Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
SianaTulnamn
Share the book

Chapitre 7.1

Raiponce était prête à venir à l’instant où j’ai décroché. C’était sans compter le blocage organisé, étant donné la venue de la famille royale. Ma famille. Il faudra attendre ce soir pour qu’elle vole à mon secours.

Mes parents ne sont même pas venus me voir. Deux de mes sœurs sont en revanche bien présentes, la troisième, l’aînée, étant occupée à un poste d’importance. C’est elle qui succédera à père, elle reprend doucement certaines affaires.

J’écoute d’une oreille les banalités de la vie à la Cour, me demandant comment Regina vit la chose de son côté. Ça doit être une toute autre ambiance.
 — C’est vrai que tu l’as embrassé ? me sort de mes pensées Alice. 

Alice est la quatrième de la lignée, juste avant moi. Nous n’avons que quelques mois d’écart, et ses grands yeux bleus surplombés d’une frange droite sont aussi plein de candeur que ceux d’une enfant. 

— Je te demande pardon ?! m’étonné-je.

— Bah, c’est ce qui se dit. 

— Qui dit ça ? demandé-je en me tournant vers mon autre sœur, Eleanor.

C’est la deuxième de la lignée. Blonde également, ses yeux bleus tendent vers le gris, mais je n’ai jamais su dire si c’était à cause de cet air flegmatique d’ado désabusé ou non. A presque trente ans, Eleanor traîne toujours ce style grunge décontracté en dehors des obligations : jeans baggy déchiré, t-shirt court rehaussé d’une chemise à carreaux beaucoup trop grande pour elle. Parfois elle porte des casquettes ou des bonnets. J’ai l’impression de voir une ado. Le pire, c’est que ça lui va bien.

Son regard me fait comprendre qu’elle s’en fout pas mal de ce que vient de me balancer Alice. En guise de réponse elle hausse simplement les sourcils : 

— Peu importe, me répond Alice le plus naturellement, c’est vrai ou pas ?

— Mais non ! 

— Oh, ça va, tu sais, nous on s’en fout hein ! 

— Baaaah… intervient Eleanor. Ça dépend.

— Oui, bon, renchérit l’autre, c’est vrai que là on parle de Regina. Moi j’ai toujours cru que c’était une sorcière, mais quand même ! tente-t-elle à grand échange d'œillade avec notre aînée. 

Je n’y comprends rien. Qu’est-ce qu’elles me font, là ? Eleanor, qui jusqu’à présent était avachie en travers d’un fauteuil et sur son téléphone, se redresse un peu, intéressée : 

— Qu’est-ce qui te fait dire que ce n’en est pas ? 

— Si c’était une sorcière, elle n’en serait pas là, argue l’autre. 

— Pourquoi pas ? 

— Réfléchis ! Elle aurait usé de ses pouvoirs, continue-t-elle en agitant les mains pour mimer la sorcellerie.

Je reste hébétée à les écouter échanger : 

— Parce que tu crois que ça fonctionne comme ça ? Et qu’est-ce qui te fait dire qu’elle n’en a pas fait usage ? 

— Et elle aurait fini à l’hôpital deux jours dans le coma ? Non, elle aurait sauvé ses miches. Et celles de notre Lucie ! ajoute-t-elle avec un clin. 

— Ça aurait été grillé à des kilomètres, alors que là, elle a peut-être simplement utilisé ses pouvoirs de façon raisonné, juste assez pour survivre et qu’on pense qu’elle n’en a pas. 

Alors que Alice réfléchit à l’hypothèse, j’explose : 

— Mais qu’est-ce que vous racontez, bon sang ?!! Vous vous entendez ? 

Mes deux sœurs me fixent de leurs billes rondes de surprise : 

— Vous vous rendez comptes des absurdités que vous balancez, en plus du manque de respect et de considération ? Qu’est-ce que vous faites là, au lieu de la remercier comme le font nos parents ? C’est tout de même elle qui m’a sauvé la vie, le respect est de rigueur. Si vous n’en avez pas suffisamment pour vous présenter face à elle, évitez de la déshonorer !

— Moi j’voulais juste savoir si ce qu’on dit est vrai… osa penaude Alice.

— Que Regina est une sorcière ?! 

— Que vous vous êtes embrassée.

Je redescends aussitôt. Oui, en théorie ce n’est pas totalement faux, Regina m’a bien embrassée. 

Eleanor chuchote quelque chose à Alice et cette dernière acquiesce. Je reprends immédiatement la mouche : 

— Quoi encore ?

— Ta coupe te vas vraiment bien, me répond Alice. 

— Oh… merci.

Je passe machinalement une main dans mes cheveux. Je commence à prendre l’habitude de leur longueur raccourcie.

— C’est pas généralement les filles amoureuses qui font ça ? lance la plus âgée.

— Comment ça ? 

Je tente de rester calme mais je sens mes joues chauffer. C’est pas ça qui va m’aider à rester maîtresse de moi et convaincante…

— De copier des traits de style de leur copain. Enfin en l'occurrence, de ta copine.

Je soupire en claquant la langue : 

— Regina n’est pas ma copine.

— Ah ? Pourtant ton ex aussi était rousse, rebondit Alice. 

— Et alors ? 

— C’est pas incohérent qu’on l'ait pensé, en plus, comme tu l’as si bien dit, elle t’a sauvé la vie. Et elle n’a pas hésité une seule seconde à ce qu’on dit. 

Notre sœur acquiesce vigoureusement. Elle pianote sur son téléphone et me le tend alors qu’elle vient de lancer une vidéo en m’affirmant : 

— C’est partout sur internet. Il fallait s’attendre à ce que de nombreuses personnes l'enregistrent et la repartage en masse. 

Sur le petit écran de verre, je reconnais bien vite le bureau de mon boss. Regina est face à la caméra qui filme juste au-dessus de mon épaule. Une secousse fait trembler l’image et bien vite tout part en vrille. Je comprends qu’il s’agit du passage de l’attentat. Mon estomac se tord alors qu’un goût de bile ferreux emplit ma bouche. Pourquoi me montrent-elles ça ? 

Je l’ai vécu, je n’ai pas besoin de le revoir. Pourtant je n’arrive pas à décrocher mes yeux du petit écran. L’angle de vue du matériel audiovisuel tombé au sol ne permet pas de voir convenablement et le son a lâché. Je passe juste devant l’objectif pour récupérer le micro. Plus loin, Regina m’observe le visage crispé d’inquiétude. Une nouvelle secousse l’oblige à se cramponner au bureau et son regard se lève vers le plafond. En haut à gauche de l’écran, par intermittence, l’énorme lustre se montre, en se balançant. Une seconde plus tard, elle se jette vers la gauche de l’écran d’où je ne suis toujours pas revenue. 

Le goût du sang emplie ma bouche alors que je ferme les yeux. Quand je les ouvre, le plan est fixe. On ne voit rien, à part les bottes à semelles rouge de Regina. Elles ne bougent pas. Et moi, je n'ai pas desserré la mâchoire, que je serre si fort... Si fort que je m'en suis mordue la langue à sang.

Eleanor me prend le téléphone des mains en houspillant Alice. Je les entends comme si j’étais sous l’eau. Apparemment je serais blanche comme un linge. Notre aîné s’empresse de m’essuyer le visage, moite, quand Alice est partie chercher une infirmière. Je meurs de chaud, et la voix de la femme les gronde. Je serai de nouveau en état de choc. 

“Quelle idée tu as eu aussi de lui remontrer ça !

— Quand tu es intervenue ça ne servait plus à rien, elle avait déjà tout vu ! La vidéo se coupe après !

— C’est pas une excuse ! Même moi je n’ai pas voulu la regarder cette vidéo, se défend Eléanor ; Lucie n’a pas besoin de la voir. Tu crois que ça lui fait quoi ?

— Tu ne m’en a pas empêché non plus !” 

L’infirmière m’allonge, les jambes surélevées et couverte. Un masque à oxygène posé sur mon visage. Après quoi elle a congédié mes sœurs. Alice a bien tenté de négocier, mais la soignante est restée ferme. Si c’est de leur faute que je sois dans cet état, alors mieux vaut que je reste seule. 

Et moi qui voulait assister à la rencontre de mes parents et de Regina. Je me demande comment elle a réagi.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet