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Chapitre 2 : Flashback

Villaverde Del Río, 2009 

~ Plaza de Andalucia ~ 

Irina

Je sors du taxi qui s’arrĂȘte en face de la place Andalucia, ici, dans ce petit village, Villaverde Del Rio. Une commune de la Vega Del Guadalquivir. Villaverde Del RĂ­o est un charmant village, situĂ© dans la province de SĂ©ville Ă  seulement 30 kilomĂštres. Elle se distingue par sa riche histoire, son architecture andalouse traditionnelle et son atmosphĂšre trĂšs accueillante. 

Ce village est connu pour ses cortĂšges, notamment avec des Rois mages, et son pĂšlerinage, en plus des fĂȘtes organisĂ©es. Quand j’étais petite, j’aimais beaucoup y participer, regarder le dĂ©filĂ© des Rois mages et surtout quand ils offraient de nombreux cadeaux Ă  tous les enfants qui Ă©taient prĂ©sents.

C'était amusant et trÚs divertissant.

Villaverde Del RĂ­o a de belles rues avec des maisons blanches et des vĂ©gĂ©tations abondantes Ă  offrir aux touristes. J’aime ce village, il est petit, mais il est trĂšs sympa. Et puis tous les Villaverderos sont agrĂ©ables. Ce village est toute ma vie, j’ai grandi ici et tous les coins de rues me rappellent mon enfance. 

Une enfance plutĂŽt heureuse jusqu’à le dĂ©cĂšs de ma maman


À chaque fois que je pense à elle, les larmes me montent aux yeux. 

Ma mĂšre est morte. Clara Guerrero Gonzalez est morte dans un accident de voiture et elle n’était pas seule, Antonio Rodriguez Ă©tait dans cette voiture avec elle. Le jour oĂč deux policiers ont sonnĂ© Ă  la porte et qu’ils sont venus nous l’annoncer, je n'en croyais pas mes oreilles.

~ Flashback ~

Treize ans plus tît


— Bonsoir, madame, Monsieur Gonzalez est ici ?

— Bonsoir, oui, que puis-je faire pour vous ? demande Dolorùs, inquiùte.

 — Nous sommes lĂ  pour vous informer de l’accident qui s’est produit sur la voie express A-4/E-05 et qui traverse le parc naturel de Despeñaperros Ă  l’axe principal de l’Andalousie.

— Un accident ? De qui s’agit-il
 ? s’enquit-elle les sourcils froncĂ©s ?

— D’Antonio Rodriguez et Clara Gonzalez. 

— Mais
 Vous ĂȘtes sĂ»r ? Il s’agit sĂ»rement d’une erreur, messieurs. 

— Bonsoir. Que se passe-t-il ici ? demande mon pĂšre en arrivant et se tourne vers les policiers. Il s’est passĂ© quelque chose ?

— Ces messieurs viennent de m’annoncer qu’il y aurait eu un accident. Et que
 Madame est morte, ainsi que votre ami, Monsieur Antonio Rodriguez, rĂ©pond-elle, lentement et choquĂ©e. 

Mon pÚre fronce les sourcils avec incompréhension et il se tourne vers les deux hommes.

— Je ne comprends pas. OĂč est ma femme ? Dites-moi oĂč est ma femme ?

— Votre femme a eu un trĂšs grave accident, lui rĂ©pond le second policier et il Ă©tait trop tard lorsque nous sommes arrivĂ©s sur les lieux. Ils sont morts tous les deux.

— Ils ?

— Oui, elle Ă©tait avec Antonio Rodriguez au moment du drame, monsieur. 

Maman est morte
 ? murmuré-je tout bas.

— Non, ce n’est pas impossible. Que faisait-il au mĂȘme endroit ? Ça n’a pas de sens.

— Je ne sais pas. C’est tout ce que nous savons, Monsieur Gonzalez.

— Non, je ne vous crois pas. Ma femme ne peut pas ĂȘtre morte. Laissez-moi, passĂ©. Il faut que j’y aille voir.

Il s’empresse de sortir, mais l’un des policiers lui barre le chemin.

— Vous ne pouvez pas vous y rendre, monsieur Gonzalez, rĂ©plique le deuxiĂšme policier, la zone est sĂ©curisĂ©e. Il est interdit d’y accĂ©der.

— Ça m’est complĂštement Ă©gal, rĂ©torque-t-il, furieux. Je dois voir l’accident de mes propres yeux !

— Calmez-vous, nous vous y emmenons. Allons-y.

Mon pĂšre sort de la maison en suivant les policiers.

— Dolorùs, dis-je la voix presque tremblante en me tournant vers elle. Ce n’est pas vrai, hein ? Ma maman n’est pas morte ? Elle n’est pas morte ?

— Calme-toi, ma puce. Bien sĂ»r qu’elle ne peut pas ĂȘtre morte. Ta mĂšre va revenir. Elle n’est pas morte, dit-elle en essayant de me rassurer le mieux que possible. 

— Je veux ma maman
 

Elle me prend dans ses bras tout en me caressant les cheveux. 

~ Fin du flashback ~

Ce jour-lĂ , ma vie s’est bouleversĂ©e. DolorĂšs a tout fait pour me rassurer, me dire que ma maman n’était pas morte et qu’elle Ă©tait toujours en vie, et je l’ai cru comme elle l’a cru. Je me disais qu’elle allait revenir et que tout ceci Ă©tait un Ă©norme mensonge. DolorĂšs a beau m’avoir convaincu et se convaincre elle-mĂȘme, malheureusement, c’était vrai, ma mĂšre Ă©tait bien morte.

~ Flashback ~

Treize ans plus tît


Mon pĂšre rentre quelques heures plus tard Ă  la maison, totalement anĂ©anti. Je m'approche de lui pour lui demander oĂč est ma maman. 

— Papa, oĂč est maman
 ? Dis-moi que maman n’est pas morte, s’il te plaĂźt
 ?

Je pleure, mes larmes ne cessent de couler sur mes joues.

— Juan, dis-nous ce qui se passe ? OĂč est ma sƓur ? demande ma tante, complĂštement dĂ©vastĂ©e, derriĂšre moi

Il ne nous rĂ©pond pas. Il se dirige vers son bureau et s’y enferme sans nous calculer. Ma tante hurle aprĂšs lui en s’approchant de la porte tout en lui demande oĂč est ma mĂšre. Elle pleure. Je m’approche d’elle et lui demande :  

— Tata
 Ma mùre n’est pas morte n’est-ce pas
 ? Elle n’est pas morte, hein ? 

Elle se tourne vers moi et me dévisage du regard, les yeux larmoyants.

— Elle est morte ! Ta mùre est morte, Irina ! Et tout ça, c’est ta faute ! hurle-t-elle.

— Non, ce n’est pas vrai, tu mens ! Tu es une menteuse ! Maman n’est pas morte ! rĂ©pliquĂ©-je en pleurant.

— Si ! C’est la vĂ©ritĂ© ! J’ai perdu ta mĂšre Ă  cause de toi ! Maintenant, laisse-moi tranquille et va pleurer ailleurs !

Je l’observe en pleurant, la gorge nouĂ©e, complĂštement accablĂ©e, pendant qu’elle s’éloigne de moi.

— Non
 Ma maman n’est pas morte par ma faute
 Je refuse


Je me retourne vers la porte du bureau et frappe de toutes les forces que je peux. 

— Papa
 ! Papa
 ! Dis-moi que maman n’est pas morte s’il te plaüt
 ? S’il te plaüt
 S’il te plaüt
 

À bout de force, je reste silencieux, le front contre la porte. Ma voix et mon corps ne me rĂ©pondent plus. Seules, mes larmes se manifestent, coulant avec abondance. 

~ Fin du flashback ~

Je m’en rappelle comme si c’était hier
 Et Ă  ce moment-lĂ , j’ai compris sans que mon pĂšre ne me rĂ©ponde. J’ai compris que ma mĂšre Ă©tait morte. Qu’elle n’était plus lĂ . Qu’elle Ă©tait partie. DĂ©finitivement. Ma vie Ă  complĂštement Ă©tĂ© dĂ©truite. Je ne buvais plus, je ne mangeais plus. Je voulais seulement revoir ma mĂšre. 

Mon pĂšre, c’était pire. Il s'est enfermĂ© dans son bureau pendant des mois entiers. Il ne parlait Ă  personne. Il ne voulait ni boire ni manger. Ma tante a tentĂ© tous les moyens possibles pour qu’il aille mieux, mais mĂȘme avec elle, il n’a pas d’effort. 

Treize ans ont passĂ© et mon pĂšre ne m’a pas dit un seul mot sur ce drame. Il s’est dĂ©barrassĂ© de tous les souvenirs qu’il avait avec ma mĂšre. Il ne voulait plus entendre parler d’elle. Car il pense qu’elle s’est enfuie avec Antonio Rodriguez, son « supposĂ© amant ». 

Mais le pire reste Ă  venir.

Mon pÚre a fini par épouser ma tante. 

Quelques jours aprĂšs la mort de ma mĂšre, il l’a Ă©pousĂ©e. Je ne sais pas ce qui lui est passĂ© par la tĂȘte de faire ça, mais je ne le croyais pas capable de le faire. Pourtant, je lui ai suppliĂ© de ne pas se marier avec elle et il l’a fait quand mĂȘme.

À mĂȘme pas quelques jours de l'enterrement de ma mĂšre.

Ça m’a terriblement affectĂ©. Mais je n’étais qu’une enfant et je ne pouvais pas aller Ă  l’encontre qu’il voulait Ă©pouser. 

Ça m’a tellement affectĂ© que j’ai fui de la maison pour m’éloigner d’eux, mais ils ont fini par vite me retrouver. Je n’avais pas le choix que de revenir chez moi.

Bien que mon pĂšre se soit mariĂ© avec ma tante, ça n’a rien changĂ©. Car, durant ces treize annĂ©es, il n'a pas arrĂȘtĂ© d’ĂȘtre triste et de boire. Ma tante ne l’a pas aidĂ©e bien qu’elle soit devenue sa femme. Ils ne vivent pas un mariage heureux. La plupart, c’est que dispute sur dispute, il se hurle dessus constamment. J’entends parfois ma tante lui reprocher de boire beaucoup. J’ai beau m’y mettre et l’aider, mon pĂšre ne nous Ă©coute pas. Il se contente de nous envoyer promener. 

Aujourd’hui, mon pĂšre continue de croire que ma mĂšre l’a trompĂ© avec cet homme, Antonio Rodriguez. Pour couronner le tout, la moitiĂ© des gens du village colportent des sales rumeurs sur elle.

« Une femme infidÚle »

« Une Marie-couche-toi-là »

« Une aguicheuse »

« Une mauvaise femme »

« Clara Gonzalez n’a Ă©tĂ© qu’une sale traĂźnĂ©e. »

Plein d’autres ragots dans ce genre et qui me glacent complùtement le sang. 

Moi, je n’ai jamais cru Ă  tout ça. J’ai toujours cru que ma mĂšre n’avait jamais trompĂ© mon pĂšre. Ma mĂšre aimait mon pĂšre et j’en suis certaine. 

Petite, j’ai voulu en savoir plus sur ce qui s’est passĂ©. Donc, j’en ai parlĂ© Ă  DolorĂšs qui m’a rĂ©pondu : « Ta mĂšre n’a jamais trompĂ© ton pĂšre, mon poussin, ce ne sont que des rumeurs, ne crois pas Ă  ses sottises. » 

MalgrĂ© ce qu’elle m’a dit, ça me rend toujours autant folle, furieuse et impuissante que son nom soit sali de cette façon. À chaque fois que je les entends mal parler d’elle, je n’hĂ©site pas une seule seconde Ă  les remettre Ă  leur place, et mĂȘme quand il s’agit de moi. 

Oui.

Moi aussi, ils m’insultent, ils m’humilient et ils me blessent. Mais je ne me laisse pas faire. MĂȘme devant les hommes. J’envoie paĂźtre tous les hommes qui s’approchent de moi qui ne cherche qu’à m’utiliser pour leur propre plaisir. 

Les hommes ne m’intĂ©ressent pas et au contraire, je les dĂ©teste pour ce qu’ils veulent de moi. Je les mets tous dans le mĂȘme sac. Des pauvres imbĂ©ciles qui pensent qu'avec quelques mots, nous serons conquises.

Je ne suis pas le genre de femme qui offre son corps pour de l’argent. MĂȘme si tous pensent le contraire. J’ai des valeurs et des principes. Je me respecte et je ne me donnerai pas au premier venu.

Quand j’étais petite, je rĂȘvais des princes charmants et je voulais tomber amoureuse d’un beau prince charmant. En grandissant, mon rĂȘve s’est volatilisĂ©. J’ai vu comment les femmes sont traitĂ©es dans ce village et comment ces salauds les courtisent. 

En voyant mes parents si heureux et amoureux, je voulais aussi connaßtre un amour aussi beau que le leur. 

