Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Emma_mchrd
Share the book

Chapitre 4

Lev

Cette fille était une tarée.

–Premièrement, j'ai ma chambre, tu as la tienne, tu ne viens pas dans la mienne. Deuxièmement, pas touche à mes livres, mais ça ne devrait pas poser de problèmes ça, tu n'as pas le portrait d'une personne qui lit. Pas le droit de critiquer mes livres. On referme les portes, sinon tu seras de corvée vaisselle pendant deux mois. Interdit de dire des propos sexistes, humour ou non, ça va de soi. Ensuite...

–T'as bientôt fini ? La coupais-je.

–Ensuite, on est respectueux, donc on ne coupe pas la parole. Sixièmement, tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies.

–Ok, dis-je en me levant.

–Et une dernière chose, arrête ça.

–De quoi ?

–De faire le mec froid qui en rien à faire de tout, ça m'insupporte au plus haut point.

–Tant mieux alors.

–Il est insupportable, l'entends-je murmurer au moment où je pars.

Je la vis me regarder sortir du salon, l'air furieux, mais je ne m'en souciais pas. J'avais déjà entendu ces discours mille fois, et au fond, je savais qu'elle n'en attendait rien de plus que d'entendre un peu de résistance. C'était son truc à elle, visiblement : imposer des règles et attendre que quelqu'un les défie juste pour pouvoir s'emporter.

Je traversai le salon sans un regard, me dirigeant vers ma chambre. La porte se ferma derrière moi, mais je l'entendis encore murmurer quelque chose dans le salon. Peut-être que cela m'agaçait un peu, mais je ne voulais pas lui donner cette satisfaction.

Je posai mon sac au sol et m'assis sur mon lit. C'est vrai que je pouvais jouer le jeu, répondre à ses attentes, faire semblant d'être intéressé par ses règles à la con, mais honnêtement, cela ne me faisait ni chaud ni froid. Si elle voulait une colocation où il fallait suivre des règles aussi précises, qu'elle aille les imposer ailleurs. Moi, j'avais ma propre façon de vivre.

Le silence dans ma chambre était lourd, presque oppressant. Une partie de moi, pourtant, avait envie de faire tomber ce mur, de l'accepter. Mais je n'y arrivais pas. J'étais coincé dans ce rôle du mec détaché. Un rôle que je me forçais à jouer.

La vérité, c'est que je portais un poids. Et je ne parlais pas de cette tension avec Sierra, ni des petites batailles de colocation. Non, ce que je portais, c'était plus lourd. C'était tout ce qui s'était passé avant, tout ce que j'avais enfoui sous des couches de cynisme et de silence. Le problème, c'est que cela me rongeait de l'intérieur.

J'avais souvent essayé d'oublier. De mettre cette histoire dans une boîte bien fermée et d'en tourner la clé. Mais il y avait des jours où tout déraillait. Où je me laissais rattraper par ces souvenirs. Où je me sentais comme si je n'avais jamais eu le contrôle, comme si tout m'avait été arraché. C'était cela qui m'effrayait, en fait : ne pas avoir su dire non. Ne pas avoir su fuir. Ne pas avoir eu la force d'interrompre ce qui se passait, de crier.

C'était étrange, je n'arrivais pas à expliquer pourquoi je me retrouvais à y repenser maintenant, après tout ce temps. Peut-être que je croyais que cela m'affectait moins. Que j'avais guéri. Mais j'avais beau essayer de tourner la page, il y avait quelque chose qui ne partait jamais vraiment.

Je me souvenais de cette soirée comme si c'était hier. L'ambiance était lourde, un peu étrange, mais j'étais jeune et naïf. J'avais pris cette décision de rester, de ne pas partir, pensant que cela allait être juste une autre soirée entre amis. Je n'aurais jamais imaginé que tout allait basculer.

Je me souvenais de l'odeur de l'alcool, de la chaleur dans la pièce, du bruit des conversations. Puis, il y avait eu ce regard, ce geste... et ce sentiment qui m'avait envahi. L'impression que je n'avais plus de choix, que tout était hors de contrôle. Ce n'était pas un accident, ni une erreur. C'était un moment où quelqu'un avait pris ce qu'il voulait, sans même s'inquiéter de ce que j'avais ressenti. Et moi, là-dedans, j'étais perdu. Comme si j'étais devenu un objet, comme si mon consentement n'avait aucune importance.

Les nuits qui suivirent furent pires. Parce que ce qui s'était passé dans cette pièce ne cessa jamais d'être en moi, me hantant, se réveillant parfois au milieu de la nuit. Et pourtant, je n'en parlai à personne. Je ne sus même pas comment en parler. Parce que, dans ma tête, il y avait toujours cette voix qui me disait que c'était de ma faute. Que si je n'avais pas fait telle ou telle chose, cela ne serait jamais arrivé.

Mais voilà, cela ne partait pas. Cela me collait à la peau comme un poids que je ne pouvais pas enlever. Et ces jours-là, où tout me paraissait inutile, c'était comme si je pouvais sentir ce poids plus fort que jamais. Comme si cela revenait me percuter en plein cœur, et je me retrouvais à jouer ce rôle du mec froid, de celui qui s'en foutait de tout, parce que c'était la seule manière de tenir debout. La seule chose qui m'empêchait d'exploser.

Peut-être que j'étais fatigué de ce rôle. Peut-être que, quelque part, j'aurais aimé pouvoir hurler tout ça, tout ce que j'avais caché, tout ce que je portais depuis trop longtemps. Mais, pour l'instant, je restais là. Dans ma chambre, avec ce mur autour de moi. Parce que même si je le voulais, je ne savais pas par où commencer.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet