Sophia
Nous remontons vers le bloc 5 dans un silence lourd, je suis plus qu’énerver, ce Leighton commence à me pomper l’air, avec ses menaces à deux balles, s’il croit que j’ai peur, c'est qu’il est vraiment débile, j’aurai dû continuer mes recherches dans un bar miteux plutôt que de m’embourber dans un gang. Franchement, je suis la plus grande des idiotes, je n’aurais pas dû écouter ce Parker, mais je me suis laissée avoir par l’argent, je sais que mon parrain en a réellement besoin. Puis dans tous les cas, c'est trop tard, on ne sort pas d’un gang, sauf si on se fait tuer et ça ce n’est pas une option, je ne peux pas mourir, je ne peux pas laisser mon parrain, je ne peux pas le faire souffrir.
Quand nous arrivons dans la maison, Eddy me salue, je lui rends son signe de la main puis toujours accompagné de Ellis et Lana, nous montons dans ce qui est maintenant ma chambre, je ferme la porte,
— Votre chef est complètement taré de vouloir me laisser sur le terrain.
— Malheureusement, on ne peut pas le faire changer d’avis, puis avec un peu d’entrainement, je suis sûr qu’on peut arriver à de bons résultats.
— Tu es le seul sûr de ça Ellis.
— Non, moi aussi, j'y crois.
— Vous êtes bien gentil, mais moi je ne vous connais pas pourquoi je voudrais mourir pour vous ?
Lana et Ellis échange un regard que je ne serai déchiffrée, mi-blessé, mi en colère, mais ils doivent comprendre mon point de vue, je ne suis pas une BloodDroop. Je ne peux pas mourir, qui annoncera à mon parrain que je suis morte, qui lui dira la vérité ? Je n’ai pas peur d’affronter la mort, j’ai peur d’abandonner celui qui m’a sauvé.
— J’ai accepté parce que j’ai besoin d’argent, parce que j’ai quelqu’un a aidé. Je sais que pour vous, le gang, c'est votre famille, mais pas pour moi. Ma famille, elle n’est pas ici.
— Je comprends Sophia. Mais tu vas devoir d’y habitué, car c’est ta nouvelle vie maintenant.
— Fantastico, che idiota. (Super quelle idiote).
Cette phrase m’est complètement destinée, je me sens comme une idiote. Lana me regarde pour que je traduise, mais je me contente de m’assoir.
— Tu pourras compter sur nous.
Je regarde Lana sachant pertinemment qu’elle ment, si elle devait sauver l’un de ses amis, je deviendrai l’idiote qui a cru en elle, Lana me laissera crever la bouche ouverte, car je ne suis pas l’une des leurs.
— Sinon ce soir, il y a une soirée pour les nouvelles recrues, ça va te faire du bien.
— Je n’aime pas trop les fêtes.
— Tu n’as le choix Soph.
Lana me lance un clin d’œil, c’est bien la première fois qu’on m’appelle comme ça. Ils finissent par quitter ma chambre pour me laisser. Je me lève et prend dans mon sac une clope, j’ouvre la fenêtre et l’allume. Je consomme cette cigarette pour soulager mon corps de tout ce stress, faire tous ces tests nous a gâché la matinée, mais je me demande bien ce que me réserve l’après-midi, ce connard de Leighton ne va sûrement pas me lâcher, à moins que notre petite dispute l’ait refroidi. Je reprends une taffe, mes yeux sont posés sur la villa, j’ai vu sur le côté droit de la villa, dont la chambre de Leighton, où hier, j'ai pu voir avec horreur ses ébats. Mais aujourd’hui, il est simplement assis dans son lit, le regard plongé sur son téléphone, je détache mes yeux de sa chambre, dont il ferait mieux de fermer les rideaux. Je rentre à l’intérieur de ma chambre, ma cigarette terminé à la main, je regarde autour de moi à la recherche d’un cendrier ou autre chose pour écraser ma cigarette, mis à part le vide sidéral, causer par le manque a cru de meuble dans cette chambre, il n’a rien pour ma cigarette qui commence a embaumé la chambre alors, je descends à la recherche d’un verre ou un truc du genre dans lequel je pourrai mettre mes clopes.
