Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
PunpunMRoyal
Share the book

Chapitre 9

Notre exposé s'était déroulé sans fausses notes, j'avais bien fait de lui faire confiance, mon instinct ne m'avait pas trompé. Grâce à tout ce qu'il m'avait écrit, j'avais réussi à faire un oral parfait.

Durant mon temps de parole, le regard de mon voisin ne m'avait pas quitté et le mien avait trouvé sa direction lorsqu'était venu son tour. J'aurais aimé ne pas le regarder autant, mais je n'avais simplement pas pu détourner mes yeux de sa personne, comme hypnotisé. Il dégageait tellement de choses.

Une rapide pensée avait traversé mon esprit. Si pour un si petit exercice, sur un sujet pas si intéressant qui plus est, il était capable de dégager tant de prestance et d'assurance, au point, que toutes les personnes dans la salle buvaient ses mots, alors... Lorsque le monde du travail s'ouvrira à lui, il le dominera, d'une aisance sans pareil.

Une pointe de jalousie à cette constatation s'immisça en moi. Plus je l'observais, plus je voyais le fossé entre nous sur ce terrain-là, ses capacités étaient à des kilomètres des miennes. Je me jurais de l'égaler et de le surpasser, un jour viendra, où nous serons côte à côte et où tous les regards seront sur moi, je ne lui en laisserais aucun.

— Bravo à tous les deux.

Je revins à la réalité après les paroles de notre professeur.

— Vous voyez, quand vous vous en donnez les moyens, vous parvenez à bien faire les choses ! Vous êtes intelligents, écoutez et travaillez, plutôt que d'avoir quatre ans d'âge mental. Je vous donne un dix-neuf.

Un dix-neuf ? Génial ! Ma moyenne allait être impeccable. Je me tournai vers Levinson et lui souris, cela m'avait paru naturel comme geste, néanmoins, lorsqu'il me regarda avec des yeux ronds, je compris que ça ne l'était pas.

Je me souvins alors que c'était lui qui se trouvait en face de moi, pas une personne lambda, mais bien Levinson. Il me rendit tout de même mon sourire, et mes yeux le suivirent jusqu'à ce qu'il atteigne sa place. Je fis de même juste près.

Même si c'était Levinson, ce dix-neuf c'était grâce à lui. Je devais lui dire merci.

Quand la sonnerie de la pause déjeuner résonna, alors nous étions en route vers le réfectoire, Tina ne cessait de me bassiner, sur le fait que j'avais été remarquable, formidable, parfait, et de tout un tas d'autres adjectifs vantant mes mérites.

Je ne l'écoutais plus depuis un moment. J'étais occupé à chercher Levinson et sa clique. Ce qui finalement me valut, lorsque Tina s'en rendit compte, un broyage de côtes, action qui fut assez douloureuse de mon point de vue.

— Tina ! Arrête. Je dois bien le trouver quand même, j'ai eu une super note grâce à lui, il a tout fait, tout seul !

Son regard se durcit.

— Écoute Danny, pourquoi irais-tu remercier ce gars, sachant que je te rappelle, puisque tu as l'air d'avoir perdu la mémoire, que c'est de Levinson dont on parle ! Et que tu es techniquement censé le détester, ce qui est, d'ailleurs, censé, être réciproque ?
— Je sais. Ça ne change rien au fait que je ne peux toujours pas le voir en peinture, mais je ne peux pas nier que je ressens de la culpabilité. Alors, je veux juste espérer qu'en le remerciant, elle disparaisse. Rien de plus.
— Si tu le dis.

Rayan et Freman apparurent enfin dans mon champ de vision. Je sautais pratiquement sur le premier, qui recula d'un mètre sous l'effet de surprise, cela me valut une espèce de sermon bizarre de sa part, que j'avais arrêté d'écouter dès les premiers mots. Mon attention était bloquée sur Freman qui me regardait d'un air meurtrier.

— Un problème ? Tu veux me tuer peut-être ?
— Si seulement !
— Ah. Sympa.
— Danny. Rends-moi un service et éloigne-toi de cette vermine.

Je vis Freman, passé d'une couleur respectable, à une jolie teinte rouge tomate, ses traits se crispant d'une grimace de colère. Intérieurement, je félicitais Tina pour cette réflexion, rien n'était plus réjouissant que de voir Freman sortir de ses gonds.

— Avec plaisir, Tina ! Sinon, je n'étais pas là pour ça, à la base, Rayan vient là, j'ai une question !
— Et si je ne veux pas ?
— Tu n'as pas le choix ?

Je l'attrapai par la manche et l'emmenais un peu à l'écart du groupe. Il se débattit encore et encore, jusqu'à ce que le nom de Levinson eût franchi mes lèvres. Il ancra son regard dans le mien.

— Je ne sais pas où il est et crois-moi, j'aimerais vraiment savoir. Avant, je le perdais rarement, maintenant, c'est quasiment tous les jours. Si tu le retrouves, dis-le-moi.

Tiens, tiens, il avait disparu, et Rayan ne savait pas où...

— Tina, Stan, mangez sans moi !

J'avais mon idée.

⟣⟡⟢

J'étais en route vers mon repère secret, j'ignorais ce qui me faisait dire qu'il était là-bas, mais mon instinct semblait me le crier.

Lorsque j'atteignis le grand arbre, il était là, endormit, un livre contre sa poitrine. Sous la même étoile. Assoupi comme cela, il avait l'air paisible. Un sourire naquit sur mes lèvres, sans que je m'en rende compte.

Avoir ma Némésis endormit à porter de mains, m'offrait tant de possibilité, pourtant, je savais que je n'en saisirais aucune. Ça aurait été lâche de ma part, si j'avais tenté quoi que ce soit.

Par ailleurs, si je m'étais retrouvé dans la même situation, j'avais la certitude que lui non plus n'en aurait pas profité. On valait mieux que ça. Peut-être n'aurais-je pas tenu le même discours si nous étions encore à l'époque du collège, mais celle-ci était loin derrière nous, très loin même.

Depuis quelques semaines, Levinson semblait épuisé et tracassé quotidiennement, là, je le voyais enfin calme. J'extirpais un cahier de mon sac et en déchirai un bout de page. Dessus, j'écrivis un unique mot, comme lui avait fait auparavant, telle une réponse au sien. Je le lui devais bien, alors, à l'encre noire, j'écrivis cinq petites lettres : merci.

Pliant le morceau de papier en deux, je le glissai au creux de sa paume qui était ouverte vers le ciel, il dut sentir le contact, puisque, sans pour autant se réveiller, il referma doucement sa main.

Je me redressai et m'apprêtais à partir, mes yeux se stoppant sur lui une dernière fois. Un vent froid me fit frissonner de partout et je le vis trembler à son tour. Nous avions beau être fin octobre, les températures étaient froides, comme celles de fin novembre, nous avions tous sorti les pulls et les écharpes.

À l'exception peut-être de Stan qui semblait continuer à apprécier ses t-shirts à manches courtes, sa résistance au froid m'épatera jusqu'à ma mort.

Je passai mes mains derrière ma nuque, enlevant l'écharpe rouge et dorée qui trônait autour de mon cou, pour aller la placer autour de celui de Levinson. Il s'arrêta de grelotter.

De l'extérieur, le geste pouvait paraître idiot, on aurait pu croire que je m'inquiétais pour lui, naturellement, ce n'était pas le cas. Simplement, s'il tombait malade à en crever, je n'aurais plus personne à aller chatouiller.

J'attrapai un deuxième morceau de papier que je griffonnai, puis le glissa dans les plis du vêtement, et sans m'attarder plus, je le quittai là-dessus. Je ne voulais pas réfléchir sur la raison de mes actions, le remerciement, l'écharpe et tout le reste, même si, dans la finalité, je savais que le résultat était le même, je les avais faites.

Sans aucun regard en arrière, je m'éloignais. Je ne vis donc pas Levinson émerger de son sommeil, l'esprit embrumé, serrer sa paume et sentir le papier qui s'y trouvait. Je ne sus pas non plus qu'il l'avait ouvert et qu'un doux sourire s'était fait une place sur son visage fatigué.

Je n'eus pas non plus connaissance du fait que, lorsqu'il remarqua ce qu'il portait autour du cou, il s'en étonna et qu'un éclair de tristesse s'insinua dans ses deux iris, malgré le sourire toujours sur ses lèvres,

Je ne le vis pas non plus porter ses mains jusqu'à l'écharpe, afin de l'installer un peu mieux autour de lui, juste avant retourner auprès de la déesse du sommeil, se rappelant du dernier message qu'il venait de lire, qui n'était autre que :

Garde là.

⟣⟡⟢

J'avais fini par rejoindre mes deux amis. Dès mon arrivée, Tina m'avait demandé si j'avais trouvé Levinson. Je lui répondis négativement, qu'il était simplement resté introuvable. Si elle apprenait que je l'avais effectivement trouvé et que je lui avais laissé mon écharpe, j'aurais eu le droit à une nouvelle crise de sa part et je n'avais pas envie de subir cela à nouveau.

Il y avait un truc dans ma vie à l'heure actuelle dont j'étais certain. C'était qu'avec Tina, je voulais à tout prix éviter un sujet de conversation, le sujet Levinson. Je préférais mentir plutôt que de m'aventurer sur ce terrain-là.

La journée se passa sans que Levinson fasse sa réapparition en cours et j'allais rentrer chez moi, sans me poser plus de questions.

Néanmoins, arrivé à la sortie du campus, je l'aperçus, lui, Rayan, Freman et une autre fille, qui venait d'arriver à l'instant même. Le regard de ma Némésis croisa quelques secondes le mien, avant de se concentrer de nouveau sur la dernière personne arrivée.

Cette dernière se jeta dans ses bras et l'enlaça avec passion, étreinte qu'il lui rendit dans la seconde. Un sourire sincère et chaleureux aux lèvres. La fille lui déposa un baiser sur la joue, cette action n'avait pas eu l'air de lui déplaire. Elle était jolie avec ses cheveux dorés et ses grands yeux d'un bleu céleste. Avec son visage fin et harmonieux, je lui donnerais... Dix-sept ans peut-être ? Dans tous les cas, elle était plus jeune que lui.

Un léger agacement m'envahit à les voir aussi proches l'un de l'autre. C'était d'ailleurs, probablement pour cette raison, que je me dirigeais actuellement vers eux, d'un pas décidé, en dépit du fait que Stan et Tina m'attendaient déjà, bien loin, dans le sens opposé de la direction que je prenais.

— Bah alors, Levinson ? Elle n'est pas un peu jeune ?

Mon ton était plus dur que je ne l'aurais voulu, malgré l'ironie que j'avais essayé de faire passer dans mes paroles. Il se mit à rire, choquant toute la population présente, qui se composait de ses deux compères et des deux miens qui nous avaient rejoints. Freman lançait un regard mauvais en ma direction. Elle m'avait définitivement dans le collimateur.

— Hey ! Davidson, puis-je te rappeler que je sors avec lui ? Je ne pense pas qu'il oserait me tromper.
— Si tu le dis, Freman.

Quant à Levinson, il continuait simplement de rire, passant son bras autour des épaules de la jeune fille, avant de la rapprocher de lui et de lui déposer un baiser sur le front. Mon cœur loupa un battement.

Puis Stan prit alors la parole :

— Sérieux, Levinson t'es flippant à rire de la sorte, enfin, je veux dire, c'est quelque chose que Dan a dit, qui te fait rire et du coup, ça rend la situation super glauque...
— Davidson, cette demoiselle est loin d'être ce que tu penses !

Il la serra encore plus fort dans ses bras, lui offrant un tendre sourire, tout en la couvant du regard, avant de reprendre :

— Mais je te présente tout de même la femme de ma vie.

Et à cet instant précis, je crus que cela allait être à mon tour de mourir de rire. Il fallait voir la tête de Freman !

Elle s'offusqua immédiatement après la déclaration. Les sourcils froncés, un air agacé, elle était prête à exploser sur le champ. Elle redescendit, malheureusement, rapidement en pression, mais sa mine déconfite valait tout autant le détour que son expression précédente. Je me délectais ! J'aurais aimé avoir filmé ce moment.

Tandis que Freman était dans tous ces états, vexé et hors d'elle, jalouse au possible, après les propos qu'avait tenus Levinson, de mon côté, c'était totalement l'inverse. Tout l'agacement et les sensations désagréables que j'avais ressentis plus tôt, venaient de s'envoler d'un claquement de doigts.

Je m'approchai de sa petite sœur et lui tendis la main.

— Enchanté, jeune demoiselle.

J'avais l'impression qu'elle me regardait les yeux remplis d'étoiles. Son frère, semblant le remarquer aussi, se plaça donc entre elle et moi, arquant son sourcil en ma direction.

— Je t'interdis de prétendre vouloir me voler ma sœur Levinson.

Et là, j'étais certain d'avoir été à deux doigts de rougir. Le sourire qu'il affichait était vraiment beau et il était pour moi. Je savais bien que je ne devrais pas éprouver de la joie, mais je ne pouvais pas m'en empêcher.

Je perdais totalement la tête.

Lorsque sa petite sœur retira enfin sa main de la mienne, elle murmura quelque chose dans l'oreille de son grand frère et l'expression de ce dernier changea, elle se fit mécontente et triste ? Je devais me faire des idées.

Je suivis des yeux, le mouvement que les mains de Levinson avaient entrepris jusqu'à son cou, remarquant alors qu'il portait toujours mon écharpe, il ne l'avait pas retiré. Au fond de moi, une douce chaleur m'envahit. Je n'y fis pas attention.

— Bon, Davidson, Riddle-

Ma Némésis toisa Tina, de la même manière que l'avait fait, il y a quelques semaines auparavant, Rayan, dédaigneusement, de haut en bas, et le ton qu'il emprunta tout en prononçant son nom fut glacial.

— Lumina.

Puis, sur ces derniers mots, lui et sa bande quittèrent les lieux. Je ne le lâchai pas du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse au coin de la rue.

Une impression désagréable que quelqu'un me fixait me parvint alors, Tina me regardait l'air perplexe et interrogatif.

— L'écharpe qu'il portait. Elle ressemblait à la tienne, celle que tu portais ce matin.

Aïe. J'oubliais que Tina était loin d'être stupide, j'appréciais son intelligence et toutes les qualités qu'elle pouvait posséder, mais peut-être qu'à cet instant, j'aurais préférées qu'elle ne soit pas aussi vive d'esprit.

— Tu dois faire erreur. La mienne, je l'ai oublié en cours ce matin et quelqu'un me la prise, probablement l'agent d'entretien ou le professeur, j'irai la récupérer demain aux objets trouvés.

Elle me regardait avec une lueur de colère, elle doutait de mes propos, elle tentait de s'insinuer en moi, pour savoir si je lui mentais ou non. Stan vint à ma rescousse, en argumentant que ce que je disais était vrai, puisque je n'avais aucune raison de leur mentir, elle sembla accepter la chose et détacha enfin son regard de moi et me sourit. Elle s'en alla avant nous.

Je me sentais coupable d'avoir menti à Stan et Tina, particulièrement à Stan, mais ce sentiment disparut très vite, lorsqu'il me fixa, les yeux remplis d'interrogations. Il avait compris et il m'avait couvert.

Je fis un mouvement de la tête, avec un sourire peiné, lui faisant comprendre que je ne voulais pas en parler, puis je partis à la suite de Tina, le laissant avec ses questions. Une douleur me traversa, je venais de voir dans son regard un sentiment de trahison, c'était la première chose que je lui cachais quelque chose. Mon premier secret qu'il ne connaîtra pas.

— Pardon Stan.

Il ne nous suivit pas, me laissant ainsi retourner à mes réflexions. Tina, souriante à mes côtés, me donnait des frissons. Je n'étais pas dupe et elle non plus. Elle savait, elle était intelligente, pas stupide. Elle connaissait la vérité, j'en étais certain, elle savait que je venais de lui mentir et je savais aussi que ça, elle ne le digérerait pas de sitôt. Un sentiment de crainte m'envahit. Son sourire n'avait jamais sonné si faux.

⟣⟡⟢

La semaine qui arrivait annonçait le début des premières vacances et, pour cette occasion, l'université préparait un bal d'Halloween. Le thème suivait la tradition de la fête, on devait se déguiser, avec une précision en plus, puisque le bal s'avérait être, un bal masqué !

Le vendredi arriva vite, Tina était évidemment ma cavalière. Nous n'avions pas reparlé de l'incident de l'écharpe. Comme elle n'avait pas remis le sujet sur la table, je m'étais moi aussi tu. Au fond, je savais que je l'avais blessée, même si elle n'en avait rien laissé paraître.

Ce soir, elle était rayonnante, splendide. Ses cheveux bruns étaient attachés en chignon, grâce à une pince de couleur bleu nuit, s'accordant parfaitement à sa robe au style du XVIIIᵉ siècle, remise au goût du jour, mais qui restait toujours dans le ton de l'époque. La robe, de couleur argenté et bleu, lui saillait parfaitement, dessinant joliment ses courbes. Elle était vraiment magnifique.

Son costume se mariait à merveille avec le mien, puisque j'incarnais, Wolfgang Amadeus Mozart, auteur, compositeur de son époque et l'un des plus grands virtuoses au monde. Chemise blanche et veste bleu nuit, de même pour le pantalon. Nous étions parfaitement accordés.

À en croire le regard de Tina, je devais être renversant, du désir se lisait dans ses prunelles vert pâle. Je lui fis une révérence et lui pris la main, la conduisant jusqu'à la voiture de Stan, ce dernier venait d'arriver.

Mon meilleur ami portait un costume de pirate, qui lui allait assez bien, je devais le reconnaître. Avec lui non plus, je n'étais pas revenu sur le sujet de l'écharpe. Le lendemain qui avait suivi cette histoire, il m'avait reparlé naturellement, comme à l'ordinaire, me faisant même douter que ce fût arrivé, alors je n'avais pas essayé de remettre cela sur le tapis.

— Whoua ! Autant l'un que l'autre, méfiez-vous, vous risquez de vous faire courtiser !

Tina et moi nous regardâmes et sourîmes, riant à la remarque de notre ami. On était à tomber et on appréciait.

On se dirigea vers le modèle coupé cabriolet, plutôt chic, de Stan. Avec ma petite amie, on s'installa à l'arrière, laissant notre ami faire le taxi, sans aucun remords. D'ailleurs, il n'avait pas tardé à nous faire la réflexion, ce qui nous avait fait bien rire.

⟣⟡⟢

Arrivés devant la fac, sur le parking, nous apposâmes nos masques sur nos visages, nous rendant anonymes, puis on s'avança vers le gymnase dans lequel était organisée la fête.
Dès qu'on eut franchi la porte, la musique résonna dans nos oreilles et pulsait à travers tous nos corps. Je ne pensais désormais plus à rien, hormis à danser et à m'éclater, entraînant Tina et Stan à ma suite sur la piste.

Comme l'avait prévu mon meilleur ami, notre entrée ne passa pas inaperçue, pas du tout même. Tous les regards s'étaient braqués sur nous, les filles jalousant ma cavalière et vice-versa.

Stan n'était pas non plus resté en reste, bien plus d'une personne le dévorait du regard. Il nous abandonna rapidement d'ailleurs, après qu'il eut remarqué une fille qu'il trouvait jolie parmi celles qui lui faisaient les doux yeux.

Ce fut au bout d'une quinzaine de minutes que les regards d'envie se détournèrent de Tina et moi, quelqu'un d'autre accaparant l'attention. Je n'apercevais presque pas les personnes qui nous volaient la vedette, la foule me bloquant la vue. Tina semblait, elle aussi, titillée par ce retournement de situation. C'était nous le roi et la reine de cette soirée après tout.

Je finis par distinguer trois silhouettes. Deux étaient dans la même thématique que Tina et moi, la troisième personne était, quant à elle, habillée d'un costume de corsaire. Je ne m'attardai pas sur la fille qui se trouvait à côté de l'homme, j'étais bien plus attiré par ce dernier. Sa prestance effaçant intégralement, celle de sa cavalière.

J'incarnais Mozart, mais pas lui, lui avait choisi le rôle d'Antonio Salieri, le rival de Mozart. Si c'était une blague, elle était bien trouvée. Mozart et Salieri.

L'homme qui portait ce costume était, indéniablement, d'une grande classe. Quand il fut assez proche de moi, assez pour que j'aperçoive son visage, mon sang ne fit qu'un tour. Pourquoi ne m'en étais-je pas douté ? Même si le masque cachait son identité, ses yeux, eux, n'étaient pas masqués. Deux perles vertes, qui semblaient me défier de là où elles se trouvaient.

Je me figeai avec une expression dure. Tina le sentit et se tourna vers moi.

— Tu sais qui c'est Danny ?
— Non.

Elle haussa les épaules et se concentra à nouveau sur ses pas de danse, tandis que, pour ma part, je restai un moment bloqué dans la même position, au milieu de la piste.

Il n'y avait qu'une personne au monde avec de tels yeux, et une seule personne qui aurait pu me regarder de cette façon. Je fixais crûment mon rival de toujours et le rival de Mozart pour cette nuit.

Cet abruti me souriait, d'un rictus rempli de fierté. Il me mettait au défi, les habitudes ne changeaient pas si facilement.

On s'avançait l'un vers l'autre machinalement, lui et moi, ce soir, Salieri et Mozart. On se bravait, on le savait, on le sentait. C'était dans nos gènes, nos vieilles manies se réveillaient, les vrais, celles qui nous animaient, quelques années auparavant, on serait meilleurs que l'autre, le jeu était lancé.

Face à face, les yeux dans les yeux, à quelques centimètres de l'autre. Nous n'avions pas besoin de prononcer un seul mot, ça avait déjà commencé. Nous nous défierons pour le titre de roi de la soirée, comme le voulait la tradition du bal.

Nous nous détachâmes et partîmes chacun de notre côté, je me dirigeai directement vers un groupe de filles, afin de leur tenir un peu compagnie. J'avais besoin de gagner leurs votes, lui, fit de même de son côté. Tina comprendrait, mon honneur était en jeu.

Dans tout ce remue-ménage, je n'avais pas remarqué que Tina s'était arrêtée de danser et avait croisé les bras sur sa poitrine, fronçant les sourcils, affichant un air blessé, trahi, voire haineux, après avoir été témoins de la scène entre moi et Levinson.
Je n'avais pas non plus remarqué que le pirate et le corsaire qui s'étaient retrouvés, avaient stoppé tous mouvements, lorsqu'ils nous avaient vus nous avancer l'un vers l'autre. L'un affichant un air de pure méfiance et l'autre de colère mêlée à de l'inquiétude.

Mais aucune de ces scènes n'était parvenue jusqu'à moi, j'étais coupé du monde. Coupé de celui-ci par deux prunelles vertes, beaucoup trop vertes et qui m'hypnotisaient.

Aucune des émotions qui passèrent par le cœur de mes amis ne parvint jusqu'à moi, pas plus que celle du corsaire, Rayan.

Si seulement, à ce moment-là, j'en avais eu connaissance.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet