Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Lys
Share the book

Chapitre 2 - Partie 2

Calista


—      Le plus souvent les victoires te rapporteront de l’argent, mais il pourra arriver que tu gagnes une bagnole. C’est vrai que la plupart des pilotes préfèrent conduire la même voiture tout au long de leur carrière, mais si t’as de la chance tu peux te retrouver avec une bonne source de pièces détachées. 

Alors c’est pour ça qu’il a aussi voulu m’apprendre à prendre soin d’une voiture ? Je prenais toute l’expérience qu’il avait à m’apporter, mais il aurait aussi pu me dire ça il y a un bon bout de temps. 

—      Ce que je veux dire, gamine, c’est que je ne peux pas juste t’offrir cette bagnole. Tu vas devoir gagner ce soir si tu veux qu’elle soit à toi. 

Que je gagne ? Ce soir ? Mais je ne suis pas prête !

—      Avant que tu ne te mettes à paniquer, viens avec moi. J’vais te montrer à quoi ça ressemble, une course de l’Hidden. 

Il me fait signe de le suivre et se dirige en direction du bruit. Nous atteignons rapidement la foule, et je découvre alors un monde complètement différent de celui que j’ai toujours connu. 

J’ai toujours vécu dans un monde qui prônait l’ordre, chaque chose a sa place, chaque personne aussi. Le désordre n’existe pas. 

Alors qu’ici… 

—      Ne te fie pas à ce que tu crois voir, gamine, il y a des règles ici et je peux t’assurer qu’elles sont respectées. Tout le monde ici a remarqué dès ton arrivée que t’es une petite nouvelle. 

Oh… je vois. Je suppose que j’ai encore beaucoup à apprendre. 

Il me désigne d’un signe de tête de grandes tentes situées un peu plus loin. 

—      Là-bas, tu trouveras les joueurs les plus influents du moment. Ça change presque tous les ans.

—      Presque ?

Il soupire.

—      C’est comme partout, certains sont plus doués que les autres et une fois qu’ils ont atteint leur position, ils font tout pour la garder le plus longtemps possible. 

—      Et plus ils restent longtemps à leur place, plus ils sont puissants je suppose ?

Il me pousse jusqu’à une autre tente, située entre celles des joueurs et la foule. 

—      Tu supposes bien, gamine, comme souvent. Il y a beaucoup d’argent qui passe dans les paris. Alors tu penses bien que les gosses de riches qui viennent ici pour s’amuser ont un certain avantage. 

—      Seulement s’ils sont doués pour parier. 

Je peux voir un sourire apparaître au coin de ses lèvres tandis que je constate qu’il nous a emmené à ce qui ressemble à un bar. 

—      Certains appellent ça un bar, d’autres une buvette parce qu’ils partent du principe qu’une tente n’est pas une salle. Dans tous les cas, je te présente l’endroit où les gens viennent faire leurs paris. 

Ici ? Je remarque un tableau a craie sur lequel est tracé un tableau avec plusieurs noms dans la première colonne et des sortes de carrés dans la deuxième et la troisième. 

—      Te fies pas à l’aspect rustique de la chose, dans certaines courses le budget est plus fourni et t’auras un écran à la place du tableau. 

—      A quoi est-ce que je peux me fier alors ? 

—      A rien ni personne, petite ! s’exclame une voix de l’autre côté du comptoir. Parce que c’est seulement quand tu vois un mort revenir à la vie que tu commences à comprendre comment ça fonctionne ici. 

Comment ça, un mort ? 

Ah.

Oui, c’est vrai que Félix a été prétendu mort il y a un paquet d’années. 

Ils ont l’air de se connaître. Enfin… c’est ce que j’en déduis puisqu’ils semblent avoir le même âge et que le barman a l’air sincèrement ravi de le voir. 

—      Est-ce que ce ne serait pas notre louveteau préféré ?

Je vois Félix grincer des dents en entendant le surnom mais il ne dit rien. C’est étonnant. 

Si ça avait été moi, j’en aurai entendu parler pendant des jours. 