J’espĂ©rais trouver mon prince charmant.

HĂ©las, aujourd’hui, c’est une femme qui vous parle. Je suis une jeune femme adulte et mĂ»re. Je veux vivre ma vie, accomplir mes projets et sans avoir affaire aux hommes. 

Je ne veux pas tomber amoureuse, l’amour ça fait trop mal. 

La souffrance m’impacte dĂ©jĂ  au quotidien et je ne veux pas en rajouter.

L’amour n’est qu’un sentiment et l’homme, c’est autre chose.

Vous l’avez sĂ»rement compris.

Mon nom est Irina Gonzalez.

La petite fille si joyeuse est devenue une jeune femme aujourd’hui.

Ma vie n’a pas Ă©tĂ© facile depuis la disparition de ma mĂšre. Mon pĂšre m’a complĂštement dĂ©laissĂ© et me voit comme une Ă©trangĂšre. Ça me peine profondĂ©ment.

Je pleure chaque jour la mort de ma mĂšre, car elle me manque terriblement.

Et pourtant, la vie continue. 

Ma mĂšre, qui Ă©tait peintre, m'a transmis l’art. C’est l’une de mes passions que j’adore, dont l’écriture et la lecture.

Mes peintures sont un succĂšs auprĂšs de certains gens au village qui ne me juge pas et veulent bien acheter mes Ɠuvres. J’ai eu l’idĂ©e de les vendre au dĂ©but quand je voulais aider mon pĂšre pour ses problĂšmes financiers. Les ventes ont Ă©tĂ© un succĂšs malgrĂ© le refus catĂ©gorique de mon pĂšre pour mon aide. J’étais encore un enfant Ă  cette Ă©poque-lĂ . Encore, je ne pouvais pas aller Ă  l'encontre de ce qui ne voulait pas.

J’ai donc continuĂ© Ă  les vendre pour moi et Ă  Ă©conomiser jusqu'Ă  ce que j’aie pu avoir une somme suffisante pour pouvoir me payer l'universitĂ©. J’étudie depuis plus de cinq ans l’art dans une universitĂ© Ă  SĂ©ville. Je suis si heureuse de pouvoir Ă©tudier l’art et de suivre les pas de ma mĂšre. Ma mĂšre serait tellement fiĂšre de moi de lĂ  oĂč elle est.

Aujourd’hui, c’est l’anniversaire de sa mort. Et tous les jours, sans en manquer un, je lui rends visite au cimetiĂšre. Si seulement elle Ă©tait encore lĂ , ma vie serait plus facile.

— HĂ© ma beautĂ© ! 

Alors que je marche tranquillement sur le trottoir en face d’un bar, deux hommes d’une quarantaine d'annĂ©es sont attablĂ©s l’un en face de l’autre. L’un d’entre eux vient de me siffler. Je l’ignore volontairement en roulant des yeux.

— Mais viens t’installer avec nous, on ne mord pas ! s’exclame le second, derriùre moi.

C’est ça, tu ne mords pas, mais tu ne penses qu’à passer du bon temps. ImbĂ©cile !

D’autres hommes se rincent l’Ɠil pendant que je marche, mais je les ignore aussi. Certains passants me dĂ©visagent, que ce soient hommes ou femmes. J’en souris Ă  quelques-uns qui me saluent en retour. J’ai dit que les habitants de Villaverde Del Rio sont agrĂ©ables et ils le sont, mais pas tous, d’autres sont des goujats et d’autres sont sympas.

Tous ces regards sur moi sont dus au fait que je ressemble énormément à ma mÚre. Je suis son portrait craché comme dirait Adriana Rodriguez.

Notre ressemblance est frappante, je l’avoue : une silhouette en V, les cheveux d’un brun chĂątain clair, les yeux marron clair en amande, des lĂšvres joliment dĂ©finies et rosĂ©es, le visage fin et harmonieux.    

Pour tout vous dire, je suis contente de lui ressembler. Ma mĂšre Ă©tait une femme magnifique de son vivant. Tout le monde voyait sa beautĂ© rayonner dans les rues du village. Aujourd’hui, c’est comme si j'Ă©tais un copier-coller d’elle. 

MalgrĂ© tout ce qui peut ĂȘtre racontĂ© sur moi, je ne m’en soucie pas. Ça me passe au-dessus, car je sais ce que je suis. 

