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PetitePlume
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Chapitre 15 : Veiller et aimer

Max n’avait pas dormi de la nuit. Elle tournait en rond dans le bureau de surveillance, les yeux rivés sur les écrans, les relevés d’accès, les micros intégrés. Depuis plusieurs jours, les anomalies s’accumulaient : un badge utilisé à une heure improbable, des bruits de fond dans une conversation supposément privée, un véhicule aperçu trop souvent près de la résidence. Le tout formait un tableau cohérent, un tableau inquiétant.

Thomas entra à l’aube. Il la salua d’un simple regard, posa un dossier sur le bureau.

— On a ce qu’il faut, souffla-t-il. C’est cet agent, Delmas. Affecté depuis peu, discret… mais il a laissé une signature vocale sur le système. Trop propre. Trop parfaite.

Max referma le dossier, les mâchoires serrées.

— On le prend quand ?

— Ce soir. Réception restreinte au ministère. Il va tenter quelque chose. On le sent. Tu seras sur place, en observation. Je veux que tu restes en retrait, Max. Pas de geste héroïque. On a des équipes prêtes à intervenir.

Mais Max savait déjà qu’elle ne pourrait pas rester les bras croisés. Surtout si Garence était là.

Et Garence serait là.

Quand elle lui expliqua, le soir venu, le plan en place, elle vit la contrariété dans son regard. Mais aussi autre chose : une résolution calme.

— Je veux être utile, Max. Je suis peut-être celle qu’ils visent, mais je ne suis pas un pion. Je peux jouer un rôle. Laisse-moi aider.

Max posa ses mains sur ses épaules.

— Tu m’as déjà aidée. Juste… reste en vue. Que je sache où tu es. S’il te plaît.

— Si c’est ce que tu veux… Je vais aller m’habiller.

Garence partit se changer. Elle devait faire bonne figure durant la réception donnée par son père. Ce n’était pas un grand événement, plutôt un petit comité restreint, des amis proches du ministre venus pour discuter politique.

— Tu peux venir m’aider ? demanda-t-elle depuis la salle de bain.

Max, qui était dans la cuisine, ne se fit pas prier et accourut auprès de sa bien-aimée.

— Toujours, répondit-elle en entrant.

Garence lui tournait le dos. Elle portait une robe sobre, élégante, le genre de tenue qui la faisait briller sans excès.

— Tu comptes m’aider à fermer cette robe ou tu restes plantée là à me regarder ?

— Franchement ? J’ai surtout envie de t’aider à l’ouvrir…

Max s’approcha, posa les mains sur ses hanches, puis susurra à son oreille :

— Je préférerais te l’enlever.

— Peut-être plus tard, répondit Garence en riant. Si j’arrive en retard, mon père va me classer dans les éléments perturbateurs. Et toi avec.

Elle l’embrassa longuement avant de s’éclipser.

La réception se tenait dans un salon privé du ministère. Une vingtaine d’invités, des verres de champagne, des discussions feutrées. Max arpentait la salle d’un œil aguerri, ses écouteurs calés contre ses tympans, les micros captant les moindres échanges. Thomas, à distance, dirigeait les opérations. Tout était prêt.

À 20h16, le badge de Delmas s’activa à l’entrée arrière. Trop tôt. Hors protocole. Il communiqua à la radio avec un ton maîtrisé, trop maîtrisé. Max le suivit du regard sur les caméras internes. Il s’approchait lentement de la zone technique, celle qui permettait d’isoler l’électricité, de couper les caméras.

Max prit une décision. Elle quitta son poste d’observation, descendit les escaliers, et intercepta Delmas dans le couloir. Il ne la vit pas venir.

— Agent Delmas, dit-elle d’une voix neutre. Que faites-vous ici ?

Il sursauta, mais se reprit aussitôt.

— Problème signalé sur l’unité de surveillance secondaire. Je vérifiais.

Max ne répondit pas. Elle appuya sur son oreillette.

— Thomas. Maintenant.

En une seconde, deux agents surgirent derrière Delmas et l’encerclèrent. Il tenta un geste vers sa ceinture. Trop tard. Ils le plaquèrent au sol. Une seringue était dissimulée dans sa manche.

Dans la salle de réception, personne ne soupçonna ce qui venait de se jouer. Max rejoignit Garence, toujours calme près du buffet. Elle ne put s’empêcher de la prendre dans ses bras, une main glissée dans son dos.

— C’est fini, murmura-t-elle. Tu vas bien ?

Garence hocha la tête.

— Et toi ?

Max la regarda longuement.

— Maintenant, oui.

Le lendemain, Thomas remit en main propre à Max un rapport officiel.

— L’enquête est close. Le décret est signé. Le ministre te doit beaucoup.

Max esquissa un sourire fatigué.

— Il m’a déjà beaucoup donné.

Le ministre les rejoignit peu après. Il serra la main de Max, la regarda droit dans les yeux.

— Vous avez sauvé ma fille. Je vous ai demandé de protéger sa vie. Vous avez fait bien plus. Vous lui avez redonné la liberté d’être elle-même.

Il marqua une pause, puis ajouta :

— J’espère que ce poste conviendra à la femme que vous êtes, autant qu’à l’agent que vous avez été.

Max acquiesça. Pour la première fois, elle ne doutait plus.

Quelques semaines plus tard, la salle d’entraînement bourdonnait d’énergie. Max observait les nouveaux venus, le regard attentif, la voix posée.

— Ce n’est pas juste un métier. C’est une promesse. Celle de veiller sur quelqu’un, sans jamais faillir.

Elle corrigea un geste maladroit, encouragea un autre. Elle n’était plus sur le terrain. Elle n’était plus celle qui courait, qui risquait tout. Elle était celle qui transmettait. Et c’était juste.

À la fin du cours, elle attrapa sa bouteille d’eau, sourit en entendant un éclat de rire derrière la vitre. Garence lui faisait signe. Max leva une main en retour. Leur regard se croisa. Il n’y avait plus de masque.

La nuit était tombée sur la ville. Max et Garence étaient installées sur le canapé, une couverture sur les jambes, un film en fond sonore.

Garence tenait une tasse de chocolat entre les mains.

— Tu sais, je ne pensais pas qu’un jour je pourrais me sentir aussi libre…

— Comment ça ?

— Je croyais que je passerais ma vie entourée de gardes du corps, régie par des protocoles, surveillée en permanence…

— Tu crois que je ne te surveille plus ? répliqua Max avec un sourire taquin.

— Tu sais très bien ce que je veux dire… Je ne pensais pas qu’un jour je pourrais être avec la femme que j’aime, reprendre mes cours au conservatoire, et faire tout ça comme je veux, quand je veux.

— Oui, je comprends. Mais je serai toujours là pour te surveiller… et te protéger. C’est juste que je ne suis plus payée pour ça.

Max se leva doucement, posa sa tasse vide sur la table basse et tendit la main à Garence.

— Viens.

— Où ça ? demanda Garence, surprise.

— Juste là.

Elle l’emmena sur le balcon, où l’air frais de la nuit caressait doucement leurs visages. En contrebas, les lumières de la ville scintillaient, comme un tapis d’étoiles.

Max passa un bras autour des épaules de Garence.

— Tu vois ces lumières ? dit-elle en désignant un point au loin.

— Oui.

— C’est la même lumière qu’on apercevait depuis notre première planque. Le soir où tout a basculé.

Garence sourit, se rapprocha un peu plus.

— Tu veux dire le soir où tu as enfin cessé de faire semblant ?

— Le soir où j’ai compris que je ne pourrais plus jamais me contenter de la distance.

Un silence. Puis Max ajouta :

— J’ai appris à me battre, à obéir, à protéger. Mais avec toi… j’apprends à vivre.

Garence tourna la tête vers elle, les yeux brillants.

— Alors vis avec moi. Pour de vrai.

Leur baiser fut simple. Évident.

Et cette nuit-là, aucune menace ne planait. Juste deux femmes, enfin libres, sous la lumière douce d’une ville qui leur appartenait un peu plus qu’avant.

Fin…

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