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- Dédicace -
𝐏𝐑𝐎𝐋𝐎𝐆𝐔𝐄
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏 : đƒđšđ›đ€Ă© 𝐋𝐱𝐛𝐚𝐧𝐚𝐱𝐬.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐 : 𝐋𝐞𝐬 𝐊𝐚𝐧𝐚𝐚𝐧.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟑 : đƒĂ©đœđąđŹđąđšđ§ đšđœđ­Ă©đž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟒 : 𝐋'Ă©đ­đ«đšđ§đ Ăšđ«đž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟓 : đ€đ„-đ€đ„đŠđšđŹ.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟔 : đđšđźđ« 𝐭𝐚 đŹĂ©đœđźđ«đąđ­Ă©.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟕 : 𝐃𝐞𝐬 đŹđžđœđ«đžđ­đŹ đ đšđ«đĂ©đŹ 𝐬𝐹𝐼𝐬 đŹđąđ„đžđ§đœđž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟖 : đˆđ§đŻđąđŹđąđ›đ„đž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟗 : 𝐋𝐞𝐬 𝐃𝐱 đ€đ§đ đžđ„đš.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟎 : 𝐒𝐹𝐧 đŹđšđźđ«đąđ«đž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟏 : 𝐌𝐚𝐩𝐚𝐧 đ©đšđźđ„đž ?
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟐 : đƒđžđ«đ§đąđžđ« đ’đšđźđŸđŸđ„đž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟑 : đ„đ§đ­đ«đž đđžđŻđšđąđ« 𝐞𝐭 đ©đžđ«đ­đž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟒 : 𝐒𝐹𝐼𝐬 đ„đž đ•đšđąđ„đž 𝐝𝐞 đ„'đ€đ„đ„đąđšđ§đœđž.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟓 : đ…đšđąđ«đž 𝐟𝐚𝐜𝐞 Ă  đ„'𝐚𝐛𝐬𝐞𝐧𝐜𝐞.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟔 : 𝐔𝐧 đ©đšđ«đŸđźđŠ 𝐝𝐞 đĂ©đŁĂ -𝐯𝐼.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟕 : đ„đ§đ­đ«đž đ„đžđŹ đ„đąđ đ§đžđŹ 𝐝𝐼 𝐩𝐞𝐧𝐼.
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟖 : 𝐒𝐹𝐼𝐬 đ„'𝐞𝐟𝐟𝐞𝐭 𝐝𝐞 đ„'đ˜Œđ™§đ™–đ™ .
𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟗 : 𝐔𝐧 đ›đšđąđŹđžđ« đŸđ„đšđź.
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𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟓 : đ…đšđąđ«đž 𝐟𝐚𝐜𝐞 Ă  đ„'𝐚𝐛𝐬𝐞𝐧𝐜𝐞.

💄 A M A L I A 💄

Je viens d'une famille mafieuse, habituée à tuer sans hésiter. Et pourtant, je n'avais jamais vu un cadavre de mes propres yeux... Jusqu'à ce jour. Le choc a été brutal.

J'ai fait l'erreur de négocier avec Nadim pour aller à la morgue, et une fois sur place, je n'ai pas pu assumer. Voir cette personne, toujours droite, avec cette fine expression de joie quand il me voyait, m'appelant "Figghia mia (ma fille)" chaque fois qu'il avait quelque chose à m'offrir pour me faire plaisir. Sauf que ce jour, en le voyant allongé, immobile, les yeux clos, la peau pùle, presque bleutée sur cette table glacée. Et lui, d'une froideur si sÚche, quand je lui ai fait un dernier baiser sur le front pour lui dire au revoir.

Je regrette de l'avoir vu dans cet état. J'aurais dû garder la derniÚre image de lui, le jour de mon mariage encore vivant, en train de me rassurer. Toutefois, j'ai eu aussi ce besoin de le voir, pour réaliser qu'il est vraiment parti, pour toujours.

Quand j'ai quitté la piÚce, je suis tombé sur mon oncle. Je l'ai salué, et il m'a regardé avec mépris, comme à son habitude.

Ma haine envers ma famille grandit de plus en plus. Surtout envers oncle Vito, je ne lui pardonnerai jamais de m'avoir forcée à garder mes émotions en moi. C'était inhumain de sa part.

Finalement, je devrais remercier mon pĂšre d'avoir arrangĂ© ce mariage, je ne le verrais plus, ni lui et ma maudite "famille". MĂȘme mon frĂšre, je ne peux plus compter sur lui. Il ne m'a pas contactĂ©e, mais venant de lui, je ne suis pas Ă©tonnĂ©e. Comme une idiote, j'ai essayĂ© de le joindre, mais il Ă©tait injoignable. C'est fini, je ne le vois plus comme faisant partie de ma famille.

C'est plutÎt toi, tu ne fais plus partie de leur famille... La seule famille qui te restait est décédée.

Le lendemain, il y a eu l'enterrement de papà. C'est là que j'ai vu mon frÚre, qui m'a à peine adressé la parole. Il n'était pas aussi triste que moi. AprÚs tout, c'est Massimo, il n'aimait pas notre pÚre.

AprĂšs que tout le monde soit parti, je suis restĂ©e devant sa tombe, ne voulant pas le quitter. C'est seulement quand Nadim m'a exigĂ© de rentrer que je me suis rĂ©signĂ©e, car oui, il Ă©tait lĂ  Ă  m'attendre. Je devais ĂȘtre un fardeau pour lui, mais je me fichais de sa prĂ©sence.

Un mois s'est Ă©coulĂ©, et je n'ai pas revu Nadim. En tout ce temps, je ne l'ai pas aperçu une seule fois et je n'ai mĂȘme pas cherchĂ© Ă  savoir oĂč il Ă©tait.

Chaque fois que Yara vient me rendre visite, elle essaie toujours de me rassurer en me disant que son frĂšre sera bientĂŽt disponible, mais cela m'importe peu. Je fais ma vie, il fait la sienne, comme il me l'avait dit.

La seule façon qui montre qu'il est passé à l'appartement, c'est quand je lui prépare à manger. Je laisse son plat sur l'ilot central de la cuisine et le lendemain, je trouve les couverts rangés dans le lave-vaisselle. C'est la seule chose qui me prouve qu'il est toujours en vie.

Nous n'avons pas de gouvernante. Quand j'ai faim, je me débrouille pour me préparer à manger. Heureusement, c'est une tùche que j'aime.

La mĂšre de Nadim vient tous les matins pour m'apprendre Ă  cuisiner quelques plats libanais. Chaque jour un plat diffĂ©rent. Elle veut absolument que son fils ne meure pas de faim. Pourtant, je sais cuisiner... des plats de chez moi, et c'est tout aussi bon. Pendant deux semaines, ça s'est passĂ© comme ça, sans que j'aie le moindre mot Ă  dire. Je devais suivre et prendre note, sinon elle ne me lĂąchait pas. GrĂące Ă  ces deux semaines, j'ai pu en apprendre davantage sur elle. Sa maniĂšre de parler avec autoritĂ© fait partie de son caractĂšre, elle ne cherche pas Ă  ĂȘtre brusque ou dĂ©sagrĂ©able.

Elle est aussi passionnée de cuisine que moi, et elle m'a bien appris chaque recette. Il se trouve qu'à l'époque, c'était justement son métier. Elle apprenait aux femmes à préparer des plats libanais.

Le reste du temps, je reste dans l'appartement Ă  m'ennuyer. Au dĂ©but, ça a Ă©tĂ© difficile, je ne savais pas quoi faire de mes journĂ©es, mais j'ai finalement rĂ©ussi Ă  trouver un rythme dans ma nouvelle vie. Il m'arrive de sortir avec Yara, mais c'est rare puisqu'elle est souvent occupĂ©e. Finalement, rien n'a changĂ© Ă  part le fait que j'ai un mari absent. Il ne m'a mĂȘme pas demandĂ© de consommer notre nuit de noces. J'ai l'impression qu'il se fiche complĂštement de moi... Il doit sĂ»rement passer du temps avec d'autres femmes ailleurs.

De toute façon, c'est ce que tu voulais, non ? Qu'il t'ignore ? me murmure ma petite voix.

Pourtant, ce n'est pas du tout comme ça que j'imaginais la cohabitation. Mais il m'a prévenue qu'il n'y aurait rien... Alors, je dois m'y faire.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrent. J'ai passĂ© l'aprĂšs-midi avec Zeina, la grande sƓur de Nadim, avec qui je me suis vraiment rapprochĂ©e. Elle a voulu faire du shopping et m'a invitĂ©e Ă  l'accompagner. Je n'ai pas osĂ© acheter quoi que ce soit, mĂȘme lorsqu'elle a insistĂ© pour payer, j'ai refusĂ©. J'en avais honte. Quand j'avais besoin de quelque chose, c'Ă©tait avec la carte bleue de mon pĂšre, mais maintenant, je n'ai plus rien pour acheter ce que je veux. DĂ©sormais, si j'ai besoin de quelque chose, je dois demander Ă  mon mari... mais s'il n'est jamais lĂ .

Je retire mes chaussures pour enfiler des chaussons, quand je remarque des chaussures d'homme négligemment laissées sur le sol.

Il est lĂ  ?

Nadim est lĂ .

Je ne sais pas pourquoi, mais mon corps rĂ©agit instinctivement, se prĂ©cipitant dans toutes les piĂšces. Je le cherche, mais il n'est ni dans le salon, ni dans la cuisine. Alors, je monte les escaliers. En arrivant, la porte prĂšs de la mienne est entrouverte. Ça doit ĂȘtre sa chambre, cette piĂšce dans laquelle je ne suis jamais entrĂ©e.

Je m'avance, incertaine s'il est à l'intérieur. Je toque donc, mais un peu trop fort, ce qui fait que la porte s'ouvre complÚtement. Et là, je le trouve prÚs de son lit, de dos, torse nu.

Il m'entend et s'arrĂȘte dans ses gestes. Je contemple ses bras couverts de tatouages, dont les motifs ressort avec intensitĂ© avec sa peau matte. Des Ă©crits et des formes que je ne distingue pas bien de loin. Sur son dos, il n'y a rien, mais quand il se retourne pour me faire face, je remarque sur son poignet, le tatouage du narguilĂ©, celui que j'ai dĂ©jĂ  vu l'autre jour. Mon regard glisse sur son torse, aussi rempli de motif et d'Ă©critures. Sauf qu'une chose qu'il tient dans ses mains me retient plus l'attention. Je recule d'un pas, et un frisson parcourt tout mon corps, du pied jusqu'Ă  la tĂȘte.

Qu'est-ce que c'est que cette bĂȘte ?