—      Gamine, je te présente Nate Donovan. S’il existe une personne au courant de tout ce qui se passe dans ces courses, c’est bien lui.

Nate me fait un clin d’œil et range le verre qu’il était en train d’essuyer. Ses yeux bleu acier semblent lire mes pensées et pourtant, ils sont animés d’une étincelle de joie qui me donne envie de lui faire confiance.

Ça m’amènerait presque à me méfier de lui. 

—      Plus sérieusement Félix, qu’est-ce qui t’amène ? Et ne me dis pas que t’en profites parce que c’est pas loin de chez toi, ça doit bien faire quinze ans qu’on t’a pas vu.

Je me demande s’il était pilote lui aussi. Et qu’est-ce qu’ils deviennent quand ils ne sont plus aptes à conduire ? 

—      Je suis là pour la gamine, t’as pas reçu mon message ?

Nate me dévisage en fronçant les sourcils.

—      Cette blondinette-là ? Elle a l’âge au moins ?

—      D’aujourd’hui, soupire Félix, c’est bon alors ?

—      Du moment qu’elle a seize ans et qu’elle sait tenir un volant c’est bon, mais t’es bien sûr de toi ? Elle est vachement jeune quand même, tu préférerais pas attendre la rentrée ? 

Et elle est toujours là, on me demande mon avis quand exactement ? 

Félix me lance un regard en coin, je me demande comment il va se justifier, Nate n’a pas l’air d’être du genre à se passer d’explications.

—      Je suppose que t’as déjà un paquet d’inscriptions pour la rentrée ? 

—      Ouais, répond Nate en haussant les épaules, on est même en train de se demander si on ferait pas mieux de faire deux courses cette année.

Il y a tant de personnes que ça qui tentent leur chance ? Pourtant, peu de noms finissent par ressortir du lot. Est-ce qu’ils ouvrent une course à la rentrée pour laisser une chance au plus de personnes possibles et restreignent ensuite ?

Sûrement.

—      Crois-moi Nate, cette gamine a du talent, et je suis presque certain que personne va râler longtemps sur le fait qu’elle commence si tard… ou tôt selon le point de vue. 

Le barman me dévisage encore de longues secondes. Si les inscriptions passent par lui, il a vraiment le droit d’en refuser ? 

Il finit par soupirer et attraper un cahier avec un stylo.

—      Si toi tu la complimente, je vais le croire. C’est pas tous les jours que ça arrive, on pourrait presque croire à un miracle. Il va me falloir un nom. 

Il me regarde mais je ne dis rien. J’ai bien compris que j’avais encore beaucoup à apprendre, et pour le coup je préfère laisser Félix gérer.

—      Ou alors j’inscris « blondinette » ? Les gens ne peineront pas à deviner de qui il s’agit.

Il est presque moqueur, mais je ne sais vraiment pas quoi lui répondre. Est-ce que je dois vraiment lui donner mon nom ?

—      Elle s’appelle Calista. 

—      J’étais presque en train de douter du fait que tu connaisses réellement son nom, fait remarquer Nate, à l’appeler « gamine » tout le temps je me posais vraiment la question.

—      Vous êtes pas le seul… je murmure.

Ça le fait rire tandis qu’il range le cahier et inscrit mon nom sur le tableau. 

—      Comme t’es nouvelle blondinette je vais t’expliquer.

Oh non. Pas lui aussi. Je commence à en avoir ras le bol des surnoms. 

Son sourire en coin me fait bien comprendre qu’il sait exactement ce que je pense et qu’il ne compte pas utiliser mon prénom lui non plus alors je me résigne.

—      Ici, les gens peuvent parier sur ta victoire ou sur ta défaite. Si tu gagnes, t’as un pourcentage sur l’argent récolté des paris sur ta défaite, mais si tu perds… bah tu perds.

C’est sympa, mais il faut gagner pour ça. 

Et puis, je doute qu’il y ait beaucoup de gens pour parier sur moi. A moins qu’ils ne pensent que ce serait de l’argent facile puisque je suis nouvelle et qu’ils ne croiront jamais à ma victoire. 

