Fallait-il vraiment qu’ils se lèvent ? Ils auraient aimé pouvoir rester là, dans le lit, l’un contre l’autre. Combien de temps cela faisait qu’ils étaient là ? Plusieurs heures certainement. Leur ventre leur rappelait de temps à autre qu’ils étaient des êtres de vie. Aïden renifla, essuyant encore une fois ses larmes qui avaient trop coulées. Il tenta de se redresser mais l’étreinte de Lughvar était solide.
— Lugh… Il faut qu’on se lève. J’ai besoin d’aller à la salle de bain et… quelqu’un risque de venir. On le savait love, on y était préparé.
— Tu as raison, soupira le démon en desserrant son étreinte. Mais c’est la première fois que je me retrouve comme cela… de l’autre côté. Toute cette douleur… La pratique devrait être vraiment évitée. Le corps subit déjà un traumatisme important par l’ouverture de la cavité, le passage des œufs... Il n’est pas vraiment nécessaire que l’oméga ait en plus un traumatisme psychologique.
Aïden prit la position assise sur le lit et s’étira. Avant de laisser ses bras tomber en soupirant. Il se leva et murmura un “je reviens”. Il prit un pagne dans l’armoire et entra dans la salle d’eau. Il tenait difficilement debout, mais il ne voulait pas être un poids. Il revint rapidement dans le lit, s’asseyant contre Lughvar qui avait pris aussi la position assise et s’était rhabillé d’un pantalon. Aïden posa une main sur son ventre vide.
— C’est vrai que ça fait mal, mais… si l’on m’avait obligé à les retirer… je l’aurais très mal pris. Qu’est-ce qui arrête les chaleur au final ? demande-t-il en fronçant les sourcils.
— C’est le fait que ton corps subit une grossesse.
— Mais comment ça ? Le fait d’être rempli provoque quoi ? Est-ce que finalement un traitement différent ne pourrait pas être fait ?
— Beaucoup de recherches sont faites, mais pour le moment, c’est le meilleur moyen tout en obtenant des résultats concluants.
Trois coups furent frappés à la porte avant qu’elle ne s’ouvre, révélant Alari dans un pantalon moulant noir avec des bottines à talon haut ainsi qu’un haut blanc en dentelle noire. Iel entra et ferma la porte avant de s’approcher des deux amoureux. Iel prit place sur le lit et leur fit un petit sourire.
— Comment vous vous sentez tous les deux ?
— J’ai l’impression qu’on m’a arraché le cœur et compressé les poumons. Je suis fatigué d’avoir tant pleuré, répondit Aïden.
— Je suis… désemparé. Je ressens un peu la même chose mais c’est différent en même temps.
— Arriverais-tu à me l’expliquer en détail, Lughvar ?
— Vivre ça... c’est quelque chose d’horrible. Dans ma race la fausse couche n'existe pratiquement pas. Quand il y a une grossesse, c’est une grossesse multiple quoi qu’il arrive. Du coup, oui il arrive parfois qu’un enfant ou deux sur les trois - quatre ne survivent pas à la naissance… mais subir une si lourde perte d’un coup. C’est bien trop choquant pour moi.
— Et pour vous deux, comment voyez vous votre avenir maintenant ?
Aïden tourna son regard vers Lughvar avec un petit sourire et entrelaça leurs doigts ensembles.
— Nous allons prendre notre temps, répondit Lughvar. Cela ne fait que deux semaines à peine que je vis sans l’ombre de Isil. Nous nous connaissons à peine et Aïden doit continuer ses études. Cela va être difficile de le laisser partir si loin de moi, alors que les premiers jours je l’aurais bien fichu à la porte sans soucis.
— Hey !
Aïden lui frappa le bras, l’air vexé bien qu’avec un grand sourire. Lughvar lâcha la main du plus jeune et passa son bras autour des épaules, le pelotonnant contre lui. Il lui embrassa le haut de sa tête. Il l’aimait tellement alors qu’il l’agaçait tant au départ.
— Et votre avis, Aïden ?
— Je… J’aurais vraiment envie de rester encore un peu. Avoir bien plus de temps pour me remettre de tout ça. Mais si je fais cela… Je sais que la séparation va être encore plus difficile. Alors partir dans deux jours me semble bien. Cela me laisse le temps de récupérer, dire au revoir et partir sans regret.
— Et pour les études, savez-vous ce que vous voulez faire ?
Aïden se mordit la lèvre du bas, jeta un regard vers Lughvar, incertain.
— Je… Je ne sais pas quoi faire. Mes notes ne sont pas trop mauvaises je crois mais pour ce qui est du caractère…
— Vous savez que je peux parfaitement vous fournir un dossier psychologique qui prouverait que votre comportement n’était que le reflet d’un traumatisme non soigné à temps. Que vous vous êtes protégé dans la violence pour faire fuir les autres. Il serait bon que je continue à vous suivre pendant les vacances d’ailleurs.
— J’aimerais oui. Vous… vous manquez de personnes ici. Je ne pourrais peut-être pas être médecin, mais peut-être que je pourrais aider. Certaines choses peuvent être faites comme les soins après la ponte ou même pour laver les omégas et bêtas présents… Certains seraient peut-être plus à l’aise en présence d’un oméga que d’un alpha. Puis étant un ylèndr, je pourrais répondre à certaines questions plus… intime.
— Ce serait une excellente idée Aïden ! Vous pouvez faire les trois années de médecine nécessaire pour devenir infirmier dans les hôpitaux généraux et je pense que ce sera suffisant pour venir travailler ici. Après, il serait mieux d’en parler avec Hargvar.
— Ce sera fait, répondit Lughvar, catégorique.
Alari se leva et passa ses grandes mains sur son pantalon.
— Tu vas me suivre dans mon bureau, Lugh, je vais avoir d’autres questions à te poser. Aïden, je vais vous envoyer Hargvar qui pourra certainement répondre à vos questions et vous orienter pour ce que vous voulez faire.
— Merci, Alari.
— C’est mon travail. J’ai beau parfois vouloir faire autre chose, aider les gens est vraiment gratifiant quand l’on voit les résultats finaux.
Alari sortit, laissant les deux amants un moment et attendant le démon dehors. Lughvar embrassa tendrement Aïden plusieurs fois et lui promit de revenir. Il passa un haut avant de partir à la suite de lae vampire.
Dans la chambre, Aïden s'allongea sur le lit, observant le plafond. Quand il était arrivé, il en avait voulu à ses parents. Il ne comprenait pas pourquoi ils ne lui avaient rien dit et pourquoi ils l’avaient laissé s'enfermer autant dans la haine. Puis il s’était retrouvé à la même enseigne que les autres, on ne lui laissait pas le choix et… et c’était pas plus mal. On le recadrait en répondant à ses attaques par des choses logiques. Lughvar l’avait menacé d’une punition car il se comportait comme un enfant et si son cas n’avait pas été aussi grave il était certain qu’il le lui en aurait donné une. Ils lui avaient parlé tout comme… comme une personne, pas comme un oméga. Avec une douceur et une insistance légère, il les avait laissé s’approcher et le soigner.
Lughvar avait même fait une injection pour retarder un peu les effets des chaleurs, respectant son choix. Il n’avait pas vraiment peur d’être touché... Il avait peur d’être abusé, blessé… peur de salir à cause de ce qu’il a subi et de ce qu'il a fait. Lughvar le faisait sentir bien, lui montrait à quel point il n’était pas sale et les autres aussi, dans un simple respect. Ils avaient juste… fait leur travail avec professionnalisme, sans outrepasser le règlement et abus de leur statut.
Il avait vraiment eu peur de mourir. Il avait menacé ses parents de se laisser mourir mais… Un fois devant, cela l’avait effrayé. Il avait eut si mal, si peur… Peur de quoi ? La mort ne l’effrayait pas tant que cela. Il avait senti quelque chose au fond de lui, quelque chose qui lui avait donné envie de se battre. Quelque chose ou plutôt… quelqu’un. Lughvar…
Le démon l’avait vraiment accompagné jusqu’au bout. Même si leur histoire personnelle s’y était mêlée, mais… ce n’était pas plus mal. Puis, il avait finalement appris pourquoi ses parents n'avaient rien dit. Sa mère s'était tue, pensant qu’il irait mieux avec le temps et n’avait rien dit à son père. Mais le temps… ils n'en avaient pas eu et il s’était complètement enfermé. Lui ne parlant pas, eux ne l’aidant pas et sa mère gardant ce secret pour elle.
La porte de la chambre s’ouvrit sur le directeur, faisant sursauter Aïden qui était trop prit dans ses pensées.
— Vous m’avez fait peur, dit-il la main au niveau du cœur.
— J’ai pourtant frappé, répondit le démon en entrant. Alari m’a fait part que tu avais quelques questions.
— Oui, enfin… Lughvar m’a fait part que vous manquiez de personnel ici.
Le jeune homme expliqua de nouveau son potentiel plan d’étude, argumentant sur le fait qu’il ne voulait pas être séparé de Lughvar et surtout que son statut d’oméga pouvait aider. Il avança aussi que son statut d’oméga était encore un frein dans certaines écoles supérieures et qu’au vu de son dossier… cela fermait pas mal de portes. Le directeur prit un moment à réfléchir, écoutant le jeune homme.
— Il y a un établissement qui pourrait te correspondre. Sur l'île de Khondè à Solàn exactement, l’établissement forme pour les métiers de la médecine. Ils y prennent tout le monde sans distinction. Si tu veux je te commande le manuel pour plus d’information.
— Je voudrais bien oui merci. Est-ce que… Est-ce que ce serait possible aussi de me faire parvenir une tenue pour ylèndr pour demain ?
— Ce sera fait. Tu n’as pas d’autre question ?
— Non, je vais aller me doucher puis attendre Lugh pour aller manger un peu et retourner me reposer.
Hargvar passa sa main dans les cheveux du plus jeune et sortit de la pièce. Il souriait plus souvent depuis la mise en couple de Lughvar avec Aïden. Les deux s’étaient parfaitement trouvés. Tous les deux très bornés, forcément qu’il y a eu des étincelles mais cela fait leur force actuelle. Ils avaient été tous deux blessés, ils étaient ressortis ensemble et maintenant construisaient leur histoire petit à petit sans se presser.
Bon certe ils avaient couché ensemble et bien plus d’une fois. Il n’était pas aveugle, il avait bien vu le suçon à l’arrière du cou de Aïden et les quelques traces de crocs qui traînaient, sans vraiment que ce soit une morsure. Ils méritaient bien leur amour. Lui l’avait laissé partir avec quelqu’un d’autre et n'avait à présent personne en vue. Enfin… Il lui arrivait parfois d'avoir envie de franchir le pas de l’interdit… un interdit se nommant Azrog. Depuis son arrivée, le démon lui avait fait une impression étrange. Cet alpha qui se laissait aller dans les bras de d’autres alphas. Un alpha grhul avec un de ces… Hargvar se frappa mentalement et entra dans son bureau.
Toute cette histoire d’amour et les hormones ambiant devaient lui monter à la tête… il n’y avait pas d’autre explication.
Lughvar soupira, passant de l’eau sur son visage pour reprendre ses esprits et le contrôle. Parler avec lae psychologue lui avait fait du bien, il ne pouvait pas dire le contraire. Mais parler de tout cela… avait été vraiment fort. Il sortit de la pièce et se dirigea de nouveau vers la chambre. Quand il entra, il entendit l’eau de la douche couler. Il se mordit la lèvre du bas et enleva tous ses vêtements avant de se glisser dans la salle d’eau puis derrière son amant.
La douche ne dura pas longtemps, leur ventre les rappelant à l’ordre. Ce ne fut qu’après un copieux repas qu’ils vinrent se recoucher l’un contre l’autre, après une douce étreinte et quelques lèvres et mains baladeuses. Lughvar observa tendrement la nymphe blonde endormie entre ses bras.
Ils s’étaient souvent demandés ce qu’ils feraient après, et bien la réponse était là. Après… ils s’aimeront encore, qu’importe la distance et le temps qui passe. Demain, il l’invitera au restaurant et lui prouvera mainte fois combien il l’aime et combien il lui manquera. Il ne pouvait pas le marquer de ses dents… mais il pouvait certainement le marquer en le couvrant de bijou. Oui… il lui offrira une parure qui montrera au monde que ce bout d’homme, cet oméga exceptionnel… était à lui, rien qu’à lui.