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Chapitre 3

Samedi, neuf heures du matin, et au lieu d'être confortablement installé dans mon lit, je me retrouvais chez mes parents. Quel bonheur ! Ironiquement parlant évidemment.

Tout le monde dans la maison était déjà en plein travail. À peine avais-je passé la porte d'entrée que ma mère me sauta dessus, me souhaitant la bienvenue, sans nul doute, elle était de très bonne humeur.

— Bonjour à toi aussi, Maman.
— Mon petit Danny-chou, comment va mon bébé ?
— Je t'ai déjà dit d'arrêter avec ce surnom, il me donne des sueurs froides.

Ma mère arborait une petite mine boudeuse, mais se concentra de nouveau très vite sur ce qui comptait à l'heure actuelle, ne perdant pas le nord, elle me conduit là où je serais le plus utile pour aider aux préparatifs de la réception. En résumé, un peu partout sauf en cuisine. On avait déjà fait l'expérience il y a deux ans, mieux valait me tenir éloigné des fourneaux, personne ne voulait revoir les petits fours carbonisés et la cuisine ressemblant à un volcan fumant en train de se réveiller.

La soirée de ce soir avait un but caritatif, elle allait servir à récolter des fonds pour une association que ma mère soutenait et affectionnait beaucoup. Ma mère s'investissait beaucoup dans la lutte pour les droits des femmes et animait souvent des salons pour aider à la réinsertion des femmes qui s'était retrouvée en marge de la société.

Organiser, ce type d'évènement était ce qu'elle savait faire de mieux, elle avait ce charisme naturel qui l'aidait beaucoup et elle adorait ça. Elle s'était forgé une réputation dans le domaine évènementiel, car, depuis quelques années, elle avait la cote et beaucoup de personnes faisaient appel à elle. Elle s'amusait beaucoup dans ce que j'appelais sa deuxième vie, et c'est tout ce qui comptait.

Pour en revenir à ces galas caritatifs, elle réussissait toujours à réunir les plus grandes personnalités d'Europe, parfois même des autres continents. Acteur, chanteur, journaliste, politique, tous les jobs y passaient, sans exception. Tant qu'elle pouvait dépouiller les poches de ses semblables.

Ce soir, c'était une occasion encore plus spéciale, c'était vraiment son soir, la date la plus importante de son année. C'était son bébé, elle y mettait toute son âme, il fallait que la réception soit réussie, qu'elle soit parfaite. Elle y tenait. Que ce soit pour l'association, ou pour accroître son nom. Ma mère n'était tout de même pas la bonne sainte pour qui elle voulait passer, il ne fallait pas exagérer.

Pour mon père, c'était juste sa bonne action de l'année. Son esprit devait avoir bonne conscience après, probablement.

Moi, ça me passait au-dessus. Pas le droit des femmes et les associations ! Évidemment. Seulement les rassemblements de millionnaires. Je n'aimais pas beaucoup l'hypocrisie de ces soirées. Seule ma mère était vraiment préoccupée des associations qu'elle représentait, pas les gens qui y participaient, eux n'étaient là que pour que ça fasse joli dans leur dossier et je trouvais vraiment ça nul.

⟣⟡⟢

La réception venait de commencer. Je déambulais parmi la foule, qui se faisait de plus en plus dense au fur et à mesure que les invités arrivaient, vérifiant si tout était bien en place, dans les moindres détails. Les petits fours, les boissons et tout le reste, si je voulais que ma mère passe ses trois cent soixante-cinq jours prochains, heureuse et de bonne humeur, il fallait que tout soit parfait.

Mes parents, eux, accueillaient les arrivants, discutaient avec eux, et à l'occasion, avec les nouveaux venus, me présentait. C'était d'ailleurs ce qu'allait faire ma mère, car je l'entendis me demander. Un peu blasé, je la rejoignis.

