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1 - Avant-Propos
2 - Guide de Prononciations
3 - Chapitre 1 - Sous la pluie des Hyades
4 - Chapitre 2 - La lettre tachée
5 - Chapitre 3 - Marbre et carmin
6 - Chapitre 4 - Le briquet amadou - Partie 1
7 - Chapitre 4 - Le briquet amadou - Partie 2
8 - Chapitre 5 - Le mythe de l'Enfant de l'Oubli
9 - Chapitre 6 - Piqûre d'orgueil - Partie 1
10 - Chapitre 6 - Piqûre d'orgueil - Partie 2
11 - Chapitre 7 - Monseigneur
12 - Chapitre 8 - Les ravages du temps - Partie 1
13 - Chapitre 8 - Les ravages du temps - Partie 2
14 - Chapitre 9 - La fille de marbre - Partie 1
15 - Chapitre 9 - La fille de marbre - Partie 2
16 - Chapitre 10 - L'embrasement
17 - Chapitre 11 - Tu t'appelles Kophyn - Partie 1
18 - Chapitre 11 - Tu t'appelles Kophyn - Partie 2
19 - Épilogue
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Chapitre 2 - La lettre tachée

En passant sous la herse, Kophyn se fit la remarque qu'en vérité, ils pénétraient dans la cour d'un noble dont ils n'étaient pas les invités. La silhouette menaçante de l'immense bâtisse pesait lourdement sur le village et sa noirceur semblait envelopper les habitations comme les pans d'un rideau opaque. Bien qu'aucune résistance ne leur fut opposée, l'elfe pressentit malgré tout que leur venue n'était pas attendue.

Et si ses instincts premiers lui soufflaient d'aller se fondre dans les ombres pour se dissimuler, observer et traquer, il devinait qu'ils feraient tous mieux de rester ensemble pour affronter les démons de cet endroit. Probablement étaient-ce également les pensées des malheureux hères du groupe puisqu'ils s'étaient immobilisés.

Malgré le temps qui n'était pas au beau fixe, le village ne s'enlaidissait pas, bien au contraire. Les toits accueillaient les trompes d'eau avec plaisir pour les laisser ruisseler le long de larges tuiles en ardoise, avant de s'échouer dans des bassins tout le long de la rue. Ceux-ci étaient prévus à n'en pas douter pour les journées chaudes, supposait Kophyn, si toutefois ce pays en connaissait.

Le bois était omniprésent sur les façades bien que les murs étaient de pierre. Que ce fût des pontons, des devantures, des encadrements, des poutres apparentes, les formes étaient diverses, mais l'essence de l'arbre était toujours la même. Ce village avait ce petit quelque chose de charmant si on ne considérait pas l'ombre menaçante du château qui le surplombait. La bâtisse donnait l'impression d'un berger qui surveillait son troupeau parce qu'il ne voulait qu'aucune de ses brebis ne s'égare.

— Allons-y, siffla simplement Kophyn en tendant un bras derrière Viscardi pour l'inviter à passer le premier.

Après tout, quitte à se jeter dans la gueule du loup, Kophyn préférait lui offrir ce vampire en pâture. Il était un sacrifice parfaitement acceptable selon le drow.

Bien que la nuit fût tombée sur le village, une agitation tranquille emplissait les rues. Les lumières des maisons éclaboussaient le pavement inégal où des traces de boue laissées par les missionnaires étaient rapidement rincées par la pluie. Le temps et l'heure tardive ne semblaient en rien être un frein pour l'activité de cet endroit, dont les habitants en avaient fait une habitude.

Kophyn fermait la marche, la main au côté prêt à dégainer sa dague, au besoin. Il observait, attentif, et comprit bientôt que la singularité du village n'avait rien à envier à ceux qu'il avait déjà conquis avec ses frères d'armes. D'apparences banales et coquettes, les maisonnées n'abritaient pourtant aucun humain. Des gobelins tenaient une boutique de bricoles sur le bord de la chaussée et étaient en grande conversation avec un centaure dont plusieurs sacoches de provisions pendaient de son dos. On regarda les nouveaux venus d'un œil méfiant, mais personne ne les interpella. Les habitants préféraient vaquer à leurs occupations sans se soucier de ce qui ne les concernait pas. Une discrétion d'ordinaire salutaire, que Kophyn trouvait particulièrement étrange en ce lieu.

Une porte s'ouvrit brusquement sur la rue.

La chaleur et le tumulte de l'enceinte qu'elle révélait furent gerbés jusque sur les pavés. Un homme grand et massif, dont les bras faisaient la taille des jambes de Kophyn, s'en extirpa pour jeter un corps informe dans le caniveau. Sa voix chaude roula comme la roche le long d'une montagne. Il semblait grogner tout en parlant.

— Va donc décuver dans une flaque d'eau fraîche ! lâcha-t-il au pochtron qu'il venait d'expulser de son établissement.

D'un simple regard en hauteur, le drow lut l'enseigne. Le panneau ballottait au bout de petites chaînes usées et indiquait « La Chape de plomb ». Kophyn haussa un sourcil. Curieux nom pour une taverne, mais idéal pour une entreprise funéraire.

— Oh étrangers ! les interpella le gérant à l'odeur musquée. Vous avez fait longue route, à c'que je vois ! Venez donc vous réchauffer à l'intérieur. On a du ragoût sur le feu.

Il leur adressa un geste de la main avant de retourner dans son établissement bruyant. Une taverne, c'était le lieu parfait pour en apprendre plus sur les environs et sur ce qui se rapprochait de près ou de loin à leur mission.

Kophyn lança un regard vers ses compagnons. Un silence retomba sur le petit groupe où chacun se jetait des œillades fuyantes. L'évidence s'imposait d'elle-même : personne ne souhaitait répondre à l'invitation du tenancier. Le drow inspira. Il serait bon de rappeler à chacun qu'ils formaient une équipe à présent, bien que cela lui déplût autant qu'à eux. Il ouvrit la bouche, mais une autre voix que la sienne s'éleva.

— Je vais aller voir de ce côté, si je peux trouver... une bibliothèque, ou quelqu'un qui peut nous renseigner, s'exclama rapidement Fyre en montrant la rue du doigt.

— Je t'accompagne ! s'élança Laekces à sa suite. Chercher un mot dans une bibliothèque, c'est pas simple.

Déjà, l'ondin s'éloignait avec la guerrière aux cheveux carmin, en discutant encore des quelques lignes prophétiques qu'on leur avait servies. Kophyn souffla par le nez. Ils avaient beaucoup à échanger ces deux-là, mais il aurait apprécié qu'ils ne s'esquivent pas de la sorte.

Krunia affichait une attitude en accord avec son jeune âge, puisqu'elle offrit un grand sourire et décida de partir batifoler vers les différents étales. Le drow crut l'entendre chantonner qu'elle allait chercher de quoi se protéger de la pluie. C'était effectivement une priorité absolue.

Il ne restait donc que Viscardi. Au point où il en était, Kophyn n'avait aucune envie que cette charogne l'accompagne à l'intérieur, alors quand il tourna le visage vers lui, une expression hostile peinte sur ses traits, il fut bien soulagé que l'autre lui annonçât qu'il préférait se trouver « un truc à se mettre sous la dent ». Kophyn le scruta d'un sale œil tandis qu'il partait en chasse sans une once d'hésitation.

Le voilà qui se retrouvait seul au milieu du pavement, face à cette lourde porte qui suintait le malt macéré. Ah, elle était belle, leur « équipe » ! L'elfe soupira, roula des yeux et se dirigea vers la taverne. Il fallait tout faire soi-même dans ce trou paumé.

Le drow poussa la porte de la Chape de plomb et s'il avait eu l'intention de s'asseoir dans un coin pour laisser ses oreilles traîner, il changea rapidement d'avis. Optant pour une approche plus incisive, il s'installa au comptoir.

Sans qu'on lui laissa l'occasion de répliquer, on lui offrit une écuelle de ragoût. Kophyn la décortiqua du regard, soucieux de ce qu'on cherchait à lui faire avaler.

— Mange donc, ça te réchauffera, mon biquet !

Kophyn releva ses prunelles rosâtres vers le tavernier à la carrure d'un ours. Il préférait ignorer son assiette, ainsi que le sobriquet, et planta ses coudes sur le plan de bois. Les doigts croisés, les paupières plissées, il interrogea. Sa voix fut basse malgré le tumulte ambiant, mais il était assez proche de son interlocuteur pour qu'il l'entende.

— Que savez-vous du « premier des mots » ?

— Le premier des mots ? Ahh, aucune idée ! J'suis pas un homme de lettres, moi. Mais je brasse ma propre bière à la châtaigne, t'en veux un godet ? ajouta-t-il, parce que ce détail changeait tout, bien sûr.

— Hmm... non, ça ira, souffla Kophyn. Je cherche quelque chose qui est immobile depuis longtemps. Quelque chose d'imposant peut-être, d'important. Ça ne vous dit rien du tout ?

Le tavernier réfléchit un instant. Il porta la main à son poitrail pour gratter l'épaisse moquette qui débordait de sa chemise.

— Boh, y a bien le grand château, là. Le village a été construit à son pied. Ça fait des siècles qu'il est là. Il a toujours été là. Grand, immobile, important. Et p'is d'toute façon, si tu veux en savoir plus sur des sujets obscurs comme ça, tu f'rais mieux d'aller voir le lord. Lui, y pourra plus te renseigner qu'tout les poivrots du coin !

Pris par un humour qui échappait à Kophyn, l'homme se lança dans un rire guttural qui entraîna avec lui les autres soûlards de la taverne. Apparemment, être un poivrot était un compliment dans cette partie du monde. Le roi des ivrognes lui avait en tout cas donné une piste à creuser, et Kophyn devinait qu'il n'apprendrait pas grand-chose de plus en ce lieu, tout compte fait.

Finalement, l'odeur du ragoût chatouillait beaucoup les narines de l'elfe, alors il décida de se laisser tenter. Son espèce était particulièrement résistante aux poisons et il se savait capable d'y faire face si son plat en contenait. Ce fut donc sans trop d'appréhension qu'il plongea la cuillère en bois dans la sauce pour en prélever quelques légumes bien cuits et les manger. C'était chaud, tendre et savoureux. Il soupira. Ça faisait du bien et ça changeait du régime alimentaire habituel des Entrailles, majoritairement composé de fongus. Il n'oubliait pas la mission et le sceau sur sa nuque, mais se restaurer un peu n'avait pas été mentionné comme une interdiction. Il apprécia donc ce moment sans ses comparses d'infortune.

Alors qu'il déposait quelques pièces sur le comptoir avant de quitter la taverne, l'ours lui glissa un morceau de papier sali, face contre le bois. Kophyn plissa encore les yeux, d'un air interrogatif. Les bords étaient irréguliers. Il avait été de toute évidence déchiré dans une feuille plus grande. Des traces de gras le souillaient et lorsque Kophyn tendit la main pour s'en saisir, il grimaça.

— Prends, le lord te parlera s'il sait qu'tu viens d'ma part.

— Vous le connaissez ?

— Tout le monde le connaît et il connaît tout le monde, ici. C'est le lord, répétait-il comme une évidence.

Kophyn retourna le papier entre ses doigts. Il sentait le beurre et l'alcool et sur sa face, l'encre s'était diffusée à cause de l'humidité. Bien que l'écriture du tavernier ne fut pas soignée, il était indéniable qu'il avait fait de son mieux. La lettre était tout de même lisible et disait ceci :

"Monseigneur Thaemios Khrusóma,

Je vous envoie ce voyageur qui s'intéresse aux histoires du coin. Faites-en bien ce que vous voudrez.

Guzrom, de la Chape de plomb"

Kophyn roula machinalement le papier dans sa paume, tout en réfléchissant. Thaemios Khrusóma. Ça ne lui disait absolument rien, mais ce nom semblait venir de temps anciens et informait le drow qu'il était peut-être sur une piste. De toute manière, c'était tout ce qu'il avait pour le moment. Il hocha la tête en guise de remerciement et sortit de la taverne.

La première chose qu'il remarqua fut la météo. La pluie avait cessé. Du moins, elle s'était bien calmée et n'était à présent plus qu'un crachin gênant. Les toits gouttaient encore et l'humidité saturait l'air, mais il y avait du mieux. Kophyn s'élança sur le pavé, pour prendre la direction du château. Il ne songea pas un instant à ses compagnons de route, qui n'avaient eu aucun scrupule à lui tourner le dos. Après tout, ils pouvaient bien faire ce qu'ils voulaient, ça ne le regardait pas.

Les lumières colorées des devantures se déformaient dans les flaques d'eau, avant que Kophyn ne les troublât en marchant dedans, le pas vif. Les odeurs de cuisine s'aventuraient dehors maintenant qu'elles n'étaient plus chassées par la pluie et le vent et les éclats de discussion animaient encore la rue principale, çà et là. Le fumet des légumes bouillis se mêlait à la cannelle en volutes que Kophyn devinait danser sous son nez. S'il n'avait pas déjà un peu mangé, cela lui aurait fortement ouvert l'appétit.

Ses pensées furent perturbées lorsqu'il aperçut Viscardi ressortir d'un interstice entre deux maisons. Le vampire s'essuya le bas du visage d'un revers de manche et quand il nota la présence de son ennemi devenu allié, il lui offrit un grand sourire.

Arrivé à son niveau, Kophyn pencha la tête vers l'étroit passage et bien que les lueurs de la rue n'atteignaient pas ce coin d'ombre, il remarqua sans mal une silhouette vautrée au sol.

— Tu l'as saigné ? questionna-t-il sur le ton du reproche.

Viscardi haussa un sourcil dans une expression qu'il voulait outrée, avant de se muer en un sourire faussement attendri.

— Ohh... t'es jaloux ? T'as cru que comme je t'ai mordu, maintenant c'était « toi et moi » pour la vie ?

— Tsss, je cherche juste à savoir si le cadavre est bien planqué ! On a pas besoin d'emmerdes supplémentaires par ta faute.

Kophyn claqua de la langue, viscéralement énervé par cet individu, cette charogne des rues à l'odeur nauséabonde. Cependant, il remarqua une petite enveloppe froissée précieusement serrée entre les doigts du vampire. Kophyn y porta la main pour s'en saisir.

— Qu'est-ce que c'est ? Quelque chose d'utile ?

Viscardi écarta vivement son bras pour empêcher Kophyn de s'emparer de son butin. Sa bonne humeur fut si vite chassée qu'on aurait pu le penser sujet aux personnalités multiples. Déjà, le voilà qui montrait les crocs.

— Il n'y a pas de cadavre parce que je n'ai tué personne. Contrairement à toi et ta race, je ne détruis pas tout sur mon passage, accusait-il en plantant un index dans le torse de Kophyn. Et puis de toute façon, en quoi ça te regarde ce que je fais de mon côté ? T'es bien allé te soûler à la taverne, toi.

Puis, il changea à nouveau de ton. Viscardi haussa une épaule.

— Et ça, appuya-t-il en agitant la petite enveloppe sous les yeux de Kophyn, c'est mon paiement pour mes services.

Kophyn fronça les sourcils. Il préférait ne pas répondre aux provocations, ça ne mènerait à rien. Viscardi était un vampire jeune et il avait par conséquent l'impertinence et l'amour du conflit des enfants. Les drows aussi partageaient ce trait de caractère, mais Kophyn était âgé de cent deux ans, et bien que cela correspondît à vingt-cinq années humaines, cela lui assurait un meilleur contrôle de ses pulsions.

— Quels services une rognure d'ongle comme toi peut bien avoir à offrir ?!

La satisfaction que Kophyn ressentit en voyant la face de Viscardi pâlir à son insulte ne fut pas simulée. Tant de résultats pour si peu d'effort, ça avait le goût d'une jouissance sans pareille. Toutefois, le vampire se reprit et un sourire aguicheur éclaira son visage. Il ne se gêna pas pour s'approcher de l'elfe et appuyer son corps contre le sien, lascif.

La réaction de Kophyn fut vive, il repoussa Viscardi d'un coup de coude, alors que sa langue claquait sur son palais. Il pouvait déjà sentir la mauvaise odeur de ses fripes se coller à ses propres vêtements. Viscardi ne s'en offusqua pas et fit danser ses mains pour présenter théâtralement son galbe.

— Tu vois ce superbe corps ? Certains sont prêts à payer des petites fortunes pour en disposer comme ils l'entendent.

— Ouais, t'es une catin, quoi.

— Mais une catin de luxe, se pavanait le vampire. Et en plus, c'était l'occasion de satisfaire deux faims à la fois, appuya-t-il en se pourléchant.

— Tsss...

Dans la société drow, il n'y avait pas de tabous. Ou très peu. Le sexe n'en était pas un, mais il n'était pas non plus une obsession comme cela semblait l'être pour beaucoup d'habitants de la surface. Kophyn ne comprenait pas que quelque chose d'aussi trivial et mué par le besoin primitif de procréation pût devenir quelque chose à ce point central de tout sujet. Sur bien des aspects, Viscardi répugnait Kophyn. Le simple fait qu'ils aient croisé le fer sans qu'aucun d'eux succombât laissait une marque indélébile que le drow rêvait de pouvoir effacer.

— Et toi, t'as trouvé quelque chose d'utile ?

Au moment où il posait cette question, Krunia, la jeune faune revenait vers eux. Elle portait une capeline dont la capuche avait été percée de deux trous pour ses longues cornes. Elle semblait bien plus en joie d'avoir pu protéger son épaisse tignasse de la pluie.

Dans ses bras, elle gardait précieusement un sac en jute d'où elle piochait des amandes grillées. Elle le tendit à Kophyn pour lui en proposer quelques-unes mais l'éloigna bien rapidement quand Viscardi voulut en profiter.

— Pas avec tes mains sales ! Tu sens la semence de loup, lui fit-elle le reproche.

L'elfe pouffa en croquant un fruit sec. Que c'était bon de voir une gamine rabrouer ce malotru condescendant ! Néanmoins, il n'en oublia pas la question que lui avait posée la sangsue et qui faisait sens. D'autant plus que les deux autres membres de leur groupe arrivaient à leur tour. Quand tout le monde fut réuni, Kophyn prit la parole.

— J'ai appris par le tavernier que le village est régi par un noble, qu'il appelle le lord, indiqua-t-il le château d'un coup de menton. Je dispose d'une... lettre d'adressage pour lui rendre visite et lui poser nos questions. Si quelqu'un peut nous renseigner, ce sera lui.

— Hmm, je n'ai rien pu apprendre des habitants, regrettait Fyre. Dès que je leur adressais la parole, ils avaient l'air effrayés.

— C'est parce que tu parles mal, se moqua Laekces.

— Ah, parce que tu en as appris plus, toi ?

— Non, je ne me suis pas donné cette peine puisque tu t'en chargeais, sourit-il, pas peu fier.

Fyre roula des yeux avant de les darder sur Kophyn. Elle inspira et demanda à voir la fameuse lettre d'adressage.

— On est au moins deux à prendre notre mission au sérieux. Par contre, pour une lettre d'adressage...

— Je ne crois pas qu'il faille s'attendre à mieux, la coupa Kophyn. Garde-la sur toi, je te l'offre.

— Trop généreux, vraiment, grimaça Fyre en tenant le morceau de papier du bout des doigts.

— Hmmm... bah moi, j'ai appris deux trois petites choses, commença Krunia en s'enfilant quelques amandes de plus. Comme par exemple... le château serait hanté. Ou maudit. C'est pareil. Apparemment, les personnes qui s'y rendent n'en sortent jamais.

— Pour quelle raison ? demanda Fyre.

— Ils n'ont pas voulu me le dire, se régalait la jeune femme. Mais...

Elle plongea à nouveau sa main dans son petit sac d'amandes et le tendit encore à Kophyn. L'elfe déclina poliment l'offre et l'invita plutôt à poursuivre son récit.

— Mais ils m'ont dit que sous aucun prétexte nous ne devrions nous rendre à la cave. Elle doit rester fermée en toute circonstance.

— À la cave, répéta le vampire. Et ils ne t'ont pas dit pourquoi ?

— J'ai pas demandé.

Viscardi leva les mains au ciel et souffla par dépit.

— T'as pas demandé... bah voyons ! C'est vrai qu'on s'en contre-balance. T'as pas demandé... Mais qui m'a affublé de coéquipiers branquignols comme vous... j'en ai marre, je me barre ! Vous allez me traîner dans la tombe.

Pourtant, si ce n'était pour faire quelques pas sur le côté, le vampire ne partit pas réellement. Il n'avait nulle part où aller et le sceau qui avait été apposé sur sa peau assurait qu'il n'en ferait rien.

— Personnellement, ça me rend curieux, l'ignora Laekces. Ce que nous cherchons s'y trouve probablement.

Kophyn approuva silencieusement et proposa que, forts de ces quelques informations, ils avaient tout intérêt à rencontrer ce fameux Lord Khrusóma. De toute façon, ils n'avaient visiblement rien de plus à apprendre des habitants de ce village, alors autant quérir une audience auprès de celui qui détenait autorité et savoir dans cette contrée.

Tous furent d'accord, Viscardi compris.

Tandis qu'ils remontaient la rue de pavés vers l'immense demeure, Laekces charriait encore Fyre de faire sa précieuse. Elle n'osait pas ranger la lettre poisseuse dans ses vêtements et la tenait du bout des doigts. La voix ferme de la jeune femme l'intimait au silence et Kophyn n'eut pas besoin de se retourner pour comprendre qu'elle venait de lui flanquer un coup, quand l'ondin s'interrompit soudainement après une énième remarque.

Note de l'auteur :

Ce chapitre s'est laissé emporter comme une caravane dans la brume : un peu plus long que prévu. 

Le rythme vous convient-il ? Ou préférez-vous des étapes plus brèves ? 

Vos mots sont des lanternes sur le chemin, alors n'hésitez pas à m'éclairer en commentaire.

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