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1 - Prologue
2 - Chapitre 1 : Le diamant
3 - Chapitre 2 : La lueur d'un Prince
4 - Chapitre 3 : Première fois
5 - Chapitre 4 : Malheureuses
6 - Chapitre 5 : La ville, l'inconnu et moi
7 - Chapitre 6 : Loyauté à la lame
8 - Chapitre 7 : De bois et de fer
9 - Chapitre 8 : Les masques
10 - Chapitre 9 : Mensonges
11 - Chapitre 10 : La petite neige
12 - Chapitre 11 : Violences
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Prologue

La nuit s'étirait lentement entre les murs feutrés du Chaste&Purity.

Ici, l'obscurité avait une odeur — celle des draps froissés, du vin renversé et des fleurs fanées abandonnées dans des vases trop pleins.
Le temps semblait suspendu, enfermé entre les velours pourpres et les dorures ternies par des mains trop avides.

Blue était assise devant son miroir, nue sous une robe de soie blanchâtre, les jambes croisées comme si son corps appartenait à une autre.
Le rouge sur ses lèvres n'avait pas bougé depuis des heures, figé comme son cœur.

On disait d'elle qu'elle était la plus belle chose que ce bordel avait jamais possédée.

Mais une chose reste une chose.

Dans le grand salon, des rires s'étouffaient derrière les paravents de bois de chêne.
Des hommes au pouvoir murmuraient leurs secrets entre deux gorgées de saké.

Blue les entendait comme toujours.

C'était là, dans le silence entre deux soupirs que la vraie nature des hommes se révélait.
Elle savait pertinemment que si elle écoutait assez longtemps, elle finirait par entendre un jour quelque chose qu'elle n'aurait jamais dû savoir.

La porte de sa chambre s'entrouvrit, laissant filtrer la lumière opaques des couloirs.

Une silhouette fine s'y glissa — Snow, la petite fille des cuisines : neuf ans, pieds nus, trop jeune pour comprendre à quel point elle était chanceuse d'être encore invisible.

— Blue... Ils demandent ta présence en bas.

Elle cligna lentement des yeux, laissant la phrase flotter. Ils. Cela pouvait être n'importe qui : un ministre, un seigneur de guerre ou pire, un homme qui se croyait capable d'acheter ce qu'elle ne vendait jamais, sa vie.

Elle se leva avec la lenteur d'une femme qui connaissait la valeur de chacun de ses gestes.
Le tissu de sa robe glissa gracieusement sur sa peau.

Blue n'était pas qu'une courtisane, elle était un joyau.

Un joyau en guise d'offrande.

— Dis-leur que je descends.

L'enfant hocha la tête avant de disparaître, laissant derrière elle une bonne odeur de savon noir. Blue resta un instant immobile, les yeux fixés sur son propre reflet.

Sa beauté était une malédiction qu'elle portait comme une couronne car, ce monde était fait de femmes qui souriaient pour survivre, et d'hommes qui payaient pour le plaisir.

Elle ouvrit un tiroir sous sa coiffeuse et en sortit une tranchante épingle à cheveux en argent, juste au cas où. Puis elle descendit lentement, comme si chaque marche la menait un peu plus près de sa propre damnation. Les escaliers craquaient sous ses pas, comme si la vieille bâtisse respirait avec elle.

Le grand salon du Chaste&Purity s'ouvrit dans un éclat tamisé de lampes à huile. Les murs étaient drapés de tissus lourds, couleur vert émeraude. L'air vibrait d'une chaleur moite, saturée par les fumées d'opium et de sueur d'hommes trop riches pour sentir leur propre déclin.

Blue descendit lentement, laissant le silence s'étirer autour d'elle. Tous savaient quand elle entrait. Jamais elle n'eut besoin d'annoncer sa présence, sa beauté la précédait toujours. Les conversations s'éteignirent peu à peu, comme si l'on venait d'ouvrir la porte d'un coffre-fort mal gardé.

Au fond de la pièce, Madame Yi veillait dans son fauteuil bas, le chignon tiré à en faire saigner son cuir chevelu. Ses yeux noirs suivaient Blue avec une satisfaction mesurée — la fierté d'une femme qui savait reconnaître la beauté, mais encore plus la souffrance bien cachée.

Une reine sur son trône de velours.

Blue savait ce que la matrone voyait en elle.
Une œuvre d'art façonnée à la main et un corps précieux vendu à la découpe.

— Blue...

La voix de Snow claqua dans l'air comme une lame effleurant la peau.

— Le seigneur Kazuo aimerait ta compagnie ce soir.

Blue se retourna lentement vers le public, lissant d'un geste distrait la soie sur ses hanches.

Kazuo. Un nom qui laisse une traînée d'or et de cendres partout où il passe. Il n'achetait pas de femmes, il achetait leur silence.

La fumée des pipes s'accrochait à ses narines.
Blue chercha du regard l'homme en question — le trentenaire était là, assis à une table en bois noir, un verre de saké à la main. Son visage était lisse, presque banal, mais il y avait quelque chose dans la façon dont ses yeux la dévoraient qui lui donnait envie de se cacher derrière les murs.

Elle sourit, lentement. Le genre de sourire qu'on apprend avec le temps, celui qui promet tout en ne donnant rien.

— Je suis honorée.

Elle s'approcha de lui, traînant dans son sillage l'odeur de l'ambre et du lilas. Kazuo ne bougea pas, se contentant de la regarder, comme on regarde quelque chose qu'on aimerait abîmer juste pour voir si ça saigne vraiment.

Blue s'assit sans qu'il le lui demande.
Elle croisa les jambes sous la table, laissant entrevoir la peau blanche de sa cuisse.

— Vous êtes bien plus belle que dans mes souvenirs, murmura-t-il.

— Car les souvenirs mentent, répondit-elle sans ciller.

Kazuo eut un petit rire, il aimait ça.

Les hommes adoraient que les femmes leur donnent l'illusion du contrôle, et Blue savait que survivre dans ce monde passait par une seule règle : toujours laisser les autres croire qu'ils avaient gagné.

Elle sentit les doigts de l'homme glisser lentement sur la tige fine de sa coupe de cristal.

— Il paraît que la guerre approche, souffla Kazuo.

Blue redressa légèrement le menton.

— Il paraît.

— Et vous, dans quelle guerre êtes-vous prête à vous battre ?

Un frisson glissa le long de sa colonne vertébrale. Ce n'était pas une question innocente. Les hommes comme Kazuo ne posaient jamais de questions sans déjà en connaître la réponse.

Elle fit tourner son verre entre ses doigts, sans jamais détourner les yeux, mais son cœur battait lentement, bien trop lentement, comme si son corps avait appris depuis longtemps à étouffer la peur.

— Eh bien, je ne suis qu'une femme. Je ne me bats que dans les draps.

Son sourire s'étira comme une ombre.

— Voulez-vous vous battre avec moi ?

Blue savait d'avance qu'ils allaient se battre.
Elle le voyait dans ses yeux. Cet homme était trop riche pour ne pas se battre avec elle.

— Si vous m'en faites l'honneur.

Il lui prit alors la main, et les deux montèrent à l'étage.

La vieille Madame Yi les observa de loin, sachant bien que Blue allait lui donner une nuit qu'il n'était pas près d'oublier.

Dans la chambre, il la déshabilla sauvagement, l'embrassa sans passion et la toucha comme on touche une chose que l'on possède déjà.

En vérité Blue n'appartenait à personne, mais cette nuit-là, elle savait qu'elle devait lui appartenir. Alors, dans cet élan de violence, elle se laissa aller, simulant le même plaisir que l'homme au-dessus d'elle.

La nuit s'étirait, épaisse et languissante, tandis que des rumeurs s'infiltraient à travers les murs de la maison close. On parlait d'un homme revenu d'entre les ombres — fort et impitoyable.
Le genre dont, seul le regard suffisait à vous trancher la gorge.

Certains disaient que si il foulait de nouveau cette ville... c'était que bientôt, une tête allait tomber.

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