Une main qui pousse mon épaule, un pied qui croche ma cheville et BAM, me voilà par terre. Un instant, la tête me tourne. Qu’est-ce qui vient de se passer ? Et puis je les vois. Leurs visages hilares au-dessus de moi. Ils rient, s’échangent des accolades, fiers du tour qu’ils viennent de me jouer. La rage m’embrase et fait brûler mes joues, très vite remplacée par la honte. Ce n’est pas la première fois qu’ils me jouent ce genre de farce ; pas la dernière non plus. Je devrais en parler aux adultes – j’ai déjà essayé – mais je ne le ferai pas. Dans le meilleur des cas, mes bourreaux seront punis puis tout recommencera. En pire. Sinon, les adultes ne feront rien car il faut bien que « jeunesse se passe » alors à quoi bon ?
Je ramasse mon sac et son contenu répandu sur le sol. J’y fourre mes affaires, puis mon paquet serré étroitement contre la poitrine, je me redresse et tente de briser le barrage qui me fait face. Ils sont plus grands, plus forts. À chaque pas que je fais dans une direction, ils se décalent et me bloquent. Pour eux c’est comme un jeu ; pour moi, une nouvelle humiliation.
— Poussez-vous, je dis, ma voix faible et tremblotante.
À cet instant, je me hais de ne pas être capable de faire front, d’en être réduite à une petite chose frémissante dès qu’ils me malmènent. La peur constante m’épuise, l’impossibilité de les fuir aussi. La boule dans ma gorge, celle qui m’étouffe en permanence et dont je voudrais me débarrasser mais qui revient toujours, m’empêche presque de respirer.
— T’as dit quoi ? Répète un peu, j’ai pas entendu.
C’est le chef de la bande. Théo. Pas le plus grand ni le plus fort, juste plus vicieux et moins sûr de lui que les autres. Me martyriser – ainsi que quelques autres – est la seule façon qu’il a trouvée d’asseoir son autorité pour ne pas être une victime lui-même.
— Rien. J’ai rien dit.
Là. Les sanglots. Ils étouffent ma voix, bloquent ma gorge, menacent de rompre les digues. Non, pas cette fois. Pas encore. Je ne peux pas les laisser s’enfuir. Serre les dents. Respire profondément. Oui, c’est ça. Une, deux. Une, deux. Les choses peuvent encore changer. Si personne ne m’aide, je vais devoir prendre les choses en main, me dresser contre eux.
— Ah ? T’es sûre ? Je crois pas moi.
Il s’apprête à dire autre chose, mais la sonnerie retentit. C’est l’heure du premier créneau de l’après-midi. Je suis sauvée. Ils n’ont pas envie d’être collés, ce qui va se produire s’ils arrivent en retard, alors ils vont me laisser tranquille. Pour cette fois du moins.
Un par un ils me contournent. Évidemment, il est le dernier à passer et il ne peut pas résister à l’envie de me bousculer une dernière fois, juste pour être sûr. Il ne faudrait pas que j’oublie ma place, n’est-ce pas ?
Ça y est, je suis seule. Enfin. Seule dans le recoin où ils m’ont surprise un livre à la main. Ils sont malins, ils n’agissent jamais où on pourrait les voir. Après tout, et si les adultes faisaient réellement quelque chose ?
La sonnerie se tait enfin. Le silence est assourdissant. Le sang bat à mes tempes, mes membres tremblent et la digue cède finalement sous l’assaut des larmes qui dévalent mes joues. Je m’effondre au sol, enroulée autour de mon sac comme un tout jeune enfant autour de son doudou. Ma main étreint mon collier, mon talisman. Il m’a été offert par Elsa, des années plus tôt pour mon anniversaire, le jour où nous nous sommes promis d’être toujours là l’une pour l’autre.
Une, deux. Une, deux. Respire. Expire, inspire. Une, deux.
Là. Peu à peu les tremblements se réduisent, les larmes se tarissent.
Je me lève avec un mal de tête lancinant qui me fait grimacer. Un rapide coup d’œil à ma montre me fait comprendre que je suis très en retard. Je suis bonne pour un mot dans mon carnet. Encore un. Ce sera le troisième ce mois-ci, plus qu’un et c’est la colle. Maman va être furieuse. Cette idée ajoute encore un poids dans ma poitrine et m’attire le cœur au bord des lèvres. Si je suis collée, maman va me punir.
Tête haute, je m’ordonne.
Trois petits coups sur la porte, puis un silence que rompt l’ordre d’entrer. La poignée pivote sous ma main et le battant s’efface pour dévoiler la salle de classe. Tous les visages sont tournés vers moi.
— Ah ! Te voilà enfin. Va vite t’asseoir.
L’enseignante m’indique ma chaise, puis met une croix dans son carnet à côté de mon nom.
Les joues rouges de gêne et les yeux fatigués par les larmes versées, je zigzague entre les tables pour atteindre mon siège. Je sens leurs regards sur ma peau. Ils m’observent, me jaugent. Des loups et leur proie. Un frisson court sur mon échine.
— Mocheté, murmure une voix quand je passe.
— Va crever, chuchote une autre.
Leurs mots sont presque doux aujourd’hui.
Je finis par atteindre mon siège. Ma voisine refuse de croiser mon regard, elle fait comme si je n’étais pas là. Nous étions amies, avant. Plus maintenant. Elle m’a lâchée la première fois qu’ils s’en sont pris à moi dans les rangs, trop effrayée de subir le même sort. Je sors mes affaires avec des gestes d’automate.
Le cours se déroule sans que je m’en rende vraiment compte. Au bout d’une éternité ou bien de deux, la sonnerie résonne de nouveau. Les autres rangent leurs affaires et quittent la pièce. Je m’apprête à les suivre quand la voix de la professeure me retient.
— Attends un peu, je voudrais te parler.
Je me fige et me retourne.
— Pousse la porte, s’il te plaît.
Je m’exécute.
— Approche.
Elle essaie de croiser mon regard, mais je fuis le sien et fais mine d’admirer les posters sur les murs.
— Que se passe-t-il ?, elle demande de sa voix douce mais ferme.
— Rien, je marmonne.
— Regarde-moi.
J’essaie. Je le jure que j’essaie, mais je n’y arrive pas. Je ne peux pas regarder les gens dans les yeux. Je ne peux plus.
— Tu sais que si tes camarades t’embêtent tu peux nous en parler, n’est-ce pas ? Pareil s’il se passe quelque chose chez toi.
J’acquiesce distraitement pour lui faire plaisir. Mes yeux survolent son visage soucieux. Elle est gentille, je l’aime bien. Pendant un instant le désir de tout dévoiler – la peur, la solitude, l’abandon – est si puissant que j’ouvre la bouche, prête à parler. Puis je me rattrape et secoue la tête.
Comme elle n’ajoute rien, j’en profite pour rouvrir la porte et me glisser dans le couloir. Il est bondé. Des dizaines et des dizaines d’adolescents et de pré-adolescents qui discutent, chahutent et crient. Une marée grouillante et mouvante que je fends tant bien que mal pour rejoindre la sortie de l’établissement. Plus qu’un bus et la journée sera finie.
Il n’y a presque personne à l’arrêt de bus à cette heure-ci. Rien que moi, quelques jeunes de ma classe et Elsa qui monte déjà dans son bus.
La douce chaleur du soleil de printemps tourne lentement à la torture, réchauffant le tissu noir de mon pull et enflammant la peau sensible de mon visage. L’attente devient un enfer. Il n’y a qu’un banc pour s’asseoir à l’abri, mais il est déjà pris et hors de question de m’asseoir par terre : le goudron est brûlant de la chaleur accumulée durant le jour.
Après une interminable attente, le bus arrive enfin. Les autres se précipitent à la porte pour être les premiers à monter et obtenir une place à l’arrière, sur la grande banquette. Je les laisse faire et monte la dernière. Je m’assois juste derrière le chauffeur, mon sac sur les genoux. C’est ma place préférée, celle où je m’assois toujours.
Le bus s’ébranle et les arrêts s’enchaînent au son de la radio. La circulation est fluide et je me perds dans la contemplation du paysage urbain, laissant mon esprit dériver et imaginer la vie des gens que j’aperçois. Une dame, grande et élégante, devient une bibliothécaire chasseuse de créatures magiques ; le monsieur là-bas est peut-être détective privé. L’enfant au ballon rouge deviendra quelqu’un de bien qui protège ceux qui en ont besoin et sur qui on peut toujours compter. Un tiraillement dans ma nuque me ramène dans le bus. Quelqu’un joue avec mes cheveux.
Je me crispe et agite doucement la tête pour les libérer, mais rien n’y fait, alors je me retourne brusquement. Ma chevelure est libérée et je me retrouve tête à tête avec un de mes tourmenteurs. Il a un grand sourire et ses amis ricanent derrière lui en échangeant des commentaires satisfaits. Le bus s’arrête et le garçon retourne près d’eux d’un pas joyeux. Je me détourne et fixe le plan de la ligne. Il vaut mieux les ignorer quand c’est possible.
Un peu plus tard, c’est mon arrêt. Une bretelle de mon sac sur l’épaule, je descends avec un salut au conducteur. La maison, bientôt. Je souris. Un jour en enfer de moins et le printemps qui s’enfuit : l’été sera bientôt là et les vacances avec lui.
Mon pas lent se transforme en une foulée bondissante qui fait danser mes cheveux dans mon dos. Une gêne étrange ne tarde pas à apparaître, comme si un poids tirait ma chevelure vers le sol. Ma foulée ralentie, puis je m’arrête, saisis quelques mèches et les ramène devant mon visage. Là. Je sens quelque chose de collant dans mes cheveux. J’essaie d’en libérer quelques uns sans résultat alors j’approche la masse poisseuse sous mon nez et renifle. Une odeur sucrée me parvient et la lumière se fait dans mon esprit : un chewing-gum.
La sensation de tiraillement, leur air satisfait. Ils m’ont collé un chewing-gum dans les cheveux. Je tire, tente de le décoller, mais rien ne fonctionne. Mes cheveux sont prisonniers et il n’y a aucun moyen de les libérer.
En écho à ce matin, la colère et les larmes jaillissent en un feu bouillonnant. J’ai envie de tout arracher, je veux les frapper. De hurler. N’importe quoi.
Je reprends le chemin de la maison. Avec un peu de chance maman n’est pas encore rentrée et je vais réussir à m’en débarrasser avant son retour.
La maison est vide quand j’arrive. Après avoir déposé mon sac, je me précipite dans la salle de bain et examine l’ampleur des dégâts. Mes cheveux sont tout englués et je me rends vite compte que je ne pourrais jamais les dégager. Une seule solution : couper.
Je fouille dans l’armoire à pharmacie et trouve une paire de ciseaux, entre les pansements et le sirop contre la toux. Je les dégaine et commence à cisailler rageusement là où les cheveux et le chewing-gum s’étreignent. Chop, chop, chop. Avec plus de précautions, je suis la forme de la pâte collante.
Une masse velue et répugnante de la taille de deux cerises repose finalement dans ma main ouverte, mélange de pâte rose et de poils bruns.
Sa vue me fait horreur.
J’ai toujours adoré mes cheveux. Mes cheveux et la couleur de mes yeux. Ce sont les deux seules choses que j’aime toujours chez moi, tout le reste j’ai appris à le détester. Ils m’ont appris à le détester. La forme de ma bouche et de mon nez, mes joues rondes, la ligne de ma mâchoire, l’espacement entre mes sourcils, et ma voix. Tout cela je l’exècre, je l’abhorre.
Je ferme mon livre quand j’entends la clé tourner dans la serrure. Après avoir vérifié qu’il n’y a plus de trace de mes larmes sur mon visage, je descends et pour saluer ma mère.
Nous discutons de nos journées respectives puis je prétexte des devoirs pour retourner dans ma chambre et reprendre mon livre.
Je lis beaucoup. C’est le seul moyen que j’ai trouvé pour échapper à l’ennui de la vie quotidienne, au cauchemar du collège. Les personnages de roman sont mes amis, mes maîtres, mes confidents. Ils m’ont appris bien plus que quiconque. Le bien et le mal, le juste et l’injuste, le respect, l’amitié et l’espoir. Avec eux j’ai affronté des dragons, des démons et la fin du monde ; j’ai voyagé par-delà les mers et vécu dans la nature sauvage et indomptable, manié l’épée de rois et épousé des princesses toutes plus formidables les unes que les autres. Ils sont mon refuge.
J’achève la dernière page quand maman m’appelle pour le dîner. Nous nous s’asseyons à table et mangeons en regardant le journal. Au moment du fromage, elle finit par examiner mon visage.
— Tu as pleuré, elle dit.
J’acquiesce en silence.
— Que s’est-il passé ?
J’inspire profondément, les mains crispées sous la table. Il ne faut pas qu’elle sache que je vais mentir. Elle déteste les mensonges.
— Je me suis disputée avec quelqu’un cet après-midi.
— Ah. Je suis sûre que tout va s’arranger.
Elle tente de me réconforter en me caressant les cheveux, mais son cœur n’y est pas.
J’enfourne un morceau de fromage pour éviter d’ajouter quelque chose qui pourrait me compromettre. Ce n’est pas vraiment un mensonge. J’ai bien eu un accrochage aujourd’hui.
C’est la nuit et il est tard, pourtant je n’arrive pas à dormir. Je ne peux pas m’empêcher de ressasser la journée passée et le jour d’avant, et le jour d’avant encore. Je n’arrive pas à me rappeler d’un jour où ils ne m’ont pas embêtée, d’un jour où je n’ai pas pleuré au moins une fois depuis la rentrée de septembre. Cette année est un véritable tourment : l’acharnement des uns, la solitude apportée par l’abandon des autres et la sensation de tourner en rond.
Au début, ce n’était pas si terrible : une remarque par-ci, une autre par-là de la part de Théo, puis lorsqu’il a remarqué que son comportement lui valait une sorte de respect de la part des autres, il a poussé son avantage : insultes, bousculades, vols, mauvais tours. J’ai tenté d’en parler, sans résultat. Évidemment ses suiveurs ont fini par se joindre à lui et à s’en prendre à mes amis également. Des amis qui, l’un après l’autre, m’ont tous laissé tombée par peur de subir le même traitement, sauf Elsa. Elle est le dernier rempart entre moi et la solitude absolue.
Je suis la proie et ils sont les loups qui me harcèlent, me mordent et me pincent en attendant la mise à mort.
Si je parle, personne ne m’écoutera puisqu’ils ne l’ont pas fait la dernière fois, et même s’ils le font, que peuvent-ils faire ?
Il n’y a pas d’issue.
Des larmes coulent sur mes joues, se faufilent dans mes oreilles alors que je repose sur le dos, les yeux grands ouverts.
Les rayons du soleil tombent sur mon visage et me réveillent. Je n’ai pas envie de me lever. Ma nuit d’insomnie me laisse le cerveau embrumé et une migraine derrière les yeux. Une autre journée en enfer, je me dis en sortant du lit. Et si aujourd’hui, rien qu’aujourd’hui, je restais à la maison ? Non, pas aujourd’hui. Aujourd’hui il y a contrôle de maths, je ne peux pas rater ça.
La main sur la poignée de la porte, j’inspire profondément. J’essaie de me convaincre que ça ira. Après tout, comment ça pourrait être pire ? J’expire dans l’espoir de chasser la boule qui se niche dans ma gorge, mais elle refuse de me quitter. Puisque c’est comme ça, plus qu’à prendre le bus et affronter la journée la tête haute.
— Je peux le faire, je dis à voix haute, surprise par le son rauque de ma propre voix.
Le bus s’arrête devant le portail du collège. De nombreux élèves sont déjà là. Ils discutent par petits groupes. J’ai l’impression que tous les yeux sont rivés sur moi quand je descends du bus. Un rire éclate. Qui est-ce ? Pourquoi ? Est-ce qu’on rit de moi ?
Elsa me rejoint quand je traverse le trottoir et m’apprête à pénétrer dans le collège. Elle me salue brièvement.
— Hey ! Dis, tu veux bien venir avec moi ? Faut qu’on parle.
Elle a l’air bizarre, tendue. Sa voix est fébrile, ses yeux balaient la zone autour de nous avec frénésie. J’acquiesce d’un signe de la tête et elle me traîne par le poignet jusqu’à un bosquet d’arbres hors de la vue du pion posté à l’entrée du collège.
Je sens une onde de malaise monter en moi. Qu’est-ce qu’elle peut bien vouloir me dire qui requiert qu’on soit seules ?
— Hey. Qu’est-ce qu’il y a ? T’es bizarre aujourd’hui.
— Écoute, ça peut plus durer tout ça.
— Comment ça ? je demande.
— Tout. Faut que tu arrêtes de te laisser faire. Je sais pas moi, réagis ! Va voir la CPE, bats-toi, je sais pas moi !
— Ah ? Et tu veux que je fasse quoi au juste ? J’ai déjà essayé et ils ont rien fait je te signale !
— J’en sais rien, moi ! Fais quelque chose c’est tout ! C’est plus possible là. Vraiment. Ils s’en prennent à toi tous les jours et quand ils te trouvent pas, c’est moi qu’ils emmerdent. J’en peux plus. Trop c’est trop. J’ai plus envie de te parler, c’est trop de problèmes.
— Quoi ! Qu’est-ce que tu racontes ? T’es en train de me lâcher ou je rêve ?
Je crie sans le vouloir, ma voix grimpant dans les aigus. Mon cœur se met à tambouriner sous le coup de la colère et mes yeux s’écarquillent sous le coup de l’étonnement. Je vois littéralement flou et de très loin alors que l’ampleur de ses mots me frappe de plein fouet. Je n’en reviens pas qu’elle me laisse tomber. Je croyais que je pouvais compter sur elle comme elle peut compter sur moi, mais apparemment je me trompais.
— C’est exactement ça.
Elle me regarde avec un air déterminé, sans même une once de regret dans la voix, comme si notre amitié ne signifiait rien pour elle.
— J’ai rien à voir avec tes problèmes donc laisse-moi tranquille. N’essaie plus de me parler, c’est pas la peine.
— T’es qu’une lâche et une traîtresse, je lui dis.
— Et toi t’es trop fière pour aller les dénoncer.
Peut-être qu’elle a raison. Peut-être que si j’étais moins réticente à demander de l’aide, toute cette affaire serait déjà finie. Ou peut-être pas. Après tout, j’ai déjà essayé quand tout a commencé, et rien n’a été fait.
Les mains tremblantes, je détache le fermoir du collier qu’elle m’a offert durant notre année de CP avec la promesse de toujours rester amies.
— Ta parole ne vaut rien ! Reprend ce truc, j’en veux plus !
Je lui crache les mots au visage en même temps que je lui jette le pendentif à la figure. Un rayon du soleil se reflète sur le sien, qu’elle porte toujours. J’ai envie de le lui arracher. Elle n’essaie même pas d’attraper le bijou et il tombe par terre avec un cliquètement délicat.
La vue brouillée par les larmes amères de la trahison, je lui tourne le dos, mon sac sur l’épaule et commence à marcher droit devant moi, sous le soleil montant et brûlant. Ses mots tournent en boucle dans ma tête, me piquent et me torturent.
Je me mets à courir, les joues et le cou détrempés, la respiration sifflante. Je cours jusqu’à étouffer et quand je finis par m’arrêter, j’ignore où je suis. Je suis perdue. Perdue et seule. Abandonnée.
Texte écrit en 2020 pour le concours d’écriture de mon université dont le thème était loyauté cette année-là. Il a fini 6ème sur une quarantaine de participants et donc au pied du “podium”, les cinq premiers étant classés.