—      Comme t’es nouvelle, ils vont te prêter une voiture, poursuit Félix, la première course est importante, elle donne idée de ce à quoi pourrait ressembler ta carrière. Alors ils veulent éviter toute tentative de triche. 

C’est logique… 

Mais comment je vais faire alors ? Je n’ai conduit que la même voiture depuis trois mois, et elles sont toutes différentes. 

—      D’ailleurs blondinette, si tu veux savoir à quoi t’attendre, y’a une course qui va commencer. Vous voulez quelque chose à boire ? demande Nate après nous avoir désigné le circuit. 

Félix lui répond tandis que je me tourne pour voir. Comme je suis un peu petite et que les gens ici ont tous l’air d’être immense, je trouve un tabouret et me hisse dessus pour avoir une meilleure vue. 

Une main me met une canette sous le nez que j’attrape en hésitant.

—      Je t’apprends rien si je te dis « pas d’alcool avant de prendre le volant » je suppose ? 

Certes, mais ça n’explique pas pourquoi il m’offre à boire.

—      Cesse de regarder cette pauvre boisson comme si elle allait t’apporter toute la connaissance de l’univers gamine. C’est pour m’excuser de pas t’avoir prévenu avant pour la course.

Oh… parce que maintenant il s’excuse aussi ? On va vraiment de miracle en miracle ce soir. 

Je prends une gorgée de mon soda et jette un coup d’œil à Félix. Si moi j’ai pas le droit de boire, lui ne s’est pas gêné pour se prendre une bière. 

Toutefois, j’ai une question, et maintenant qu’il semble avoir fini de me faire découvrir des choses, je ne vais pas me gêner.

—      Tu as dit que pour chaque course notre nom était associé à un autre, c’est aussi le cas pour la première ?

Il prend une gorgée de sa bière avant de me répondre. 

—      Ça dépend. 

Il va vraiment falloir que je pose mes questions une par une ? 

Il doit remarquer ma frustration parce qu’il reprend.

—      Y’en a qui viennent tout seuls, ils ont entendu parler de l’Hidden et ils veulent tenter leur chance. Ceux-là ont leur seul nom d’inscrit mais généralement personne s’en formalise puisque peu d’entre eux se démarquent. D’autres sont des membres de la famille de pilotes déjà un peu connus, eux non plus personne ne dit rien s’ils n’ont personne d’autre de mentionné, leur seul nom de famille suffit. Puis y’en a qui, comme toi, ont été amené ici par des anciens. Vous, vous avez notre nom à côté du votre. J’espère que ça te dérange pas gamine ? 

Je secoue négativement la tête. Je trouve ça normal puis même si j’avais voulu dire quoi que ce soit, personne ne m’écouterait. 

—      Il y a beaucoup d’accidents pendant les courses ?

Celle-ci vient tout juste de commencer et vu comme les pilotes se précipitent tous dans la même direction, je doute qu’ils s’en sortent indemne à chaque fois.

—      Ça arrive parfois.

Il dit ça tellement facilement… comme si ça ne lui faisait rien. Combien a-t-il vu d’accidents pour en parler aussi nonchalamment ?

Je n’ose même pas penser à combien d’accidents se seraient déjà produits si les personnes à l’intérieur de ces bolides ne les maîtrisaient pas aussi bien. 

C’est assez impressionnant vu d’ici, est-ce que ça l’est autant dans une voiture ?

Je suppose que je le saurai tout à l’heure.

—      T’as le droit de stresser gamine, mais ne commence surtout pas à paniquer. Là tu serais fichue, compris ?

J’acquiesce doucement. Je comprends ce qu’il veut dire. Mais quand je vois certains virages… j’en ai déjà pris d’aussi serrés ? Peut-être. Je ne sais plus. 

Et si je perds ce soir, qu’est-ce que ça voudra dire pour la suite ?

Non. 

Je devrais plutôt me demander ce qui arrivera si je gagne. 

Nate avait l’air de sous-entendre qu’aucune personne de mon âge ne faisait sa première course en fin d’année. Ou du moins, personne de connus n’avait fait sa première course à mon âge et à une période de l’année aussi avancée. 

Je ne suis pas sûre de vouloir être la première.