Je me retrouvais devant un couple de personnes, probablement de l'âge de mes parents. L'homme qui se tenait devant moi me rappelait vaguement quelqu'un, toutefois, je n'avais pas la mémoire des visages, encore moins dans les soirées mondaines. La seule chose dont j'étais sûr, c'était que, lorsque nos regards se croisèrent, un long frisson d'émotion inconnu parcourut mon corps.

— Je vous présente mon fils Danny. La dernière fois que vous l'aviez rencontré, il n'était pas très grand, si je me souviens bien. Il a bien grandi depuis.
— Danny, laisse-moi te présenter, Monsieur et Madame...

L'homme que j'avais en face de moi était grand, brun, les yeux bleus, plutôt banal quand on y réfléchissait. Cependant, malgré son visage passe-partout, cela ne l'empêchait pas de me toiser de haut en bas, d'un air posé, qui, pourtant, me faisait sentir, indéniablement, inférieur à lui. Ridiculement petit, même. J'étais extrêmement mal à l'aise par sa présence. Il imposait un certain respect, mais d'une manière peu agréable.

Alors qu'il me tendait la main, je la lui serrai.
Ce fut seulement par réflexe que je réussis cela, car mon corps était tendu, je n'arrivais presque plus à bouger et la connexion entre mes neurones ne se faisait plus.

Lorsque je me tournai vers sa femme, je fus captivé. Elle dégageait le complet opposé de son mari, elle était magnifique. Je n'avais jamais vu une femme de sa prestance ou cela remontait à très loin dans ma mémoire. Elle n'était pas très grande et avait un visage fin, ses cheveux blonds tombaient jusqu'à ses hanches et ondulaient légèrement en leur fin. Elle possédait un de ces sourires, qui par leur simple présence calmait vos peurs, vous rassurait. Il était chaleureux et inspirait, confiance et gentillesse. Un de ces sourires que l'on ne pouvait pas louper. Et enfin, elle avait des yeux d'un vert pur, peu commun, un splendide vert émeraude qui me rappelait vaguement ceux de...

— Levinson.

Oui, exactement ! Les yeux de l'autre abruti ! Attendez... pardon, quoi ? Levinson ? Pause, pause ! On arrêtait tout, on rembobinait et on recommençait.

— Chéri ? Danny ? Tu vas bien ?
— Vous, vous êtes Monsieur et madame Le-Levinson ?

Génial, je bégayais.

La femme me répondit par l'affirmatif avec air malicieux, se moquant doucement de moi. Je l'avais rencontrée, il y a très longtemps, quand j'étais encore un enfant. Comment avais-je pu oublier une femme comme elle ? Il était vrai qu'en dehors de Levinson junior, mes souvenirs à propos de sa famille étaient très vagues, mais quelle femme.

— Danny-chou, ferme la bouche, tu vas gober les mouches !

Oh ! Ça rimait ! Enfin, ce n'était pas le sujet. Ressaisis-toi, Danny.

Je tombais de haut, ma mère avait invité les Levinson, les Levinson étaient dans notre domaine. Physiquement parlant, ils étaient chez moi. Monsieur Levinson s'adressa alors à ma mère.

— Madame, notre fils est également là, il devrait arriver bientôt, il se trouvait juste derrière nous.

Hein ? Leur fils ? Sérieux ? C'était une blague... hein ? Après tout, voyons, le Levinson que je connaissais n'était peut-être pas fils unique ? Il avait peut-être un frère caché ? D'accord, je ne croyais pas en cette théorie, mais l'espoir faisait vivre.

— Tenez d'ailleurs, le voici. Ashton, je te présente Madame Davidson, tu as déjà vu son mari plusieurs fois, et leur fils, Danny, bien que tu doives aussi le connaître.
— Enchanté, Madame, Monsieur.

Son éternel sourire était revenu, placardé de nouveau sur son visage et, pour être honnête, il m'agaçait déjà de nouveau. Levinson offrit une poignée de main de mon père et fit une légère révérence devant ma mère, des étoiles brillaient dans les yeux de cette dernière, elle était sous le charme. Quant à moi, je n'avais eu le droit qu'au hochement de tête poli, auquel j'avais répondu par la même politesse feinte. Ma mère curieuse, nous demanda si nous nous connaissions bien.

Je voulus répondre, cependant, l'autre me devança.

— Nous sommes dans la même faculté, madame, et nous sommes camarades de classe, mais cela s'arrête là.

Levinson regarda son père en prononçant ces derniers mots.

Une fois les présentations terminées, mes parents prirent congé, suivi de Madame Levinson, ils allaient nous laisser seuls, leur fils et moi, puisque je compris très vite que son père allait les suivre. Avant cela, il s'adressa une dernière fois à son fils sur un ton, dont je n'arrivais pas à comprendre l'émotion.

— Ashton, ne disparaît pas, j'aurai des amis à te présenter.
— Oui père.

Je crus déceler une pointe d'animosité dans la voix de Levinson junior, ainsi que, pendant une fraction de seconde, un éclair de douleur et de colère dans ses yeux. Néanmoins, son expression était calme, comme si tout cela était habituel pour lui.

En temps normal, son sourire m'énervait, toutefois, celui qu'il affichait actuellement me procurait un tout autre ressenti. C'était un de ces rictus qu'on arborait généralement pour faire bonne figure, qui ne servait que de façade pour masquer quelque chose d'autre. Levinson donnait l'impression d'être résigné à je ne sais trop quoi. Face à ça, je me surpris à avoir un pincement au cœur.

Son père se pencha vers lui, lui murmurant à l'oreille quelque chose qu'il m'était impossible d'entendre. Je vis d'un coup, l'expression de ma Némésis changée brutalement. Alors que ses yeux s'ouvraient sous la stupeur, il pâlit. Il pâlit considérablement même. Un fantôme à côté aurait eu l'air en meilleure forme que lui !

Je crus aussi, l'espace d'un instant, déceler une étincelle de terreur dans ses émeraudes.

Après ça, son père s'en alla. Levinson resta sous le choc durant quelques dixièmes de seconde, avant de se reprendre, se passant une main sur la figure. Son expression calme et son sourire de nouveau placardé à ses lèvres.

— Allez, ramène-toi, Levinson. On est tous les deux coincés ici, je t'offre un verre.

Et aussi bizarre que cela paraissait, Levinson me suivit. On rejoignit un coin excentré du jardin, bien plus calme que le reste de la maison, et le silence s'installa entre nous, jusqu'à ce que je ne tienne plus, et y mette fin, ne pouvant m'empêcher de lui poser une question;

— T'étais passé où ?
— Ce ne sont pas tes affaires Davidson.
— Je sais. Mais quand ton ennemi disparaît, après t'avoir superbement ignoré la veille, je ne peux m'empêcher de me poser quelques questions.
— Tu l'as dit à Daniel.

Ou comment changer de conversation.

— Oui.
— Je t'avais dit de garder ça pour toi.
— Depuis quand est-ce que je fais ce que tu me dis ?
— Tu es un connard Davidson.
— Je sais. Toi aussi.

Il y eut un long moment durant lequel aucun de nous deux ne parla. Nos échanges verbaux ne s'étaient pas améliorés à entendre notre conversation, sèche, courte, le minimum. Je n'avais cependant pas lâché mon affaire et je repris, bien décidé à avoir des réponses.

— T'as pas répondu à ma question.
— Je ne te dois rien. Ou alors, est-ce que tu t'inquiéterais pour moi, Davidson ?

Son air était moqueur.

— Et puis quoi encore ? Mais je me pose des questions. De plus, c'était quoi ces marques ?

Son regard se ternit, j'en regrettais presque d'avoir abordé le sujet.

— Rien.

À partir de là, plus personne ne parla. Nos regards, cependant, ne quittèrent pas celui de l'autre. Je voulais des réponses et lui ne voulait pas me les donner. Dans la finalité, je ne pus que me résigner a respecté son choix.

Une trentaine de minutes plus tard, son paternel vint le chercher, lui annonçant qu'il avait des amis à lui présenter. Levinson me salua poliment et partit en direction de la foule. Je le suivis du regard jusqu'à ce qu'il arrive au niveau d'un petit groupe d'hommes. Je reconnus l'un des quatre comme étant Bill Ernest, un publicitaire d'une compagnie anglaise, quant au plus grand du groupe, si mes souvenirs étaient bons, il s'appelait Alfred Eberhard, un homme d'affaires réputé en Allemagne. Les deux autres m'étaient totalement inconnus. Levinson gratifia chacun d'entre eux, d'une poignée de main. Enfin, tout cela m'importait peu, toutes ces mascarades me déprimaient.

Alors que mon attention commençait à se détourner de la scène au loin, elle fut de nouveau piquée instantanément, dès lors que le grand blond, Eberhard, enroula son bras derrière les hanches de ma Némésis. Sa main caressait la hanche de ce dernier et l'Allemand l'avait rapproché au plus près de lui, leurs deux corps se touchaient.

Les deux s'étaient éloignés du groupe et discutaient maintenant à l'écart. Le plus vieux ne cessait de se pencher à l'oreille de Levinson, lui racontant je ne sais quoi, gloussant goulûment. À la vue de ce spectacle, je sentis une boule désagréable se former dans mon estomac.

Pourquoi l'homme le touchait-il de cette façon désinvolte ? Pourquoi le père de Levinson ne disait-il rien ? Pourquoi Levinson, lui-même, ne disait-il rien ? Et j'avais beau le fixer, essayer de décrypter une émotion, son visage n'exprimait rien. Pas une trace d'une quelconque émotion, quelle qu'elle soit, juste un regard las, résigné, on aurait dit qu'il était déconnecté avec le moment présent.

Son père et les autres hommes s'éloignèrent, laissant Levinson cette fois-ci, complètement seuls avec ce pouilleux, avec qui, plus le temps passait, plus les distances vitales qui les séparaient diminuaient. Le plus âgé lui prit alors la main et l'emmena un peu plus loin, là où il y avait beaucoup moins de regards. La boule dans mon estomac venait de doubler de taille.

Plus par réflexe qu'autre chose, à nouveau, je m'étais mis à les suivre. Ils s'étaient logés dans un petit coin sombre, caché du plus grand nombre. J'apercevais qu'Eberhard avait passé ses mains sous le t-shirt de ma Némésis et le rapprochait de lui. Je vis l'homme mettre sa tête dans le cou de son vis-à-vis et la boule au niveau de mon estomac avait tellement grossi, que je ne sentais plus que ça. J'avalais difficilement ma salive. Une envie de hurler à ma Némésis de réagir se glissa dans ma gorge. Pourquoi est-ce qu'il ne bougeait pas ?

Malgré la situation, je ne vis aucun éclair de rébellion dans son regard émeraude, juste une étincelle de tristesse qui passa, et cette fois-ci, je fus certain de ce que j'avais vu, elle n'était pas sortie de mon imagination. Mon sang se glaça, je me dirigeais vers eux.

Alors que je partais dans leur direction, j'entendis quelqu'un hurler mon prénom, je me figeai. Ce n'était pas le moment, pas maintenant. N'importe quand, mais pas maintenant.

Je me retournais brusquement et sentis une pression contre mes lèvres. Tina. Ma mère avait fini par l'invité, finalement. Je répondis à son baiser une fois encore par pur réflexe, trop de choses se bousculaient dans ma tête. J'avais dû mal à tout gérer. C'était le pire moment que ma petite amie pouvait choisir pour débarquer et m'empêcher d'avancer.

— Je croyais que tu ne m'adressais plus la parole ?
-C'est vrai, mais je ne peux pas rester loin de toi ! J'espère que ces trois jours t'auront fait remarquer à quel point je suis importante pour toi ! Plus que, tu vois de qui je parle, pas vrai ?

Bien évidemment que oui, que je voyais très bien. Levinson. Oh, non, Levinson ! Et zut ! Je tentais de la repousser, mais elle reprit de plus belle mes lèvres. Elle n'avait pas l'air de vouloir me lâcher, mais, derrière ce fichu bosquet, ce crétin... Je ne le comprenais pas ? Pourquoi se laissait-il faire ?

— Tina !

Nathalie ! Ma tante, le timing était parfait ! Tina se détacha de moi avec regret pour diriger vers elle. Sans plus réfléchir, je me précipitai vers l'endroit où se trouvaient Levinson et l'autre, m'arrêtant net en les apercevant. Le plus âgé avait ses lèvres collées sur celle de l'idiot et lui, il n'en bougeait pas plus. Qu'est-ce qu'il fichait ! L'homme se détacha du corps de Levinson et le salua avant de s'en aller.

Une fois que celui-ci se fut éloigné, je pus voir plus précisément ma Némésis. Son teint se mariait parfaitement à ses yeux, une couleur étrangement verdâtre, d'ailleurs, il ne s'attarda pas sur place et fila jusqu'à l'intérieur de la résidence. Je pensais savoir où il allait.

⟣⟡⟢

— Levinson ?
— Mais c'est pas vrai ! Dégage Davidson !

Bingo !

Malgré ses avertissements et ses menaces, j'entrais sans hésitation dans la pièce où il s'était réfugié. Il était penché au-dessus de l'évier de la salle de bain et au vu de ses cheveux mouillés, il s'était aspergé. Il dégoulinait de partout, des gouttes glissaient le long de sa nuque. Je me maudis de remarquer ce détail.

Je m'assis sur le rebord de la baignoire et le fixai. Il se mordillait l'intérieur de la lèvre, essayant de réprimer ses émotions. J'avais remarqué ce tic au fil des années, quand il était très en colère contre moi, ce dernier apparaissait. C'était grâce à cela que je savais, dans ces moments-là, que je touchais des points sensibles. En tout cas, à cet instant précis, grâce à ça, je savais qu'il n'allait pas bien.

— Je t'avais dit de ne pas entrer.
— C'est encore ma maison, et je dois vérifier que les invités vont bien.
— Je vais bien. Maintenant, dégage.
— Hors de question.
— T'es soûlant !
— Je sais ! Et c'est toujours un plaisir ! Maintenant, réponds-moi. Tu te laisses souvent embrasser comme ça ?

Je le vis se figer, avant de baisser la tête, fuyant tout contact visuel avec moi.

— Alors, tu nous as vus ?
— Oui. Tu le connais depuis longtemps ?
— Non, je venais de le rencontrer.
— Alors, pourquoi tu l'as laissé te toucher ?

Aucune réponse.

— Réponds Levinson !
— Non.
— Pourquoi CE mec te touchait !

Je m'étais levé sans même m'en rendre compte, faisant un pas dans sa direction. Il releva enfin son visage vers moi, encrant ses deux émeraudes, pleines de menaces, dans mon regard. Il avait cette expression froide qu'il arborait quand on se battait.

Je devais l'admettre, à cet instant, il en imposait. Et après cette soirée, en ayant vu son paternel, je savais d'où cela lui venait. Néanmoins, je n'allais pas fuir devant lui, tout cela, n'était qu'une façade, un stratagème pour que je laisse tomber, une énième tentative pour que j'abandonne, mais il en était hors de question. Je soutins son regard avec toute la détermination que je possédais.

— Davidson, ce ne sont pas tes affaires.

Sec, sans appel. Levinson me tourna le dos et se rapprocha de la porte, sur le point de s'en aller. Mais voilà, cette fois-ci encore, au lieu de faire ce que j'aurais du faire, c'est-à-dire, le laisser partir, je réitérai l'expérience. Lui attrapant le poignet, je l'obligeai à me faire face. Levinson débordait de colère, ses yeux s'étaient teintés de cette allure dangereuse que j'avais déjà aperçue au lycée.

— Levinson, tu restes là, j'ai pas terminé ! Quatre jours que j'attends de t'avoir sous la main, je ne vais ne pas te laisser repartir si vite. Tu vas répondre à mes questions !

Le ton de ma voix laissait passer plus d'émotions que je ne l'aurais voulu. Il me regardait d'un air mis surpris, probablement dû au ton que je venais d'avoir, et mis énervé par la situation. Je raffermis ma prise et posa ma seconde main autour de son avant-bras. Une grimace apparut pendant une seconde sur son visage et je compris que ses bleus devaient toujours être là. Je lui empoignai fermement le bras et remontai la manche de la chemise de son costume.

— Premièrement, d'où te viennent ces marques ?!
— Va te faire Davidson !
— Réponds !
— Je suis tombé dans les escaliers.
— Menteur ! J'ai entendu la conversation entre toi et Rayan !
— Tu espionnes les gens maintenant ?
— Mon cher, ce n'est pas ma faute si je me trouve pile aux endroits durant les évènements quand ils arrivent ! Deuxième question, qu'est-ce que tu faisais avec ce gars !

Ses épaules s'affaissèrent, se détendant un peu, avant de me regarder avec un rictus que je n'appréciais pas. Je pris peur et le relâcha, reculant d'un pas, alors que lui garda son sourire placardé sur son visage, un air rempli de fierté l'accompagnant. J'osais à peine prononcer ma phrase, ayant peur que ce que j'imaginais ne soit réel.

— Est-ce que ?

Il me sourit de plus belle, alors que le choc en moi était présent.

— Levinson ? Ça ne peut pas être ce que je pense ?

Arquant un sourcil, il me répondit :

— Ce ne sont pas tes affaires de toute manière.
— T'es pas sérieux, là ?

Je devais me tromper. Je ne voulais pas y croire, mon hypothèse de lundi dernier, ne pouvait pas s'avérer réel.

Levinson se rapprocha de moi, m'obligeant à reculer jusqu'à ce que mon dos vienne heurter le mur froid, j'étais coincé. Le mur et lui. Je n'avais pas d'échappatoires. Il posa sa main à côté de ma tête.

Tiens ? Une gourmette, est-ce qu'il la portait souvent ? Il était toujours vêtu de ses manches longues maintenant que j'y réfléchissais. Même en été. Je n'avais jamais relevé, mais ce n'était pas quelque chose de commun.

Il se rapprocha au plus proche de moi, ce qui me fit sortir de mes réflexions, je ne respirais plus. Sa voix au creux de mon oreille était chaude et rauque.

— Tu ne serais pas jaloux par hasard ?

Sans comprendre ce qu'il se passait dans ma poitrine, je fermais les yeux. L'aura qui émanait de lui me terrifiait, ce n'était pas le Levinson que je connaissais. Je posai mes mains contre son torse, prêt à le repousser de toutes mes forces.

— Recule !

Levant les mains en l'air en signe de paix, il ne perdit pas pour autant son sourire. Il émit un soufflement nasal, s'apprêtant à un rire moqueur. L'enfoiré.

Après cela, il tourna les talons et partit pour de bon, la porte claqua derrière lui. Je ne pus détourner mon regard de celle-ci alors que je commençais à respirer de nouveau. Mon corps finit par lâcher et je me laissai glisser jusqu'au sol. J'étais toujours sous le choc. Je ne comprenais pas ce qu'il venait de se passer. Qu'est-ce que c'était encore que cette histoire ?

Putain. Ce type me faisait vraiment chier.

⟣⟡⟢

Il m'avait fallu de longues minutes avant de me décider à retourner à la réception. Je tentais de retrouver Levinson parmi la foule, en vain. Il devait pourtant être quelque part.

Je scrutai un par un tous les visages et fini enfin par voir le sien. Il dansait sur la piste de danse accompagnée, à mon soulagement, d'une femme à ses côtés. Soulagement ? Qu'importe, ce n'était pas le moment de s'attarder sur ça. Le principal c'était que l'autre vieux n'était pas avec lui.

Toutefois, en faisant un peu plus attention à la personne qui l'accompagnait, une vague d'indignation s'empara de moi. Freman. Je devais trouver ma mère.

Déterminé, je partis en direction des petits fours et du punch. Bingo !

— Maman ? Tu as invité les Freman ?
— Oui ! Ils tiennent une grande boutique de vêtement dans le centre-ville ! Tu devrais un peu plus te renseigner chéri ! Plus tard, tu travailleras en côtoyant des gens importants, tu le sais ? Tu vas devoir avoir de bons rapports avec toutes ces personnes !
— Avec Abigaelle Freman, c'est déjà plutôt mal engagé ! Et sinon, par le plus grand hasard, tu n'aurais pas vu Stan ? Il m'a dit qu'il devait venir avec ses parents.
— Je l'ai vu, mais je ne sais plus où. Cherche ton amoureuse, tu le trouveras sûrement avec elle, en train de te chercher toi.

Elle avait très bien insisté sur la fin de sa phrase, le reproche n'était même pas dissimulé. Le fait que j'avais disparu depuis plus d'une heure et demie déjà, n'avait pas eu l'air de beaucoup lui plaire. Il devait certainement y avoir eu une pénurie de petits fours et personne pour aller en chercher des nouveaux, en rajoutant à cela, une Tina qui avait dû venir se plaindre de ne pas me trouver. Ma mère appréciait un peu trop Tina à mon goût, même probablement plus que moi-même. Je m'attendais presque qu'à tout moment, qu'elle commence à évoquer le mariage.

— Dit, Danny-chou ? Cela fait quatre ans que tu es avec Tina... Tu comptes lui faire ta demande ?

Tandis qu'elle affichait un grand sourire, je manquai de m'étouffer avec le punch. Je m'y attendais à cette question, mais pas maintenant, et elle n'avait pas fait de détour.

— Maman ! On a dix-neuf ans ! Je ne vais pas me marier à dix-neuf ans ?

Elle haussa légèrement ses épaules.

— Ton père m'a épousé à vingt ans, tu sais ?
— Ouais et c'était y a trente ans.

Sur ce, je la laissai là avec sa mine déconfite, je venais peut-être de lui ruiner son idée de petits enfants, pour un certain nombre d'années à venir.

Je me mis à la recherche de Stan, je fis le tour de la demeure, jardin, intérieur, salle de bain, toilettes, il n'était nulle part, pas même dans ma chambre. Je regardai alors au dernier endroit où je n'avais pas cherché, la piste de danse, Stan n'aimait pas danser.

Et pourtant, il y était, un large sourire naquit sur mes lèvres. Stan se trouvait en charmante compagnie, ma cousine, une femme sublime, aux cheveux bruns, aux anglaises parfaites qui descendaient jusqu'au milieu de son dos et des yeux d'un bleu océan, si profond, qu'on aurait pu s'y noyer. Ce n'était pas pour me vanter, mais elle avait bien le charme des Davidson.

Stan en pinçait pour elle depuis la sixième, malheureusement, son amour était voué à l'échec. Elle était déjà éprise de quelqu'un, mais laissons-le avoir sa danse et son moment de bonheur.

D'un seul coup, ma main fut capturée et l'on me tira vers la piste, je ne pus y échapper. Tina. J'allais l'avoir pour la soirée, sans pouvoir m'en défaire, maintenant qu'elle m'avait mis la main dessus.

Je n'avais pas vraiment envie de danser, et encore moins d'être sur cette piste de danse. Malheureusement, il n'y avait pas d'issues, alors je me laissais emporter. Tina se logea contre moi, ses mains derrière mon cou alors que les miennes vinrent se caler sur ses hanches. Sa tête reposait doucement contre mon torse, je ressentais la chaleur de son corps.

Ce contact aurait dû suffire à me faire tout oublier, sauf que cela ne suffisait pas à garder mon regard et mon attention fixés sur elle, mon esprit observant tour à tour les visages de ces gens autour de moi.

Un peu plus loin de nous, Stan affichait un sourire qui illuminait son visage. Je savais que ma cousine l'aimait bien, mais pas assez pour ce qu'il voulait, elle le lui avait déjà dit et Stan respectait complètement cela. Malgré tout, je l'enviais tout même, car, même s'il savait que son histoire n'allait nulle part, en ce moment, il était clairement heureux, parce qu'il était amoureux.

En l'observant, j'en vins à me demander pourquoi, je ne me sentais pas heureux dans les bras de Tina. Je n'irais pas jusqu'à dire que je n'étais pas bien et que le moment était affreux, mais j'avais l'impression de ne pas être à ma place. Qu'il manquait quelque chose. Je ne m'étais pas sur l'affection que j'éprouvais envers elle, pourtant, je comprenais bien qu'ils étaient très différents de ce que Stan pouvait éprouver.

Tina, comme si elle pouvait sentir mon doute, releva la tête et m'embrassa. Quand le baiser prit fin, elle me sourit et reposa sa tête délicatement contre mon torse. J'aurais aimé ne voir qu'elle.

Mon regard continuait de vagabonder à travers la foule, jusqu'à le trouver. Il était toujours avec Freman, front contre front. Je l'aperçus déposer un léger baiser sur les lèvres de son partenaire, avant de lui sourire tendrement et de caler sa tête dans son cou.

Levinson lui rendit son sourire et, pour je ne sais quelles raisons, je sentis mon cœur se serrer dans ma poitrine.

Il releva la tête de sa partenaire et croisa mon regard, son sourire arrogant venait de réapparaître. Il commença à embrasser le cou de sa copine, sans détacher une seule seconde, son regard de moi. Freman qui gloussait comme une chèvre, fut la goute de trop.

Je ne supportais pas de les voir.

⟣⟡⟢

La soirée continuait et tout le monde semblait s'amuser. Pour ma part, je n'avais plus qu'une unique préoccupation, celle d'oublier, par n'importe quels moyens, cette sensation désagréable que j'avais ressentie lorsque j'avais vu Levinson embrasser Freman.

C'était très certainement pour cela que j'avais laissé Tina me conduire jusqu'à ma chambre et qu'on s'embrassait maintenant avec passion sur mon lit. Je souhaitais me sortir Levinson de la tête.

Depuis une semaine, il avait réussi à mettre, sens dessus dessous, un certain nombre de choses. Notre routine, nos habitudes et surtout mes émotions. Je souhaitais tout oublier, que tout redevienne comme avant.

Avant, c'était tellement simple.

Je voulais le détester, le haïr comme je l'avais toujours fait, et non me poser des dizaines de questions, dont je n'avais pas l'ombre d'une réponse.

Tout de suite, je ne voulais voir et ne penser qu'à Tina. Elle qui gémissait sous chacune de mes caresses. Elle qui me désirait et que je désirais aussi. J'aurais probablement pu être plus doux dans mes gestes, mais Tina avait l'air d'aimer cette nouvelle façon, un peu plus sauvage, de nous découvrir. Au creux de mon oreille, elle me susurra qu'elle appréciait, m'invitant à continuer.

Je ne désirais qu'une chose, ne plus entendre mes pensées, faire le vide.

Nos deux corps finirent par tomber d'épuisement, et le sommeil nous gagna. Morphée emporta tout. Pour cette fois du moins, car je savais, pertinemment, au fond de moi, que rien n'était fini et que tout allait commencer.

Connard.

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