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Chapitre 2 Les Chaînes du Destin

Dans les temps anciens, quand l'astre était dans l’enfance, 

Dans le Néant Glacial, où régnait le silence, 

L'Unique, fatigué par son éternelle errance, 

Choisit la froide terre, pour son ultime danse.

Ainsi s'éteignit l'Unique, dans un souffle de vie, 

Et de ses chaires mortes, naquit l’énergie infinie, 

Le Fluide, puissance éclatante,

Irradia chaque être, d'une vigueur fulgurante.

Des rares survivants, certains transcendèrent, 

Capturant un fragment, figé dans leur chaire, 

Naquirent les Premiers Dieux, titans altiers, 

Sculptant le monde, selon leurs péchés.

Le Premier Âge vit, leurs guerres dévastatrices, 

Où les Arpenteurs et Dieux, égaux en avarices, 

Opposèrent leur force, combats sans merci, 

Faisant trembler les cieux, de leurs tristes conflits.

Ainsi débuta le Déclin, la Chute inéluctable, 

Et Arpenteurs et Dieux, unies dans la bataille, 

Déchirèrent la terre, leurs pouvoirs redoutables, 

Laissant l'astre exsangue, n’être plus que failles.

Au seuil du Deuxième Âge, dans l'ombre des ruines, 

Vois, vois les Aspirants qui s’animent, 

Prêts à inscrire leur nom, en lettres de sang, 

À écrire une nouvelle page, dans l'histoire des tyrans.

Les Dieux, Sombres Tyrans,

Source inconnue.

Jamais jusqu’à présent un royaume mortel n’est parvenu à réunir en un même lieu autant de personnes brillantes, audacieuses et inventives. (…)

L’académie des Magistères, au sein de la capitale Ircania, est en tout point un endroit unique en son genre, berceau de tous les possibles.  Nul doute qu’il en jaillira certainement les plus grands esprits du monde de demain. 

Ircanie, le Royaume aux Mille Promesses. 

Par Dunustan Dial, Historien Impérial

Année 29 du calendrier Royal.

Quinze ans plus tard…

Année 37 du calendrier Royal.

Ville d’Ircania, capitale royale, Académie des Magistères.

Vellin jaillit des portes de l’imposante bibliothèque académique et se précipita au milieu de la large avenue pavée de pierres blanches, ignorant les regards courroucés des jeunes apprentis qu'il venait de bousculer.

Comme à son habitude, il était en retard. 

Le magistère avait une fois de plus perdu la notion du temps, absorbé par ses lectures parmi les milliers de rayonnages que comptait l'immense bibliothèque. Il n’avait repris conscience du temps passé qu’au tintement du carillon annonçant la quinzième heure. Quinze heures, c’était également l’heure à laquelle il devait retrouver son mentor, le Haut Magistère Willnus de la Maison des Arcanes.

Située en bordure orientale de la capitale Ircania, l'académie des Magistères formait une véritable ville dans la ville. Entourée de hauts remparts crénelés, elle abritait toutes les commodités d'une cité ordinaire.

L’académie s’ouvrait sur une large avenue pavée et richement arborée. La Voie du Maître comme on l’appelait, séparait l’ensemble du complexe en deux quartiers distincts. La bibliothèque, monument massif tout en colonnades de marbre blanc s’élevant sur plus de cinq étages et batie dans le plus pur style ircanien, constituait le point finale de l’avenue principale. 

Le Quartier Ouest regroupait toutes les boutiques et services nécessaires à la vie quotidienne. Des étals de bouchers et de maraîchers s'agglutinent sous un grand marché couvert ouvert de jour comme de nuit, qui embaumait les rues de ses senteurs. Les mages pouvaient y trouver également des livres, des tissus, du cuir, des pierres précieuses et une multitude d'autres composants pour leurs travaux. En outre, le quartier abritait aussi six débits de boissons officiels et même deux maisons de plaisirs, tolérées plus ou moins par les Hauts Magistères et le Doyen.

Quant au Quartier Est, il était consacré à l'enseignement et à la recherche. Divisé en cinq parties égales, il correspondait à chacune des cinq Maisons de Magistères. Des bannières arborant toutes le symbole du Jorgal royal mais aux couleurs différentes pour chacune des Maisons, flottaient devant chaque sous-quartier et rappelaient aux visiteurs les propriétaires légitimes des lieux. Au cours de leurs enseignements, les apprentis magistères rejoignaient la Maison la mieux adaptée à leurs capacités. La Maison des Cicatrices se revetait d’un rouge pourpre, la Maison des Arcanes d’un bleu cobalt, la Maison des Ombres en noir ébène, la Maison des Chuchotements en blanc ivoire et la Maison des Vestiges en vert émeraude.

