Le café sentait la pluie et le café brûlé.
Quelques tables en bois usé, des banquettes en velours rouge défraîchies, une musique douce en fond... C'était tout sauf glamour. Mais il y avait quelque chose d'intime, de réconfortant dans cet endroit.
Élisa essuya rapidement son visage trempé et s'approcha timidement du comptoir. Le jeune homme ne la quittait pas des yeux, sans insister, sans lourdeur. Juste... attentif.
Elle sentit son cœur battre un peu plus vite. Ridicule. Elle ne le connaissait même pas.
— Vous voulez un café ? demanda-t-il d'une voix grave et douce.
Élisa hésita.
Elle hocha la tête.
— Oui... Merci.
Il fit un signe au serveur sans la quitter du regard, puis repoussa doucement son carnet noir pour lui faire un peu de place.
— Vous avez l'air perdue, dit-il.
Élisa esquissa un sourire triste.
— C'est peut-être parce que je le suis.
Il ne répondit pas tout de suite. Il se contenta de poser ses doigts sur la couverture de son carnet, comme s'il caressait un souvenir.
— Raphaël, dit-il enfin en tendant la main.
Élisa serra doucement la sienne.
— Élisa.
Un léger courant électrique passa entre leurs paumes.
Ou peut-être était-ce juste l'effet de cette soirée étrange, entre la pluie, la fatigue et cette rencontre inattendue.
— Alors Élisa, poursuivit Raphaël en souriant légèrement, qu'est-ce qu'une fille perdue vient chercher dans un endroit pareil ?
Elle haussa les épaules.
— De l'oubli, peut-être.
Raphaël eut un petit rire amer.
— Mauvais choix. Ici, on trouve surtout des souvenirs qu'on croyait avoir enterrés.
Le serveur posa deux cafés devant eux, éclaboussant un peu la soucoupe. Élisa observa Raphaël.
Il était beau, mais pas d'une beauté parfaite. Ses traits étaient légèrement marqués, comme s'il avait trop vécu pour son âge. Ses cheveux noirs, en bataille, tombaient sur ses sourcils.
Il avait l'air... vrai. Et c'était peut-être ce qui la troublait le plus.
Elle entoura sa tasse de ses mains froides.
— Et vous ? demanda-t-elle doucement. Vous cherchez quoi ici ?
Un éclat passa dans les yeux de Raphaël. Une ombre.
— À ne pas sombrer, répondit-il, presque dans un murmure.
Un silence complice s'installa entre eux, dense, chargé de ce que chacun fuyait.
Au fond, ils n'étaient peut-être que deux naufragés se reconnaissant dans la tempête.
Et pourtant, sans le savoir, Élisa venait de mettre le pied dans une histoire bien plus dangereuse que tout ce qu'elle aurait pu imaginer.
Car Raphaël n'était pas qu'un simple photographe solitaire.
Il portait un secret.
Un secret capable de les détruire tous les deux.