–– Jezabel ––
Une fois dans celle-ci, je ferme précautionneusement la porte derrière moi. Je pause mes vêtements sur le couvercle de la cuvette des WC avant de commencer à retirer l'entièreté de mes habits.
Alors que je porte ma main droite à mes cheveux pour les dénouer, je remarque que je porte encore le bracelet bleu phosphorescent. Je le fixe longuement, avant d'enfin me décider à le retirer et à le jeter dans la poubelle de la salle de bain.
Une fois entièrement nue, je me glisse dans la cabine de douche et ferme la porte de celle-ci. J'allume l'eau, et la mets à la température idéale pour moi. Je me positionne sous le pommeau de douche, et laisse l'eau chaude venir s'écraser sur ma tignasse noire, avant de parcourir son chemin sur ma peau et de venir tracer de longs sillons sur mon épiderme. Après quelques minutes, mes muscles finissent enfin par se détendre, et un léger sourire de satisfaction vient étirer mes lèvres.
Après avoir passé plus d'une heure sous la douche, je me décide enfin à sortir de la cabine. J'attrape ma serviette et m'enveloppe dedans.
Je me positionne face au miroir et passe l'une de mes mains sur la surface lisse pour en enlever la buée qui la recouvre. J'observe longuement mon reflet et me mets à tenter de reproduire l'ombre d'un sourire convainquant que je pourrai éventuellement afficher durant le reste de la journée, mais ma tentative est définitivement vouée à l'échec, puisqu'à chaque essai, mes "sourires" font de plus en plus peur.
C'est bon, je jette l'éponge, j'abandonne pour aujourd'hui, ils devront se contenter de mon visage de marbre jusqu'à ce que j'aille me coucher.
Je finis de sécher l'entièreté de mon corps, avant d'enfiler mes sous-vêtements pardessus lesquels j'ajoute un ensemble de survêtement gris et me décide enfin à sortir de la salle de bain. L'humidité provoquée par la chaleur de l'eau que j'ai utilisée, sort sous forme de vapeur au même moment ou j'ouvre la porte de la salle d'eau.
Arrivée au pied des escaliers, ma sœur, suivie des deux paternelles, entrent dans la maisonnée. Maya monte les marches quatre à quatre pour venir me sauter dans les bras, tant-dis-que ma mère se dirige directement dans la cuisine - les sacs de courses dans les bras - sans même m'accorder la moindre attention.
Mon père, lui, est déjà au téléphone lorsqu'il pose un pied à l'intérieur, il m'adresse à peine un regard avant de filer dans son bureau qui se trouve au rez-de-chaussée.
- On t'a acheté une voiture, me hurle ma benjamine dans les oreilles.
Je la pause à terre et la regarde éberluée, bien qu'elle m'ait rendue sourde par son annonce plus que bruyante.
- Mais bien sûre, t'en as d'autre des conneries pareilles, la questionnais-je en secouant négativement la tête.
- Mais si je t'assure, elle m'attrape la main et m'entraîne à l'extérieure pour appuyer ses propos.
Une belle Audi A6 noire nous fait face. J'effleure de ma main, la calandre de ce qui semble être ma nouvelle bagnole et un sourire vient étirer le coin de mes lèvres. À moi la liberté ! Je fais le tour du bolide et regarde à l'intérieure de la bagnole, et à mon grand regret, les siège et la banquette arrière sont en cuir de couleur crème. D'un, les siège en cuir son le pire truc, autant l'été que l'hiver, et de deux, la couleur crème est réellement à vomir.
Mais je ravale mes commentaires, je n'ai pas à me plaindre, je dois m'estimer heureuse d'avoir une telle voiture -même si je sais qu'il va leurs falloir une contrepartie.
- On va faire un tour ? me questionne Maya en me sortant de ma rêverie de sa voix enfantine.
- J'ai l'air d'avoir les clefs, morveuse ? la questionné-je en retour en levant les yeux au ciel.
La gamine m'attrape à nouveau par le bras, avant de m'entraîner à nouveau à l'intérieure de la baraque, et de se diriger à la cuisine, dans laquelle ma mère est entrain de ranger les courses dans le frigo et dans les placards. Je la fixe un instant, ne sachant quoi dire, mais Maya me secoue le bras pour m'encourager, et pour m'exprimer son impatience grandissante.
Je finis par enfin me décider à remercier ma mère pour ce cadeau, mais je le fais brièvement. Puis je finis par enfin lui demander si je peux avoir accès aux clefs pour aller faire un tour avec Maya, pour qu'elle finisse enfin par se décider à me lâcher la grappe. Parce qu'elle a beau venir de rentrer d'une matinée dans les magasins avec les paternelles, elle est toujours autant excitée comme une puce, et la voir gesticuler à côté de moi, a le don de m'agacer au plus haut point. Parfois, j'en suis même à me demander si elle n'est pas hyperactive et qu'il lui faudrait peut-être un traitement.
Enfin bref, j'attrape les clefs que ma mère a fait glisser sur le comptoir jusqu'à moi, avant d'aller dans l'entrée, où j'enfile ma paire de Doc Martens avant de me rendre à ma voiture. Je me dirige vers le côté droit de ma bagnole et en ouvre la portière, mais quand mon fessier se retrouve sur la place passagère, je reviens brusquement à la réalité. On est en Amérique Jezabel, la place conducteur est à gauche, plus à droite comme en Angleterre.
Je ne m'embête pas plus que ça, et plutôt que de sortir de ma voiture, de la contourner pour enfin ouvrir la portière côté passager et enfin pouvoir poser mon cul sur ce siège qui se trouve derrière le volant, je préfère enjamber l'ilot central, c'est tout aussi simple, et deux fois plus rapide.
Je me penche par-dessus le levier de vitesse et claque la portière passagère que j'avais oublié de fermer avant que je change de place. Maya prend place sur la banquette arrière, derrière le siège passager, elle boucle sa ceinture et je démarre enfin la voiture. Je sors de l'allée principale et finis par demander à Maya :
- Tu veux aller où en fait, la questionnais-je, ne sachant trop quoi faire et où aller.
- Manger une glace !
Je hoche silencieusement la tête avant de me garer sur le bas-côté de la route et de sortir mon téléphone pour y chercher une boutique de glace. Une fois que j'ai trouvé une adresse, je la mets sur mon GPS et me remets en route.
Après seulement cinq minutes de trajet, j'allume la radio de ma voiture puisque je n'ai pas pensé à connecter mon téléphone au Bluetooth ma caisse. Et c'est la chanson Twist and Shout des Beatles qui nous accueil. Étant donné que c'est une chanson que l'on affectionne tout particulièrement avec Maya, j'augmente le son et commence à chanter les paroles avec elle. La chanson a beau ne durer que trois minutes, ce cours moment me permet de m'évader l'espace de quelques instants. Ça me permet de mettre ma vie sur pause pendant un moment, bien sûr ce laps de temps n'est pas éternel et n'est qu'éphémère, mais ça me fait un bien fou.
Je tape le rythme de la musique à l'aide de mes deux index sur mon volant, tout en restant le plus attentive et vigilante à ce qui se passe sur la route.
On arrive enfin devant le stand de glace, après avoir eu vingt minutes de voiture, auxquelles on ajoute dix minutes de marche.
Maya se positionne devant la vitrine derrières laquelle se trouve les glaces. Blondine pause ses paumes contre la glasse et regarde les crèmes glacées, l'eau à la bouche, à deux doigts de bavé.
- Votre filles très mignonne, comment s'appelle-t-elle, me questionne la glacière.
- J'ai une tête à avoir une gosse ? répliqué-je sur un ton acerbe.
La femme n'ose plus dire un seul mot après ma réplique cinglante, elle scrute ses glaces qui se trouve devant elle en attendant qu'on lui dise ce que l'on veut.
Une fois nos choix sont faits, je commande deux boules Starcciatella pour moi et une vanille et l'autre au chocolat pour Cendrillon. Nos pots de glace en main, on se dirige vers un banc qui se trouve sous un arbre pour y déguster nos pots de crème glacée.
****
J'ai ramené Maya à la maison il y a une demi-heure, désormais, je hère dans le super marché à la recherche d'huile et de farine. Ariel a déclaré la guerre ce matin en me bloquant l'accès à la voiture et je ne suis pas le genre de fille qu'il faut provoquer. Alors que la guerre commence, et elle commencera dès cette nuit.
J'attrape deux kilos de farine et deux litres d'huile avant d'aller à la caisse, pour payer.
- Vous prévoyez de faire de la pâtisserie, me demande la caissière.
- J'ai une tête à faire des gâteaux ? Et puis de quoi vous vous mêlez d'abord, lui réponds-je sur un ton amer.
La caissière me regarde outrée, c'est ça regarde-moi comme si je t'avais offensée, tu ferais mieux de me rendre ma tune et de t'occuper du prochain client ou je me ferais un plaisir de te refaire le portrait.
La femme me rends l'argent qu'elle me doit et je récupère mes achats avant de quitter enfin ce foutu magasin de merde.
Aujourd'hui je ne suis réellement pas d'humeur a essayer de faire un quelconque effort pour faire preuve de bienséance envers qui que ce soit.
Je retourne à ma voiture et pose ma farine et mon huile sur le siège passager avant de boucler ma ceinture de sécurité et de démarrer pour rentre chez moi pour préparer mon plan de ce soir.
Sur le chemin du retour, j'ai pensé à connecter mon téléphone à la radio de ma voiture, et c'est sur un son des The Score que je prends l'autoroute tout en chantant à tue-tête et en tapant le rythme de la chanson sur mon volant. Mais je prends garde à rester le plus attentive possible à ce qui se passe sur la route.
Une fois arrivée à la maison, je me gare dans l'allée et coupe le moteur.
J'attrape mes quelques achats ainsi que mon téléphone et mes clefs de voiture avant de sortir de l'habitacle et de retourner à l'intérieure.
Dans la maison, le calme règne, je passe dans le salon et remarque que les paternelles ne sont pas là. Je fouille de fond en comble la maison entière, mais personne ne s'y trouve. Je vais donc à la cuisine pour me servir un verre d'eau et je tombe sur une note qui est posée sur le comptoir qui dit : Ton père a dû partir travailler, Maya est chez Santa puisque tu n'étais pas là.
Je peux sentir le reproche derrière ces derniers mots, il fallait que je m'y attende, une voiture comme simple cadeau était bien trop beau pour être vrai.
Bien sûr, mon père travail, sa carrière est plus importante que sa famille, et ma mère est probablement allée se réfugier dans un spa pour échapper à son devoir de mère. Aucun des deux n'est là pour Maya, c'est pour ça que je n'ai toujours pas quitté le nid familial, enfin si on peut appeler ça comme ça.
J'attrape la note, et la chiffonne en une boule avant de la jeter dans la poubelle qui se trouve sous l'évier. J'oublie de me servir un verre d'eau et monte directement dans ma chambre, dans laquelle je pose les petites courses que je viens d'effectuer.
Je sais que je devrais aller chercher ma benjamine chez les voisins, mais la voiture de Bétamèche, est là, donc je préfère prendre un peu de temps pour réfléchir à mon plan de ce soir. Je m'installe sur mon lit, et réfléchis à la procédure de mon évasion de cette nuit. Le reste ça passera crème, il faut juste que je réussisse à trouver un moyen discret de sortir de cette maison en pleine nuit sans me faire chopper.
Je pense que le moyen le plus simple, sera de simplement attendre que toute la maisonnée se soit endormie, et qu'à partir de ce moment-là, j'aurais le champ libre pour m'évader, il faudra simplement que je prenne garde à ne pas faire trop de bruit en m'éclipsant.
Alors que je souris diaboliquement face à mon idée ingénieuse, je me rends compte qu'il y a des chances pour que mon plan tombe malheureusement à l'eau. Il ne manquerait plus que Charlotte aux fraises se décide à sortir et qu'il prenne sa voiture, dans ce cas-là, il ne me servira à rien que je quitte la maison en pleine nuit. Mais je préfère rester positive et me dire que je parviendrais à mes fins dès ce soir, il sera là, sa voiture aussi et le lendemain matin, je l'entendrai s'égosiller fasse à la gueule qu'aura sa magnifique Ford Mustang. J'en ris déjà d'avance, je m'imagine sa mine déconfite et moi qui le regarde de ma fenêtre en riant diaboliquement.
Alors que le film de toute cette scène se déroule déjà dans ma boîte crânienne, je ne peux m'empêcher de laisser échapper un rire sadique s'évader d'entre mes lèvres.