Chaque sous-quartier disposait de résidences spécifiques, de salles d'étude et de recherche, ainsi que d'infrastructures adaptées à ses besoins. Ainsi le Quartier des Arcanes abritait un laboratoire où avait vu le jour de nombreuses inventions récentes, tandis que celui des Cicatrices avait érigé une vaste arène d'entraînement où s'affrontaient les mages les plus redoutables.

Le rendez-vous de Vellin se tenait dans le second bâtiment commun à toutes les Maisons : un somptueux palais aux colonnades de marbre semblable à la bibliothèque, s'étirant sur trois niveaux comme une pyramide écrasée. Le Palais du Roi rappelait à tous les magistères que malgré leurs affiliations différentes, ils œuvraient pour un même objectif, à savoir la grandeur de l'empire ircanien.

La base du palais accueillait plusieurs amphithéâtres où se déroulaient les cérémonies et conférences diverses. Le premier étage était réservé aux réunions  importantes, notamment entre les Hauts Magistères, tandis que le dernier étage servait de résidence au Doyen de l'académie. Le Doyen était un Haut Magistère désigné par le roi lui-même. En vérité, Maître Sableterne occupait le poste depuis la création de l'académie, plusieurs décennies auparavant. 

Vellin le savait, une convocation au premier étage du palais équivalait à une raison de premier ordre.

Le jeune homme remonta l’avenue ombragée, d’un grand réconfort dans la chaleur étouffante de l’après-midi, et se fraya un chemin à grands renforts de coude au milieu de la foule d’apprentis magistères et de marchands. Avec plus de trois milles magistères pour autant de personnels et de commerçants, la Cité des Mages comme l’appelait les habitants d’Ircania, grouillait d’une continuelle effervescence et le nombre de jeunes recrues en provenance de tout le royaume était en constante augmentation. Constatation qui avait le don d’agacer Vellin. 

Ces gamins de l’ouest ne sont guère que des sauvages qui ne connaissent même pas les bases du respect élémentaire… De mon temps, on s’écartait sur le passage d’un magistère ! Bientôt, il n’y aura plus que des rustres et des idiots dans les rangs.

La chaleur suffocante et le vent aride en provenance du Désert des Murmures balayaient la cité malgré ses nombreux jardins, écrasant la ville sous une fine couche de sable jaunâtre. Ircania, autrefois la plus pauvre des Cités Libres, était connue sous le nom de "Porte du Désert", dernier îlot de civilisation à l’extrémité Est des Territoires Libres avant le désert implacable. Le Désert des Murmures formait une frontière naturelle quasi-infranchissable dont seules les tribus nomades de Gerbois se partageaient les sables avec les créatures du désert.

Quand Vellin atteignit enfin l'arche sculptée marquant l'entrée du Quartier Est, il ruisselait de sueur. Des gouttes salées dévalaient sa tignasse ébène pour tomber sur sa tunique cobalt en lin, lui causant une sensation d'irritation désagréable. Plus habitué aux lectures interminables qu'à l'effort physique, le mage ralentit pour reprendre son souffle, épongeant son front avec une petite étoffe. Il s'engagea ensuite dans le luxuriant jardin entourant le Palais du Roi, où fleurs odorantes et arbres fruitiers aux teintes éclatantes abondaient. Après dix ans passés dans la Cité des Mages, Vellin restait toujours émerveillé par les prouesses techniques qui avaient permis la création d'un tel lieu de beauté aux pieds du désert.

Un réseau d'aqueducs massifs apportait l'eau depuis les sources et les oasis environnantes, certaines situées à plusieurs jours de marche, et alimentait les nombreux canaux irriguant la ville et ses jardins. Des conduites plus petites acheminaient ensuite l’eau vers les quartiers périphériques. Ils permettaient d’évacuer une partie des déchets, ce qui avait grandement contribué à améliorer l’hygiène en ville. Plus impressionnant encore, d’énormes hélices en bois élevaient l'eau jusqu'aux étages supérieurs, permettant à de nombreux bâtiments de posséder leurs propres jardins suspendus d'arbres fruitiers.

Toutes ces prouesses avaient permis au cloaque desséché qu’était Ircania de devenir la capitale d’un royaume puissant et une ville rayonnante en l’espace de quelques dizaines d’années. Et l’immense statue de celui qui avait rendu cela possible trônait au centre du jardin, Razhan l’Astucieux. 

La statue en bronze restituait fidèlement les traits du gerbois, son museau fin aux longues moustaches, ses yeux sombres presque globuleux pétillants d’intelligence et ses grandes oreilles en paraboles. La robe qu’avait sculpté l’artiste empêchait de distinguer les longues pattes musclées et la queue caractéristique des Gerbois. De la taille d’un humain adolescent, la vitesse des Gerbois pouvait égaler celle d’un cheval au galop et leurs capacités de saut dépasser la hauteur d’un étage d’habitation. Les Gerbois excellaient dans l’art de la fuite. 

À Ircania, tout le monde connaissait l’histoire de Razhan et reconnaissait son rôle majeur dans l’ascension de la cité.

Gloire à vous, Maître Razhan. Loué soit votre génie et tout ce qu’il a permis… et louée soit notre Reine d’avoir perçu votre grandeur. D’esclave à héros. Le courage de notre Roi, la sagesse de notre Reine et l’intelligence de Razhan. Les trois Piliers du royaume. Puissé-je un jour vous épauler dans vos prestigieux travaux et contribuer au rayonnement de notre peuple !    

Vellin adressa une salutation discrète à la statue et continua son chemin jusqu'aux imposantes portes du Palais du Roi. Il contourna un groupe d'ouvriers affairés à installer l'un des Bâton-de-Feu qui proliféraient depuis peu dans toute la ville. Dernière création de Razhan, les Bâton-de-Feu exploitaient les poches de gaz souterraines et, sous l’action d’une flamme, pouvaient brûler toute la nuit. Cette invention prometteuse était sur le point de remplacer toutes les torches et leurs fumées nauséabondes.

Le calme qui régnait à l'entrée du Palais du Roi contrastait avec l'agitation des rues environnantes. Cinq gardes en armures, arborant les couleurs de chacune des Maisons, montaient la garde aux portes. Assommés par la chaleur, ils se contentèrent d'un signe de tête au passage de Vellin.

Le vaste hall d'entrée était magnifique. Deux rangées de quatre colonnes en quartz rose guidaient les visiteurs vers le large escalier central. De grandes fenêtres rondes garnies de vitraux en rosaces inondaient une forte lumière bleutée dans la pièce. Une immense fresque peinte représentant l'union entre la Reine Semira et le Roi Darius ornait les voûtes du plafond.

Une trentaine de gamins discutaient à voix basses. Vellin les identifia comme premières années à leurs tuniques de lin couleur gris, signe qu'ils n'avaient pas encore été intégrés à l’une des Maisons. Il était primordial d'inculquer aux nouveaux venus l'amour du royaume et de ses dirigeants, surtout maintenant que les recrues provenaient des quatre coins des anciens Territoires Libres.

De plus en plus de vauriens de l’ouest dans nos rangs. Ces ingrats sauront-ils nous être redevables un jour ?

Il ignora les regards curieux des vulgaires première année et traversa la pièce la tête haute. Il était attendu au premier étage. 

Dans les salles réservées aux magistères importants ! 

Un lumière douce filtrée par de petites embrasures caressait le petit couloir en haut des escaliers, jurant avec la démesure du rez-de-chaussée. L’endroit se voulait plus intimiste, plus élitiste aussi. Seuls les Maîtres Magistères et leurs disciples les plus fidèles se rendaient à cet étage. Vellin y était monté qu’à deux occasions et toujours en compagnie de Maître Willnus, son mentor. 

Deux gardes aux armures grises, symbole de neutralité, surveillaient l’unique couloir d’accès aux salles latérales. Vellin s’annonça de sa voix la plus sûre possible.

— Messieurs. Vellin Ombrépine, magistère et disciple de Maître Willnus Lunepâle. Le Maître m’a convoqué ici pour un conseil important.

Les deux gardes observèrent Vellin. Après quelques plusations indécises, ils échangèrent un bref regard et l’un d’eux, une femme aux traits épais, répondit.

— Maître Lunepâle est effectivement passé, magistère. Il marchait aux côtés de Dame Aseph Ventrevigne.  

Elle se retourna et ouvrit la porte qui se trouvait dans son dos.

— Le conseil se déroule au bout de ce couloir. Mais je dois vous prévenir que vous êtes en retard. Et que la Dame Noire à horreur des retardataires. 

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