Mes forces sont mes valeurs et mes principes. Ils permettent de survivre.           

♡

~ Propiedad Del GonzĂĄlez ~

— Ma petite est rentrĂ©e ! s’exclame-t-elle heureuse de me voir.

— Bonjour, Dolorùs

Cette femme est la prunelle de mes yeux. C’est une femme brave et trĂšs belle Ă  l’intĂ©rieur qu’à l’extĂ©rieur. Elle a des cheveux d’un chĂątain foncĂ©, coupĂ©s au carrĂ©, toujours ramassĂ©s en un chignon haut, qui embellit son teint mat et ses yeux clairs. 

DolorĂšs travaille pour nous en tant que domestique, mais pour moi, elle est plus qu’une domestique. DolorĂšs a toujours su s'occuper de moi, toute mon enfance, comme si j’étais sa propre fille. Elle a Ă©tĂ© encore plus prĂ©sente pour moi lors du dĂ©cĂšs de ma mĂšre. Je la considĂšre comme une deuxiĂšme mĂšre et je ne l'Ă©changerai pour rien au monde. Je lui en serais toujours reconnaissante d’avoir toujours Ă©tĂ© lĂ  pour moi. 

— Comment s'est passĂ© ta matinĂ©e, mon poussin ? me demande-t-elle en souriant.

— Bien. Trùs bien, Dolorùs.

— J’espùre que ce n’est pas trop dur ?

Je souris.

— Bien sĂ»r que non. L'art est ma passion et je ne m’en lasse jamais.

— Oh oui, j’en suis tĂ©moin. Je suis heureuse pour toi et contente que tu suives les pas de ta mĂšre.

— Oui, je lui rĂ©ponds d’une pointe de tristesse, me souvenant encore qu’aujourd’hui, c’est l'anniversaire de sa date de mort.

— Tu es passĂ© au cimetiĂšre ?

— Je vais m’y rendre. Je vais d'abord voir papa. OĂč est-ce qu'il est ?

— Oui, il y travaille depuis ce matin. 

— D’accord. 

— Ne tarde pas trop quand tu iras dĂ©poser les fleurs sur la tombe de ta mĂšre. Tu sais que je n'aime pas que tu traĂźnes autant dehors, ma chĂ©rie.

Elle me dit ça pour les gens qui circulent ses ragots sur moi. Mais elle n’a pas Ă  s’en faire, car ce qu'ils peuvent dire sur moi, m’est complĂštement Ă©gale. Je lui offre un sourire qui se veut rassurant.

— Ne t’inquiĂšte pas pour moi. Je fais un tour au marchĂ© et me rends sur la tombe de ma mĂšre puis je rentre.

— Trùs bien, sourit-elle.

Je lui souris et je me dirige jusqu'au bureau de mon pùre. Je toque puis ouvre la porte. J’entre.

Le bureau est sombre. Il n’y a quasiment pas d’éclairage. Les rideaux sont fermĂ©s. La piĂšce est complĂštement Ă  l'opposĂ© du monde extĂ©rieur. 

Je laisse Ă©chapper un soupir en voyant mon pĂšre assis dans son fauteuil. J’avance tout en l’observant. Ses cheveux chĂątain clair mi-longs sont lĂ©gĂšrement en bataille et son teint normalement bronzĂ© est terne. Ses iris grises lui donnent aujourd’hui un air froid. C’est un homme robuste et solitaire.

Mon regard se porte sur sa bouteille alcoolisée posée sur son bureau.

Ça, c’est du travail


Comme d’habitude, il passe son temps à boire.

— Papa.

— Qu'est-ce que tu fais ici, Irina ? demande-t-il d’un ton froid.

— Je voulais te voir. Je viens de rentrer de l'universitĂ© et je voudrais qu'on discute tous les deux avant que je n’aille au cimetiĂšre sur la tombe de maman.

— Tu n’as qu’à y aller dans ce cas.

— Mais je voudrais qu’on parle. Et puis
 C’est l’anniversaire de sa mort. Tu ne voudrais pas m’accompagner ?

Il relĂšve la tĂȘte pour me regarder.

— Je n’ai pas l’intention de rendre visite à ta mùre, tu as compris ? Sors de mon bureau.

— Papa


Je coupe ma phrase en voyant le regard noir qu’il me lance.

Encore un coup de poignard dans le cƓur


— Sors immĂ©diatement de mon bureau et ne reviens plus me dĂ©ranger, Irina, ordonne-t-il, autoritaire.

Blessée, je me tourne vers la porte et l'ouvre directement lorsque que je tombe sur ma tante juste devant. Je referme la porte derriÚre moi.

— Irina, qu’est-ce que tu essaies de faire ? Tu vois bien que ton pĂšre ne veut pas te voir, laisse-le tranquille, dit-elle, l'air exaspĂ©rĂ©e. 

Ma tante Carolina. 

Elle me voit comme une Ă©trangĂšre, dans cette maison. Elle ne m’aime pas. MĂȘme si elle fait semblant de m’aimer, je sais qu’elle ne me porte pas dans son cƓur. Je me suis toujours demandĂ© pourquoi. Mais j’ai toujours eu la rĂ©ponse. Je ressemble tellement Ă  ma mĂšre qu’elle me rejette. Au fond de moi, j’ai toujours su qu’elle dĂ©testait sa sƓur bien qu’elle le nie.

Je me demande ce que serait-il passĂ© si ma mĂšre Ă©tait encore lĂ . Peut-ĂȘtre qu’elle serait trĂšs loin de cette maison et que je vivrai en paix. Je me souviens qu’elle avait prĂ©vu de voyager, mais elle n’est jamais partie. Quand ma mĂšre est dĂ©cĂ©dĂ©e elle a pris sa place. Elle s'est mariĂ©e avec mon pĂšre puis elle est tombĂ©e enceinte. 

Mais le bĂ©bĂ© n’a pas survĂ©cu.

Par ma faute


Pourtant, je n’ai jamais voulu que ça arrive.

Malheureusement, c’est arrivĂ©. 

~ Flashback ~

Treize ans plus tît


Je suis assise sur le rebord de la piscine qui vient juste d’ĂȘtre vidĂ© sur la dĂ©cision de tata. Elle ne voulait plus de piscine Ă  la maison, car plus personne ne l’utilisait. Je suis triste et je pleure. J’aurais aimĂ© qu’elle ne vide pas la piscine. Je pleure aussi Ă  cause de maman puisque qu’elle n’est plus lĂ  pour me consoler et pour me dire que tout ira bien. Elle est partie. Je ne la reverrai plus jamais.

— Maman
 Maman, tu me manques


— ArrĂȘte de chouiner Irina, ta mĂšre est morte et enterrĂ©e. Tu ne le sais pas ? dit la voix de tata Carolina derriĂšre moi.

Je me lÚve et me tourne vers elle et hurle tout en articulant : 

— Maman, n’est pas morte ! 

— Si, elle est morte, rĂ©torque-t-elle, agacĂ©e.

— Elle n’est pas morte, je te dis ! Ma maman va revenir !

— Tais-toi ! Je t’ai dit qu’elle Ă©tait morte ! C’est fini ! Tu ne la reverras plus jamais !

— Ma mĂšre reviendra
 suffoquĂ©-je alors qu’elle m’observe avec mĂ©pris.

Je soutiens son regard avec insolence puis je la contourne en courant, mais elle me rattrape dans mon élan.

— Reste là ! Je n’en ai pas fini avec toi.

— Laisse-moi tranquille, tu me fais mal
 !

— Je te prĂ©viens, si tu continues Ă  chouiner, je dirais Ă  ton pĂšre de t’emmener loin d’ici loin et de ce foutu village, tu m’entends ? 

— Laisse-moi ! Je n’irai nulle part et mon pùre ne m’enverra pas loin !

Je retire mon bras de son emprise puis j’entends un cri aigu. Je me retourne et j’écarquille les yeux, effrayĂ©e : 

— Tataaaa ! 

Ma tante vient de tomber dans la piscine. Elle s’est Ă©crasĂ©e au sol avec son bĂ©bĂ© dans le ventre. 

—  Irina, Irina, qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi tu criais ? Oh mon Dieu ! Madame, s’affole DolorĂšs Ă  mes cĂŽtĂ©s, voyant ma tante Ă©tendue sur le sol de la piscine.

— Du
 Sang
 Du sang, DolorĂšs, balbutiĂ©-je, en sanglotant. Je n’ai pas fait exprĂšs, je n’ai pas fait exprĂšs, je te jure


— Non... Je sais
 Mais allons vite Ă  l’intĂ©rieur prĂ©venir ton pĂšre. 

~ Fin du flashback ~

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