Je ne veux pas non plus perdre. 

Je ne vais donc pas avoir le choix, il va falloir que je me donne à mon maximum. 

La course se termine sous les acclamations de la foule. C’était vraiment intéressant à voir. Maintenant j’ai une idée de comment les gens conduisent sur ce circuit. 

—      Aller gamine, viens, on va te trouver une voiture libre. 

—      Et comment on sait ça ?

Je saute de mon tabouret et le suis à travers la foule, profitant qu’on passe devant une poubelle pour y jeter ma canette. 

Nous arrivons finalement devant les voitures placées sur la grille de départ et il m’en désigne certaines sur lesquelles un hologramme tournoie doucement. C’est presque hypnotique. 

La couleur change doucement en fonction de la lumière, mettant en valeur le majestueux griffon. 

—      Tant que l’hologramme tourne, c’est que la voiture est libre. Visiblement, soit t’es pas la seule à commencer, soit y’en a qui se sont fait choper pour triche et ils jouent leur dernière course.

C’est clair que ce n’est pas stressant du tout. J’en remarque une qui m’inspire un peu plus de confiance que les autres et Félix m’y traine. A le voir faire, on pourrait presque penser qu’il me force. 

Je m’installe en prenant bien tout mon temps ce qui le fait soupirer. 

—      On te croirait à l’échafaud… murmure-t-il.

—      Mais… c’est que… je suis pas prête. Je connais pas cette voiture, et ne parlons même pas du circuit… 

—      Et donc gamine, tu vas faire quoi ? Abandonner ? 

—      Je…

Il soupire encore une fois et s’accoude à la portière, plaçant son visage dans l’ouverture de la fenêtre.

—      Ecoute-moi bien, Calista. 

Le fait qu’il utilise mon prénom me choque juste assez pour que je l’écoute attentivement.

—      Ça reste ton choix. Tu peux sortir de cette voiture, déclarer forfait, et alors plus jamais tu n’aurais la chance de te tenir au départ d’une de ces courses. Ou alors, tu restes assise là, et tu conduis comme si la mort t’attendait après chaque virage.

Déclarer forfait… dans l’Hidden World ça signifie la fin de tout. Parce que si tu n’as pas le courage de conduire, alors tu n’as rien à faire là. 

Si je choisis cette option, c’est comme si j’abandonnais sans même avoir essayé. 

Félix se penche à travers la fenêtre pour venir allumer le poste autoradio. Ils mettent vraiment des chansons dans chaque voiture ?

—      Du classique d’il y a plus de mille ans ? je demande complètement étonnée.

—      C’est un requiem qui date d’il y a 900 ans. Apprends tes classiques gamine. Et fais une chose : cesse de réfléchir. Ne regarde pas le circuit, ressens-le. Comme avec la musique. Ça t’arrivera forcément encore comme situation. Un circuit inconnu, une voiture inconnue… et ce jour-là, il faudra que tu te souviennes d’une chose. 

La sonnerie qui annonce qu’il reste cinq minutes aux coureurs pour se mettre sur la ligne de départ retenti. 

—      Quelle chose ?

—      Pose-toi cette question : pourquoi t’as commencé à conduire ?

—      Pourquoi j’ai… 

Il ne me laisse pas le temps de finir qu’il se redresse et commence à s’éloigner. 

J’ai commencé parce que je pensais que ma seule autre solution c’était de mourir. 

Qu’est-ce que ça change que je m’enlève la vie moi-même ou que je la perde ce soir dans une voiture ? 

Rien.

Le résultat sera le même. 

Sauf si je gagne cette fichue course. Dans ce cas, je pourrai avoir un avenir ici. Différent de celui qu’on m’a rabâché toute ma vie. 

C’est une idée plus qu’intéressante. 

Et puis, c’est pour ça que je suis ici, non ?

Cette fois je suis déterminée. Je ferme les fenêtres et concentre mes oreilles sur la musique tandis que je fixe le panneau de départ. 

Félix ne m’aurait pas emmenée ici si je n’en étais pas capable. Il est grand temps que j’y crois moi aussi.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet