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Xian_Moriarty
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Ella marchait à vive allure dans les rues dans la capitale, les nerfs à vif. Ses poings serrés blanchissaient tandis que ses sourcils cherchaient à rejoindre ces joues. Elle ne savait pas contre quoi sa colère s’exerçait : son attitude volontaire, le stress, la police, la peur, l’irrespect de Kerviller. Cet ivrogne d’inspecteur l’avait traité comme une moins que rien. Même le chat avait suscité plus d’attention qu’elle. Elle s’en voulait aussi à elle. Pourquoi s’être lancé à corps perdu au commissariat pour lors avouer un truc qui lui serait retombé sur le coin de la tronche à un moment ou à un autre. Mais plus que cela, c’était tout son passé qui lui revenait en pleine face. De sa jeunesse, elle n’en gardait que de très mauvais souvenir. Souvenir d’une naïveté et d’une faiblesse qui la rendait malade maintenant.

Ella percuta une vieille femme voûtée comme une église qui nourrissait quelques moineaux. Elle s’excusa auprès de l’aînée délabrée. Son errance l’avait conduit vers les jardins Luxe-en-bourg où des familles favorisées paradaient avec enfants ou chiens. Dans ce grand parc arboré au milieu de la capitale, l’ancienne métallieuse eut une nausée. Cela lui rappela les jardins du manoir Michinski. Une sorte de paradis qui cachait un enfer. Un pivert cogna dans sa boite crânienne. Elle se dirigea vers une fontaine publique. Elle tourna la petite pompe. L’embout cracha un épais boyau d’eau. Ses mains en creux recueillirent le liquide qu’elle porta à sa bouche. Un goût infect de métal rouillé envahit sa gorge. Mais elle avala plusieurs goulées, avant de s’installer sur un banc. Ses yeux se levèrent vers le ciel. Durant un court moment, elle oublia ces soucis. Une de ces créations mécaniques sur un corps décapité. Une locataire peau-de-vache avec deux taurillons fous. Du charbon qui tardait à rentrer. Des comptes médiocres. Sa boutique fermée sans prévenir depuis ce matin au risque de rebuter quelques potentiels clients. Journée de merde. Le fond du trou. Encore.

— Allez ma fille, te laisse pas abattre. Tu t’es sortie de bien pire !

Ella bondit du banc sous une nuée de pigeons effrayé. Elle s’engagea dans la première ligne de tramway qu’elle aperçut.

Après trois changements, aussi longs que pénibles, Ella gagna une interminable avenue ombragée par des arbres en rang d’oignon. La métallieuse s'émut pour ces fiers platanes enfermés dans leur corset. Ils respiraient les odeurs chaudes du bitume que les ouvriers coulaient sur l’allée en réfection.

Après avoir suivi des bosquets écrasés contre des grilles métalliques, Ella s’engouffra dans un chemin privé qu’un haut portail ouvert gardait. Une haie de saules pleureurs l’accompagna vers la porte principale d’un hôtel particulier. Elle rendit les saluts aux gens d’écuries qui s’occupaient des montures des membres du cénacle. La métallieuse se figea sur les marches. La colossale portière, Athéna Grise, la darda de son regard de gorgone. Engoncée dans son costume cendré, la gardienne esquissa un mince rictus. Une salutation bienveillante. Qui n’est pas autorisé à pénétrer dans le Cénacle ou ne possédant pas d’invitation ne pouvait franchir le seuil sans prendre une mandale inhospitalière. Ella constituait l’exception. Grise lui ouvrit la porte. La métallieuse fut happée dans l’immensité du hall d’entrée. La lumière chutait du dôme vitré et inondait le sol de marbre de ses rayons. Le vide de cet aquarium s’accroissait avec le silence. Dans un coin, quelques morses lisaient journaux et ouvrages divers dans une ignorance érigée au rang d’art. Les bottines d’Ella résonnèrent, augmentant un sentiment de désorientation. Elle détestait cet endroit. Elle n’y était venue que très peu et jamais pour des raisons plaisantes. Aujourd’hui ne faisait pas exception. Ses pas la conduisirent à l’accueil tenu par deux jumeaux filiformes aussi enjoués que Grise est morne. Deux rangées de dents blanches la reçurent avec une sincérité qui désarma Ella. Les deux échalas étaient trop jeunes pour connaître son histoire dans les moindres détails. De plus, ils se faisaient un devoir de jouer leur rôle avec le plus de gaieté possible. N’importe qui, de mauvaises humeurs, retrouve le chemin de la joie quand on l’invite dans des yeux de bonheur, disaient-ils souvent.

— Mademoiselle Michinski, se réjouit Luc avec son air candide.

Les jumeaux n’employaient jamais le « madame » avec elle, car tous deux savaient qu’elle n’appréciait pas d’être ramenée à son défunt mari. La gaîté du garçon s’insinua dans les veines d’Ella et cet enthousiasme lui mit du baume au cœur.

— Que pouvons-nous faire pour vous ? poursuivit sa sœur, Léïha.

— J’aurai besoin d’accéder aux archives de ma famille.

Les sourires des jeunes gens désertèrent leurs lèvres. Leurs regards se croisèrent, peinés.

— Ah… Nous…

— Je sais que ce que je vous demande est…

L’ordre vint d’en haut :

— Sortez d’ici !

Les morses baissèrent discrètement leur lecture pour jeter des œillades racoleuses vers le théâtre qui allait se jouer.

Ella roula des yeux. L’once de dignité qui l’habitait l’empêcha de s’écrouler sur le comptoir. Face à Louis D’Urbon du Castelfort, voûter les épaules serait lui faire un trop gros honneur. Les sourcils de la métallieuse se froncèrent pour former un grand V sur son front. Le mépris giclait de ses iris et le maître du Cénacle le lui rendait bien. Sa colère ruinait l’apparence élégante qu’il affichait comme une preuve de sa supériorité : un bon métallieur doit aussi être une personne de goût. Avec sa tenue humble un peu usée, Ella représentait exactement ce qu’il pensait d’elle : un être médiocre.

Le quadragénaire déboula du premier étage, dégringolant les marches quatre par quatre pour se planter devant l’objet de son dédain. L’homme dominait l’indésirable d’une bonne tête. Son souffle rageur s’accrochait dans les cheveux châtain d’Ella comme de la boue sur du tissu. Les postillons se retrouvèrent prisonniers de sa moustache frétillante de colère.

— Sortez d’ici.

— Je suis venue consulter les archives…

— Vous n’avez rien à faire ici ! Grise ! Sortez-moi cette intruse ! Grise !

La grande groom entra, le visage plus renfrogné que jamais. Ses pas lourds résonnaient dans le hall. Le sol tremblait sous les pieds de la colosse. Elle se mouvait comme une épaisse masse de chair, traînant ses orteils comme autant de boulets, mais dont l’avancée demeurait inévitable.

— Ça suffit !

La voix grave tonna comme un torrent en furie. Grise s’arrêta, décapitée par l’ordre tranchant. Tous les yeux se tournèrent vers le point d’émissions de l’injonction. Les dents d’Urbon de Castelfort crissèrent. Une petite lueur d’espoir et de soulagement brilla dans le regard d’Ella.

La canne ferrée prit le relais des pas de Grise dans le grand hall. Chaque cliquetis métallique tranchait avec la démarche féline de sa propriétaire. Dame Amaranthe Faye rejoignit le groupe, à vive allure, l’un des jumeaux sur les talons. Avec son port altier, la vieille métallieuse possédait une raideur qui la rapprochait des troncs corsetés du boulevard. L’arbre à chevelure blanche de saule posa sa branche sur l’avant-bras d’Ella et lui adressa un regard doux.

— Je vous attendais. Cela faisait tellement longtemps que nous ne nous étions pas vus. Je suis ravie.

Puis ses sourcils se durcirent pour foudroyer un Urbon de Castelfort furibond.

— Vos manières se dégradent mon cher. Je suis persuadée que vos parents vous ont mieux élevé que cela, Louis.

— Elle n’a rien à faire ici !

— La seule chose qui n’a pas sa place ici, Louis, c’est votre rancune. Vous avez beau être le maître du Cénacle, cela ne vous donne pas tous les droits. Alors maintenant, retournez à vos petits papiers !

La vieille femme agita sa main comme si elle avait affaire à un gamin capricieux. Les deux fortes têtes se toisèrent un long moment.

Dame Amaranthe ne cilla pas. L’autorité naturelle qui émanait de sa haute personne mettait souvent ses interlocuteurs mal à l’aise. Apprendre à cerner ses expressions demeurait le meilleur moyen de rester en bon terme avec elle. Et là, ses traits durs ne laissaient place à aucune concession. Si D’Urbon de Castelfort ne cédait pas, leur face à face pouvait durer des heures. À moins qu’un petit suicidaire ne prenne sur lui de les séparer au risque de recevoir les foudres des deux belligérants. Le maître du Cénacle se détourna le premier, sous prétexte qu’il avait autre chose à faire. Il cracha ses mots avec un mépris à peine voilé pour la vieille métallieuse qui ne bougea pas d’un cheveu. Urbon de Castelfort regagna son atelier, les poings serrés, le dos voûté. Ses semelles claquèrent contre les marches de marbres.

Si la confrontation eut crispé Dame Amaranthe, elle n’en montra rien. Son port altier resta le même alors qu’elle se tourna vers Ella. Seul son regard changea. Presque une grand-mère affectueuse auprès de sa petite fille après un chagrin.

La tension retomba dans le hall. La grande groom regagna sa porte aussi silencieusement qu’un chat tandis que les jumeaux reprenaient leur souffle. Leïha tapota l’épaule de son frangin avec gratitude. Ce dernier allait avoir quelques soucis. Le maître du Cénacle lui fera regretter son initiative. Encore quelques heures sup non payées à venir.

Dame Amaranthe se tourna vers Ella, un peu penaude d’avoir déclencher un énième esclandre, chamboulé par l’agression d’Urbon de Castelfort. Jamais elle ne parviendrait à rester stoïque face à cet homme qui lui rappelait trop bien son défunt mari. Dans son malheur, la tendresse dans les yeux de la vieille métallieuse lui réchauffa le cœur. Sans la douceur et la bonté de l’archiviste du Cénacle, qui sait ce qu’elle serait devenue ?

— Ella, ma petite.

Dame Amaranthe nommait tout le monde par cet adjectif, sauf celles et ceux qu’elle ne pouvait pas piffrer. Et peu de personnes du Cénacle se risquaient à se la mettre à dos.

La longue main fine et osseuse se posa sur la joue d’Ella. Sa peau sentit les cales et le cuir de ces doigts experts dans la lecture des métaux. Cette rugosité aurait fait peur à n’importe quel enfant. La délicatesse venait de son regard honnête et sincère.

— Cela faisait trop longtemps que je ne vous ai pas vu. Vous continuez de fuir cet endroit comme la peste alors que vous devriez le reconquérir, faire valoir vos droits.

Toujours aussi combative. Si elle avait le physique, Dame Amarnathe aurait mis une grosse raclé digne des Forts des Halles à ce malotru d’Urbon. Ella ne possédait pas cette force. Bien au contraire. Malgré les épreuves, elle demeurait cette petite fille timide et discrète qui n’apprécie guère le conflit. Sans compter qu’à chacune de ses audaces, une catastrophe se produit.

— Je suis heureuse de vous revoir aussi. Vous m’avez manqué. Je pense souvent à vous.

— Et j’imagine que cela arrive de temps à autre. Surtout en ce moment. Avec vos yeux fatigués, j’en déduis que cela ne va pas fort. Est-ce pour cette raison que vous êtes venus ici ? Vous avez besoin d’aide ? Vous savez que je serais toujours là pour vous épauler.

— Pourrions-nous en parler en privé ?

Les sourcils de la vieille métallieuse se plissèrent, inquiets et surpris. Elle conduit son amie vers son bureau. En passant devant les morses, Dame Amaranthe leur lança une remarque acerbe à faire pâlir les morts – son vocabulaire parfois charretier tranchait avec sa physionomie de grande dame – tout en regrettant de ne pas pouvoir les désintégrer d’un claquement de doigts.

L’ordre est propre à chacun. Dame Amaranthe clamait toujours qu’elle rangeait autrement. Si tout dans sa personne respirait l’organisation – pas un seul cheveu ne dépassait jamais de l’énorme tresse qu’elle portait de côté —, ce n’était pas le cas de son lieu de travail. Pourtant, elle était l’archiviste du Cénacle. Ella circula jusqu’à un siège avec la précaution d’un éléphant dans une boutique de porcelaine, de peur de marcher sur un document ou sur un livre. La vieille métallieuse coula dans la pièce pour s’installer à son bureau. Même sa canne ne dérangea pas un seul papier.

— Le sujet doit être sérieux si vous souhaitez en parler loin des oreilles indiscrètes. J’espère que ce n’est rien de bien grave.

Ella lui tendit le journal à la page concernée. Dame Amaranthe demeura de marbre devant la sordide photo.

— Pauvre homme. Une bien triste fin. Je suppose que c’est le petit animéca qui vous inquiète.

Vous savez quelque chose à son propos, j’imagine.

La métallieuse remercia son amie de posséder un esprit aussi vif. Elle lui narra donc sa matinée et sa rencontre avec cet ivrogne d’inspecteur Kerviller. Durant toute son histoire, Dame Amaranthe n’exprima aucune émotion, concentrée sur le récit de son comparse. Mais dès qu’elle eut terminé, un long soupir s’échappa dans ses lèvres. Une crampe d’estomac saisit Ella. L’angoisse d’avoir commis une grave erreur lui triturait les boyaux. Agir sans réfléchir, faire des bourdes sans nom était l’une de ces spécialités. Le stress la rendait idiote. Et le rictus de Dame Amaranthe signalait qu’une fois encore, elle avait œuvré contre elle-même.

— Mais vous avez raison. Louis ne laissera pas la police entrer ici, mais il ne pourra pas faire obstruction à une enquête pour meurtre. Si l’animéca est de nature à porter ombrage à la réputation de Léonce, il fournira des documents falsifiés. Cet imbécile est prêt à tout pour vous faire renoncer à votre nom et pour auréoler de gloire la famille Michinski. Quel crétin !

L’admiration d’Urbon de Castelfort pour cette grande lignée de métallieurs virait à la bêtise et à l’aveuglement. César Michinski éleva sa dynastie au sommet ! Des rumeurs courraient même à son sujet : il aurait lié un alliage. Hélas, un accident lui en partie perdre l’usage de ses mains. Aucun de ces fils ne parvint à relever le niveau. Athanase, l’aîné, était un très bon métallieur, mais ne réalisa que peu de pièces. Il ne souhaitait pas prendre la suite de son père. Sa passion se tournait vers les chevaux et il rêvait d’ouvrir un haras refuge. Léonce, lui, était un imposteur de première. Métallieur médiocre doublé d’un ingénieur inepte, son principal talent résidait dans son éloquence et son art de la manipulation. Beaucoup de ses animécas avaient été conçus par son frère. Il se contentait de les lier, au mieux. Au pire, il lisait les pièces avant de relier sur la première trame. Hélas, les riches clients de la maison Michinski ignoraient tout cela. Au moins trois personnes connaissaient la supercherie. Ella, qui confectionna et lia les plus belles pièces de la maison au profit de Léonce ; de Dame Amaranthe, une lectrice de métal d’exception et qui avait très vite découvert le pot aux roses et Urbon de Castelfort qui ne jurait que par le génie du fils Michinski.

Tous ces souvenirs heurtèrent Ella. Trop de peines, amplifiées par le stress, remontèrent à sa gorge et à ses yeux qui s’humidifièrent. Ne pas pleurer. Porter ses mains au visage attirera l’attention de son amie. Elle ne voulait pas l’embêter avec ces blessures anciennes auxquelles elle ne pouvait rien changer. Hélas, la vieille métallectrice était d’une perspicacité à toute épreuve.

— Ne vous mettez pas dans des états pareils. Cela ne nous avancera à rien. Ilesh !

Un petit jeunot, pas même vingt ans, déboula d’une pièce voisine. Sa cravate et ses lunettes de travers, il semblait émerger de son sommeil. Pourtant, son regard noir et vif indiquait le contraire, tout comme sa réactivité. Ses cheveux corbeau tombaient sur ses épaules, ce qui accentuait son air négligé. Sa tenue claire faisait ressortir son teint de peau très mate. Cette apparition surprit quelque peu la jeune métallieuse. Les gens de couleur étaient rares au sein du Cénacle. Urbon de Castelfort renâclait à accueillir des « étrangers » — pour rester poli.

— Ella, je te présente Ilesh. Je le forme à l’art de l’archivage. Va donc nous chercher du thé, veux-tu ? Sans sucre et un peu de lait pour miss Michinski.

L’apprenti opina du chef et se glissa hors du bureau.

— Ne faites pas cette tête ! Vous ne pourrez jamais rivaliser avec Louis à ce petit jeu. Ce ne fut pas simple, mais Ilesh est le meilleur métallecteur que j’ai eu l’occasion de rencontrer ces trente dernières années. De plus, il a une mémoire que je jalouse !

Ce gamin devait être exceptionnel ! Dame Amaranthe pouvait reconnaître avec une facilité déconcertante le liage des animécas et retrouver leur créateur. C’était ainsi qu’elle avait découvert la supercherie de Léonce. Hélas, sa réputation de l’époque n’aurait pas fait le poids face à celle de la famille Michinski. Mais en plus de savoir identifier le travail des uns et des autres, ses doigts en gardaient une mémoire incroyable. Mémoire d’autant plus exceptionnelle qu’elle parvenait à retrouver sans difficulté un document rangé entre deux livres de sa bibliothèque dix ans auparavant.

— Il me remplacera un jour. Et il me supplantera même ! Mais pour le moment, je le mène à la baguette dans l’espoir qu’il se forge à mon image. Parce que niveau naïveté, il en tient une bonne couche. Pire que vous, sans vouloir vous offenser.

Ella se décrispa et lâcha un mince sourire.

Ilesh revint avec la commande de son instructrice puis elle l’envoya aux archives pour chercher dans les dossiers de la famille Michinski un document, une liste, ou toutes informations concernant un petit animéca insecte que Léonce aurait vendu.

— Il en existe une dizaine, fit remarquer Ella.

Le jeune homme hocha la tête et disparut au pas de course.

— Il m’épuise à toujours galoper. Je me demande parfois comment il fait pour rester des heures et des heures sur sa chaise.

— J’espère qu’il parviendra à dénicher quelques choses. Tout a brulé lors de l’incendie du manoir familial. Je n’ai même pas pu sauver les plans de mes créations.

Elle prit une gorgée de thé pour étouffer un soupir. Cette nuit-là, tout son travail était parti en fumée, les deux frères Michinski finirent carbonisés et un autre enfer s’ouvrit sous ses pieds.

— J’espère que votre inspecteur viendra bien chercher lui-même ces informations. J’aimerai bien jeter un doigt sur votre animéca, m’assurer qu’il s’agit bien d’une de vos réalisations.

Ella écarquilla les yeux, ne sachant trop quoi penser de la remarque de son amie.

— Dame Amaranthe, je vous suis gréé de tout ce que vous faites pour moi. De tout ce que vous avez fait pour moi. Mais s’il vous plait, ne faites rien d’inconsidéré.

La vieille métallieuse ricana entre deux gorgées de thé.

— Ne vous inquiétez pas. Loin de moi l’idée de mentir à la police pour vous disculper. Mais de nombreuses copies de pièces rares circulent sous le manteau en ce moment, comme on dirait dans la rue. Mal liées, très vite défectueuses. Des métallieurs illégaux. Nous avons déjà quelques pistes. J’espère que vous ne vous risquez pas à réaliser des animécas sans autorisation.

Non ! Hors de question de perdre la mince chance de pouvoir reprendre son activité de métallieuse pour si peu ! Métallectrice, oui, cela, elle pouvait encore le faire en toute discrétion. En croisant les doigts que ces petites anicroches pour rectifier quelques imperfections passent inaperçues.

— Mais que puis-je faire maintenant ? J’ai l’impression de mettre jetée dans la gueule d’un loup qui ne serait jamais venue me trouver si je n’avais pas couru à lui.

— Rien. Rentrez chez vous, reprenez votre activité. Peu importe ce que fera Louis, jamais il n’orientera la police vers vous, car cela pourrait nuire à la réputation des Michinski. Au mieux, nous identifierons le propriétaire cet animéca. Au pire, cela risque de rester un énième crime crapuleux sans réponse, j’en ai bien peur. Vous n’êtes pas responsable en rien dans cette affaire. Pas plus que le tailleur du défunt.

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