Le lendemain matin, Paris s'éveilla lentement sous un ciel de plomb.

Élisa ouvrit les yeux, encore flottante.

Elle avait rêvé de la nuit précédente, de leurs rires, de sa main dans la sienne... Mais un détail la troubla : dans son rêve, il y avait aussi des murmures, des silhouettes, des pas dans son dos.

Elle chassa cette impression d'un geste, se leva et se prépara mécaniquement.

Aujourd'hui, elle travaillait à la petite librairie du Marais où elle était employée à mi-temps. C'était un havre pour elle, un endroit où les livres murmuraient à son oreille, loin du vacarme du monde.

Vers midi, alors qu'elle rangeait des cartons derrière la boutique, son téléphone vibra.

Un message inconnu.

Raphaël : "Pause café ? Rue des Archives, dans 15 minutes."

Un sourire étira ses lèvres.

Elle n'hésita pas une seconde.

**

Il l'attendait à la terrasse d'un petit café discret, son carnet noir posé à côté de lui.

Lorsqu'il la vit arriver, il se leva, presque instinctivement, comme si sa présence avait une importance qu'il ne contrôlait pas.

— Tu es venue, souffla-t-il, presque étonné.

— J'avais envie, répondit Élisa, gênée par la sincérité de sa propre voix.

Ils s'installèrent côte à côte, leurs genoux se frôlant presque.

Ils parlèrent de tout et de rien, de livres, de photos, de souvenirs d'enfance.

Élisa se surprenait à rire, à parler sans réfléchir, à se livrer sans peur.

Raphaël l'écoutait avec une attention si rare qu'elle avait l'impression d'exister à nouveau, pleinement.

Mais au fond de ses yeux, une ombre persistait.

Une inquiétude qu'il essayait de cacher.

Au moment de payer, Raphaël fouilla dans sa poche.

Élisa remarqua quelque chose tomber discrètement de son blouson : une petite carte noire, rigide, qui glissa jusqu'à ses pieds.

Elle se pencha pour la ramasser.

Sur la carte, un symbole étrange était gravé — un cercle noir barré d'une ligne rouge — et un simple mot en lettres capitales : "SPECTRE."

Raphaël blêmit en la voyant tenir la carte.

Il la reprit doucement, presque trop vite.

— Ce n'est rien, dit-il d'une voix basse. Un vieux truc.

Élisa haussa les sourcils, mais il détourna le regard, évitant ses questions silencieuses.

Pour la première fois depuis leur rencontre, un frisson de doute la traversa.

Qui était vraiment Raphaël ?

Et pourquoi avait-elle le sentiment qu'il n'était pas seulement poursuivi par ses souvenirs, mais aussi... par des ennemis bien réels ?

**

Plus tard, seule dans sa chambre, Élisa fixait le plafond.

Le mot gravé sur la carte tournait en boucle dans sa tête.

SPECTRE.

Et dans l'ombre de Paris, le piège continuait lentement de se refermer sur eux.