— Ne fais pas cette grimace de dĂ©goĂ»t. Tu vas vexer Mina.

Hein ?

— C'est elle, Mina ? dis-je un peu trop fort. C'est... cette bĂȘte ?

Il tient une mygale noire poilue dans ses mains, qui se déplace lentement, tandis qu'il bouge sa main pour éviter qu'elle ne tombe. Rien qu'en la voyant, une nausée m'envahit, et l'envie de fuir devient presque incontrÎlable.

— Ne l'appelle pas comme ça. Viens, je te la prĂ©sente.

— Non merci, je rĂ©pond sĂšchement.

Depuis que je vis ici, elle est restée dans la chambre juste à cÎté de la mienne ? Quelle horreur. Et si elle était venue dans ma chambre ? Je l'aurais tuée sans hésiter.

Cette Mina, j'aurais préféré qu'elle soit une femme, et non cette chose moche.

Mais qu'est-ce qu'il fait avec ça, d'ailleurs ?

— Viens, elle est inoffensive.

Je secoue la tĂȘte nĂ©gativement. Inoffensive ou pas, l'idĂ©e de savoir qu'elle est ici va gĂącher mes prochaines nuits.

Nadim s'avance avec sa bĂȘte rĂ©pugnante, mais je recule jusqu'Ă  sortir de la chambre. Je vois son sourire sur ses lĂšvres, il le fait exprĂšs... Puis une pensĂ©e me traverse l'esprit. Est-il comme mon frĂšre, Ă  faire souffrir les innocents juste pour le plaisir ? Et est-il sur le point de le faire avec sa mygale ?

Mon cƓur bat Ă  tout rompre, prĂȘt Ă  sortir de ma poitrine.

Cependant, Nadim ne me vient pas jusqu'Ă  la sortie, comme je le pensais. Je l'aperçois sur le cĂŽtĂ©. Et c'est lĂ  que je remarque un espace clos en verre, et il y met la bĂȘte Ă  l'intĂ©rieur.

— Je ne pensais pas que tu aurais peur.

— Tout le monde aurait peur de ça, sauf toi, apparemment. Ne me dis pas que c'est ton animal de compagnie... C'est bizarre.

Il lĂšve les yeux vers moi, et je regrette immĂ©diatement mes mots. Je ferais bien de me taire, j'oublie qu'il pourrait me rĂ©duire en poussiĂšre en un clin d'Ɠil. Et qu'en cet instant, il semble plus attachĂ© Ă  sa bĂȘte qu'Ă  moi.

— Enfin chacun ses goĂ»ts, je tente de me rattraper.

— As-tu besoin de quelque chose ?

Il me pose la question en se dirigeant vers une autre piÚce à l'intérieur de sa chambre, qui est en fait un dressing. Je le suis en le regardant.

— Un mois que je ne t'ai pas vu. La seule façon de savoir si tu es toujours en vie, c'est de voir si tu manges le repas que je te prĂ©pare chaque soir.

Pendant qu'il cherche, je contemple son grand dressing. Il a beaucoup de vĂȘtements qui se ressemblent, comme les chemises noires et blanches, des costumes noirs et des chaussures noires. Mais de l'autre cĂŽtĂ©, on trouve des vĂȘtements plus dĂ©contractĂ©s : jeans, t-shirts, pantalons d'Ă©tĂ©, des baskets et d'autres vĂȘtements variĂ©s.

— En ce moment, c'est la pĂ©riode oĂč j'ai Ă©normĂ©ment de travail.

— Hum... dis-je en continuant Ă  observer son dressing, poussĂ©e par la curiositĂ©.

— Amalia ?

Je ramĂšne mon regard sur lui.

— Ce soir, on mange chez mes parents avec toute la famille. C'est un repas qu'on organise une fois tous les deux mois, et il est important qu'on soit prĂ©sents.

Donc, un gros repas de famille.

— D'accord, je peux ramener quelque chose ? Je ne veux pas y aller les mains vides.

— Fais comme tu veux.

...

Une derniĂšre touche de parfum, et je suis prĂȘte. En sortant de la chambre et descendant les escaliers, je retrouve Nadim en bas. Mais son accoutrement me surprend. Pourquoi est-ce qu'il est habillĂ© de façon aussi casual, voire trop ?

Il porte une chemise ample, les premiers boutons ouverts, dévoilant son torse et une chaßne en or qui scintille. Il est aussi en jean et baskets. Ses cheveux, d'habitude coiffés au gel, sont cette fois-ci naturels, des boucles bien définies qui partent dans tous les sens.

Et je regarde ma tenue. Deux styles différents.

— On va juste à un düner familial, pas à un bal, me fait-il remarquer, alors que je fixe ma robe noire moulante chic et mes talons.

— Je...

Le rouge me monte aux joues Ă  cause de l'embarras.

— Monte te changer et habille-toi normalement.

Je fais demi-tour, me change rapidement et enfile un ensemble ample beige et des sandales noires. Quand je redescends, il me fixe durant de longues secondes avant d'approuver ma tenue d'un signe de tĂȘte.

Chez moi, pour un dĂźner familial, il fallait toujours ĂȘtre classe de la tĂȘte au pied. Mais apparemment, ce n'est pas le cas partout. J'oublie que je ne suis plus chez moi.

Nous prenons l'ascenseur, sans oublier le plat que j'ai préparé. J'ai fait de la parmigiana d'aubergines, un plat sicilien, mais maintenant, j'ai peur que ça ne leur plaise pas. On verra bien.

Nous montons jusqu'au dernier étage. Le penthouse des parents de Nadim. PremiÚre fois que je m'y rends.

En arrivant, un membre du personnel nous accueille avec politesse et prend le plateau des mains. J'observe autour de moi, leur penthouse est immense. Tout est d'une propreté impeccable, pas un grain de poussiÚre. Le sol est en marbre, et les meubles semblent valoir une fortune. Je suis déjà habituée à ce genre de maisons modernes, mais celle-ci est particuliÚrement impressionnante.

Nous marchons jusqu'Ă  une grande salle, situĂ©e juste en face de vastes baies vitrĂ©es donnant sur l'extĂ©rieur. La vue sur Downtown Las Vegas est saisissante. MĂȘme moi, je dois admettre que c'est hypnotique.

— Amal, kifek, ça va ? dit une voix.

La tante de Nadim, Dina arrive la premiĂšre vers nous. Elle s'Ă©lance vers moi et me fait la bise. Je suis un peu prise au dĂ©pourvu, figĂ©e. Elle me sourit en attendant une rĂ©ponse, et je lui rends son sourire, mĂȘme si quelque chose m'a frappĂ©e : le franco-arabe. J'ai suivi quelques cours de français, mais je ne m'attendais pas Ă  ce qu'ils le parlent aussi naturellement ici.

Elle se tourne pour prévenir les autres de notre arrivée. Pendant ce temps, je regarde Nadim et lui demande :

— Vous parlez français aussi ?

— Au Liban, il arrive qu'on mĂ©lange l'arabe et le français.

Sa tante se recentre sur nous, toute souriante, visiblement trĂšs heureuse de nous voir. Je l'ai rencontrĂ©e quelques fois, tout comme son mari. Elle est la petite sƓur de Gabriel, tandis que la mĂšre de Nadim, Hanane est la petite sƓur du mari de Dina. Son mari, Khalil, me rend aussi intimidĂ©e, Hanane. Je comprends mieux pourquoi ils sont si proches et pourquoi leurs personnalitĂ©s semblent si semblables.

— Khaltou, c'est Amalia, corrige Nadim.

Elle lui répond en arabe. Si tout le monde commence à parler uniquement dans leur langue, je vais avoir du mal à suivre.

— Viens dire bonjour aux autres, et par la mĂȘme occasion, je vais te prĂ©senter Ă  la belle-famille, me dit-elle.

Elle me prend par le bras, et je la laisse me guider. Elle me fait saluer tout le monde. Elle me présente à la belle-famille de Zeina et Yara.

Nader et Zeina ne se lĂąchent jamais. Surtout quand je vois comment Zeina le contemple pendant qu'il parle, comme si plus rien d'autre n'existait. Ils ont l'air tellement amoureux que je me dis qu'il reste encore une part d'amour vrai dans notre monde cruel.

J'ai jetĂ© un coup d'Ɠil aux tenues des autres, et heureusement qu'il m'a suggĂ©rĂ© de me changer. Sinon, je me serais vraiment tapĂ© la honte. Tout le monde est habillĂ© super dĂ©contractĂ©, comme s'ils Ă©taient juste sortis faire une course rapide. MĂȘme le chef de la famille est vĂȘtu d'un t-shirt et pantalon.

En scrutant autour de moi, je ne vois pas Yara. J'aurais préféré qu'elle soit là, juste pour me sentir un peu moins perdue...

Sur le sofa, j'aperçois Maysoon, assise, un casque sur les oreilles. Peut-ĂȘtre que je devrais essayer de sympathiser avec elle.

Dina adore parler, mais j'ai réussi à l'interrompre un instant en m'excusant, prétextant que j'allais voir sa fille. Quand je lui ai dit ça, elle a fait une petite grimace, qu'elle a vite cachée derriÚre un sourire avant de m'encourager à y aller. Finalement, je ne le sens pas trop.

Je m'approche doucement, me place derriÚre elle et me penche légÚrement. Elle feuillette un magazine de mode. C'est sans doute de là que vient son sens du style. Chaque fois que je la vois, elle est toujours impeccablement habillée. Jamais dans la simplicité, au contraire, elle ose des tenues extravagantes, souvent de haute couture, avec un style différent.

Aujourd'hui, elle a opté pour un total look noir, avec une touche gothique. Une jupe courte noire, un haut en dentelle aux motifs sombres. Ses jambes croisées mettent en valeur ses bottes hautes Naked Wolfe. Elle qui est petite, doit faire ma taille avec ces plateformes.

Mes yeux vont vers l'écran de son téléphone, affichant de la pop d'un groupe coréen.

Elle lĂšve la tĂȘte, me lance un regard noir, puis retire lentement son casque d'une oreille.

— DĂ©gage de ma vue, sinon ça va mal finir pour toi, me balance-t-elle, avec une froideur qui m'a littĂ©ralement clouĂ©e sur place.

Elle est mal Ă©levĂ©e ? Ou juste, elle n'aime pas sociabiliser ? Je ne sais mĂȘme plus comment la dĂ©finir, cette fille.

Je décide de faire comme si je n'avais rien entendu.

— C'est bien de la K-pop ? tentĂ©-je.

Elle reste une seconde sans bouger, puis son expression change. Ses traits se détendent, deviennent plus neutres. Et dans son regard, je crois distinguer... une pointe de surprise ?

— T'Ă©coutes de la K-pop aussi ?

— Non, mais je connais de nom. J'ai dĂ©jĂ  enten...

Elle ne me laisse mĂȘme pas terminer ma phrase. Elle remet aussitĂŽt son casque et replonge dans son magazine, comme si je n'existais plus.

Elle est mal polie.

Soudain, je sens deux mains se poser sur mes épaules. Je sursaute légÚrement. En me retournant, c'est Yara.

— Tu es lĂ , soufflĂ©-je, soulagĂ©e.

— Ne reste pas seule avec elle, dit-elle en jetant un coup d'Ɠil vers Maysoon. Viens, on va sur la terrasse. Le temps est agrĂ©able... et surtout, ça nous Ă©loignera des pots-de-colle, ajoute-t-elle en regardant son fiancĂ© avec un air de dĂ©goĂ»t.

On traverse le salon. En passant, je sens le regard de Nadim se poser sur moi. Une seconde, peut-ĂȘtre deux. Puis il dĂ©tourne le regard et reprend sa conversation avec Saif, qui tient sa fille Layal dans les bras.

Mais un autre regard me suit. Plus lourd. Plus insistant. Je tourne lĂ©gĂšrement la tĂȘte. Un homme se tient debout dans un coin, que je n'avais pas remarquĂ© jusqu'Ă  prĂ©sent. C'est la premiĂšre fois que je le vois.

Il me scrute.

Et il sourit.

Un frisson me parcourt le dos. Mon corps rĂ©agit avant mĂȘme mon esprit. Son regard est lourd, presque oppressant. Une fixitĂ© glaciale, celle d'un prĂ©dateur. Cet homme dĂ©gage une aura dangereuse, quasiment vicieuse. Je dĂ©tourne aussitĂŽt les yeux, dĂ©rangĂ©e.

— C'est qui, lui ? demandĂ©-je Ă  Yara, Ă  mi-voix.

— Ah, Ziad. C'est l'aĂźnĂ© d'oncle Khalil.

Donc Saif a un grand frĂšre. Mais on n'aurait pas dit qu'ils viennent de la mĂȘme fratrie.

— Qu'est-ce qu'il fait bon ce soir, souffle Yara en inspirant profondĂ©ment l'air frais.

On arrive enfin sur la terrasse panoramique, doucement éclairée par de fines guirlandes lumineuses et quelques lanternes orientales suspendues. Au centre, une table en verre est entourée de fauteuils moelleux habillés de coussins aux tons clairs. Quelques plantes bien placées et des objets de décoration apportent une touche cosy et chaleureuse à l'endroit.

Puis, devant nous, s'étend une vue à couper le souffle sur toute la ville. Je m'approche du bord. Je m'appuie contre la rambarde, une main posée sur le métal, et laisse mon regard glisser lentement sur la ville qui vibre en contrebas.

Yara fait comme moi.

— C'est impressionnant, dis-je Ă  voix basse, presque pour moi-mĂȘme.

C'est la premiÚre fois que je me retrouve sur une terrasse aussi haute. Downtown s'étale sous mes yeux, brillant de mille néons. Un spectacle vivant, bruyant, quasiment irréel, se joue en contrebas...  ce qui est évident, Vegas ne dort jamais.

Je fixe un moment cette agitation, étant fascinée... jusqu'à ce qu'un léger vertige me prenne. Je détourne les yeux et me retourne face à l'intérieur.

— Est-ce que ta nouvelle vie te convient ? me demande Yara Ă  cĂŽtĂ© de moi.

— Doucement mais sĂ»rement, dis-je en lui adressant un sourire pour la rassurer, alors qu'au fond, tout ça reste encore Ă©tranger, dĂ©routant.

Juste ĂȘtre ici, Ă  ce dĂźner qui n'a pas encore commencĂ©, je ne me sens pas Ă  ma place.

— D'ailleurs, tu ne m'avais pas dit que Mina, c'Ă©tait une grosse araignĂ©e poilue ! lancĂ©-je avec un petit rire nerveux. Quand je l'ai vue, j'ai cru faire un arrĂȘt cardiaque. Elle est Ă©norme ! Et lui, il joue avec comme si c'Ă©tait un chiot !

Elle éclate de rire.

— Mon frĂšre et ses goĂ»ts... dit-elle en secouant la tĂȘte. Je ne t'ai rien dit pour te laisser la surprise. Le jour oĂč il nous l'a prĂ©sentĂ©e, ma mĂšre a failli le foutre dehors avec sa "Mina". Depuis, elle ne vient presque plus chez lui.

— Je sais mĂȘme pas comment je vais dormir ce soir. Je me tĂąte Ă  caler une serviette sous la porte, ou Ă  dormir dans la salle de bain juste pour ĂȘtre sĂ»re qu'elle n'entre pas dans ma chambre.

Yara tourne soudain la tĂȘte vers moi, les yeux lĂ©gĂšrement plissĂ©s :

— Vous ne dormez pas dans la mĂȘme chambre ?

Merde. Personne n'est au courant qu'on dort chambre Ă  part.

— Ah si, si, bien sĂ»r, je rĂ©ponds hĂątivement. Je voulais dire, euh...

Mais une voix masculine, grave et posée m'interrompt :

— Chùre cousine, tu n'es pas venue me dire bonjour.

Je relÚve les yeux, et c'est ce Ziad, traversant la porte vitrée de la terrasse.

Il s'avance lentement. Yara se fige à cÎté de moi, ses sourcils se froncent. Je sens sa main glisser discrÚtement derriÚre moi, entre mon dos et la rambarde en verre, comme un geste protecteur. Un signal clair : il représente un danger.

Qui est vraiment cet homme ?

Ziad est d'une taille moyenne, la peau mate. Il a les cheveux trÚs courts et une barbe de trois jours qui lui donne un air encore plus fermé. Et des yeux trÚs noirs... Des yeux sombres, profonds comme un puits sans fond. Il est tout l'opposé de Saif, qui a la peau claire, des cheveux chùtain clair mi-longs, et qui est légÚrement plus grand que lui. Par contre, maintenant que je le regarde mieux... Maysoon lui ressemble, à l'exception de ses yeux d'un vert clair.

Son regard s'accroche Ă  moi.

Plus tĂŽt, j'ai juste ressenti une gĂȘne. Mais lĂ , face Ă  lui, Ă  quelques mĂštres, je reconnais ce que je ressens : de la peur. Ses yeux n'expriment rien. Un vide Ă©motionnel glaçant. Et ce sourire qu'il me lance... il est malsain. Il me donne la chair de poule.

Pas question de rester seule ici sans ĂȘtre collĂ©e Ă  Nadim ou Yara. Ce type... je le sens pas du tout. Il doit ĂȘtre le mal en personne.

— Inte sharmouta el-zamel, dit-il en arabe.

Et c'est repartie. Je vais finir par prendre des cours d'arabe. Toutefois, la pression soudaine de la main de Yara dans mon dos suffit Ă  me faire comprendre que ce n'est pas un compliment. L'ambiance change, l'air devient plus lourd.

— Tu veux quoi ? crache Yara.

— Rien. Juste faire connaissance avec la femme de mon cousin, dit-il en me fixant sans dĂ©tour.

Instinctivement, je croise les bras devant ma poitrine. Ce geste le fait sourire. Il a compris. C'est évident qu'il sait lire le langage du corps. Je déglutis avec difficulté. Ce qu'il me fait ressentir... je ne l'ai jamais vécu avec personne. Est-ce que je suis vraiment en sécurité dans cette famille ?

— Ziad.

Une voix surgit derriÚre lui, plus ferme, plus menaçante. Je la reconnais immédiatement. Celle de mon mari.

Il s'avance, son visage crispĂ© par la colĂšre. Son regard, perçant et glacĂ©, semble capable de tuer. Et il n'est dirigĂ© que vers Ziad. Celui-ci se tourne lentement, et s'avance Ă  la rencontre de Nadim, s'arrĂȘtant Ă  sa hauteur, comme pour lui montrer qu'il ne le craint pas.

— Tu as une belle femme, Nadim. Prends-en bien soin, dit-il d'un ton volontairement fort, pour que je l'entende.

Puis, il retourne à l'intérieur.

Nadim ne bouge pas. Il reste là, les mùchoires contractées, les yeux encore pleins de rage. Je comprends maintenant que ces deux-là ne sont pas proches du tout.

— Ne t'en fais pas, il ne va rien faire. Il a juste de la gueule, me dit Yara à voix basse.

Mais le ton de sa voix sonne faux. Comme une phrase qu'on se force Ă  dire pour rassurer quelqu'un.

— C'est l'heure de manger, venez ! appelle quelqu'un de l'intĂ©rieur.

On entre tous dans la salle Ă  manger. Une longue table est dressĂ©e, couverte de plats aussi variĂ©s que colorĂ©s. J'en reconnais certains que Hanane m'a appris Ă  faire, comme falafels, taboulĂ©, houmous que j'apprĂ©cie en manger avec le pain libanais. La table elle-mĂȘme est dĂ©corĂ©e Ă  la maniĂšre traditionnelle, dans une ambiance typiquement orientale. Rien Ă  voir avec les grands dĂźners chics auxquels j'ai l'habitude d'assister.

Depuis que je vis ici, je suis dépaysée, complÚtement ailleurs. Au début, c'était perturbant. Tout m'était étranger. Mais petit à petit... ce changement me plait bien.

Je m'installe à cÎté de Nadim, qui est à ma droite et à ma gauche, Yara prend place. Elle appelle Maysoon pour qu'elle prenne la place à cÎté d'elle. Mais à la derniÚre seconde, son fiancé s'assoit à cette place. Elle le regarde avec un profond mépris, marmonne quelque chose que je n'arrive pas à entendre, puis se rapproche de moi comme si son fiancé avait une maladie contagieuse. J'aimerais tellement comprendre... Pourquoi elle le déteste autant ? Qu'est-ce qui peut provoquer une telle réaction ?

Les autres s'installent peu à peu. Et bien sûr, Ziad se met juste en face de moi. Coïncidence ? J'en doute.

À cĂŽtĂ© de moi, je ne sais comment je sens Nadim bouillir. Il ne dit rien, mais son silence est lourd. TrĂšs lourd. Il passe un bras derriĂšre moi, le posant nĂ©gligemment sur le dossier de ma chaise. Est-ce un geste de protection ? De possessivité ? Ou est-ce que je me fais des films ? Depuis tout Ă  l'heure, son comportement Ă  cause de Ziad me laisse perplexe. Pendant ce temps, les autres sont absorbĂ©s dans leurs conversations, rient et mangent, sans prĂȘter attention.

Je suis lĂ , au milieu d'un dĂźner de famille, entourĂ©e de dialogues que je ne comprends pas, avec un homme en face de moi qui me glace le sang, et un autre Ă  cĂŽtĂ© de moi qui semble prĂȘt Ă  exploser. Je souris comme je peux, tout en essayant de ne pas croiser les yeux noirs une nouvelle fois.

— Mange, tiens. Yara prend mon assiette et la garnie de tout un tas de plats.

— Merci, dis-je en la regardant poser l'assiette remplie, avec en prime un pain libanais.

Comment je vais réussir à manger tout ça ?

— Tu veux de l'Arak ? C'est de l'alcool.

— Non. Elle ne va pas supporter, intervient Nadim.

— T'abuses, rĂ©plique Yara en roulant des yeux.

— J'ai dit non, insiste Nadim, cru.

— Laisse, Yara. De toute façon, je ne bois pas trop d'alcool.

Elle fait une moue déçue, comme si elle avait absolument envie que je goûte.

Les discussions continuent autour de moi tandis que je mange et j'observe en silence. Ils mĂ©langent l'anglais, l'arabe et le français dans leurs Ă©changes. Combien de langues parlent-ils au juste ? De mon cĂŽtĂ©, je ne parle que l'anglais et l'italien couramment. C'est dĂ©jĂ  Ă©norme pour moi. Mais les voir rire et discuter entre eux... C'est agrĂ©able, mĂȘme si je ne peux pas trop suivre.

Il y a quelque chose de rĂ©confortant dans cette ambiance. Parfois Yara m'adresse la parole, mais ensuite elle se laisse emporter par les discussions de sa famille. Ils parlent assez fort, mais ce n'est pas agressif. C'est juste leur façon de communiquer. À la maison, chez moi, on parle toujours doucement, il faut presque deviner les mots pour ne pas paraĂźtre impoli ou mal vu. Ici, c'est diffĂ©rent. Ce n'est pas dĂ©sagrĂ©able, bien au contraire, car leurs sujets sont intĂ©ressants. Et de temps en temps, des rires sincĂšres Ă©clatent.

Ce n'est pas un dĂźner avec de mafieux. Non, actuellement, il y a de l'humour, de la chaleur, des Ă©changes vivants. C'est un autre monde, un monde diffĂ©rent. Ils sont tellement humains, cela me paraĂźt quasiment nouveau, alors que c'est en rĂ©alitĂ© tout Ă  fait normal. C'est juste que j'ai grandi dans une famille oĂč les relations Ă©taient plus froides, moins ouvertes.

Je comprends pourquoi papà se plaisait à passer du temps avec eux. Ils sont agréables, malgré quelques personnes dérangeantes. Mais je préfÚre ignorer les aspects négatifs et me concentrer sur le cÎté positif.

— Amalia, une petite voix m'appelle.

Je cherche d'oĂč elle vient et je vois la petite Layal, assise sur les genoux de sa grand-mĂšre, me faire coucou de la main. Je lui rends son geste avec un sourire.

— Oh, qui a fait ça ? demande Hanane en voyant mon plat abandonnĂ© sur un coin de la table.

Je l'ai complÚtement oublié.

— C'est moi, rĂ©ponds-je, un peu gĂȘnĂ©e.

Soudain, tous les regards se tournent vers moi. La chaleur me monte aux joues. Je n'ai pas l'habitude qu'on me fixe comme ça. J'ai toujours eu un certain trouble de l'anxiĂ©tĂ©, et lĂ , je ne sais plus oĂč me mettre, ni quoi faire.

— C'est de la lasagne ? s'interroge Zeina en observant le plat, visiblement curieuse.

— Non, c'est du Parmigiana di Melanzane, prĂ©cisĂ©-je.

Tous les regards se croisent, incrédules. Bien sûr, ils ne connaissent pas ce plat italien.

— En fait oui, ce sont des lasagnes... aux aubergines, rectifiĂ©-je plus simplement.

Yara et Saif laissent échapper une exclamation de compréhension. Le reste de la table semble aussi intrigué, tandis que Maysoon hausse les sourcils.

— Ça a l'air bon, commente Zeina en se servant.

— Moi aussi, je veux ! s'empresse de dire Yara.

— Je veux aussi, ajoute Saif.

— Pourquoi tu me copies ?

— Yara.

Sa mĂšre la recadre immĂ©diatement. Yara lance un regard dĂ©sapprobateur Ă  Saif, qui rigole de bon cƓur. Elle se fait petite, mais lui ne semble pas gĂȘnĂ©. Pour sa mĂšre, ça doit sĂ»rement ĂȘtre un comportement qu'une femme ne doit pas avoir. Je connais bien ce genre de rĂšgles. Ça me rappelle mes tantes et les rĂšgles tacites qu'elles imposaient. Peut-ĂȘtre est-ce Ă  cause d'elles que je suis devenue aussi introvertie.

— D'ailleurs, Ziad, bon retour. J'espùre que tu t'es endurci, dit le mari de Zeina.

— Et que tu t'es aussi calmĂ©, ajoute Fadi, avec un ton amusĂ©.

Calmer dans quel sens ?

Ziad lui lance un regard si froid qu'il remet immédiatement Fadi à sa place.

— Amalia, ça te plaüt chez nous ? demande le chef de la famille, alors qu'il est au bout de la table.

Tous les yeux curieux sont encore une fois tournĂ©s vers moi. Ce dĂźner, je ne l'oublierai jamais, Ă  cause de leurs regards sur moi Ă  chaque fois que je prends la parole. Je me sens envahie par une immense gĂȘne.

— Oui, je m'habitue petit Ă  petit, rĂ©ponds-je, essayant de rester calme.

— Tant mieux, c'est ce que ton pùre aurait voulu aprùs tout.

Je sens la tension monter en moi. Parler de mon pÚre, c'est devenu trop sensible. C'est un sujet que je préfÚre éviter, mais il va falloir que je m'y fasse et que je cesse de vouloir pleurer à chaque mention de son nom.

— Je... je m'interromps alors que j'ai une question en tĂȘte.

Le regard de Gabriel se plisse, remarquant mon hésitation.

Depuis le début du repas, Nadim est resté presque silencieux à cÎté de moi, mais sa main, discrÚtement, glisse sous la table et vient se poser sur la mienne. Est-ce pour me soutenir ? Ce geste m'a tellement surprise que je me fige pendant deux secondes, puis je me force à me concentrer pour poser ma question :

— Comment est-il vraiment mort ?

Un lourd silence s'installe autour de la table. Je regrette d'avoir perturbĂ© l'atmosphĂšre du dĂźner, mais j'ai besoin de savoir. À cet instant, Nadim lĂąche doucement ma main.

— Tu aurais pu demander Ă  ton mari en privĂ©, non ? commente Ziad, prenant une gorgĂ©e d'alcool sans me jeter un regard.

Maysoon, à cÎté de lui, affiche un sourire satisfait, visiblement heureuse de me voir humiliée devant tout le monde. Elle a dû suivre son frÚre dans ce genre de comportement depuis son jeune ùge, ce qui explique en grande partie son attitude.

Son pÚre lance un regard d'avertissement à son ainé, mais Gabriel réplique fermement :

— Elle a le droit de passer par moi, Ziad. Je suis tout de mĂȘme le chef, et surtout un ami de son pĂšre.

Il ne dit rien, mais son attitude dédaigneuse me trouble. Quel est son statut pour oser agir ainsi ?

— Ton pĂšre a Ă©tĂ© retrouvĂ© par ton oncle Vito dans ta suite, quand il cherchait ses mĂ©dicaments avant que son attaque ne se dĂ©clenche complĂštement.

Je fronce les sourcils. Chercher ses médicaments ? Mais mon pÚre gardait toujours ses médicaments sur lui, ou dans la voiture. Pourquoi seraient-ils dans ma suite de mariée ?

— Oh... d'accord, rĂ©ponds-je, ma voix trahissant une lĂ©gĂšre incomprĂ©hension face Ă  cette rĂ©ponse.

Ça devait ĂȘtre une exception ce jour-lĂ , il avait ses mĂ©dicaments dans ma suite, sans le savoir. Tandis que je me perds dans mes pensĂ©es, les autres reprennent leur conversation sur un autre sujet.

— Qu'est-ce que tu as ? me demande Nadim, se penchant vers moi.

— Rien, rĂ©torquĂ©-je, mais ma voix tremble lĂ©gĂšrement.

— Sois honnĂȘte, je ne tolĂšre pas les mensonges.

Je me sens prise au piĂšge, mais je me lance enfin.

— Mon pĂšre est venu me parler dans ma suite avant de mourir. Et ses mĂ©dicaments ne sont que dans la voiture ou sur lui. Il ne serait pas venu pour ça. Ce n'est pas logique.

Le regard de Nadim se fait plus intense, comme s'il venait d'apprendre une nouvelle qui le dĂ©stabilise. Saif, Ă  cĂŽtĂ© de lui, jette un coup d'Ɠil Ă  son cousin.

— J'ai quelque chose Ă  annoncer, intervient soudainement le pĂšre de Fadi dont j'ai oubliĂ© le prĂ©nom, attirant l'attention de tout le monde.

— Nous avons enfin la date prĂ©cise pour le mariage de Fadi et Yara. C'est dans trois mois.

Les applaudissements fusent, suivis de cris de joie.

— Enfin ! Il Ă©tait temps, lance Dina, visiblement ravie.

— Ça ne s'arrĂȘte plus, les mariages. C'est ennuyant, ajoute Maysoon sans gĂȘne.

J'ai entendu dire que son mariage a été suspendu jusqu'à ce que Nadim se marie. Yara n'a pas l'air du tout enthousiaste, car elle n'a pas réagi. Cette annonce semble pour elle un véritable cauchemar. En baissant les yeux, je remarque ses mains posées sur ses cuisses fermées en poings.

— Yara ? je murmure doucement en posant ma main sur son bras.

Elle tourne la tĂȘte, le visage calme, mais dans ses yeux, je lis une tempĂȘte d'Ă©motions prĂȘtes Ă  dĂ©border. Je reconnais sa douleur, car je l'ai vĂ©cue moi-mĂȘme. Pourtant, je ne peux rien faire pour allĂ©ger son fardeau. Elle n'a pas d'autre choix. Elle devra accepter ce qui lui est imposĂ©, comme j'ai dĂ» le faire. Accepter des choses que ni elle ni moi n'avions jamais souhaitĂ©es.

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