répondre, une voix forte et distincte retentit depuis l'arrière-boutique, où une autre silhouette apparut dans la pièce principale, détournant l'attention de Briana.

— Parce que t'es trop con pour gérer un magasin.

Le jeune homme aux cheveux longs et ondulés se retourna, laissant apparaître une silhouette immédiatement reconnaissable : Hellhammer, le batteur emblématique d'Helvete. Sans un mot, il s'avança et s'installa nonchalamment à côté d'Heist[3], qui venait de sortir de l'arrière-boutique.

Briana sentit son cœur s'emballer. Une nouvelle vague de choc l'envahit, tout aussi violente que la précédente. Hellhammer. En chair et en os. Puis son regard glissa vers Heist, qui se tenait penché sur le comptoir, l'air aussi sombre que fascinant. Ses bras pâles reposaient sur le bois usé, et ses cheveux noirs de jais encadraient son visage, tombant en mèches désordonnées devant ses yeux. Il avait cette aura intimidante qui semblait glacer d'effroi quiconque osait soutenir son regard trop longtemps.

Combien de fois avait-elle parcouru des photos d'eux, analysé leurs gestes dans des vidéos d'interviews ou de concerts ? Les voir ici, bien vivant, était comme se prendre une gifle en pleine figure.

C'était donc lui Heist. En prétend un peu plus attention à lui, elle ne le trouva pas si evil que ça. En vérité, il lui apparaissait davantage comme un jeune homme en quête de sensations fortes, jouant de son aura magnétique, presque dangereuse. Et pourtant, cet homme avait créé avec ses amis le courant musical le plus sombre et macabre qu'il soit : le black metal.

— Mec, tu sors d'où, on t'a cherché partout, grimaça Hellhammer en regardant le charismatique guitariste.

Heist releva à peine la tête, dévoilant un sourire froid et carnassier.

— Si t'avais ouvert un peu mieux les yeux, tu m'aurais trouvé, répliqua-t-il d'un ton cinglant, mordant sa lèvre inférieure avec nonchalance.

Hellhammer étouffa un léger rire avant de reprendre son activité, triant les disques avec une indifférence apparente. Il semblait totalement ignorer la présence de Briana, et c'était probablement mieux ainsi. Rester discrète était sa meilleure option pour le moment.

Son regard se porta de nouveau sur son professeur de Culture Musicale. Elle ignorait qu'il avait fréquenté ce cercle si proche d'Helvete, mais après réflexion, sa réaction lorsque Kristian avait mentionné le nom du chanteur et du guitariste expliquait beaucoup de chose, maintenant qu'il se trouvait à Oslo, âgée d'une vingtaine d'année et se tenant face à elle.

Prenant une profonde inspiration, Briana brisa le silence :

— Excusez-moi ?

— Quoi ? demanda Heist en levant le menton du comptoir, un sourcil légèrement arqué.

— Vous embauchez ?

Un rire s'échappa de la bouche du leader.

— On n'embauche pas de nana, désolé, répondit-il en arquant un sourcil.

— Wow... Et pourquoi ?

— C'est comme ça.

— C'est merdique comme raison, trouve en une autre.

Cette fois, Heist se redressa légèrement, croisant les bras sur son torse. Son regard perçant la jaugea.

— T'es qui d'ailleurs pour la ramener ?

Une cinglée qui s'est retrouvée à faire un travail de recherche sur ton groupe. Travail ordonné par ton pote à droite qui s'est convertit en prof de Culture Musicale, et qui enseigne aux States en 2000 putain de 17 !

— Briana ou Breeze pour les intimes, mais vu qu'on est pas intime, ça sera Briana.

Un sourire en coin, lourd de sous-entendus, se dessina sur le visage d'Heist. Briana se mordit la lèvre, maudissant son impulsivité.

— À quel point t'aime le métal ? lança-t-il, la défiant ouvertement.

— Assez pour que je te dise que j'ai besoin d'un taff, dit-elle en croisant les bras, soutenant son regard.

Heist resta là. Silencieux. L'observant comme un faucon qui guettait sa proie. Il la regardait de haut en bas, en prenant son temps. Il s'attarda sur chaque aspect de son visage, de son corps avant de reposer ses yeux sur ses...

Lèvres ? Sérieusement ?

— Qu'est-ce que tu regardes ? Aller, donnes-moi moi un taff ! S'il te plait !

Un rire bref, presque moqueur, échappa à Heist. Il haussa les épaules avec nonchalance, son sourire se faisant plus narquois.

