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Leto55
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Chapitre 4

Il ne reste plus qu’un jour avant que je parte en direction de Mexico pour la première manche de la saison. J’ai passé les derniers jours à profiter du calme et du réconfort que ma famille me procure. Ça m’a fait énormément de bien de m’éloigner de la pression constante des circuits, des pilotes, et surtout, de ces regards sceptiques qui pèsent sur moi au travail.

Ici, tout semble plus simple, plus authentique.

Ce matin, je me suis réveillée requinquée, mais aussi avec le cœur lourd de devoir à nouveau quitter ma famille. Laura est au travail et les enfants sont à l’école, seul Sebastian demeure à la maison.

Je sirote mon café en silence, assise sur le tabouret de l’îlot de la cuisine, observant à travers la fenêtre les arbres qui bordent la maison de mon frère. Le calme de la forêt m’apaise et je me sens presque prête à affronter à nouveau le travail. Mais pour l’instant, je savoure ces derniers moments de tranquillité.

La sonnette de la porte d’entrée retentit. Je tourne la tête en direction du hall, légèrement surprise. Aucune visite n’est prévue aujourd’hui. Sebastian, qui vient de descendre l’escalier menant à l’étage, ouvre la porte.

Une voix familière fait écho dans le hall, parvenant jusqu’à la cuisine.

— Hé, Seb !

J’entends un bruissement de vêtements. Comme si Sebastian avait pris l’inconnu dans ses bras.

— Lina ! C’est pour toi ! crie Seb.

Intriguée, je me lève du tabouret et je traverse la pièce. Lorsque j’arrive dans l’entrée, mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Noah Meyer se tient debout sur le seuil de la porte, un large sourire aux lèvres.

— Noah !

Nous ne nous sommes pas vus depuis un moment, nos projets professionnels nous tenant chacun bien occupés. Pourtant, malgré la distance et le temps, Noah reste l’un de mes amis les plus proches. Nous avons grandi ensemble, entourés par le monde du sport automobile, partageant de nombreux souvenirs d’enfance.

— Salut Lina, répond Noah en enlevant son manteau plein de neige avant de me prendre dans ses bras avec affection fraternelle.

— Ça fait un bail. Comment tu vas ?

Je me détache légèrement de ses bras.

— Je vais bien mieux depuis que je suis ici. Qu’est-ce que tu fais ici ? Pas que ça me déplaise, évidemment…

Noah ricane.

— Je savais que tu étais chez Seb, alors je me suis dit que j’allais faire un détour par ici pour te voir.

Sebastian, toujours à côté de la porte, observe la scène avec un sourire tendre aux lèvres.

— Vous avez toute la journée devant vous, je vous laisse tranquille, dit-il en mettant son manteau et en prenant ses clés de voiture.

Lorsque la porte d’entrée se ferme derrière Seb, nous allons nous installer dans le salon auprès de la cheminée, comme nous avions l’habitude de faire dans le chalet de son père, Ulrich. Pendant un instant, c’était comme si rien n’avait changé depuis notre enfance.

— Alors, raconte-moi, comment se passe ton nouveau job ?

— Honnêtement, c’est plus dur que je ne l’imaginais. C’est pas seulement la voiture, c’est aussi les gens, je soupire. Tu sais mieux que moi comment ça se passe quand un membre de ta famille a été célèbre dans ce domaine…

— Ouais, complètement.

Noah passe une main dans ses cheveux en soufflant. Il voit très bien de quoi je parle.

— Je dois constamment prouver que je suis à ma place… Luca, l’un des pilotes, a encore l’air de douter de mon engagement dans ce travail, et puis il y a Hayden Heikkilä qui…

Je fais une pause, réalisant que j’en avais peut-être dit un peu trop. Mais Noah hoche la tête, m’encourageant à continuer. Il me connaît bien, et il sait que j’ai besoin de parler. Mais avant que je puisse ouvrir la bouche à nouveau, il me coupe.

