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Suky
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Chapitre 4

Lina

J'avais un souvenir flou de ce qui s'était passé après. Je me souviens juste de la main chaude d'Isa dans la mienne. Elle me ramenait vers chez elle, son téléphone plaqué à l'oreille, en train de parler à Noé. Son visage était tendu, concentré, mais ses doigts serraient les miens avec une douceur silencieuse. Ce geste disait tout : je suis là, tu n'as rien fait de mal.

Moi, j'avais baissé les yeux. Je me noyais dans cette honte familière, cette idée que je suis toujours celle qui complique tout. Que dans chacun de mes choix, il y a toujours une erreur.

« Lina, tu es sûre de ce que tu racontes ? Si tu mens, tu risques de tout briser. »

Les mots de ma mère revenaient sans prévenir. Ils cognaient dans mon esprit, comme une vieille chanson qu'on n'arrive pas à oublier. Et parfois, j'y croyais encore. Que je détruis tout ce que je touche. Que sans moi, les choses auraient été plus simples. Que sans moi, peut-être, tout le monde serait heureux.

- Lina !

La voix d'Isa résonnait dans mes oreilles comme à travers un épais brouillard.
Lointaine. Étouffée.

- Elle fait une crise de panique...

C'était Noé. Sa voix restait calme en apparence, mais je le connaissais assez pour savoir qu'il paniquait aussi. Depuis quand était-il là ?Je ne l'avais même pas vu. Et cette pensée, minuscule mais claire, traversa mon esprit juste avant que la douleur n'explose à nouveau. Le monde autour de moi devenait flou. Les sons, les gestes, les voix... Je sentais Isa manipuler doucement mon corps, me guider vers le sol comme on allonge une poupée fragile. Je m'assis sur le goudron froid, humide sous moi. Isa s'installa en face. Noé, derrière, me soutenait le dos pour que je ne m'effondre pas. Il prit ma main et la posa contre sa poitrine.

- Respire en même temps que moi.

Je levai les yeux, sans vraiment voir. Mon visage était trempé de larmes. Je ne m'étais même pas rendu compte que je pleurais. Isa inspirait et expirait de manière exagérée, pour me guider. Noé posa sa main sur mon épaule. Alors j'ai respiré, moi aussi. Petit à petit. Moins violemment. Et le sol cessa de tanguer. Une bouteille d'eau apparut dans mon champ de vision. Élise. Elle était là. Silencieuse, mais présente.bOn était à quelques rues de chez Isa. Assis tous les quatre, en cercle, sur le trottoir.bEt à ce moment précis, rien d'autre n'existait. Pas les passants. Pas les rires moqueurs. Pas les regards curieux.
Juste eux.
Mes piliers.
Ma famille, celle du sang, est brisée.
Peut-être à cause de moi.
Mais ces trois-là...
Je les ai. Et rien que pour ça, je pouvais encore respirer.

Une fois la tempête passée, j'étais affalée sur une chaise haute, les mains autour d'un mug de chocolat chaud. Je soufflais doucement sur la surface fumante, comme pour ralentir le temps. Autour de moi, mes amis s'agitaient, chacun à sa manière.

- Ce bâtard... Qu'il vienne, je l'attends, grogna Noé, un chocolat chaud à la main, ce qui rendait sa colère presque comique.

- Noé, calme-toi, chuchota Élise, en me caressant doucement le dos, comme si ses mots pouvaient recoller les morceaux.

Isa, les bras croisés, gardait son sérieux.

- Élise a raison, dit-elle en me fixant. Il faut que tu portes plainte.

Sa voix était ferme. Presque tranchante. Un frisson me parcourut.

- Non ! m'écriai-je, sans même réfléchir.

Isa ne broncha pas.

- Lina... Ce mec t'a agressée en pleine rue. Si je n'avais pas été là...

- Mais il a compris, maintenant. Il ne recommencera pas, j'en suis sûre.

Un silence. Leurs regards se croisèrent. Sceptiques. Inquiets. Élise reprit doucement ses gestes dans mon dos, comme pour apaiser la tension.

- Tu sais quoi ? dit-elle en se penchant vers moi. On en reparlera plus tard.

Elle ajouta du chocolat dans mon mug.

-Pour l'instant, essaie juste de te retrouver un peu.

Elle jeta un regard aux autres, leur intimant de ne pas insister. Noé soupira, bruyamment. Isa croisa les bras et souffla :

- J'aurais dû lui casser les bras, à ce malade.

Et là, malgré tout, on a ri.
Tous les quatre.
Un peu nerveusement.
Un peu pour chasser ce qu'on venait de vivre.
Mais on a ri.

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