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Pythonisse
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13 - Vérité et mur de son

Un mois et demi après la soirée où tout était parti en vrille, ma tristesse s’était transformée en colère. Oui, je comprenais parfaitement qu’il avait pu mal vivre cette expérience. Mais était-ce vraiment une raison pour me rayer de sa vie après tant d’années d’amitié ? J’étais vexé et blessé de son silence. Surtout qu’il s’en était donné à cœur joie pendant notre « activité mutuelle » ! Je trouvais ça injuste d’être le seul à souffrir de cette situation alors qu’il se complaisait dans sa solitude.

Afin de me changer les idées, Gabi me proposa de sortir le samedi soir. J’acceptais avec plaisir, sachant pertinemment que j’avais besoin de m’aérer l’esprit. C’est ainsi que le samedi suivant aux alentours de vingt heures, nous prîmes sa voiture. Il ne voulait toujours pas me dire où nous allions, la seule info qu’il daigna me lâcher fut que nous aurions plus d’une heure de route. Il utilisa son portable pour nous mettre un peu de musique afin de nous « mettre dans l’ambiance ». Les mélodies électroniques débordaient de basses, emplissant l’habitacle de légères secousses qui me firent dodeliner de la tête.

— Au fait, quand on sera là-bas, te perds pas. Tu restes bien à côté de moi et tu t’éloignes pas, ok ? me prévint-il.

— Pourquoi ? C’est dangereux ? me renseignai-je, plus trop enclin à y aller si c’était le cas.

Il rit.

— Dangereux ? Nan, faut pas exagérer. Mais… quand on connaît pas, ça peut surprendre. On va dire que là-bas, y a un certain genre de comportement à avoir si tu veux finir la soirée sur tes deux jambes.

Je fronçai les sourcils, ne comprenant strictement rien à ce qu’il me disait. Durant le reste du trajet, nous discutâmes de choses et d’autres, car j’avais beau insister, il refusait de me dire quoi que ce soit, prétextant que je me « ferai une montagne de petites choses, somme toutes assez habituelles dans ce milieu ».

Nous quittâmes finalement l’autoroute et nous enfonçâmes dans des chemins de campagnes bordés de petits bois de pins. La route abîmée et parsemée de cailloux rendait notre avancée cahoteuse et les champs nous entouraient, renforçant l’impression du monde qui se refermait sur nous. Au loin, je fus pourtant capable de discerner un grand hangar se détacher du paysage noir de la nuit grâce à des points de lumières. Nous roulâmes encore quelques minutes pour arriver jusqu’à un terrain de terre où des dizaines de voitures étaient déjà stationnées.

Quand il stoppa le moteur, des bruits de coups sourds m’interpelèrent. Je tendis l’oreille jusqu’à comprendre que les à-coups n’étaient que la réverbération des basses d’une musique agressive. Nous sortîmes de la voiture et il se dirigea à l’arrière du véhicule afin d’ouvrir son coffre pour en sortir un grand sac de sport foncé dont il extirpa un masque noir. Je le vis bidouiller un peu, puis soudain, des LED bleues s’allumèrent, y dessinant un visage approximatif. À la place des yeux se trouvaient deux grandes croix et la bouche était une longue suite de lumières, traversé perpendiculairement par de plus petites. En deux mots, ce masque était flippant.

Il l’installa pourtant sur son visage et se rapprocha de moi.

— Retiens bien mon masque. Si jamais on se perd, tu le chercheras, ok ?

Je hochai la tête, tout de même un peu stressé et il attrapa ma main pour me guider vers l’entrée du hangar dont de la musique du même style que celle qu’il avait mis dans la voiture s’extirpait. Devant le bâtiment, des personnes fumaient et discutaient joyeusement entre elles, un verre ou une bouteille à la main. L’un d’eux le salua et il lui fit un signe de la main, renforçant sa prise sur la mienne.

Son sac sur l’épaule, il m’entraînait sans grand ménagement, marchant d’un pas rapide, le dos droit et le torse bombé. Ce changement d’attitude me fit sourire et quand nous pénétrâmes dans le hangar, je marquai un temps d’arrêt. Devant moi, une foule humaine dansait et sautait sous les assauts violents d’un mur de son disposé tout au fond à droite. D’une hauteur d’environ trois mètres, il était composé d’une dizaine de sonos empilées les unes sur les autres. Un DJ, portant le même style de masque que Gabi, se tenait devant ses platines, mixant sous les hurlements déments de la foule qui ne suffisaient pas à couvrir la musique. Tout le bâtiment semblait vibrer au son des basses violentes.