— Attends… Heikkilä ? demande-t-il, les sourcils froncés. Le pilote finlandais ? Je l’ai croisé quelques fois. Un gars assez compétitif. Il te cause des soucis ?

Une chaleur familière s’étend dans ma poitrine en le voyant autant attentionné.

— Il est… agaçant, et un peu trop insistant. Il essaie de me charmer avec ses belles paroles, mais je ne me laisse pas avoir.

Du moins, j’essaye…

— C’est juste… compliqué de le gérer en plus de tout le reste.

Je fixe un point au loin, perdue dans mes pensées.

Noah reste silencieux un moment avant de poser une main sur mon épaule.

— Je sais que c’est difficile, Lina, mais tu es forte. Tu as toujours été capable de gérer ce genre de trucs. Ne laisse personne te faire douter de toi. Et si Heikkilä devient trop lourd, je peux toujours “m’occuper de lui”, tu sais.

Noah me fait un clin d’œil et je ris, touchée par la bienveillance de mon ami.

— Je vais m’en sortir, mais merci.

Nous avons passé le reste de la journée à discuter de tout et de rien, principalement de nos carrières respectives, de nos souvenirs d’enfance, … C’était exactement ce dont j’avais besoin : un moment avec mon meilleur ami, mon frère, mon jumeau… Un rappel que j’aurai toujours des amis sur qui je peux compter.

À la fin de la journée, Noah se lève pour partir.

— On se revoit bientôt, d’accord ? dit-il en me prenant dans ses bras une dernière fois.

— Promis ! dis-je en me sentant plus légère.

Et alors que je regardais Noah s’éloigner dans la neige, j’ai pris conscience que je n’étais pas seule. Et parfois, c’est tout ce dont j’ai besoin pour continuer à avancer.

🦋🦋🦋

C’est avec l’esprit reposé que je mets les pieds dans le paddock pour la première fois depuis ma semaine chez Sebastian.

L’horloge murale indique 23h30. Le garage est éclairé par des néons froids, donnant une ambiance presque irréelle. Je suis penchée sur la voiture de Luca, les mains pleines de graisses alors que je vérifie les dernières modifications qu’on a apportées. Le silence est seulement perturbé par le cliquetis des outils qui passent de ma main au sol, quand soudain, j’entends des pas derrière moi.

— Toujours là ? Il est presque minuit…

La voix de Luca résonne dans le garage vide.

— Ouais, j’ai quelques réglages à finir. Ça m’a perturbé toute l’après-midi… Je voulais m’assurer que tout soit parfait pour les séances d’essai, dis-je sans lever les yeux.

— Tu sais, t’as pas besoin de pousser autant, surtout à cette heure-là. C’est déjà impressionnant ce que tu as fait avec la voiture. Prends une pause, t’as travaillé comme une folle toute la journée.

Je m’arrête, presque assommée par son élan de gentillesse. Il utilise une voix douce que je n’ai jamais entendue de sa part.

— Je sais, je sais… soupiré-je. Mais tu me connais maintenant. Quand je suis lancée, c’est difficile de m’arrêter. Et puis, tu m’as confié ta voiture. Je ne peux pas me permettre de bâcler quoi que ce soit. Chaque détail compte.

Luca sourit, amusé.

— Ouais, mais je tiens aussi à ce que mon ingénieure soit en forme, pas juste ma voiture. Si tu t’épuises, tu ne seras pas efficace non plus.

— T’inquiète, je suis habituée à ces longues nuits. J’ai souvent vu Sebastian bosser des heures sur les moindres ajustements de son kart. On est tous un peu obsédés par la perfection dans cette famille.

— Ouais, ça, je l’ai bien compris.

Il soupire et passe une main dans ses cheveux avant de détourner le regard.

— Mais tu fais déjà plus que ce que j’aurais pu espérer. La voiture se comporte beaucoup mieux depuis que tu as pris les choses en main. Tu m’as permis de retrouver confiance sur la piste.

Je le regarde, bouche bée. On dirait que ça lui arrache la bouche de dire ces mots, mais je sens qu’il est sincère.

Je reprends contenance et je m’essuie les mains sur un chiffon.

— C’est gentil de dire ça. Mais honnêtement, c’est un travail d’équipe. Je ne fais que mon boulot, et tu es le pilote qui exploite le potentiel de la voiture. Si on gagne, c’est ensemble.

— C’est vrai. Mais je sais que tu prends ça très personnellement. Je t’ai vue stresser à propos de la voiture plus que moi parfois. Tu te donnes à fond, et ça se voit.

— La Formule E, c’est un tout autre défi. Les données, l’efficacité énergétique, la gestion des batteries… Tout ça, c’est complexe, et je veux m’assurer que tu as les meilleures chances possibles sur la piste. J’aime comprendre chaque détail par moi-même. Quand je bosse sur la voiture, je veux savoir que chaque pièce, chaque ajustement, a un sens et est optimisé au maximum. C’est une façon pour moi de me sentir connectée avec la voiture.

— Tu es définitivement aussi obsédée que ton frère, dit Luca en riant.

Je lui lance mon chiffon gras sur la tête, qu’il retire avec un regard de dégoût.

— Si tu veux être utile, va me chercher un café pour que je puisse finir ça rapidement.

Luca croise les bras sur son torse avant de rétorquer :

— Certainement pas à cette heure-là ! Tu vas pas dormir de la nuit après !

Je roule des yeux.

— Je t’apporte un chocolat chaud, ok ?

— Bien.

Il revient rapidement avec deux gobelets de chocolat chaud.

— Merci, ça va me faire du bien de prendre une pause. Après tout, la dernière série de tests sur la batterie est terminée. Je vais juste m’assurer que les simulations correspondent aux prévisions… et après, je vais dormir, promis.

— Mouais, je te connais. Tu vas encore trouver quelque chose à ajuster, dit-il en rigolant avant de prendre une gorgée de son chocolat chaud.

Je finis par me remettre rapidement au travail. Dès que tout est terminé, je me lève pour me dégourdir les jambes en bâillant. Luca rit.

— Fatiguée ?

— Oui, c’est bon, la fatigue me rattrape.

Luca se redresse et récupère son manteau, ainsi que le mien.

— Allez, je te ramène à l’hôtel.

— Quoi ?

Luca roule des yeux.

— Je sais que t’as pas ta voiture à Mexico et je sais que tu comptais rentrer à pied, petite maligne. Alors laisse-moi te raccompagner, de toute façon, je loge dans le même hôtel que toi.

La fatigue est si intense que je ne combats pas. Il m’entraîne rapidement vers sa voiture avant d’ouvrir la portière passager. Il referme derrière moi pour éviter que le froid s’engouffre dans l’habitacle.

Luca conduit en silence, les yeux fixés sur la route, tandis que je somnole quasiment à côté de lui.

Il tourne dans le parking de l’hôtel et se gare avant de couper le moteur. J’ouvre les yeux, lui lançant un regard surpris lorsque je vois un air crispé sur son visage.

Nous entrons en silence dans l’hôtel, puis on s’engouffre dans l’ascenseur. J’appuie sur mon numéro d’étage, mais Luca ne bouge pas pour appuyer sur son propre numéro d’étage.

— Tu sais, tu n’es pas obligé de m’accompagner jusqu’à ma chambre.

— Je sais, mais fatiguée comme tu es, tu pourrais t’effondrer à tout moment, dit-il tandis que je roule des yeux.

Lorsque nous arrivons devant ma porte, je n’arrive pas à m’empêcher de lui demander ce qui ne va pas.

— Euh… Est-ce que tu as vu la vidéo qui tourne ? dit-il en grattant sa nuque.

— La vidéo ? Quelle vidéo ?

— La vidéo de toi qui fait du karting avec Sebastian…

J’ouvre grand les yeux. Je me doutais que nous allions être filmés, mais pas que nous devenions viraux sur les réseaux sociaux.

— C’est rien, juste mon frère et moi en train de s’amuser.

— Non Lina, sérieusement, c’était incroyable. Tu as un vrai talent. Pas juste en ingénierie, mais sur la piste !

— Luca, c’était juste une course de karting entre mon frère et moi, rien de fou.

— Je t’ai vue dans cette vidéo, Lina. Ce n’était pas juste une simple course amicale. Tu as du talent, c’est indéniable. Le contrôle, la précision… Tu as vraiment l’aura d’une pilote.

— Ça fait des années que je fais du karting pour m’amuser, mais je n’ai jamais pensé à en faire une carrière.

Mensonge…

— Sebastian est le champion de la famille, pas moi.

Luca me regarde avec un air très sérieux.

— Et si je te disais que tu as autant de potentiel que ton frère ? Et avant que tu ne dises quoi que ce soit, je ne suis pas en train de te flatter, Lina. Je reconnais le talent quand je le vois, et toi, tu as quelque chose de spécial… Je… J’aimerais que tu fasses un essai en Formule 4

Je le regarde, complètement choquée.

— Tu plaisantes, là, non ? Moi, en Formule 4 ? C’est un tout autre monde, Luca. Le karting et la F4, c’est absolument pas comparable !

— Écoute, je ne dis pas que c’est facile. Mais tout ce que je dis, c’est que tu devrais au moins essayer. Un test, juste pour voir. J’ai déjà parlé à quelques contacts, et je peux t’arranger un essai en Formule 4. Pas de pression, juste toi et une monoplace sur une piste. Je veux te voir en action dans un environnement plus exigeant.

— Attends, tu as déjà parlé à des gens ? Tu es sérieux, là ? Je n’ai même pas dit que j’étais intéressée !

Soudain, je revois tous ces moments dans la journée où je l’ai trouvé étrange.

— Tu as essayé de m’en parler toute la journée ?

— Oui, Luca acquiesce. Je veux voir ce que tu as dans le ventre. Tu pourrais être surprenante, répond Luca avec un sourire malicieux.

— Tu sais, Sebastian m’a toujours dit que j’avais un bon instinct de pilote. Mais c’était toujours pour rigoler… Je ne me suis jamais prise au sérieux comme lui. Et puis, c’est son monde, pas le mien.

— Pourquoi ça devrait être uniquement son monde ? Qui a dit qu’il n’y avait pas de place pour deux Hermann dans le sport automobile ? Ton frère a peut-être ouvert la voie, mais ça ne veut pas dire que tu dois rester derrière.

Il voit mon regard sceptique.

— Je te parle avec honnêteté. Le monde de la course a besoin de plus de pilotes comme toi. Des gens qui aiment ça naturellement, sans chercher la gloire ou la reconnaissance. Et en plus, tu as ce petit côté “mystérieux”. Personne ne s’attend à te voir sur une grille de départ, et c’est exactement ce qui rendrait ton arrivée encore plus impactante.

— C’est vrai que ça serait drôle de voir la tête de certains quand ils découvriraient qu’une autre Hermann débarque dans le paddock en tant que pilote… Mais est-ce que je suis vraiment prête à tout ça ?

Luca pose deux mains fermes sur mes épaules.

— Un test, Lina… un test, ça ne t’engage à rien. Ça te permettra juste de sentir ce que ça fait d’être au volant d’une Formule 4. Et crois-moi, après ça, tu sauras si c’est fait pour toi ou non. Mais si tu as même un tout petit doute, si une part de toi a toujours rêvé de ça, alors tu devrais essayer. Juste pour toi.

Je réfléchis longuement.

— Tu me laisses le temps d’y réfléchir ?

Il me regarde avec des yeux doux.

— Bien sûr.

Il tapote ma tête avec sa main.

— Mais ne prends pas trop de temps, mini Hermann, dit-il en s’éloignant en direction de l’ascenseur.

Je rentre dans ma chambre, mon cœur battant à tout rompre.

Putain, qu’est-ce qu’il vient de se passer ?

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