Charles
Purée d'une bouteille de vodka, il fait super froid. Je devrais abandonner l'idée d'envoyer ma petite Lyly à la supérette.
Je sais pas où je vais, mais j'y vais. J'suis bien curieux de voir où mes pieds vont m'emmener.
Il va être un peu tard, nan très tard même je ne vois plus le soleil, juste un ciel bleu et des lampadaires qui commencent à s'illuminer comme les lumières rondes des voitures bizarres je sais plus...
J'essaye de me réchauffer en me frottant un peu à moi même, en vain, c'est plutôt mon coeur que je devrais essayer de réchauffer.
Ça fait depuis hier soir que j'ai rien bu, et il est déjà presque 19heures. Faut que je trouve un moyen de me procurer une drogue ou une quelconque bouteille d'alcool, quelque chose de susceptible à combler se vide qui fait mal... C'est pas possible, quand je repense à quand j'avais encore fraîchement 28 ans, ce soir-là où j'ai dû refuser la marchandise d'un dealer qui passait pour la première et dernière fois dans le parking de l'hôpital où je bossais. Quel enfoiré j'étais... je regrette tous mes ancêtres.
« Impossible que je me drogue, je suis docteur. »
Le fait que je pensais comme ça avant m'effraie, alors qu'aujourd'hui je ne peux passer une journée sans ma dose de folie, voire la vie en rose, faire chier tout le monde...je ne veux plus jamais être sobre !
Je m'arrête, à peut-être trois mètres, dans un coin de rue isolé de la ville, planqué entre deux murs tagués.
L'endroit pue l'urine... comme le shit. Ça me plaît.
J'avance tranquillement, confiant, les mains dans les poches, mais je m'arrête un instant.
Certains toxicos se sont réunis autour d'un feu, bouteille à la main.
— Qu'est-ce tu regardes charmant vieil homme ? Dit l'un des toxicomanes en riant d'ivresse.
J'ai pas l'air si différent d'eux.
Je me marre intérieurement de ma propre remarque.
J'analyse l'endroit : y'a deux dealers au fond. Un groupe de jeunes délinquants est avec eux ils doivent avoir quoi... 17, 18 ans ?
Fais chier, ils doivent vendre super cher.
Les murs sont tagués, moisis, et surtout un peu étroits. Si les flics commencent à débarquer, j'aurai aucune issue.
Mais c'est pas grave. Ça m'arrive tout le temps.
Je m'avance jusqu'à ce qu'un des dealers me repère et vienne vers moi, tout en noir, capuche vissée, clope au bec.
— Salut mon vieux, dis-moi ce que tu veux.
Il jette sa clope, l'écrase du pied.
— Tu me proposes quoi ?
— Du CBD, ça te va ?
Est-ce que j'ai l'air d'être ici pour de la CBD ? Cette fois ci je râle intérieurement.
— Non... t'as pas du crack ou de l'héroïne ?
Il hoche la tête, confiant.
— Carrément, t'inquiète, c'est 30 balles.
Je me fige, il voit que ça me choque. Je pète un câble.
— Tu te fous de moi ?!
— À gros, c'est le marché... il lève les mains l'air innocent.
Quelle arnaque... J'ai vu des désespérés se faire avoir pour moins que ça.
Bon, j'ai qu'à chercher dans ma veste en cuir. Lyly me l'emprunte parfois, elle a bien dû y planquer un peu de fric ou un truc du genre...
Mais avant que je fouille plus loin, le dealer pose une main sur mon épaule. Quand je lève la tête, il me regarde, surpris.
— Un problème, fiston ?
Je réponds automatiquement, confus.
— Attends... c'est toi, Charles ?!
Il éclate de rire à gorge déployée.
Je suis largué un moment, jusqu'à ce qu'il enlève sa capuche, révélant complètement son identité.
Si j'étais pas sobre à ce moment précis, je me serais sûrement plié en quatre de rire.
Mais là, je suis juste... vide. Aucune émotion ne me traverse, dépressif quoi. Revoir Elio, par hasard, comme ça... Un des plus vieux potes d'Erin. Un dealer.
— Wow, désolé vieux, mais d'habitude on te voit plus avec un sourire de clown...
Il continue en me prenant par l'épaule, m'entraînant hors de la ruelle.
— C'est rare de te voir sobre. Dommage que t'aies pas encore guéri... t'as tout mon soutien, frère.
On sort complètement de l'odeur d'urine et de shit. Les lampadaires sont tous allumés maintenant, le silence presque oppressant.
— Mais tu connais la chanson : Erin m'a interdit de te vendre ces merdes.Faut que t'apprennes à vivre sans... non, pardon. Faut que t'apprennes à guérir sans.
Ses mains sur mes épaules me donnent l'impression d'étouffer, malgré tout l'espace autour.
— Elio... s'il te plaît... ne me touche pas.
À mon soulagement, il obéit.
Je veux m'effondrer. J'en peux plus.
Je veux pleurer, crier, partir, boire de la tequila au bord de la mer et pourrir là-bas en paix, si possible.
— Je vais très bien. J'ai guéri, t'inquiète pas.
Je réponds sèchement.
Bien sûr, il ne m'a pas cru.
On a marché un peu, échangé quelques mots. Mais c'était tendu. Une tension épaisse, étouffante... pour moi, en tout cas.
Ce vide dans mon ventre grossit à chaque pas, me ronge lentement. J'ai besoin de ma dose. C'est pas une envie, c'est une agonie silencieuse.
Mais il ne me laisserait jamais aller m'en procurer. Pas maintenant.
Et pourtant, j'en crève.
— Tiens, attends-moi ici, dit-il en me stoppant d'un geste. Je vais acheter des bonbons pour Lyris.
Je le regarde s'éloigner vers une mini supérette, un sourcil levé.
— Tu sais qu'elle est plus une gamine pour qu'on lui achète des bonbons ?
— Ouais, il ricane. Mais si j'oublie, elle me défonce.
Il disparaît à l'intérieur, et tout d'un coup, l'air semble plus froid.
Seul dans la lumière blafarde du néon.
Et cette pensée revient, encore, toujours :
Une seule dose. Juste de quoi tenir. Juste un peu...
Ellipse de 10minutes
— Enfin, on est arrivé. J'en avais marre de marcher, pas toi Charles ?
— Ouais...
Je baille, à moitié las, et m'empresse de toquer à la porte.
Les lumières sont encore allumées à l'intérieur.
La serrure tourne avec un clac discret.
La porte s'ouvre lentement, et Erin apparaît dans l'embrasure, les bras croisés, son regard planté droit dans le mien.
Elle porte un vieux sweat trop grand, sûrement volé à quelqu'un d'autre un jour. Ses cheveux sont attachés à la va-vite. Elle a l'air fatiguée...
— On t'attendait pour manger. Entre. Lyris crève de faim, et moi aussi.
Elle se pousse pour nous laisser passer. J'entre sans un mot.
L'odeur de la cuisine me frappe. Le genre d'odeur qui te prend à la gorge quand t'as passé trop de temps loin des choses simples.
Puis son regard tombe sur Elio, resté un pas derrière moi.
— Tiens, t'es là toi ?
Son ton change, moins fermé, presque amusé.
Elio lève les mains, sourire narquois.
— J't'ai manqué ?
— Non. Mais Lyris oui.
Elle tourne les talons et retourne vers la cuisine.
— Bougez-vous avant que ça refroidisse. J'vous sers pas deux fois.
On se suit à l'intérieur. Pendant quelques minutes, on mange, on respire.
Le repas touche à sa fin.
Elio parle d'une histoire sans importance, Lyris rigole à moitié, moi je me perds dans la sauce restée au fond de mon assiette.
Mais je vois bien : Erin me jette des coups d'œil. Elle me surveille.
Erin se lève brusquement. Son assiette est à moitié vide, mais elle commence à débarrasser comme si c'était la seule chose qui tenait encore debout dans sa soirée.
— Lyris, il est 20h16. Presque 20h20. Va dormir.
Lyris lève la tête de son assiette, les sourcils froncés, un reste de sauce au coin des lèvres.
— Tu rigoles, là, j'espère ?
Erin se retourne, déjà en train d'empiler les verres.
— T'as cours demain. Pas le choix. Tu montes.
— Tu m'as dit que je pouvais rester si je faisais mes devoirs !
Elle tape du poing sur la table. Pas fort, mais assez pour marquer le coup. — Et j'les ai faits, je te les ai même montrés !
Erin s'immobilise une seconde. Puis elle répond, posément, mais avec cette fermeté sourde qui claque dans l'air :
— Je t'ai dit ça avant que Charles revienne à moitié défoncé et silencieux comme un mort. T'es pas obligée de m'aimer, Lyris, mais ce soir tu montes. C'est moi l'adulte ici.
Un silence glacé.
Lyris pousse sa chaise en arrière d'un coup sec et quitte la pièce sans un mot, son carnet serré contre elle.
La porte claque à l'étage.
— Bon bah, bonne soirée, j'y vais.
Elio lève le pouce en l'air en passant la porte,
Il sait très bien ce qui va suivre.
Il me plante là.
Moi, j'me lève en douce, discret comme un chat ruiné. Direction l'étage. Fuir. Vite.
— Quand je t'ai autorisé à te lever ?
Sa voix claque.
Je m'arrête net, figé à côté du canapé du salon. Pas un bruit dans la maison. Pas même un tic-tac.
Elle arrive sans me regarder, s'affale sur le canapé comme si elle portait le poids de la journée entière.
Dans sa main : une bouteille de whisky bas de gamme, étiquette froissée, bouchon mal revissé.
celle qu'on garde au fond d'un placard pour les soirs où le monde est trop dur.
Elle lève les yeux vers moi, lentement, comme si elle me scannait jusqu'à l'os.
Pas un mot de plus. Juste un soupir discret, puis :
— Viens t'asseoir.
Je ne me fais pas prier.
J'ai même l'impression d'y être attendu depuis des années.
Je m'affale à ses côtés, sans dire un mot. Elle tend la bouteille. Le whisky, tiède, presque chaud entre ses doigts.
Je la prends. J'hésite même pas.
Une gorgée. Deux. Trois. Quatre. Cinq.
Ça brûle comme l'enfer. Et c'est exactement ce que je voulais.
La brûlure me remplit, remplace le vide, me donne l'impression d'exister une seconde.
Je repose la bouteille, la gorge nouée, les yeux dans le vide.
Erin ne me regarde pas. Elle parle à la pièce entière, ou peut-être à elle-même.
— T'es en train de crever de l'intérieur, Charles. Et tu bois comme si t'avais pas déjà tout perdu.
Elle sort une cigarette de sa poche et l'allume avec un briquet qui était aussi dans sa poche. Tire un coup, puis relâche. Pas de larmes. Juste une voix tremblante, retenue.
Pourtant, elle avait été claire à l'époque :
« Interdiction de fumer à la maison, sinon je vous fais payer ! »
— Tu crois que ça m'amuse de te regarder mourir par petits morceaux ?
Je ferme les yeux. Trop de mots d'un coup. Trop de vérités aussi.
— Tu te trompes. J'ai pas tout perdu, Rriri.
C'est là que l'alcool monte, mais je poursuis.
— Au contraire, j'ai gagné plus que j'en avais : toi, Lycoris... le fait que vous me virez toujours pas de la maison alors que je fous toujours de la merde...
Je ris.
— Et puis je ne meurs pas facilement, tu—
— Tais-toi.
Soudain je sens des bras m'entourer, une chaleur que j'avais oubliée.
Sa tête au creux de mon épaule, je sens ses sanglots discrets, et son cœur déchiré qui lutte contre le mien.
— On a besoin de toi, Charles.
Sa voix est tremblante.
— On est une putain de famille...
Elle s'accroche plus fort.
— Je t'interdis de te détruire avant que Lycoris soit mariée à un homme riche.
Je ris encore, et je la rejoins dans ses pleurs.
Je la soutiens en caressant sa tête, puis son dos, un geste lent, répétitif, comme une berceuse triste.
Je déteste voir mes filles pleurer. Mes richesses...
Et cette fois-ci, c'est mon cœur à moi qui se déchire.
Encore plus qu'il ne l'était.
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Heyyyy coucou comment allez-vous ? Moi bof je sais pas j'ai la santé et c'est déjà ça hein.
Oui j'ai failli pleurer à la fin de ce chapitre en l'écrivant...(tsai la meuf elle est trop dans le RP)
Pour l'instant j'essaie d'introduire l'univers de mon histoire donc c'est pour ça que il y'a plein de personnages tralalas mais je vous rassures les choses sérieuses commence dans les alentours du chapitres 6; 7 et 8 et peut être que je posterai avant dimanche bon après personne ne se précipite vraiment pour lire cette histoire
I feel like this : 🤡
Sinon dans les rares des cas je voudrais des avis DVPVPVPCORKEIENEKFBFBDBNEBEBENE
MERCI AUREVOIR !!!!!!! 🏃🏻♀️➡️🏃🏻♀️➡️