L’entièreté de l’immense hangar était empli d’une fumée opaque, venant autant des canons à fumée, disposés au sol, que des cigarettes et autres joyeusetés des participants. Des projecteurs de lumières inondaient l’immense salle de lumières colorées et tourbillonnantes. Pour dire la vérité, il y avait trop d’informations visuelles autour de moi pour que je décèle quoi que ce soit avec précision.

— À partir de maintenant, tu me lâches plus, me cria-t-il dans les oreilles afin que j’entende quelque chose.

Je hochai la tête et raffermi ma prise sur sa main. Nous essayâmes alors de traverser la foule. Gabi donnait de bons coups d’épaules afin de nous frayer un chemin. En avançant, je me cognais régulièrement aux gens, puis, rendu au milieu de cette marée humaine, il se stoppa soudainement et se tourna vers moi. Avec son masque, je ne voyais plus du tout son visage. Il se pencha pour me demander de bien regarder ce qu’il se passait autour de moi.

J’obéis et inspectai les personnes qui entraient dans mon champ de vision avant de sentir mes joues chauffer à leur maximum. À ma droite directe, un jeune homme à genoux dévorait goulûment le sexe d’un autre. De l’autre côté, j’étais aux premières loges pour admirer une pénétration en bonne et due forme. Immédiatement, je reposai des yeux exorbités sur le masque de Gabi, dont les épaules tressaillirent sous un rire qu’il n’avait pas réussi à restreindre. Sans attendre, il se retourna et continua d’avancer en me tirant derrière lui.

Lorsqu’une main attrapa la ceinture de mon jean pour me faire reculer, je compris que tout à l’heure, je ne me cognais pas aux gens. Non. Ils essayaient simplement de m’attraper. Surpris et tiré violemment en arrière, ma main lâcha celle de mon amoureux et mon dos percuta le torse d’un gars que je ne connaissais pas. Sous mon regard paniqué, il commença doucement à faire passer ses mains sous mon t-shirt.

Un hurlement de panique pure s’extirpa de moi, mais avant que je ne puisse bouger pour m’échapper, mon sauveur se matérialisa devant moi et saisit violemment le col de son haut. Ce dernier recula, ce qui me permit d’aller me réfugier dans les bras de Gabi tandis qu’il montrait son masque au malotru. Le gars leva les bras, comme pour s’excuser et fila sans demander son reste. Le cœur battant à tout rompre et le souffle court, je suivis mon super héro qui réussi à nous faire sortir de la foule, nous menant devant un escalier en fer que nous gravîmes afin de rejoindre une pièce qui ressemblait à une salle des commandes ou à un salon VIP, tant les machines et les câbles au sol se mélangeaient avec les grands canapés molletonnés. Ces derniers étaient installés dos à d’immenses fenêtres permettant de voir la salle de danse en contre-bas.

Ici la musique était un peu étouffée par les murs, mais les vitres tremblaient en réponse aux assauts des basses. J’allais directement prendre place sur une des assises tandis qu’il ôtait son masque et allait vérifier je ne sais quoi au niveau des différents appareils.

— Il s’est passé quoi en bas ? C’est quoi cette soirée ?

— Le nom de la soirée, c’est « Drum & Sex », me dit-il, le regard toujours fixé sur ses machines.

— D’accord ? Et donc ? C’est une espèce d’orgie géante ?

Il rit puis vint s’asseoir à côté de moi.

— C’est un peu plus compliqué que ça. Disons que tu peux venir danser, sans plus, mais tu peux aussi venir chercher du sexe. La plupart des gens qui viennent à nos soirées sont des libertins. Ils accompagnent parfois leurs partenaires ou débarquent seuls.

— Tu fais partie du staff, n’est-ce pas ? C’est ça que ton masque veut dire ?

Il me sourit tendrement, allongeant son bras sur mes épaules.

— Exactement. Et ce soir, j’ai demandé à être en régie. Comme ça, tu peux tout observer sans qu’on soit obligés de se mêler à la foule. Pour une première fois, je trouve que c’est un bon compromis.

J’acquiesçai.

— Ça fait longtemps que tu fais ça ?

— Un peu moins de deux ans.

— Et vous ne faites que ce genre de soirées ? Pas des plus softs ?

— Ça dépend. On a d’autres genres de soirées, mais la DS est la plus demandée.

— Ouais, on se demande pourquoi, ricanai-je.

Je tournai mon regard vers la foule plus bas. À bien y regarder, il se passait beaucoup de choses en bas, même dans les coins les plus sombres…

— Et… vous n’avez jamais eu de problème ?

— Pour l’instant, aucun. On sélectionne nos membres et puis mine de rien, on est beaucoup à surveiller tout ce qui se passe. Les membres eux-mêmes font de la surveillance par intermittence. On a déjà eu des bagarres, mais rien de plus grave.

Tandis qu’il parlait, j’examinai la salle avec attention, à genoux sur le canapé, les bras reposant sur le haut du dossier. Je remarquai alors beaucoup de masques presque identiques à celui de Gabi. Ils déambulaient dans la foule, furetant partout.

— Et toi, tu… Tu as déjà participé à ce genre de soirée… sans faire partie du staff ?

— Oui. C’est comme ça que j’ai été amené à les rencontrer justement.

Je fis la moue. Ça, ça me plaisait beaucoup moins.

— Ah…

Il ricana et m’attira à lui afin que je retombe sur ses genoux. Ses bras enserrèrent ma taille et il déposa un baiser sur ma joue.

— Sois pas jaloux, c’était il y a plus de deux ans. Depuis ce temps-là, je suis pu là pour m’amuser.

J’allais répondre, mais son portable a sonné. Il a fixé son écran et a inspiré un grand coup avant de me sourire. Il m’invita à me relever et se redressa à son tour.

— Excuse, on a besoin de moi. Je reviens. J’en profite pour aller nous chercher à boire, ok ?

Je hochai la tête, me rasseyant sur le canapé tandis qu’il quittait la salle. Je le suivis un instant des yeux quand il apparut en bas, mais je fus distrait par le DJ qui sautait comme un fou furieux et quand j’ai tenté de le retrouver il avait disparu.

Durant de longues minutes je restai planté devant mon portable. Ce dernier, ouvert sur ma page de discussion avec Matt me rappelait son silence avec une certaine violence. Mes messages se succédaient sans jamais avoir de réponses. Je soupirai, sentant la crispation dans ma poitrine augmenter drastiquement. Il était vraiment con !

Rageur, je laissai mon appareil retomber sur le tissu de l’assise et me retournai de nouveau pour scruter la foule, cherchant Gabi. Soudain, mon regard se posa sur un couple qui s’embrassait passionnément. Je soupirai puis me mit à faire la tronche quand un troisième gars s’ajouta à leur duo. Quelle soirée de merde. Je laissai ma tête retomber contre le haut du dossier du canapé, le moral au plus bas et même quand la porte s’ouvrit, je ne le regardai même pas.

Il s’approcha pourtant de moi et se pencha à mon oreille.

— Je suis revenu !

Je répondis par un « hum » assez neutre.

— Alors, dis-moi, tu préfères quoi ; du whisky, du coca ou Matt ?

Hein ? Je fronçai les sourcils et me retournai vers lui sans comprendre. Il me sourit, puis se décala pour dévoiler Matt, toujours à l’entrée de la salle. Mon premier réflexe fut de me lever et d’avancer vers lui. Mais après avoir fait quelques pas, je me stoppai. Non.

— Alors ? Tu le boudes ? se moqua Gabi.

Les bras croisés sur mon buste, je tournai le dos à mon ex meilleur ami. J’étais tellement content de le voir, mais tout autant en colère que j’avais du mal à savoir comment agir. Gabi se planta devant moi et me sourit.

— Vous avez des choses à vous dire, alors je vous laisse quelques minutes, ok ? Nous dit-il en nous regardant tour à tour avant de rire. Paniquez pas, je reviens vite, promis.

Il m’embrassa et sortit. Lorsque la porte se referma sur lui, le silence s’installa. Je restai immobile, gêné et en colère.

— Andy ?

En entendant mon nom, je me renfrognai. L’énervement monta en moi comme une vague et les digues mentales que je m’étais intimé de respecter cédèrent. Je me retournai vivement vers lui et lui criai dessus.

— T’es vraiment con, tu le sais ça ? Franchement ! Tu m’as ghosté pendant plus d’un mois ! C’est quoi ton problème ?

Il baissa les yeux, embarrassé au possible.

— Je suis désolé. Je savais juste pas comment réagir.

— Tu as très bien su comment m’ignorer par contre, répliquai-je. Ça m’a blessé ! T’es mon meilleur ami, tu sais tout de moi et pourtant, t’as cru que c’était la bonne façon de faire ?

Ma colère rencontrait sa gêne. Il soupira puis avança vers moi. Je me tendis imperceptiblement jusqu’à ce qu’il m’enlace. Il foutait quoi là ?

— Je suis désolé. Je voulais pas te blesser ou te rendre malheureux. J’ai juste eu vraiment peur.

Blottis contre son torse, j’entendais son cœur battre à une cadence infernale.

— T’as eu peur de quoi ? demandais-je sur un ton plus calme, mais toujours aussi froid.

Il soupira de nouveau.

— Il faut que je t’avoue quelque chose.

Je le repoussai. Qu’est-ce qu’il me faisait là ? Reculant d’un pas, je le regardai droit dans les yeux.

— Vas-y. J’attends.

Il fit la moue.

— Tu me facilites vraiment pas les choses, mais bon, je l’ai mérité. Juste, avant que j’te dise tout, je veux que tu saches que je veux t’obliger à rien, ok ?

— M’obliger ? répétai-je. Mais de quoi tu parles ?

Il détourna le regard une seconde avant de braquer ses yeux dans les miens.

— Je t’aime. Je t’aime depuis… longtemps. Gabriel l’a découvert la nuit où on a tous les deux dormi chez toi. Et ce qu’il s’est passé chez moi… comment dire…

Je reculai d’un pas, glacé d’effroi à l’idée de comprendre ce qu’il sous-entendait.

— Vous avez organisé ça tous les deux ? C’était prévu ?

Il frotta sa nuque, embarrassé au possible.

— Je préférerais vraiment qu’il soit là. J’me sens hyper con.

Puis soudain, mon cerveau assimila tout ce qu’il m’avait dit.

— Attends, quoi ? Tu m’aimes ? Qu’est-ce que ça veut dire ?

— Je suis amoureux de toi, depuis le collège, je pense… Peut-être avant…

Le ciel me tomba sur la tête. Comment est-ce que j’avais pu être aussi aveugle ?

— Mais… t’es hétéro ! Tes copines et tout ! Comment ?

Il fit un pas vers moi.

— Des mensonges. Quand tu m’as avoué être gay, j’avais déjà des sentiments pour toi. J’ai eu peur que tu me rejettes alors j’ai menti. Et après, c’était plus facile de continuer de mentir que de tout t’avouer.

Mon cœur se serra de nouveau. Je repensais à mes ex, à son soutien indéfectible…

— Comme je te l’ai dit, reprit-il, je veux t’obliger à rien. Je voulais juste te dire la vérité.

Son aveu remettait absolument tout en question. Tout ce que je savais de lui, de moi, de notre amitié, de la nuit qu’on avait passé ensemble. Mon cerveau n’était plus qu’une bouillie informe sans une once de réflexion intelligente.

— Andy ? Je peux te poser une question ?

Je haussai les épaules.

— Au point où on en est, vas-y.

— Qu’est-ce que tu ressens pour moi ?

Je lui envoyai un regard incertain. C’était une bonne question qui méritait réflexion. Ce que je ressentais… de l’amitié ? Fusionnelle ? Fraternelle ? Un peu plus ? Comme un crush ? Ou plus encore ? Comme un amour de jeunesse qui reste au fond du cœur ? Ce fut à mon tour d’être gêné. Gabi… Mon cœur se comprima. La situation ne me plaisait pas du tout. Est-ce que c’était ça qu’attendait Matt ? Que je choisisse entre Gabi et lui ? Je… Je pouvais pas faire ça…

— Je suis désolé, murmurai-je.

Si je devais choisir, alors je préférais le garder près de moi en tant qu’ami. J’étais très attaché à Gabi et je refusais de passer de l’un à l’autre. Ce fut ce moment que choisit mon amoureux pour faire son entrée. Le sourire sur son visage disparu au moment même où nos regards se croisèrent. Il tourna un regard blasé vers Matt.

— Qu’est-ce que t’as encore branlé pour qu’il soit dans cet état ? On avait dit concis !

L’intéressé pinça les lèvres tandis que je détournai le regard et que le troisième soupirait.

— C’est pas possible, quelle bande de bras cassés vous faites. Venez là, dit-il en tendant les bras.

Sous mon regard incrédule, je vis mon meilleur ami rejoindre mon amoureux et se blottir contre lui. Gabi me fit signe de les rejoindre et j’hésitais. Je ne comprenais pas et surtout, je n’acceptais pas ce que Matt venait de m’avouer. Je reculai à nouveau d’un pas ce qui lui fit foncer les sourcils. Il se détacha de Matt pour venir vers moi. Il saisit mon visage et m’embrassa. Encore sous le coup de mon énervement, je le repoussai.

— Andy ?

— Non. Tous les deux, vous vous êtes foutu de ma gueule, explosai-je. Ça fait combien de temps que ça dure ?

— Andy, j’te jure que c’est pas ce que tu crois, intervint Matt.

— Ah ouais ? répliquai-je les larmes au bord des yeux. Parce que de mon point de vue, c’est très clair ! Encore que ça vienne de lui, je peux comprendre, mais toi ! Putain…

Rageur, je me retournai pour ne plus les voir. J’aurais bien fui, mais j’avais un peu peur de traverser tout seul la horde d’assoiffés sexuels en bas. J’avais le cœur en miettes. Depuis combien de temps est-ce qu’ils avaient prévu de me baiser à deux ? Ils avaient monté tout un plan pour parvenir à leur fin. Ils m’avaient utilisé, mais pas comme j’aimais. Ils s’étaient servis de moi et ils avaient joué avec mes sentiments. Lorsqu’une main se posa sur mon épaule, je me décalai violemment.

— Je vous interdis de me toucher, grognai-je. Vous savez quoi ? Vous avez qu’à rester ensemble puisque vous vous entendez si bien ! Putain… J’ai été tellement con…

— Andy ? Qu’est-ce qui t’arrive ? osa me demander Gabi.

Un rire mauvais s’extirpa de moi.

— Ce qui m’arrive ? Oh ben je sais pas, peut-être que je suis énervé parce que mon gars s’est foutu de ma gueule et que mon meilleur ami et lui ont monté un coup pour pouvoir me baiser !

Il fronça les sourcils.

— Nan, t’as pas compris…

— Ah ouais ? le coupai-je. Et y a quoi d’autre à comprendre à part le fait que vous avez dû bien vous amuser à mes dépens ? D’ailleurs, j’peux savoir ce que tu fous là Matt ? Comment t’es au courant pour cette soirée ? Ah… mais oui, suis-je bête… C’est Gabi qui t’a dit de venir. Je peux savoir depuis combien de temps vous parlez tous les deux ? Alors que tu m’as complètement ignoré pendant plus d’un mois ?

Les larmes dévalaient mes joues. Je n’arrivais pas à croire qu’ils avaient été capables de me faire ça.

— Tu te méprends sur nos intentions, me dit Matt d’une voix douce.

Emprunt d’une rage galvanisante, j’avançai jusqu’à me planter devant lui.

— Ose me dire que t’as pas fait un plan avec lui pour me baiser. Allez ! Dis-moi que j’ai tort !

Il baissa les yeux et un sanglot m’échappa.

— Comment t’as pu me faire ça ?

— Hey, lui en veux pas ; c’était mon idée, intervint Gabi, ce qui m’énerva encore plus.

— J’en ai rien à foutre que ce soit ton idée ou la sienne. Il aurait du savoir que c’était pas la bonne façon de faire !

Les souvenirs remontaient. Ceux d’une soirée que j’aurais préféré oublier. Ceux d’une honte que je n’aurais pas dû avoir. Je relevai des yeux assassins vers mon ex meilleur ami.

— Je pensais pas que t’irais jusque-là alors que tu sais dans quel état j’étais la dernière fois !

Il sembla perdu avant de froncer les sourcils.

— Rassure-moi, t’es pas en train de me comparer à ce fils de pute ?

— Je sais pas, entre connards, vous devriez vous comprendre, non ? crachai-je.

— Je pige pu rien, se plaignit Gabi.

— Eh ben t’as qu’à fermer ta gueule et laisser les grandes personnes parler ! hurlai-je. Vous savez quoi ? J’en ai marre de vous deux. Allez vous faire foutre.

Je lui mis un gros coup d’épaule et m’apprêtai à quitter cette salle quand il saisit mon poignet.

— S’te plaît, laisse-moi t’expliquer !

Je retirai mon bras de sa prise d’un mouvement brusque.

— Pourquoi ? Pourquoi je prendrai le temps d’écouter ce que t’as à me dire alors que tu me mens depuis des années et que tu t’es servi de moi pour te vider les couilles ? C’est tout ce que je suis pour toi ? Un trou à combler ?

Une angoisse passa sur son visage.

— Bien sûr que non ! Évidemment que non ! Je t’aime !

Je fis la tronche.

— Ah, tu m’aimes ? Donc pour toi, aimer quelqu’un c’est lui cacher tes sentiments pendant des années et le baiser dès que t’en as l’occasion ? Belle philosophie ! Putain… T’es pire que lui…

Matt accusa le coup de mes reproches. Il ne se laissa pourtant pas démonter.

— Arrête de me comparer à ce connard !

— Parce que pour toi vous êtes différents ? Vous avez pas monté un coup dans mon dos pour pouvoir me baiser ? Remarque, lui, au moins, il m’a filé cinquante balles après.

— Mais qu’est-ce que vous racontez ? intervint Gabi.

Je me retournai vers Matt, les bras croisés.

— Vas-y, explique-lui et après, essaie de me convaincre que vous avez pas fait la même chose.

J’allai m’asseoir sur le canapé et tapai du pied. J’étais tellement énervé contre lui ! Il passa sa main sur sa nuque et soupira.

— Pendant un moment, Andy sortait avec un gars. On était jeunes et lui, un peu plus vieux. Il… comment dire… Andy était pas prêt à coucher avec lui, mais il a insisté. Pendant plusieurs semaines il a fait que ça et Andy a fini par craquer. Ils l’ont fait et après, il lui a donné un billet de cinquante euros en lui disant la vérité. Que depuis le début, c’était qu’un pari avec des potes et que grâce à lui, il venait de se faire presque trois-cent balles, alors il pouvait bien lui en lâcher un peu.

— Mais c’est quel genre de connard ? grogna Gabi.

— Le genre de connard qui est super gentil, qui te fait te sentir à l’aise et qui obtient exactement ce qu’il veut. Un peu comme vous, non ? répondis-je, amer.

Matt baissa les yeux une nouvelle fois tandis que je ricanai pour éviter de recommencer à pleurer. Gabi quant à lui, s’approcha et s’agenouilla devant moi.

— Tu penses vraiment qu’on a fait ça pour s’amuser ?

Je plantai mon regard dans le sien.

— Pour quoi d’autre, sinon ? Au moins, vous aurez des trucs à raconter. À croire que j’ai pas mûri depuis ce temps-là. J’suis toujours aussi con.

Matt avança à son tour et vint s’asseoir à côté de moi. Je voulus me décaler, mais Gabi, qui prenait appui sur mes cuisses m’en empêcha.

— Je sais que ça te paraît semblable. Mais je te jure que c’était pas ce qu’on voulait, me dit Matt.

— Alors qu’est-ce que vous vouliez ? soupirai-je. J’en ai marre de tourner autour du pot. Au lieu de me dire « mais non, Andy ! », « tu te trompes, Andy ! », « c’est pas ce que tu crois, Andy » ayez des couilles et dites-moi une bonne fois pour toutes ce que vous voulez !

Ils se jetèrent un regard qui m’énerva encore plus, puis Gabi se leva et m’attira à lui. Entre ses bras, je sentis ma détermination flancher. J’étais pitoyable, ils faisaient exactement ce qu’ils voulaient de moi.

— Tu sais pas encore grand-chose de moi. Mais il y a une chose que j’ai toujours voulu essayer. Alors tu veux bien m’écouter jusqu’à la fin sans t’énerver ? me dit-il en déposant des baisers sur mon visage.

J’opinai de la tête, sentant l’énervement en moi refluer petit à petit.

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