Le couloir semblait sans fin, un puits obscur où le temps et l'espace se dérobaient sous mes pieds. Je ne savais pas comment j'étais arrivée ici, ni même si j'y étais vraiment. Tout me semblait flou, irréel. Pourtant, chaque pas résonnait, chaque souffle faisait écho dans ce vide oppressant.
Les murs autour de moi étaient irréguliers, comme si la matière elle-même hésitait à exister pleinement. Des draps noirs pendaient lourdement sur des formes indistinctes. Des tableaux ? Des miroirs ? Je ne pouvais pas dire. Je détournais les yeux à chaque fois que j'essayais de regarder de plus près, une sensation viscérale d'interdit me saisissant. Ce que ces voiles cachaient, je n'étais pas sûre de vouloir le découvrir.
Mon corps avançait malgré moi, mes jambes mécaniques, mes mouvements hésitants. Je me sentais étrangère dans ma propre peau, comme si je flottais juste au-dessus de moi, spectatrice d'un cauchemar qui ne m'appartenait pas.
Puis, je les vis.
Les portes.
Elles étaient alignées de part et d'autre du couloir, imposantes, identiques, et pourtant, chacune semblait vibrer d'une énergie différente. Pas de noms, pas de numéros. Juste des ouvertures potentielles vers... quoi ? Je ne savais pas. Et je ne voulais pas le savoir.
Une pression sourde monta dans ma poitrine. Mes mains tremblaient, mes doigts glissant sur le tissu froid de mon pantalon. J'avais l'impression que ces portes m'observaient, qu'elles attendaient quelque chose de moi. Mais quoi ? Que je choisisse ? Que je fuie ?
Je m'arrêtais, paralysée, mon regard rivé sur la fin du couloir.
C'est là que je la vis.
Une porte différente. Plus grande, plus sombre. Elle n'aspirait pas seulement la lumière, elle semblait absorber tout ce qui l'entourait, comme si son existence même déformait la réalité. Mes jambes vacillèrent. Une chaleur désagréable monta dans ma gorge, le genre de chaleur qui précède un cri ou une crise de panique.
Un bruit.
Faible d'abord, comme un murmure porté par un vent inexistant.
Puis, un sanglot.
Mon cœur s'arrêta un instant, le temps suspendu. Ce n'était pas un simple bruit. C'était humain. Quelqu'un pleurait.
Je déglutis, mes pieds cloués au sol. J'avais envie de reculer, de fuir ce son qui me pénétrait jusqu'à l'os. Mais je ne pouvais pas bouger. Quelque chose m'attirait vers cette porte.
Le sanglot devint plus clair, plus proche. Une voix, entrecoupée, brisée, s'éleva dans le silence :
— S'il te plaît... réveille-toi.
Je frémis. Cette voix... Elle avait quelque chose de familier, mais je ne pouvais pas dire pourquoi. Elle résonnait dans ma tête comme un souvenir lointain que je n'arrivais pas à attraper.
Je fis un pas en avant. Puis un autre. Mes jambes tremblaient sous mon poids, et chaque mouvement semblait m'aspirer un peu plus profondément dans cet espace irréel.
Quand j'arrivai devant la porte noire, ma main se leva d'elle-même, mes doigts hésitant à toucher la surface. Elle semblait vibrer sous mes yeux, comme si elle était vivante.
— Réveille-toi.
La voix était plus pressante maintenant, comme un ordre, mais teintée d'un désespoir qui me glaça le sang.
Mes doigts frôlèrent la poignée. Un frisson parcourut tout mon corps. Le métal était glacé, mais il me brûlait en même temps, comme si mon toucher déclenchait quelque chose.
Puis, tout s'arrêta, lorsque j'entra
Le couloir. Les sanglots. La voix.