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Athyrion
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Chapitre 2 Les Chaînes du Destin

Une Dame Noire ? Par les Abysses, que vient-elle faire ici ? 

Les interrogations se pressèrent dans l'esprit de Vellin alors qu'il s’avançait dans le corridor obscur. La présence d'une Dame Noire signifiait qu'une chose : l'implication directe de la reine Sémira. La Maison des Ombres, cinquième maison magistère, ne comptait que des femmes triées sur le volet pour leur dévotion sans faille envers la souveraine. Les Sœurs Noires occupaient divers rôles, tantôt conseillères, tantôt messagères, tantôt espionnes... et étaient elles-mêmes soumises à l'autorité froide et inflexible des Dames Noires. Contrarier une Dame Noire équivalait à défier la Reine Noire elle-même.

Ne tremble pas Vellin, la présence de cette femme peut être l’opportunité tant attendue ! Si le regard d’une Dame Noire se pose sur nous, ce serait l’occasion inouïe de me distinguer ! Elle rapporterait ensuite à notre reine à quel point le jeune Vellin Ombrépine a l’esprit aiguisé. Et alors, je deviendrais l’un des plus jeune Maître que le royaume d’Ircanie ait jamais connu ! 

Maître Vellin Ombrépine, vingt-deux années seulement, un talent comparable à Razhan. Éminence grise de la reine, scientifique de génie….   

Arrivé devant la porte cerclée de bronze, Vellin s’arrêta et tendit l’oreille. Des éclats de voix étouffées lui parvinrent de l’autre côté des planches de bois. Le jeune homme se maudit d’être une nouvelle fois en retard. 

Il retint son souffle, prit son courage à deux main et ouvrit la porte.

Une femme d’un certain âge s’interrompit et fronça ses fins sourcils gris en voyant la porte s’ouvrir. 

Une demi-douzaine d'hommes et de femmes se tenaient assis autour d'une imposante table en bois massif dans le salon décoré avec soin. Celle que Vellin venait d’interrompre présidait l’assemblée depuis le bout de table le plus proche. Il la reconnut immédiatement à sa longue robe sombre dépourvue de la moindre fioriture de style. La Dame Noire. Grande, sèche et droite comme une trique de bois, elle transperça Vellin d'un regard aussi froid que ses yeux de glace, une teinte rare chez les ircaniens de souche.

— Votre disciple daigne enfin nous honorer de sa présence, Maître Lunepâle, déclara-t-elle d’une voix contrariée.

— Toutes mes excuses… bredouilla Vellin en se frottant les mains, paralysé sous le regard inquisiteur de la Dame.

— Taisez-vous. Votre manque de discipline nous fait perdre du temps et mon temps est une ressource précieuse. Maintenant installez-vous et remerciez votre chance de ne pas être sous ma responsabilité.

Dans un silence pesant, Vellin prit place sur l'une des chaises disposées le long du mur. La pièce, assez spacieuse pour accueillir une vingtaine de personnes, était encombrée d'étagères surchargées d'objets hétéroclites. Les murs étaient tapissés de cartes, certaines vieilles et usées, d'autres récentes et colorées, représentant des lieux inconnus. Le désordre se poursuivait jusqu’au sol, où des tapis en peaux de bêtes tantôt velues, tantôt écailleuses, venaient masquer le plancher.

Pour m’être distingué, on peut dire que je me suis distingué… Moi et ma foutue manie d’être en retard ! Et pourquoi sommes-nous aussi nombreux ?

Car onze autres personnes se trouvaient dans le salon.

La Dame Noire dirigeait la réunion. Vellin ne connaissait pas grand-chose à son sujet, sinon les rumeurs concernant les Dames. On les disait toutes sévères et intransigeantes, à consigner avec minutie le moindre événement notable, afin d’alimenter l’implacable réseau de renseignements mis en place par la reine. Celle-la ne semblait  pas déroger à cette réputation. Et Vellin irait certainement rejoindre un nouveau rouleau de parchemin. “Non professionnel et peu fiable” lirait-on à son sujet.

Misère… Adieu mes rêves de gloire ?

En plus de la Dame, quatre Hauts Magistères, pour chacune des quatre autres Maisons, siégeaient autour de la table. Vellin en connaissait deux d'entre eux.

Son mentor, Maître Willnus Lunepâle, se tenait assis à la gauche de la Dame Noire. Une cinquantaine d’années, visage rond, cheveux longs et besicles glissant sur un nez aquilin, sa tunique bleu azur semblait menacer à chaque instant de céder sous la terrible pression de son embonpoint. Vellin appréciait Maître Lunepâle, son insatiable curiosité, sa sympathie. Le Maître lui adressait un sourire gêné. Un geste qui signifiait “ne t'inquiètes pas, elle finira bien pas oublier… enfin peut-être”.

Maître Abthonas Griffesable lui faisait face, campé droit dans son armure d’écailles pourpre, une épée longue imprégnée glissée à la ceinture. Le mage-guerrier excellait dans l’art du combat et comptait en son temps parmi les plus jeunes magistères à avoir obtenu le rang de Maître. Il le devait à ses exploits sanglants durant les conquêtes des Cités Libres, ou il avait activement pris part à la chute de Z’inthra et de Seddis. D’une nature cruelle, il prenait plaisir à brimer les premières années lors des initiations au combat magique. Vellin comme beaucoup d’autres en avait fait les frais. En piètre manipulateur du fluide, il conservait un souvenir cuisant ainsi qu’une vilaine estafilade à la cuisse de sa rencontre avec le Maître, dix années auparavant.

Les deux derniers Maîtres étaient des inconnus pour Vellin. Tout les opposait dans leurs attitudes. La Dame de la Maison des Vestiges portait une tunique émeraude dépenaillée trop ample pour son corps frêle et des cheveux grisonnants ébouriffés comme si elle sortait tout juste du lit. Cette femme dans la fleur de l’âge ne semblait pas accorder le moindre poids à son apparence. A l’inverse, le Maître de la Maison des Chuchotements incarnait son rôle de diplomate à la perfection. Sourire étincelant et tunique ivoire dépourvue de plies ajustée à un corps athlétique, il évoquait à Vellin une statue de bronze qui aurait pris vie. 

De plus, les Maîtres n’étaient pas venus seuls. Cette constatation blessa encore un peu plus l’égo de Vellin. 

Je ne suis donc pas le seul disciple convié à la fête…

Cinq autres magistères étaient déjà installés sur les chaises alignées le long des murs ornés de cartes. La mage assise au plus proche de Vellin était d'une beauté saisissante. Un sourire niais s’était dessiné quelques secondes sur le visage du jeune homme lorsqu’il s’était placé à ses côtés. Elle possédait un visage en tout point parfait, et dont les yeux hazels et le sourire radieux rayonnaient dans la pièce en véritable phare de beauté. Sa silhouette aux formes généreuses, à peine dissimulée sous une robe blanche en soie vaporeuse, devait grandement contribuer à ses talents en persuasion auprès des hommes comme des femmes de sa profession.

Un jeune homme aux traits juvéniles, l'air émerveillé et de toute évidence trop serré dans son pourpoint vert sapin se tenait une place plus loin. Certainement le plus jeune de l'assemblée, il observait les étagères couvertes de babioles avec l'enthousiasme d'un enfant dans une échoppe de jouets. Son regard papillonnait de gauche à droite, sans se préoccuper du reste des participants.

Installés en retrait, ceux que l’on surnommait les “jumeaux écarlates” observaient Vellin. Il connaissait bien leur sombre réputation et ne fut guère surpris que la fratrie ait trouvé en Maître Griffesable un mentor aussi impitoyable qu’eux. Le frère et sa sœur descendaient d’une branche de la famille du Roi Darius. En tant que cousins du Roi, ils jouissaient d’une certaine impunité et plusieurs apprentis rivaux avaient connu d’étranges accidents au cours de leur formation. 

Nemeth Keto clôturait la rangée. La jeune femme avait débuté sa formation en même temps que Vellin et faisait partie de la même promotion d'apprentis magistères. Originaire des Cités Libres nouvellement conquises, Nemeth représentait l'une des premières enfants issues des régions de l’ouest à intégrer les rangs de l'académie. Reconnaissable à sa peau claire, son nez droit et ses cheveux d'un brun doré, elle avait enduré nombres épreuves cruelles de la part de ses camarades au fil des années d'apprentissage. Cruauté à laquelle Vellin avait pris part plus d’une fois. Pourtant, au lieu de l'affaiblir, ces épreuves n’avaient fait que renforcer sa détermination. Nemeth Keto en avait gardé une haine tenace de ses origines ainsi qu’une admiration sans faille pour la reine, imposant sa place au sein de la Maison des Ombres.

Peste du Désert. De toutes les Soeurs Noirs, il a fallu que ce soit cette garce cuivrée qui accompagne la Dame. Mon âme doit être maudite ! Je vais devoir faire profil bas…  

La Dame Noire se racla la gorge.

— Bien, nous pouvons enfin commencer. Vous devez certainement vous interroger sur la raison de votre convocation. Vous tous, en tant que magistères, êtes plus à même que quiconque de percevoir les signes du changement. Il ne vous a donc pas échappé que notre royaume est à nouveau secoué par des troubles. La paix durement acquise dans les Territoires Libres, cette paix que nous avons obtenue au prix du sang versé et des vies perdues, vacille aujourd'hui plus que jamais. Si en apparence les Cités Libres de l'Ouest ont juré allégeance à notre  couronne, de nombreuses voix de contestation murmurent dans l’ombre et tentent de saper l’autorité légitime du couple royal. 

— La Main de Tyr… cracha Abthonas Griffesable. La simple évocation de ces bâtards renégats est une souillure sur ma langue. 

— Une souillure qui se propage pourtant plus vite que la gangrène,  profitant d’un chaos savamment orchestré. Les traîtres se parent d’atours libérateurs alors qu’ils ne sont que des bourreaux. En s'appuyant sur la popularité de figures locales, leur influence croît de jour en jour. De simples rebelles se sont vus devenir de véritables héros en l’espace de quelques mois. Certains prétendent même que ces hommes pourraient un jour tenir tête au Roi. Des moins que rien élevés au rang de Presque-Dieu... Jamais nous avons été confrontés à de tels phénomènes dans notre courte histoire, et cela nous fait craindre le pire.

— Une Ascension… murmura la Dame vêtu de vert dans un souffle. Mais Dame Aseph, c’est impossible. Les Dieux Anciens ont disparu depuis des siècles. Aucun mortel ne s’est élevé depuis. Les plus puissants Aspirants actuels ne sont que de pâles copies. Même le couple royal, béni soient-ils, n’a su franchir ce seuil, malgré leurs exploits.

— Et pourtant, Dame Coeurvelu, poursuivit Aseph, nous autres magistères ressentons les vents du changement qui soufflent sur l’Astre. Des veines de fluides taries après la Chute s’écoulent à nouveau. D’anciens filets sont devenus torrents. L’énergie afflue. Elle s’infiltre et inonde des terres jadis stériles. Nos terres. Notre royaume. Ces plaines autrefois si pauvres en magie que nos ancêtres ont choisies pour fuir la folie des Anciens. Les changements ne se feront pas sans conséquence, Dame Coeuvelu. Notre reine en est convaincue. 

— Par les Abysses, ce serait l’aube d’un nouveau cataclysme…

— Reine Sémira, dans son infinie clairvoyance, a compris depuis longtemps que laisser croître ces Aspirants reviendrait à nous condamner. Le danger concerne tous les habitants du royaume, qu’il soit ircanien, maka, ou même un chien de renégat. C’est pourquoi les Traques ont été décrétées. Empêcher l’émergence d’un fléau. Nous autres humains, connaissions ce danger puis les années l’ont drapé d’oubli, comme tous les cauchemars anciens… Les purges, que les habitants de l’ouest dénoncent, sont en réalité un mal nécessaire. Le bien commun ne peut s’embarrasser de complaisance. Nous autres Dames Noires, portons ce fardeau plus que quiconque.

— Louées soient la Reine Sémira et nos Dames, déclama le Maître en blanc, dans un sourire éclatant.

Tous répondirent à l’unisson. 

— Louées soient-elles.

La Dame Noir hocha la tête, satisfaite, avant de poursuivre :

— Mais ce n’est pas de la Main de Tyr que nous parlons aujourd'hui. Du moins, pas directement. D’autres ombres rôdent, plus insidieuses encore. Notre mission est d’anticiper. Éteindre les braises avant l’incendie. Drull, la Cité Libre du Nord, est en proie à une grande agitation. 

Une vague de murmures parcourut la salle.

— Prévenez-nous plutôt le jour où elle ne le sera pas, siffla Abthonas Griffesable. Drull a toujours été la fange des Cités Libres. Un repaire de hors-la-loi et de profiteurs. Le roi Darius aurait dû raser ce cloaque depuis longtemps.

— Peut-être, mais Drull reste aussi notre principal fournisseur de ressources, comme le bois. Sans ses forêts et ses mines, Ircania ne serait jamais devenue la capitale qu’elle est aujourd’hui. La reine tient en haute estime Velda Marek, la Matriarche des Terres Froides. Et je ne vous ai pas convoqué pour recueillir votre avis sur la gouvernance des colonies nordiques, Maître Griffesable.

Le mage pourpre se renfrogna. Vellin esquissa un sourire : même les Maîtres n’échappaient pas aux piques de la Dame Noire.

— Depuis quelque temps, d’étranges disparitions frappent les colonies de Drull. Des villages isolés retrouvés entièrement vides. Des convois abandonnés le long des routes, les marchandises intactes. Des camps de bûcherons en lisière de bois volatilisés, sans la moindre trace d’affrontements. Les colons n’osent plus s’éloigner des remparts de la cité-état. Velda Marek ne sera pas ravie de notre présence, mais les livraisons se sont déjà raréfiées et contrairement aux Cités de l’Ouest, nous ne pouvons nous permettre cette pénurie. Si la situation venait à empirer, l’ouest pourrait saisir l’occasion pour s’embraser…

— Alors quoi, s’emporta Abthonas, une bande de mercenaires entreprendrait de contrôler la région ? Plusieurs groupes de déserteurs ont fui pour se réfugier au nord et Velda Marek était bien contente de les accueillir dans ses rangs... Ou bien une énième incursion d’un Fils au Sang-De-Pierre venu du grand nord ? Ou alors des isthres ? Ces sauvages seraient bien trop lâches pour s’aventurer hors de leurs bois sacrés.

— Là est toute la question Maître Griffesable. Aucun survivant. Pas même un indice. Quoi qu’il s’agisse, la menace est sérieuse.

Drull la Brumeuse, dernière halte avant les vastes et dangereuses Terres Sauvages du nord. J’ai entendu de nombreuses rumeurs à ton sujet… Une occasion unique de traverser le royaume, de voir des forêts ! Et pas n’importe quelle forêt, les arbres géants de Rultis…tout en servant la reine. Mon premier voyage en dehors des murs d’Ircania ! Quant à cette mystérieuse menace… Je laisse le danger à Griffesable et ses sbires. Maître Lunepâle et moi-même aurons suffisamment à étudier sur place.  

Autour de la table les maîtres magistères échangeaient à voix basses. Les hauts mages affichaient des mines sinistres. 

Cette fois, ce fut Lunepâle qui reprit la parole pour l’assemblée. 

— Ne pourrions-nous pas envoyer quelques-uns de nos valeureux myrmhides? Après avoir pacifié l’ensemble des Territoires Libres, ils devraient pouvoir protéger Drull sans trop de difficulté. je pense parler au nom de tous en disant que nous avons d’importants travaux en cours. Il nous en coûte de les abandonner ainsi…

—La menace demeure trop intangible Maître Lunepâle. Et les myrmhides, aussi braves soient-ils, ne peuvent couvrir toutes les colonies, rétorqua Aseph avec calme, levant un doigt autoritaire. Des troupes, la Matriarche n’en manque pas. Ce dont elle manque, c’est votre discernement. Vos capacités de réflexion. Chacun d’entre vous a été soigneusement choisi par par mes consœurs pour ses talents spécifiques, et vous avez eu toute latitude pour sélectionner vos disciples les plus prometteurs. J’assurerai la supervision et tiendrai les Dames informées, mais ce sera à vous de mener l’enquête sur le terrain.

Pourquoi ai-je la désagréable sensation que ce voyage vous contrarie, cher Maître ? 

— Une fois à Drull, Maître Echardefeu, vous rencontrerez Velda Marek. En tant que Maître de la Maison des Chuchotements, vous gardez naturellement autorité sur les échanges diplomatiques. Rien n’échappe aux oreilles de la Matriarche concernant les Terres Sauvages. Elle devra vous en dire davantage sur ces troublantes disparitions.  

Le Maitre tout de blanc vêtu s’inclina légerement, un sourire mielleux aux lèvres.

— Mais certainement, ma Dame.

Le trajet jusqu’à Drull est long. Il est impératif que notre mission reste la plus discrète possible. S’il advenait que la Main ne soit pas impliquée, il serait fâcheux de leur offrir un prétexte pour s’agiter davantage. Des places nous ont été réservées à bord de la prochaine Grande Migration. Le départ est prévu depuis Thanobras, dans trois jours. Vous n'aurez donc pas à vous soucier de la sécurité durant le voyage, Maître Griffesable, les caravaniers makas s’en chargeront. Je vous fournis néanmoins dix myrmhides, parmi nos soldats les plus aguerris, pour une fois arrivé à Drull. Cela vous convient-il ?

— Entendu, Dame Ventrevigne, répondit le mage guerrier en laissant glisser ses doigts le long du pommeau de son épée. Ce sera plus que nécessaire.

— Officiellement, vous êtes une délégation de magistères envoyés en mission diplomatique, chargée d’élaborer de nouveaux accords commerciaux pour l'Académie. Les Dames tiennent à ce que la version officielle ne souffre aucune variation. Notre présence à Drull ne doit pas alerter les espions de la Main.

Vellin, mal à l’aise sur sa chaise de bois dur, tenta de remettre un peu d’ordre dans le tumulte de ses pensées.

Notre mission fait donc écho aux craintes de la Reine. Nous sommes ses limiers, son avant garde, œuvrant pour la protection du royaume. “Vellin, étude des terres sauvages du Nord, comment un jeune magistère sauva le royaume du désastre”. Je vois d’ici l'ouvrage, trônant fièrement sur toutes les bibliothèques ! Les jeunes apprentis rêveront d’un destin aussi glorieux que celui du Grand Vellin Ombrépine ! Cette mission sera mon chemin vers la renommée !

J’ai toute confiance en vous, déclara Aseph Ventrevigne en promenant son regard sur chacune des magistères présentes. Elle s’attarda un bref instant sur Vellin, et le jeune homme crut y déceler une pointe de mépris. La froideur fit vaciller ses ambitions. 

— Mais il va sans dire que cette confiance à un prix. J’espère que vous en mesurez les conséquences.

Tous acquiescèrent en silence. Ils le savaient, décevoir la reine signifiait un sort pire que la mort. Le souvenir de Denatrius était encore vif dans les esprits. Le magistère suspecté d’avoir fourni des renseignements aux renégats de l'ouest avait agonisé à la vue de tous pendant des jours, crucifié sur l’obélisque central d’Ircania et maintenu en vie uniquement par volonté magique. On racontait que seule l’intervention nocturne de sympathisants avait mis fin à son calvaire. 

Mon destin est à désormais lié à celui des personnes présentes dans cette salle. Le succès me vaudrait d’être enfin reconnu comme Maître respecté. L’échec… 

La Dame Noire se leva de sa chaise.

— Si tout est clair, je ne vous retiendrai pas davantage. Le départ étant prévu dans trois jours, je vous laisse à vos préparatifs. Chers Maîtres, je vous convoquerai chacun en temps voulu pour détailler vos prérogatives. Il est préférable que certaines informations demeurent confidentielles, même entre nous. Ne voyez pas là un manque de confiance, mais une précaution nécessaire. Chaque magistère devra se limiter à son propre domaine.

Elle marqua une brève pause.

— Vous pouvez disposer.

Tous se levèrent sans un mot. Il n’y avait de toute façon rien à ajouter. 

On ne contestait pas les décisions des Dames.

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