— Pourquoi ici ?

— Pourquoi pas ?

Il resta immobile un instant, puis esquissa un sourire en coin, révélant une lueur malicieuse dans ses yeux.

— Ok. C'est bon je t'embauche, déclara-t-il, presque désinvolte, avant de plisser les yeux avec un air mesquin. Tu commenceras par nettoyer les chiottes.

La remarque laissa Briana sans voix. Une vague de frustration monta en elle, mêlée à un soupçon d'incrédulité. Elle avait lu des témoignages décrivant son attitude méprisante, mais elle ne s'attendait pas à ce qu'il le soit à ce point. Pas étonnant que Karma se soit chargé de lui.

Bon certes, se faire assassiner de vingt coups de couteau ou plus, était peut-être un peu fort, mais merde quoi ! C'est un vrai con se type !

— Tu te fiches de moi ? lâcha-t-elle, la mâchoire serrée.

— Non, répondit-il avec un sourire machiavélique. C'est la partie la plus dégueulasse de tout le magasin. Y'a de la pisse, de la merde, et même du sang, le tout sur une même cuvette. Mais, bon voit le bon côté des choses, le reste du ménage te semblera super simple après ça, répondit-il avec un sourire machiavélique.

Je retire ce que j'ai dis, vingt coups de couteau c'est pas assez...

Elle inspira profondément, se retenant de démissionner avant même d'avoir commencé, mais son Jiminy Cricket lui rappela à qu'elle avait besoin de lui, et d'eux, pour retourner dans son époque.

— Ne sois pas si dépité, lança Faust en se redressant légèrement. Il vous aime vraiment, vous les femmes. C'est juste qu'il ne le montre pas vraiment, ricana-t-il avant de lui donner ce qui semblait être une serpillière.

Briana garda le silence, préférant ignorer la remarque. Lorsqu'elle entra dans les toilettes, le mur était littéralement pourrit. Le mur était littéralement rongé par la crasse. Une mosaïque de croûtes étranges et de taches douteuses s'étalait sur les carreaux défraîchis dont elle n'avait aucune envie de savoir ce qu'elles étaient. Quant à la poubelle... N'en parlons pas !

— Je te laisse faire. Oh, et ne touches pas à la stéréos. Hellhammer et moi sommes en charge de la musique, ajouta son ancien professeur de Culture Musicale.

Un sourire inconscient se dessina malgré elle sur le visage de Briana.

Il était plutôt pas mal le prof dans sa jeunesse.

Elle détourna les yeux de Faust pour les poser sur le miroir des toilettes, sale et jauni par le temps. Son propre reflet lui renvoya l'image d'une jeune femme d'une vingtaine d'années, visiblement perdue. Coincée dans une époque qui n'était pas la sienne, tentant de naviguer dans les méandres d'une réalité qu'elle peinait encore à appréhender. Son regard détailla son visage. Les cernes, la fatigue, les traces d'une nervosité permanente. Tout semblait étranger, même à elle-même. Ses pensées, comme un disque rayé, revenaient sans cesse aux événements à venir. Un énième soupire s'échappa de ses narines, avant qu'elle ne s'assoie sur le sol des toilettes en se demandant pourquoi tout cela lui arrivait.

Qu'est-ce que je suis censée faire ? Empêcher un chanteur suicidaire de passer l'arme à gauche et par la même occasion sauver un guitariste mégalo de se faire buter ?

C'est le regard perdu dans le vide et les pensées sans dessus dessous que Briana finit par se lever et prit une feuille blanche et un crayon qui trainaient sur le comptoir. Elle s'occupera du ménage plus tard.

Briana avait toujours aimait dessiner, cela lui permettait de se libérer l'esprit et/ou de son stress. C'est donc armé de sa feuille, son crayon et d'un vinyl en guise de support qu'elle laissa courir son imagination.

Certes, c'est pas avec ça qu'elle allait retourner en 2017, mais au moins, l'espace de quelques instants elle oubliait toute cette folie des dernière 24h. Malheureusement, son cocon de bonheur dura moins de dix minutes quand la voix d'Heist se fit entendre depuis l'entrebâillement de la porte.

— Tu dessines ? demanda-t-il, l'air à mi-chemin entre l'intrigue et la moquerie.

— Non, je fais du ski alpin, répliqua-t-elle ironiquement, un léger sourire en coin malgré elle.

Pour réponse Heist roula des yeux, exaspéré, avant de s'emparer de la feuille qu'elle tenait encore entre les mains.

Un vrai gentleman...

Elle ne s'attendait pas à ce geste brusque. Pourtant, contre toute attente, il examina son dessin avec un sérieux inattendu, ses yeux glissant sur chaque détail, et pendant quelques secondes, un silence pesant s'installa entre eux.

Son dessin bien qu'encore inachevé, était méticuleusement détaillé. Il représentait une tête de lynx réaliste, ses yeux perçants et sauvages semblant fixer celui qui les regardait. Sur son crâne, deux imposantes cornes de cerf s'étiraient, majestueuses et menaçantes à la fois. Entre les cornes, une sphère cristalline semblait flotter, éclatante et lumineuse, tandis que trois papillons minuscules virevoltaient juste au-dessus, comme figés dans un moment suspendu. L'ensemble formait une image à la fois déroutante et captivante, un chaos maîtrisé.

Je sais, j'ai une imagination débordante et chaotique. Rebecca me le faisait toujours remarquer et ça l'amusait.

— Wow, souffla Heist finalement, presque imperceptiblement, toujours absorbé par le dessin.

— Merci, répondit Briana, sincèrement. Mais, il n'est pas encore fini, je veux encore ajouter quelque chose.

Heist releva les yeux, son expression intriguée.

— Comme quoi ?

— Je ne sais pas encore. Je te montrerais quand il sera terminé.

Il la fixa un instant de plus, un demi-sourire mystérieux effleurant ses lèvres, avant de détourner le regard. Il reposa la feuille sans un mot de plus et retourna à ses occupations, laissant Briana reprendre son œuvre.

Elle se sentit apaisée. Créer lui permettait de trouver un semblant de sérénité, un refuge dans cette tempête chaotique qu'était devenue sa vie. Pendant quelques minutes, elle pouvait se perdre dans les lignes et les ombres, loin des pensées oppressantes qui la tourmentaient depuis son arrivée.

Quand elle releva finalement la tête, son crayon suspendu au-dessus de la feuille, elle croisa de nouveau son regard. Il la regardait encore. Cette fois, cependant, son sourire avait changé. Il n'avait plus rien de l'arrogance ou de la provocation qu'il affichait si souvent. Il était plus doux, plus sincère, presque vulnérable. Dans ce moment fugace, il n'était plus le leader charismatique et implacable d'un groupe culte. Il n'était qu'un jeune homme, tout aussi perdu qu'elle, tentant de naviguer dans une réalité qui semblait lui échapper.

_______________________

Note de l'auteure :

Merci d’avoir plongé avec moi dans ce retour à Oslo, 1987 — là où tout commence vraiment pour Briana. Le genre d’endroit où le métal n’est pas juste de la musique, mais une religion, un bastion, une guerre silencieuse. ⚔️🔥🎸

Stormblåst, c’est plus qu’un magasin de disques, c’est un territoire sacré, réservé aux initiés. 🕯️👹 Et si vous avez jamais osé y mettre les pieds, vous savez déjà que la peur et le respect s’y mélangent. Ici, les regards tuent plus sûrement que les riffs de guitare. ⚡👁️‍🗨️

Et puis, il y a cette rencontre improbable, ce moment où Briana franchit la porte — sans savoir que ça va tout changer. Mr. F, Hellhammer, Heist... Vous les connaissez déjà, vous, hein ? Vous avez repéré cette ambiance électrique, ce frisson d’avant-tempête ? ⚡🌩️

Alors, dites-moi : vous auriez osé pousser cette porte, vous ? Ou vous seriez restés plantés là, figés par l’aura du lieu et ses gardiens ? 

Balancez vos impressions, vos questions ou vos souvenirs de lieux un peu « too much » où vous avez osé vous aventurer — je lis tout, toujours avec ce petit sourire qui trahit mon impatience pour la suite. 😏📖

Promis, on ne fait que commencer. La vraie tempête est à venir. ⚡🌑

À très vite, pour la suite de cette plongée dans le cœur du métal norvégien, et dans le chaos qui va suivre. (Et si vous avez un faible pour les blousons en jean déchirés et les vinyles sombres, vous êtes au bon endroit. 🔥)

Petit point vocabulaire (Ça fait beaucoup je sais, mais c'est pour vous aider 😉) : 

[1] : « Stromblåst » se prononce à l'anglaise storm-blast.

[2] : « Åpen » (prononcé open) se traduit par « ouvert » en français

[3] « Heist » se prononce Hey-st. 

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