Lorsque j’arrive dans le salon, quelques hommes sont là, devant la télévision, il regarde des courses de voiture. Mon père en regardait chaque soir… Je prends dans un placard un verre et je dépose ma cigarette,
— D’habitude, on fume à l’extérieur.
— C’est pour ça que lorsque je suis arrivée les murs étaient imprégnés de tabac ?
— Ok seulement certains d’entre nous. Tu voudrais aller faire un tour ? on est off aujourd’hui.
Je regarde Eddy, c’est le seul qui m’adresse la parole dans cette maison et c’est le seul qui me semble sain d’esprit.
— Je crois que j’en ai besoin, je vais chercher mon téléphone et mon paquet.
Il hoche la tête, je me dépêche de tout récupérer et le rejoins sous le porche. Quand nous passons devant la villa et que je lève les yeux, je vois Leighton debout face à sa fenêtre nous regardant partir.
Eddy m’emmène je ne sais où, nous empruntons des petits chemins que je ne connais pas, puis rapidement, je reconnais le centre-ville et me demande comment c’est possible de s’y rendre aussi vite. Sûrement des passages qu’ils ont créés pour aller vendre plus hâtivement. Nous arrivons sur la plage bondée de touriste,
— J’espère que tu aimes avoir les pieds dans le sable.
— Je suis d’ici, tu sais.
— Pourtant la rumeur dit que tu es Italienne.
— Comme tu le dis, c'est une rumeur, j’ai habité huit ans là-bas, mais rien d’autre.
— Parle-moi italien, j’aime cette langue.
— Le rose sono rosse come il sangue, la mia anima nera grida disperata, ho bisogno di aiuto, ma sono soffocata dal dolore. (Les roses sont rouges comme le sang, mon âme noire hurle désespérément, j’ai besoin d’aide, mais je suis étouffée par la douleur).
Il me regarde, interrogateur, crier sa souffrance dans une langue que les autres ne connaissent pas, est devenue mon seul moyen de quelques fois soulagé mon cœur, car je suis incapable de parler de mon passé.
— Un simple poème.
— Il a l’air beau.
— Dans un sens oui.
— Parle-moi de l’Italie.
C’est la première fois que je vois quelqu’un s’intéresser autant à un pays, je commence à lui conter à quoi ressemble l’Italie et il semble subjugué. Et nous passons la journée à parler jusqu'à qu’il soit l’heure de rentrée, pour la fête.
— C’était sympa.
— Oui.
— Un jour, tu me parleras de tes tatouages ?
— Si un jour, j'en ressens le courage.
Mes tatouages sont la grande préoccupation de toutes les personnes qui me croisent, certains pensent que je suis une gothique, d’autre que je suis une femme qui veut se démarquer et certains comprennent qu’ils cachent un lourd passé. Mes tatouages m’ont aidé, certains n’ont pas de signification comme le mot Angel, une lettre sur chaque phalange. Puis d’autre représente l’espoir, la perte, la vengeance ou le nouveau départ, il parle de moi, de mes émotions, de ma douleur.
Eddy sourit simplement et nous empruntons une nouvelle fois les passages secrets. Le soleil commence à se coucher quand nous arrivons devant la villa, nous rejoignons le Bloc 5 où je monte rapidement à l’étage pour me préparer. Je prends dans mon sac un jean noir et un col roulé ainsi que de nouveau sous-vêtement, je rejoins la salle de bain en face de ma chambre, je rentre à l’intérieur, ferme à clé et vérifie que la porte soit bien fermée, je n’ai aucune confiance en ces hommes. Une fois que je suis certaine d’avoir bien tout fermer, je me déshabille et rentre dans la douche, l’eau chaude rentre en contacte avec ma peau, je laisse les tensions de la journée couler dans le siphon de la douche, je me savonne ensuite avec un savon bon marché, puis sort, je m’essuie, enfile mes vêtements et un homme vient toquer à la porte râlant que je suis top longue, j’ouvre la porte,
— Si tu trouves que cinq minutes, c'est long, pose-toi les bonnes questions.
Je rentre dans ma chambre, le laissant marmonner dans sa moustache. Je m’assois dans mon lit, enfile une paire de chaussette et ma sempiternelle paire de bottes militaires qui commence à faire leur temps, mes chaussures aux pieds, on toque à ma porte,
— Sophia, c'est Eddy, tu es prête ?
— Oui, j'arrive.
Dans la poche arrière de mon jean, je place mes cigarettes et mon téléphone, néanmoins avant de le ranger, je jette un coup d’œil à celui-ci, aucune notification.
J’ouvre la porte, Eddy est sur le palier, une chemise noirs sur le dos, ses cheveux longs accrochés dans un chignon bas.
— Je vais finir par croire que tu me mates.
— Je ne mate pas les hommes, vous êtes inintéressant.
Eddy écarquille les yeux, puis je passe devant lui pour rejoindre la villa, j’aimerais éviter de faire une entrée remarquée en étant en retard, Leighton ne le supporterait pas et je n’ai vraiment pas envie de me prendre la tête avec lui ce soir. Quand nous arrivons, Lana et Tess courent vers moi des verres à la main,
— Tu es toujours magnifique ?
— Oui, ce sont les tatouages qui font cet effet.
Les filles rigolent et je prends le verre que me tend Tess, elles commencent à me poser un tas de question sur ma vie, je souris, je crois que c’est la première fois que des femmes m’adressent la parole pour essayer d’être ami avec moi, d’habitude, elles me mettent dans la case, fille bizarre. Finalement, je crois que dans ce gang, il n’y a que Leighton qui est un gros connard.
Pendant environ deux heures, nous parlons toutes les trois et j’ai un sentiment étrange dans la poitrine, comme si je pouvais ressentir un peu de bonheur. Les filles ne cessent de me poser des questions, respectant certaines limites lorsqu’elles voient que je suis touché, surtout celle sur mon passé, alors elles se contentent de me poser des questions sur l’Italie, je leur parle de mes études d’art et je me surprends à leur raconter les conneries que j’ai bien pu faire là-bas et j’en ai beaucoup fait. Volée dans des galeries d’art, exposée illégalement mes peintures pour me faire connaitre, prendre de la drogue, me saouler à n’en plus en pouvoir, en Italie, j'étais une tornade, une tornade de souffrance qui s’autodétruisait pour essayer d’aller mieux.
— Je vais fumer, je reviens.
Les filles opinèrent du chef, je rejoins l’extérieur, sortant une clope et mon briquet. À l’entrée, se trouve Leighton, je l’ignore, allumant ma clope, il me regarde, un air mauvais dans ses yeux bleu foncé, une cigarette coincé entre ses lèvres roses et charnue. Des mèches ondulées lui tombent sur le front, son corps musclé enfermé dans un costume noir. Lui aussi la vie ne l’a pas épargné, il a cette ombre sur le visage, celle de la souffrance.
— Tu les as volées à qui ses clopes ? Peut-être à Eddy, ton nouvel ami.
Je hausse les sourcils sans lui répondre, je n’ai pas envie de rentrée dans son jeu. Il continue ses insinuations sur le fait que je suis une voleuse ce qui me fait marrer, il est si con.
Je sentis sa main dans ma nuque, ses doigts long et fin l’empoignant avec force pour m’obliger à le regarder,
— Regarde-moi quand je te parle, Papillon, dit-il en regardant mon cou où trône un énorme papillon.
— Tu comptes encore me mettre un couteau sous la gorge ?
— Non, la prochaine fois, je te tue avec. Je t’ai posée une question, d’où viennent ses clopes ?
— À ton avis Lee !
Sa main gauche tient toujours fermement ma nuque pendant que sa main droite longe mon corps jusqu’à attraper le paquet dans ma poche arrière, il fait tourner le paquet entre ses doigts devant mes yeux,
— Arriveras-tu à survivre sans papillon ?
Il rangea le paquet dans la poche intérieur de son costume, ses yeux s’imbriquent une dernière fois dans les miens, puis il lâcha ma nuque, la chaleur de sa peau fine disparue laissant simplement le froid de la nuit, il lance un dernier sourire narquois en ma direction puis part à l’intérieur, je me tourne vers l’horizon, mes mains agrippent la rambarde, et je hurle à pleins poumons. Je le hais, chacune de mes entrailles le hais.